Discours à l'occasion de la Cérémonie de commémoration du Centenaire du début de la Première guerre mondiale (French only)
Strasbourg, Wednesday 25 June 2014

Mesdames et Messieurs,
Chères/Chers collègues,

Dans trois jours nous allons commémorer le centenaire de l'assassinat de l'archiduc Franz-Ferdinand d'Autriche-Hongrie à Sarajevo. Cet assassinat a précipité, en l'espace de quelques semaines, une guerre sans précédents dans le monde – tant par son étendue géographique, que par sa violence destructrice et par le caractère macabre de sa sophistication technologique.

Cependant, cette guerre n'est pas décrite de façon identique dans les manuels d'histoire des différents Etats européens. Dans la mémoire collective française et britannique, traumatisée par l'ampleur des pertes humaines, elle est présentée comme la « Grande guerre », The Great War. En Russie, la Première guerre mondiale a été interrompue et éclipsée par un autre bouleversement – celui de la Révolution d'Octobre – et par la terreur de la Guerre Civile qui a suivi. La Première guerre mondiale a précipité également la dissolution de grands empires européens, en redessinant la carte de l'Europe et en conduisant à l'indépendance de plusieurs nations.

La Première guerre mondiale a été une tragédie commune pour le continent européen, tragédie prémonitoire. Selon le grand historien Eric Hobsbawm, partout en Europe la Première guerre mondiale a marqué l'effondrement de la civilisation du XIXème siècle et le départ  de ce qu'il appelle l'« Âge des extrêmes ».

Le Traité de paix conclu en 1919 à Versailles a mis fin à la Première guerre mondiale, sans créer les bases pour une paix durable. Cette nouvelle configuration internationale a conduit à l'effondrement et à l'humiliation de l'Allemagne, ce qui a finalement ouvert la voie à la montée du nazisme et à la Seconde guerre mondiale. Suite à ce nouveau cauchemar meurtrier, nos prédécesseurs ont appris la leçon: assurer une paix durable dans l'humiliation est impossible, créer un ordre international sans dialogue respectueux est impossible.

C'est dans cet esprit de dialogue, de coopération et d'ouverture que les pères fondateurs du Conseil de l'Europe ont essayé de construire un nouvel ordre international. Cet ordre international devait garantir la paix durable en Europe et protéger les Européens de la violence meurtrière et du mépris de leurs droits fondamentaux.

Il est tragique de constater, qu'après tous ces efforts les conflits armés sur le continent européen aient perduré : Chypre, l'Irlande du Nord, l'ex-Yougoslavie, le Caucase du Nord et du Sud et maintenant l'Ukraine. La violence continue à déchirer notre continent. La montée des extrémismes et de populismes nationalistes, la xénophobie et l'intolérance que nous apercevons aujourd'hui ne sont pas sans rappeler le climat de chauvinisme qui avait précédé la Première guerre mondiale et qui avait rendu possible son explosion.

Dans ce contexte, le risque existe que nous oubliions la leçon apprise si tragiquement au prix du lourd tribut payé aux deux guerres mondiales. Si nous ne voulons pas trahir ceux qui ont sacrifié leur vie pour la paix, nous devons, plus que jamais, renforcer nos efforts afin de garantir aux Européens l'exercice de leurs droits fondamentaux, et avant tout du droit à la paix, du droit à la vie sans crainte. C'était pour cela que le Conseil de l'Europe avait été créé, c'est pour cela que sa mission est aujourd'hui plus importante que jamais, et c'est pour cette raison que nous nous engageons.