Niklos

Nemeth

Premier ministre de Hongrie

Discours prononcé devant l'Assemblée

lundi, 29 janvier 1990

Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, au nom de la République de Hongrie, je vous prie de recevoir mes salutations respectueuses et le témoignage de ma reconnaissance. Je vous remercie de l’honneur que vous nous avez fait en nous invitant à prendre la parole devant cette éminente Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe. Je suis heureux de pouvoir aborder devant vous la question du présent et de l’avenir de nos relations, et de résumer l’actuelle évolution démocratique de la Hongrie.

A l’aube de la dernière décennie du vingtième siècle, l’Europe est le théâtre d’événements historiques auxquels nous participons ou dont nous sommes témoins. Nous travaillons à l’élimination de l’affrontement artificiel entre l’Est et l’Ouest de notre continent, relique des années de guerre froide. En Europe de l’Est, on ne démantèle pas seulement les rideaux de fer et les murs, mais aussi les valeurs idéologiques et les stéréotypes politiques qui en constituaient la base, le parti unique et l’économie planifiée et centralisée sont aussi balayés.

La Hongrie compte parmi les premiers pays touchés par le vent de réforme en Europe de l’Est. Nous avons, les premiers, «abattu» notre rideau de fer et ce fut le début de la fissuration irréversible de la structure monolithique de l’Etat à parti unique. Une structure institutionnelle vieille de plus de quarante ans a cessé de fonctionner à la suite des pressions constantes exercées par les forces progressistes du pays, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du parti au pouvoir.

Ce qui, selon nous, a importé, au cours de quelque deux années de transition démocratique, dynamique et pacifique, peut se résumer de la façon qui suit. Malgré les programmes très différents des partis politiques, un accord se dégage sur un point: nous voulons tous bâtir un Etat constitutionnel, une démocratie parlementaire et pluraliste, pleinement respectueuse des droits de l’homme.

Sur le plan économique, les diverses forces politiques du pays estiment dans leur majorité qu’il est dans l’intérêt national de créer une économie de marché à caractère social. Tous les partis reconnaissent l’importance d’une transition pacifique. On s’en tient à cet avis même lorsque la campagne, en vue des prochaines élections, suscite certaines flambées de passion. J’espère que, grâce à la modération de leurs rivalités, les partis politiques hongrois et l’opinion publique feront la preuve de leur maturité politique et de l’esprit de responsabilité qu’ils doivent avoir à l’égard de la nation. Quel que soit le résultat des élections, on doit espérer que les partis politiques assureront une transition démocratique paisible sans affaiblir, mais au contraire en renforçant, la stabilité politique et sociale de notre pays.

Nous savons qu’il nous appartient de résoudre notre problème et que, si la situation historique particulière dans laquelle nous nous trouvons nous offre une occasion, nous devons la saisir.

Nous savons aussi qu’un long chemin semé de multiples obstacles imprévisibles est encore à parcourir et que nous devrons consentir à des sacrifices. Nous luttons pour une économie plus moderne et plus stable, et pour un avenir plus sûr et plus prospère.

Les Hongrois célébreront dans quelques années le 1100e anniversaire de leur établissement dans cette région du monde. Notre passé est culturellement et scientifiquement très riche. Depuis les toutes premières années de la civilisation européenne et depuis l’épanouissement de l’humanisme, les intellectuels hongrois s’efforcent de suivre le rythme de l’évolution en Europe.

Tout au long de son histoire, notre pays a toujours eu le désir profond d’appartenir à l’Europe. L’Europe ne peut oublier l’importance du protestantisme hongrois, des réformateurs hongrois revenus au pays avec Descartes dans la tête et le protestantisme dans le cœur. Nous autres Hongrois, nous ne pouvons oublier que tout cela constituait à l’époque, comme aujourd’hui d’ailleurs, un élément fondamental de notre culture nationale. Les exemples pour le confirmer ne manquent pas: ainsi, lorsque le développement s’est interrompu en Hongrie, les intellectuels ont toujours attiré l’attention de la population sur l’importance de notre attachement à l’Europe. Comme l’écrivait le grand historien hongrois Gyula Szegfù, la démocratie est depuis le dix-huitième siècle l’idéal de tous les patriotes hongrois. Malheureusement, pendant longtemps, elle n’a été qu’un idéal et une aspiration. Nous nous sommes perdus dans les dédales de l’Histoire. Les tempêtes du passé ont affecté la vie de notre nation et, à plusieurs reprises, nous sommes devenus l’instrument de puissances étrangères et avons été réduits à la servitude. Les Hongrois, qui se sont souvent battus glorieusement pour leur survie, n’ont pas su saisir l’occasion qui s’offrait à eux à certains moments historiques où il eût fallu qu’ils choisissent la bonne voie. Nous avons chèrement payé nos erreurs.

Aujourd’hui encore, je ne puis affirmer que chaque citoyen de ce pays voit notre avenir enfin libéré de toutes les illusions. Une chose est certaine cependant: notre peuple – et peut-être tous les peuples d’Europe centrale – peut affirmer que hors de l’Europe, hors du monde, il ne saurait y avoir de progrès chez soi. C’est pourquoi nous voulons adhérer aux nouvelles valeurs européennes en mettant fin à toutes sortes d’inimitiés avec d’autres populations, groupes ethniques et minorités. Pour nous, Hongrois, c’est la leçon que l’Histoire a gravée dans notre esprit.

