Discours d'investiture à l'occasion de la Partie de session de janvier 2014 (French only)
Strasbourg, Monday 27 January 2014

Mesdames, Messieurs,
Chers collègues,

C'est avec émotion et avec fierté, je l'avoue, que je prends la présidence de notre Assemblée.

C'est un très grand honneur pour moi et je tiens à vous remercier de tout cœur de la confiance que vous venez de me témoigner et j'espère de m'en montrer digne.

Cet honneur revient également au Parlement luxembourgeois, la Chambre des Députés, représentée ici par les membres de la délégation luxembourgeoise que je tiens à remercier pour leur soutien sans faille.

Je ne  voudrais pas manquer de saluer la présence d'un compatriote Monsieur Dean Spielmann, Président de la Cour européenne des droits de l'homme.

La présence de mes amis les plus proches à cette séance me fait énormément plaisir.

Ma reconnaissance s'adresse à mon prédécesseur Jean-Claude Mignon qui, au cours des deux dernières années, s'est investi avec un engagement sans pareil dans les travaux de notre Assemblée, la défense de nos valeurs et l'amélioration des relations interinstitutionnelles. Cher Jean-Claude, je m'efforcerai de construire mon mandat sur vos réussites ainsi que sur celles de nos prédécesseurs. Aussi voudrais-je remercier le Président Mignon pour la façon dont il a su diriger nos débats : avec souplesse et éloquence.

Etant donné que je ne peux pas, comme la grande majorité d'entre nous, m'exprimer dans ma langue maternelle, je ne serai certainement pas en mesure d'égaler le talent oratoire de mon prédécesseur.

J'ai choisi de m'exprimer, en tout cas la plupart du temps, dans la langue du pays hôte de notre organisation, le français, l'une des deux langues officielles du Conseil de l'Europe,-  but from time to time I might switch to English -.  Mon pays fait partie de la Francophonie, mais notre langue maternelle est le luxembourgeois : Lëtzebuergesch.

Alors permettez-moi, chers collègues, de faire une petite entorse à notre procédure en prononçant quelques mots en luxembourgeois, op Lëtzebuergesch, et ceci avec l'accord et la complicité des interprètes que je tiens à remercier.

Ech si ganz houfreg fir haut kënnen als Représentant vun der lëtzebuerger Chamber d'Présidence vun enger Assemblée ze iwerhuelen, déi 318 Parlamentarier aus 47 europäësche Länner mat 820 Millounen Bierger emfaast. Ech si mer der enormer Erausfuerderung an der grousser Responsabilitéit bewosst an ech soën doheem jidderengem merci dee mech dobäi ënnerstëtzt.

Je suis très fière aujourd'hui de pouvoir prendre, en tant que représentant de la Chambre des Députés, la Présidence d'une Assemblée regroupant 318 parlementaires de 47 pays européens composés de 820 millions de citoyens. Je suis consciente de l'énorme défi et de la grande responsabilité que cela représente et je remercie chacun pour son soutien.

Mes remerciements s'adressent à mes collègues Présidents des groupes politiques pour l'excellente collaboration que nous avons eue au cours des dernières années dans l'intérêt de l'organisation de nos travaux.

Il me tient à cœur d'exprimer ma gratitude aux membres de mon groupe, l'Alliance des Libéraux et Démocrates pour l'Europe, que j'ai eu le privilège et le plaisir de présider, pour le travail collégial que nous avons accompli ces dernières années et pour leur soutien unanime à ma candidature à la Présidence et c'est pour la deuxième fois seulement en 30 ans qu'un membre de la famille libérale accède au perchoir. C'est avec d'autant plus d'émotion que je rends hommage en ce jour à Lord Russel Johnston qui fut un grand Président.

Je remercie  mes prédécesseurs pour leur engagement et je pense avant tout à Madame Leni Fischer, la première femme à présider notre Assemblée.

Je sais gré au Secrétaire Général de l'Assemblée, Monsieur Wojciech Sawicki et à  tous les membres du personnel pour la qualité de leur travail et leur prévenance. Qu'ils soient d'ores et déjà assurés de ma reconnaissance pour leur soutien et leur indulgence.

Je m'adresse au Secrétaire Général du Conseil de l'Europe, Monsieur Thorbjorn Jagland ainsi qu'à la Secrétaire Générale adjointe, Madame Gabriela Battaini-Dragoni pour leur exprimer mon souhait de d'une  coopération accrue entre toutes les composantes de notre organisation afin de tirer profit de l'excellence du travail à tous les niveaux. Je suis convaincue qu'ensemble nous réussirons à décloisonner les différentes entités en vue de renforcer l'impact du Conseil de l'Europe.

Une collaboration plus étroite avec le Comité des Ministres s'impose surtout en cette période de restrictions budgétaires, chaque organe préservant évidemment ses prérogatives. Mesdames, Messieurs les Ambassadeurs, soyez assurés que nous continuerons à cultiver la politique du dialogue, prérequis indispensable à tout progrès.

Chers collègues,

Il y a 69 ans aujourd'hui que le camp de concentration d'Auschwitz a été libéré, et en cette journée de commémoration de la Shoah, nous nous inclinons devant les souffrances de toutes les victimes des atrocités commises par le régime nazi.

Aujourd'hui, 69 ans plus tard, il nous incombe  de nous battre plus que jamais pour souligner que nos objectifs et nos valeurs ne sont pas négociables et resteront inaliénables. Les Droits de l'Homme, la démocratie et l'Etat de droit ne connaissent et ne devront jamais plus connaître de frontières.