Les changements qui se produisent actuellement dans notre environnement immédiat ne sont pas sans effet sur nous. Ces changements modifient radicalement le scénario du processus de développement européen. Toutes les parties concernées doivent reconnaître qu’elles ne peuvent retarder davantage la révision du concept de l’intégration européenne. Nous avons le devoir de poser la question encore et encore: sommes-nous prêts à accepter – dans notre esprit et dans notre cœur – qu’une période de l’histoire de l’Europe vient de s’achever? Qu’une nouvelle structure va remplacer l’Europe divisée? Que, même si les lignes de partage subsistent, elles se trouvent ailleurs? Que cette nouvelle structure de l’Europe affectera aussi inévitablement les relations extérieures du continent? Sommes-nous également capables et souhaitons-nous penser en termes d’Europe unifiée ou notre imagination est-elle toujours emprisonnée dans les limites de l’Histoire? Sommes-nous disposés à faire face à de nouveaux conflits éventuels, pouvant naître de relations humaines et d’intérêts plus proches? Les institutions européennes qui seront constituées seront-elles capables de régler les conflits, et ces institutions auront-elles un poids suffisant pour intégrer les motivations nationales et sauront-elles gérer les aspects économiques, politiques, ethniques ou autres du nationalisme caché?

Le défi est complexe et ne peut se résumer en une simple question commerciale ou douanière.

A l’heure actuelle, les pays de l’Est sont éclatés et se trouvent engagés dans une course unique contre le temps pour la démocratie, et cependant il y a une uniformité dans les messages pressants qu’ils adressent au monde. Tout cela se passe à un moment historique où les pays de l’Europe occidentale s’efforcent aussi de renouveler leur coopération. Les actes du Gouvernement de la République hongroise sont motivés par la création d’un Etat souverain totalement indépendant. Notre politique étrangère, compte tenu de notre situation géopolitique et de nos traditions historiques, est axée sur l’Europe, tout en respectant les valeurs et les principes universels de la civilisation humaine. Nous respectons et défendons le droit des peuples à la souveraineté. Nous coopérons avec tous les pays, gouvernements et peuples, organisations et institutions régionales et universelles qui se déclarent prêts à agir dans l’esprit du droit international, de la Charte des Nations Unies, de l’Acte final d’Helsinki et des réunions consécutives, qui sont régis par le principe de l’égalité des droits et des avantages mutuels, et qui s’abstiennent de toute ingérence dans les affaires intérieures des autres pays.

Pour réussir notre processus de transition démocratique et maintenir la stabilité intérieure du pays, nous avons besoin d’un environnement international pacifique en Europe et ailleurs. Dans la mesure de nos possibilités, nous souhaitons aussi, dans nos relations avec l’étranger, contribuer à cet environnement pacifique. A cet égard, je crois nécessaire de rappeler ici, une fois pour toutes, que la détermination de la politique étrangère hongroise par des considérations idéologiques appartient aujourd’hui au passé. Ce principe s’exprime à travers notre total respect des droits de l’homme, ainsi que des droits individuels et collectifs que nous défendons quelles que soient la structure ou les valeurs sociales.

Dans cette perspective, l’objectif de la République hongroise est de contribuer à une Europe indépendante des blocs militaires, où aucune troupe étrangère ne stationne dans aucun de ses pays, et aussi d’aider à la création d’un continent pacifique et sûr. Cela est conforme à notre intérêt national et nous poursuivrons activement cet objectif.

Nous avons commémoré l’année dernière le 40e anniversaire du Conseil de l’Europe, qui unit vingt-trois démocraties. Nous avons rappelé alors, pour reprendre les termes de Robert Schuman, que le Conseil de l’Europe était un laboratoire où la coopération européenne est mise à l’épreuve. Je partage le point de vue de Robert Schuman et j’aimerais ajouter que le Conseil de l’Europe a joué ce rôle avec pragmatisme et aussi avec prévoyance. Depuis juin dernier, conformément à votre décision, la Hongrie – avec l’Union Soviétique et la Pologne – participe en qualité d’invité spécial aux sessions plénières de l’Assemblée et à ses travaux en commission. Cet automne, inspirés par notre ferme intention d’approfondir les liens multilatéraux en Europe et aussi de contribuer, dans la mesure de nos possibilités et de nos ressources, à la formation de l’unité européenne, nous avons décidé de demander le statut de membre à part entière du Conseil de l’Europe. J’espère que les changements historiques en cours dans notre pays et l’élargissement des contacts entre la Hongrie et le Conseil de l’Europe seront une base suffisante pour que notre candidature soit favorablement accueillie.

Nous espérons que l’Assemblée parlementaire et le Comité des Ministres réserveront un accueil positif à notre demande et que la Hongrie deviendra cette année membre de plein droit du Conseil de l’Europe.

J’aimerais saisir cette occasion qui m’est offerte pour annoncer notre intention d’adhérer à la Charte européenne de l’autonomie locale et à la Convention-cadre européenne sur la coopération transfrontalière des collectivités ou autorités territoriales. J’aimerais annoncer en même temps que la Hongrie est prête à se joindre en qualité d’observateur, au niveau des experts, aux travaux concernant la charte des langues régionales et minoritaires. Je suis convaincu que ces mesures renforceront encore nos liens fructueux avec le Conseil de l’Europe. Au nom du Gouvernement de la République de Hongrie, je me félicite particulièrement de l’initiative du Conseil de l’Europe et des Communautés européennes qui ont déclaré 1990 Année du tourisme.

J’attends avec impatience la prochaine visite de Mme Catherine Lalumière, visite sur laquelle nous fondons de grandes espérances. Le 25 mars sera une journée importante dans le processus de démocratisation de notre pays. C’est la date à laquelle le Président par intérim de la République de Hongrie vous a invité, Monsieur le Président, avec des Représentants de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, à assister aux élections générales dans notre pays. J’espère sincèrement que vous accepterez cette invitation.

Nous attachons une grande importance à l’intégration organique de la Hongrie à l’Europe. Nous accordons une attention particulière à nos relations avec les Communautés européennes. Nous apprécions vivement les efforts des Vingt-trois et, parmi eux, des Etats membres de la Communauté européenne, pour favoriser le processus de réforme en Hongrie.

Nous avons développé nos relations avec le Parlement européen; les consultations politiques sont devenues régulières dans le cadre de cette coopération. J’aimerais aller plus loin dans ces relations, espérant que dans un avenir relativement proche la Hongrie pourra bénéficier d’une association spéciale qui contribuera à son intégration en Europe.

Il est essentiel pour nous d’établir des relations institutionnelles avec l’AELE. Nous avons déposé des propositions à cet effet l’année dernière et nous souhaitons qu’elles aboutissent sous peu à des entretiens entre les experts de Hongrie et ceux de l’AELE.

Un chapitre orageux de l’histoire de l’Europe d’après-guerre touche à sa fin. Pour la phase suivante qui se dessine, la Hongrie met l’accent sur ses relations avec l’Europe. Dans le cadre de nos efforts pour renforcer la coopération, et si vous approuvez notre demande, nous espérons que notre pays sera bientôt membre à part entière de votre Organisation.

Permettez-moi, Monsieur le Président, de vous exprimer ma gratitude pour votre invitation. Mesdames, Messieurs, je vous remercie de votre aimable attention. (Applaudissements)

M. LE PRÉSIDENT (traduction)

Je vous remercie, Monsieur le Premier ministre, de cet intéressant exposé. Je sais que vous avez reçu beaucoup d’invitations de l’étranger et nous sommes heureux que vous ayez choisi la visite au Conseil de l’Europe parmi les rares voyages qu’il vous a été possible de faire en raison d’un emploi du temps très chargé. Nous vous sommes reconnaissants de nous avoir présenté votre avis sur l’avenir de la Hongrie et de l’Europe.

Monsieur le Premier ministre, vous avez bien voulu accepter de répondre à nos questions. Bien que ces questions soient orales et spontanées, j’ai déjà une longue liste de membres qui ont déclaré vouloir vous interroger. Je leur demande d’être brefs et de ne poser de questions supplémentaires que si cela est absolument nécessaire, afin de permettre le plus grand nombre de questions possible. J’ai déjà une liste de vingt noms.

En raison de l’emploi très chargé de M. Nemeth, nous devrons en avoir fini avec les questions à 17 h 20. La première question émane de M. Fourré.

M. FOURRÉ (France)

Monsieur le Premier ministre, vous avez évoqué largement votre volonté d’être le pionnier de la rencontre de ces pays appelés anciennement «de l’Est» qui sont engagés dans un grand mouvement avec nos propres pays.

La question de la rencontre bute sur le plan institutionnel, en particulier pour l’avenir. En effet, un certain nombre de propositions sont formulées, qu’il s’agisse de la théorie des «cercles concentriques» ou de la théorie de «l’ovale», rappelées par notre Secrétaire Général. Dans toutes ces possibilités, on ressent la place du Conseil de l’Europe, seule institution permanente d’échanges et de paix. L’Europe à elle seule peut ouvrir une perspective à d’autres pays d’Europe ayant renoué avec la démocratie.

Monsieur le Premier ministre, pensez-vous que le Conseil de l’Europe puisse offrir le lieu du débat au sein duquel pourrait peut-être se définir une confédération respectueuse de la souveraineté de chacun?

M. Nemeth, Premier ministre de Hongrie (interprétation)

souligne que bien des organisations et des hommes politiques s’attachent actuellement, à l’Est comme à l’Ouest, à faire des propositions en faveur de l’unité européenne, à dégager des solutions. Mais, pour agir de façon responsable, il faut étudier tous ces éléments avec le plus grand soin et filtrer les idées en les faisant passer par plusieurs canaux. Il est toutefois certain qu’il serait préjudiciable à tous les Européens, y compris à ceux de l’Ouest, de maintenir la division du continent. Le Conseil de l’Europe et le Parlement européen ont beaucoup fait en faveur d’un rapprochement: la Hongrie se félicite de ces efforts et est prête à y coopérer activement.