Ainsi nous nous retrouvons tous ici sur un pied d'égalité et il ne doit y avoir aucune distinction entre pays d'après la taille, la situation géographique, la date d'adhésion ou encore le fait d'être membre de l'Union européenne ou non. Nous devons nous rendre compte que pour nous, membres de cette Assemblée, c'est une énorme chance de pouvoir fréquenter nos homologues de tous ces pays. Pour tirer profit de cette diversité et pour qu'elle soit source d'enrichissement il faut, en dehors du dialogue permanent et du respect mutuel, faire l'effort de comprendre l'autre avec son vécu, son  histoire, sa culture, ses sensibilités et ses opinions politiques. Notre rôle est de défendre ensemble nos objectifs avec détermination et engagement, non seulement ici à l'Assemblée en soutenant des résolutions et des recommandations, mais également dans nos Parlements nationaux où nous devons être considérés comme des défenseurs inconditionnels des droits de l'homme, de la démocratie et de l'Etat de droit.

Les défis qui nous attendent sont énormes et il  est évident que, dans le temps qui m'est imparti, je ne puis les énumérer tous.   Ils vont de la montée des extrémismes et du terrorisme à la traite des êtres humains, la violence contre les femmes et les enfants ou, encore, les dangers liés aux nouvelles technologies pour n'en citer que quelques-uns. Nous disposons d'une panoplie d'outils pour faire face à ces défis : nous débattons sur la base de rapports publics, nous organisons des campagnes parlementaires, nous participons à l'élaboration de standards internationaux des droits de l'homme ou, encore, nous assurons une implication parlementaire dans l'exécution des arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme.

Aussi, devons-nous réagir, rapidement et efficacement, à des situations de crise dans nos Etats membres ainsi que dans notre voisinage. Nous suivons tous avec beaucoup d'inquiétude et avec une consternation profonde les évènements qui se déroulent en Ukraine. La violence n'apporte jamais de solutions, bien au contraire. Il est urgent de réagir face à cette situation de crise grave. J'espère que vous soutiendrez la proposition de tenir un débat d'urgence sur cette question durant cette partie de session, afin d'identifier des moyens d'action concrets pour notre Assemblée, basées sur le strict respect de nos valeurs et de nos standards.

Une autre situation de crise que je ne peux pas ne pas évoquer est bien entendu la guerre en Syrie et, notamment, ses lourdes conséquences humanitaires. Aujourd'hui, alors que nous suivons avec beaucoup d'espoir le déroulement des négociations à Genève, j'aimerais tout particulièrement saluer le travail exceptionnel de notre rapporteur, M. Jean-Marie Bockel, qui présentera durant cette session un rapport sur la situation des réfugiés syriens et l'organisation de l'aide internationale. La recherche de la solution politique au conflit en Syrie prendra du temps et nous devons soutenir pleinement les efforts de la diplomatie internationale ; en même temps, dans l'immédiat, nous devons travailler dans nos capitales et dans nos parlements pour proposer des mesures concrètes afin de mieux coordonner l'aide aux réfugiés et leur assurer des conditions d'accueil dignes. C'est dans notre pouvoir et, dans ce contexte, je salue tout particulièrement l'engagement de notre Commissaire aux droits de l'homme sur ce dossier.

Chers collègues,

Permettez-moi de ne mettre en exergue que 5 sujets  qui méritent notre attention particulière sans pour autant minimiser l'importance d'autres aspects.

Il s'agit premièrement des questions liées aux flux migratoires sur un fond de crise économique et financière offrant aux extrémistes un terrain de prédilection pour répandre leurs idées afin de déstabiliser nos démocraties.

Le deuxième sujet, lié en partie au premier, est celui de notre coopération avec nos voisins de l'Afrique du Nord, du Moyen-Orient et de l'Asie centrale où l'objectif sera d'approfondir les contacts en développant le statut de partenariat pour la démocratie.

Le troisième sujet que je voudrais aborder est celui de la corruption, qui est le plus grand ennemi de nos valeurs, une vraie gangrène qui mine les fondements de notre société.  Pour combattre ce fléau, l'indépendance de la justice est un préalable tout comme la liberté d'expression. Il est de notre devoir de veiller à ce que dans tous nos pays ces prérequis soient remplis sans restriction aucune.

Le quatrième axe de réflexion porte sur notre coopération avec l'Union européenne pour dégager une vraie plus value pour chaque partenaire et de ce fait pour tous les citoyens. Nous aurons la possibilité d'en discuter avec le Président du Parlement européen, Monsieur Martin Schulz, qui s'adressera à notre assemblée mercredi.

Finalement je voudrais souligner qu'il nous faudra continuer à réformer nos propres procédures en particulier celles du monitoring qui doivent être revues sur la base des excellents travaux préparatoires de la commission de suivi.

Mesdames, Messieurs,

Chers collègues,

« Mettons en valeur ce qui nous unit et non ce qui nous sépare » telle est la devise sur laquelle je voudrais baser mon travail.

Ce qui nous unit ce sont les objectifs du Conseil de l'Europe : renforcer les droits de l'homme, la démocratie et l'Etat de droit en nous rappelant que nos valeurs ne sont pas des acquis, mais qu'il faut les défendre jour après jour.

Tavaillons ensemble dans un esprit d'ouverture et de respect mutuel, mais également en étant à l'écoute des citoyens.

Pour conclure  je voudrais faire miennes les réflexions d'Albert Camus :

«  Le régime démocratique ne peut être conçu, créé et soutenu que par des hommes qui savent qu'ils ne savent pas tout. Le démocrate est modeste, il avoue une certaine part d'ignorance, il reconnaît le caractère en partie aventureux de son effort et que tout ne lui est pas donné, et à partir de cet aveu, il reconnaît qu'il a besoin de consulter les autres, de compléter ce qu'il sait par ce qu'ils savent. »

Alors chers collègues commençons notre travail commun dans cet état d'esprit !