M. BRITO (Portugal) (interprétation)

souligne que le poids de la dette extérieure constitue une entrave au développement de nombreux pays. D’autre part, les programmes qu’impose généralement le Fonds monétaire international se soldent par des coûts sociaux importants. L’orateur aimerait savoir si, pour M. Nemeth, une véritable coopération n’impliquerait pas la renégociation des emprunts extérieurs et l’octroi de nouveaux prêts, à des taux et à des conditions d’amortissement plus intéressants que ceux habituellement consentis par le FMI.

M. Nemeth, Premier ministre de Hongrie (interprétation)

rappelle que son pays, comme certains de ses voisins, a entrepris en un laps de temps très court de considérables réformes politiques et institutionnelles. Il l’a fait avec le souci de ne pas se couper de ses propres racines, de conserver son identité et, bien entendu, dans le strict respect des droits de l’homme. Mais l’Europe centrale et orientale souffre d’une crise économique qu’elle ne pourra surmonter par ses seuls moyens.

La Hongrie, par exemple, a une dette qui se monte à 20 milliards de dollars: si la situation est si grave, c’est parce que cette somme a été mal employée. Il faut donc tirer les leçons de ce qui s’est passé. Mais les Hongrois ne peuvent se permettre d’agir avec leur dette comme M. Bush a fait avec son discours à Budapest lorsqu’il a déchiré en mille morceaux l’allocution qu’on lui avait préparée!

La Hongrie a toujours payé ses dettes et elle a l’intention de persévérer dans cette voie. Il n’empêche que le FMI et la Banque mondiale devraient réviser la règle n° 24 et chercher la possibilité d’accorder des facilités aux pays d’Europe centrale et orientale afin qu’ils puissent mettre en œuvre les indispensables réformes qui leur permettront de sauvegarder la paix sociale tout en s’insérant dans l’Europe.

M. AHRENS (République Fédérale d’Allemagne) (traduction)

Monsieur le Premier ministre, je voudrais poser deux brèves questions. Mais auparavant, je voudrais, avec l’autorisation du Président, dire quelques mots.

Nous avons encore tous devant les yeux les images qui nous ont été retransmises de votre pays à la fin de l’été, lorsque des milliers de personnes de la République Démocratique Allemande ont afflué dans votre pays pour accéder à la liberté. La Hongrie leur avait alors ouvert le chemin de la liberté, et cela à une époque où la situation politique internationale était particulièrement difficile.

En prenant cette décision, la Hongrie a fait passer le respect des droits de l’homme avant les engagements pris dans le cadre de traités internationaux.

Je remercie le peuple hongrois non seulement au nom des sociaux-démocrates et des socialistes, réunis dans cet hémicycle, dont je suis le porte-parole, mais certainement aussi au nom de tous les membres de cette Assemblée parlementaire. L’Europe libre, Monsieur le Premier ministre, n’oubliera jamais et ne doit jamais oublier cet acte de courage de la Hongrie.

J’en viens maintenant à mes questions: quand pensez-vous que les institutions démocratiques pourront se mettre à l’œuvre dans votre pays et créer ainsi les conditions pour l’adhésion de votre pays au Conseil de l’Europe? Qu’en est-il du calendrier prévu? Quelle est votre opinion sur l’évolution chez vos voisins, en Roumanie, et prévoyez-vous un nouvel afflux de réfugiés roumains de Hongrie?

M. Nemeth, Premier ministre de Hongrie (interprétation)

remercie M. Ahrens et constate que les événements ont prouvé que la décision hongroise d’ouvrir les frontières aux réfugiés est-allemands fut la bonne.

Il rappelle qu’au cours de ces derniers mois la Hongrie a déjà mis en place un gouvernement démocratique dans un cadre juridique et institutionnel pluraliste. Beaucoup reste cependant à faire, et d’abord à affronter les élections libres de mars prochain. Elles doivent être organisées de manière que l’Europe et le monde constatent qu’elles se sont déroulées avec toute la régularité possible.

Mais, après les élections, la Hongrie devra agir comme une démocratie. Il y a mille ans, elle a choisi la civilisation occidentale. Ce fut un choix définitif, mais au cours de ces quarante dernières années, elle s’est écartée de ce chemin. Il est toujours malaisé d’y revenir.

Outre la réforme du système constitutionnel, il faut encore procéder à l’élection du Président de la République, améliorer le fonctionnement de la Cour constitutionnelle et, enfin, compléter les différents corps constitués. Certaines institutions démocratiques fonctionnent déjà et l’on peut espérer que l’édifice sera prochainement achevé.

Les événements qui se sont déroulés en Roumanie depuis Noël dernier sont de la première importance pour la Hongrie. Ils ont permis d’espérer l’établissement de nouvelles relations entre les deux pays. Historiquement, ce ne fut jamais le peuple hongrois ou le peuple roumain qui se sont heurtés: ce sont des hommes politiques étrangers qui en ont fait des ennemis. Les nations minoritaires méritent le respect, ont droit à l’éducation dans leur langue maternelle et au maintien de leur héritage culturel. Il est tout à fait possible de trouver des solutions à ces problèmes qui, après la seconde guerre mondiale, paraissaient surmontés. Il est évident que les changements intervenus en Roumanie permettront tant à la minorité hongroise qu’aux autres minorités ethniques de vivre là où elles sont, de façon qu’elles n’aient pas envie de s’exiler. Si les demandeurs d’asile politique venus de Roumanie n’ont cessé de croître en Hongrie ces dernières années, la responsabilité en incombe aux gouvernants qui refusaient de régler le problème.

M. SARTI (Italie) (traduction)

Monsieur le Premier ministre, je voudrais tout d’abord vous exprimer la sympathie et l’admiration du groupe du Parti populaire européen qui regroupe les démocrates-chrétiens de toute l’Europe.

Notre admiration s’adresse à vous personnellement, à votre Gouvernement, aux forces politiques hongroises et au peuple hongrois pour ce qu’il a réussi à faire en 1989 et, si vous me le permettez, aussi pour ce qu’il a su être en 1956.

Ma question fait abstraction de ces remarques préliminaires et de l’engagement que nous essaierons d’honorer pour ce qui nous concerne, à savoir accueillir et examiner d’un œil très favorable la demande de la Hongrie d’entrer au Conseil de l’Europe.

Ma question est très simple: vous avez évoqué avec précision le rapport qui existe entre la libéralisation des systèmes internes en Europe du centre et de l’Est et la fin des blocs militaires. Pensez-vous, Monsieur le Premier ministre, qu’à cette déclaration de principe peut faire suite rapidement la sortie de votre pays du Pacte de Varsovie?

M. Nemeth, Premier ministre de Hongrie (interprétation)

répond que l’élimination des blocs revêt une grande importance, mais qu’elle ne pourra se réaliser que dans le respect des réalités. Il faudra sans doute élaborer des compromis raisonnables. La Hongrie souhaite une modification de l’organisation du Pacte de Varsovie et un dialogue stimulant avec l’OTAN. Elle essaiera là encore de donner l’exemple en se fondant sur le principe de la sécurité suffisante. Elle entend parvenir à une réduction graduelle des différentes catégories d’armement et au retrait de toutes les troupes étrangères. Il faut parvenir à une Europe débarrassée des blocs, mais le chemin sera long.

M. COX (Royaume-Uni) (traduction)

Comme les autres membres de l’Assemblée, je félicite le Premier ministre de son discours. Peut-il dire à l’Assemblée les raisons de la visite récente en Hongrie de représentants du Gouvernement sud-africain? Sait-il que l’oppression dont son pays a souffert si longtemps existe encore pour la grande majorité des personnes de couleur vivant en Afrique du Sud? Il faut espérer qu’aucun des pays qui viennent de recouvrer la liberté ne fera quoi que ce soit pour encourager ce régime.

M. Nemeth, Premier ministre de Hongrie (interprétation)

indique que son pays a rétabli ses relations avec Israël et qu’il compte faire de même avec le Saint-Siège. Quant à l’Afrique du Sud, il souligne qu’il sait parfaitement que l'apartheid n’a pas cessé, mais que ce pays abrite une importante colonie hongroise et que le sort de celle-ci l’a conduit à recevoir un ministre sud-africain. Le Gouvernement hongrois a saisi cette occasion pour condamner Y apartheid, mais le Premier ministre a relevé dans les propos du représentant sud-africain des phrases prometteuses de changements là-bas aussi.

M. ELMQUIST (Danemark) (traduction)

Ma question va dans le même sens que celle de MM. Fourré et Sarti. Je sais que la future structure de coopération européenne pose des problèmes difficiles. En juillet, nous avons reçu la visite de M. Gorbatchev qui s’est efforcé d’exposer dans cette enceinte son idée de la maison commune européenne. Votre réponse à M. Fourré ne m’a pas paru très claire. Vous avez mentionné dans une même phrase le Conseil de l’Europe et le Parlement européen, et je ne sais pas si vous incluez la Communauté européenne dans votre idée d’une future coopération européenne élargie.

Comme suite à votre réponse à M. Sarti, je vous poserai une question très simple: en raison de toutes les troupes stationnées en Europe, pensez-vous que l’institution convenant le mieux à la future coopération européenne est la CSCE – la Conférence sur la sécurité et la coopération en Europe – ou le Conseil de l’Europe?

M. Nemeth, Premier ministre de Hongrie (interprétation)

précise qu’il n’a fait allusion à la CSCE que pour évoquer certains liens économiques. Il entend éviter tout malentendu: pour lui, le Conseil de l’Europe sera toujours le meilleur cadre pour le développement d’une Europe unifiée.

M. KARHAN (Turquie) (traduction)

Nous suivons avec beaucoup d’intérêt les préparatifs de votre Gouvernement pour mettre en place une économie de marché libre en Hongrie. A la lumière de ce processus, que pensez-vous de la possibilité de réviser les règles du Comecon qui sont incompatibles avec le principe du libre-échange, notamment celles concernant les divisions économiques du travail et les relations économiques privilégiées?

M. Nemeth, Premier ministre de Hongrie (interprétation)

rappelle que pendant des années la Hongrie et la Pologne avaient demandé en vain une réforme du Comecon. Ce n’est que récemment que les pays membres ont accepté d’appliquer l’économie de marché. Cette décision exigera une nouvelle charte et un bouleversement complet. Il reste peu de temps pour réaliser une tâche d’une telle ampleur, d’autant plus nécessaire que le Comecon n’a jamais servi les intérêts des Etats membres ni ceux de la Communauté. Il a été une machine excessivement bureaucratique qui n’a pas assez tenu compte des réalités du marché. Si la réforme qui est actuellement envisagée échouait ou si elle n’avait pas de conséquences réelles, cette institution serait menacée d’éclatement et les pays comme la Hongrie, la Pologne et la Tchécoslovaquie, qui se sont ouverts à l’économie de marché, s’en retireraient. On peut espérer cependant qu’une conception nouvelle du Comecon, davantage fondée sur l’économie de marché, sera élaborée rapidement. Ce serait important pour les relations de la Hongrie avec la Communauté économique européenne.

M. EICHER (Belgique)

Monsieur le Premier ministre, les événements historiques et bouleversants de l’Europe de l’Est ont été perçus à l’Ouest comme une volonté de retour à l’Europe, à la véritable, à la Grande Europe.

Aussi nous réjouissons-nous de pouvoir vous accueillir au sein de notre institution, symbole de l’Europe démocratique et pluraliste. Bienvenue, Monsieur le Premier ministre!

Mais, au-delà de l’euphorie des premiers jours, se pose la question de savoir comment peut être concrétisé ce retour. Votre pays a demandé son adhésion au Conseil de l’Europe. Est-ce une fin en soi ou un stade intermédiaire en vue de l’intégration au sein de l’Europe communautaire et que pensez-vous – vous y avez déjà répondu partiellement – de la proposition du Président de la Tchécoslovaquie, M. Vâclav Havel, de créer une fédération regroupant la Hongrie, la Tchécoslovaquie et la Pologne, en vue d’une coopération avec la Communauté européenne? Quel est votre sentiment en ce qui concerne la proposition de M. Mitterrand, Président de la République française, qui a parlé d’une «confédération européenne»?

M. Nemeth, Premier ministre de Hongrie (interprétation)

rappelle qu’il a abordé cette question lors des entretiens qu’il a eus à Budapest avec M. Delors et que celui-ci estime que les accords qui existent déjà entre la Hongrie et la Communauté doivent d’abord être mis en œuvre concrètement, même si les deux parties peuvent et doivent réfléchir à un type nouveau de relations. On pourrait imaginer, à terme, que s’établissent entre la Hongrie et la Communauté des relations semblables à celles qui existent entre la Yougoslavie et cette dernière. Le Premier ministre se félicite à cet égard des déclarations de M. Dumas.

La Hongrie doit faire face à des problèmes économiques d’une telle ampleur qu’elle ne peut espérer les résoudre sans une aide de l’extérieur, au demeurant profitable à long terme à ses partenaires. Cela dit, l’adhésion de la Hongrie à la Communauté et même l’idée d’une Europe entièrement réunifiée ne sont pas à l’ordre du jour dans un avenir prévisible. Les réformes économiques courageuses qui ont été lancées en 1968 n’ont pas eu les effets escomptés parce que le cadre politique et juridique était demeuré inchangé. Les réformes engagées aujourd’hui s’attaquent donc au fond du problème. Tel est le sens de la demande d’adhésion au Conseil de l’Europe et des relations nouvelles avec les autres institutions européennes comme la CEE et l’AELE. Peut-on envisager que la Pologne, la Hongrie et la Tchécoslovaquie – trois pays qui ont en commun une certaine tradition et qui sont les plus avancés sur la voie de l’économie de marché – coopèrent de manière plus étroite au sein d’une organisation spécifique? Ce projet est intéressant, mais il n’a pas encore reçu de formulation concrète.

En ce qui concerne la demande d’adhésion au Conseil de l’Europe, le Premier ministre croit avoir donné une réponse dépourvue d’ambiguïté. C’est dans le cadre du Conseil de l’Europe que la Hongrie entend procéder à des échanges de vues sur ce que pourrait être la «maison commune».

Mme PALACIO (Espagne) (interprétation)

rappelle que les pays membres de la Communauté s’interrogent aujourd’hui sur le point de savoir quel est le système le mieux à même de faire avancer la coopération européenne. Vaut-il mieux renforcer l’unité des Douze et aller vers la voie de la coopération politique ou.bien, sans abandonner l’Acte unique européen, mettre sur pied une structure plus souple et plus accueillante? Mme Palacio aimerait savoir si la Hongrie juge plus facile de s’intégrer le moment venu à une Europe plus unie, structurée en fédération ou en confédération, ou à une Europe qui resterait, dans ses grandes lignes, celle qu’on connaît aujourd’hui.

M. Nemeth, Premier ministre de Hongrie (interprétation)

estime indispensable d’étudier soigneusement toutes les propositions, qu’il s’agisse du concept de «maison commune» lancé par M. Gorbatchev ou de l’idée de confédération suggérée par M. Mitterrand. Il faut aussi peser tous les éléments de la future réforme du Comecon et de l’Acte unique européen. Déterminée à renforcer ses relations économiques avec la Communauté, la Hongrie souhaite que celle-ci achève son évolution institutionnelle. Elle insiste pour que toutes les propositions sérieuses soient prises en considération, qu’elles viennent de l’Est ou de l’Ouest, et elle est bien consciente qu’à côté des impératifs économiques importe aussi le respect des droits de l’homme.

M. VARA (Portugal) (interprétation)

notant qu’aucune décennie ne s’était ouverte autant que celle-ci sous le signe de l’espoir, juge qu’une Europe de la paix et de la solidarité commence à devenir possible de l’Atlantique à l’Oural. Il souhaiterait savoir comment M. Nemeth envisage cette coopération, notamment dans le cadre du Comecon.

M. Nemeth, Premier ministre de Hongrie (interprétation)

indique que chacun voit bien les problèmes, mais qu’il est plus difficile de trouver des réponses concrètes. Il insiste donc sur la nécessité d’une discussion franche et ouverte.

M. PECCHIOLI (Italie) (traduction)

Monsieur le Président, je tiens à m’associer à l’évaluation positive de la grande œuvre de réforme qui est actuellement en cours en Hongrie.

Il ne fait aucun doute que l’Occident doit offrir toute son aide désintéressée à cette grande révolution démocratique en cours à l’Est.

Je voudrais cependant signaler que notre tâche, la tâche de cette partie de l’Europe qui est la gardienne d’un vaste patrimoine de valeurs démocratiques, doit être celle de traiter avec les pays de l’Est avec la même dignité. En fait, l’Occident dispose d’un grand patrimoine positif à mettre à la disposition d’un développement mondial; mais on y trouve également des aspects négatifs du développement dont nous devrons nous assurer qu’ils ne passent pas à l’Est.

L’Est ne doit pas être considéré exclusivement comme un grand et nouveau marché à exploiter, mais, au contraire, comme une partie du continent avec laquelle il faut collaborer.

La question de politique étrangère que je souhaite poser au Premier ministre concerne l’élan qui existe aujourd’hui en République Démocratique Allemande et en République Fédérale d’Allemagne vers une relance et une reprise de l’unification allemande. Je souhaiterais connaître le point de vue du Gouvernement hongrois sur cette question qui est essentielle et décisive pour l’avenir de l’Europe.

M. Nemeth, Premier ministre de Hongrie (interprétation)

est bien conscient que la Hongrie, si elle veut s’intégrer à l’Europe, devra satisfaire à un certain nombre d’exigences très strictes, qui ne sont pas seulement de nature économique. La tâche sera certainement difficile et les Hongrois demandent donc aussi de la patience et de la compréhension: tous les changements nécessaires ne se feront pas du jour au lendemain. Mais l’orateur a compris que le Conseil de l’Europe était prêt à aider son pays et il l’en remercie.

Pour les Hongrois, on ne peut imaginer une Europe unie sans une Allemagne unie. Mais c’est évidemment aux deux peuples concernés de prendre la décision, en tenant compte des intérêts des autres nations. Cette tâche aussi sera difficile, mais on ne saurait regarder comme une décision irrévocable l’existence, au milieu de l’Europe, de deux Etats allemands séparés.

Mme KALAYCIOÔLU (Turquie) (traduction)

En tant que membre de la délégation turque, je tiens, Monsieur le Premier ministre, à vous souhaiter la bienvenue. Nous avons remarqué que, parmi les membres du Pacte de Varsovie, c’est votre pays qui a pris la tête du mouvement de la démocratisation de la société. Selon vous, les événements qui se sont produits récemment en Lituanie et en Azerbaïdjan risquent-ils d’avoir des conséquences négatives sur ce processus?

M. Nemeth, Premier ministre de Hongrie (interprétation)

rappelle qu’il n’y a pas si longtemps les dirigeants soviétiques prônaient la «solution léniniste» du problème des nationalités et répétaient constamment que toutes les républiques de l’Union étaient placées à égalité. M. Gorbatchev s’est maintenant lancé dans des réformes courageuses, mais il est évident qu’il ne peut, en un jour, annuler les conséquences de la politique menée pendant plusieurs décennies. Il n’a d’ailleurs même pas encore «ouvert la porte», mais on mesure déjà l’ampleur des problèmes. Le processus se poursuit dans les républiques baltes et dans le Caucase, et l’équipe au pouvoir à Moscou commence à proposer des solutions. Elle devra impérativement élaborer une nouvelle politique des minorités. Il est bien évident que les relations entre Moscou et, par exemple, les républiques baltes devront s’établir sur de nouvelles bases et en fonction d’une législation fédérale adéquate. Mais, après avoir constaté les difficultés économiques que connaît l’Union Soviétique et les diverses tendances qui se dégagent parallèlement en Europe centrale, il convient d’œuvrer de manière à ne pas porter préjudice à l’action de M. Gorbatchev. L’Union Soviétique a dû attendre ce tournant pendant soixante-dix ans. Il ne faudrait pas qu’elle attende encore soixante-dix nouvelles années pour que ces réformes se concrétisent.

Lord MACKIE of BENSHIE (Royaume-Uni) (traduction)

Ma question est d’ordre pratique, elle concerne l’agriculture. Je me suis rendu récemment en Hongrie et j’ai visité deux fermes d’Etat. J’ai trouvé qu’elles étaient plutôt bien exploitées, bien qu’évidemment trop grandes. Que deviendront ces énormes fermes d’Etat? Comment allez-vous introduire l’économie libérale dans l’agriculture hongroise?

M. Nemeth, Premier ministre de Hongrie (interprétation)

reconnaît qu’il s’agit de l’une des questions les plus épineuses que devra résoudre le Gouvernement hongrois. Deux tendances se dégagent actuellement: la première est celle du parti historique des petits propriétaires, qui a proposé de rétablir les titres de propriété tels qu’ils existaient avant 1947. L’autre tendance consiste à dire que fermes d’Etat et coopératives agricoles ont, dans l’ensemble, répondu à l’attente et qu’il convient simplement de lever certaines restrictions.

Le Gouvernement hongrois a soumis récemment au Parlement un projet de loi qui fut accepté. Il tend à permettre aux successeurs des anciens propriétaires de retirer leurs terres des coopératives s’ils le souhaitent. La politique gouvernementale vise à créer des conditions égales pour le secteur coopératif et le secteur privé, car ceux qui travaillent la terre doivent pouvoir en retirer le maximum de profit. Il a été estimé qu’environ 40 % des terres agricoles pourraient ainsi passer au secteur privé dans un avenir proche.

M. REDDEMANN (République Fédérale d’Allemagne) (traduction)

Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, je ne poserai pas de question, mais au terme de cette séance consacrée aux questions orales, je voudrais encore une fois remercier très sincèrement nos invités hongrois au nom de la délégation allemande. Les changements qui se sont produits ces derniers mois en République Démocratique Allemande n’auraient pas été possibles si, cet été et cet automne, le Gouvernement hongrois, le peuple hongrois n’avaient pas aidé, comme si cela allait de soi, les réfugiés de la République Démocratique Allemande et, grâce à leur action, permis la reconquête de la liberté en République Démocratique Allemande. Déjà l’an dernier, j’avais adressé aux invités spéciaux du Parlement hongrois mes remerciements au nom de la délégation. Je voudrais les réitérer aujourd’hui. La délégation allemande souhaite tout particulièrement à la Hongrie la bienvenue au sein de l’Assemblée.

M. SOARES COSTA (Portugal) (interprétation)

constate que le moment est particulièrement bien choisi pour se féliciter des réformes démocratiques entreprises par la Hongrie sur le plan tant politique qu’économique. Elles permettront notamment une représentation démocratique au Parlement hongrois après les élections de mars.

Mais la réforme économique est tout autant indispensable, car elle doit ouvrir la voie vers une économie de marché. Il est bien évident qu’une période d’adaptation sera nécessaire, notamment dans le secteur agricole, particulièrement sensible. Au-delà de la réforme foncière, il faut envisager la présence de petites propriétés agricoles de type familial.

L’orateur aimerait savoir par M. Nemeth comment le Gouvernement hongrois envisage cette transition des fermes d’Etat vers une agriculture de type privé. Il est essentiel que cette transition se réalise sans rupture de l’économie de production.

M. Nemeth, Premier ministre de Hongrie (interprétation)

rappelle que les structures actuelles de l’agriculture hongroise ont permis de produire assez pour nourrir une population égale à une fois et demie celle de la Hongrie. Il n’empêche qu’il faut transformer l’agriculture qui connaît encore des méthodes d’exploitation trop coûteuses et non concurrentielles. Le Gouvernement hongrois a l’intention de réaliser une réforme totale de la structure de la propriété, tout en évitant une rupture catastrophique de la production agricole. Il rappelle qu’au début des années 70 on avait voulu introduire de nouveaux impôts en agriculture, notamment en ce qui concerne la production de pommes de terre, ce qui a amené un désordre tel que la Hongrie a été obligée d’en importer.

Lorsqu’on veut modifier l’agriculture, il convient donc de planifier les changements, de prévoir un matériel agricole différent de celui, de grande dimension, utilisé par les fermes d’Etat et les coopératives, ce qui implique également des changements dans la production industrielle. Il faut que cette évolution soit progressive. C’est le marché qui déterminera ce qui sera le plus indiqué de faire. Le Gouvernement hongrois n’a pas de préjugés, mais il n’entend pas non plus démolir d’un seul coup les structures en place.

Lord KINNOULL (Royaume-Uni) (traduction)

Le Premier ministre a répondu parfaitement à ma question. Je tiens à le féliciter chaleureusement de son exposé et de la franchise avec laquelle il a répondu à de nombreuses questions délicates.

M. KLEJDZINSKI (République Fédérale d’Allemagne) (traduction)

Monsieur le Premier ministre, je n’insisterai pas – parce que le temps presse – sur le fait qu’en tant qu’Allemand, je suis particulièrement reconnaissant.

Ma question est la suivante: la liste du Cocom empêchant actuellement pratiquement les échanges, sur le plan scientifique et technologique, de produits de haute technologie, considérez-vous comme moi qu’une étroite coopération s’impose dans les domaines de la recherche sur l’énergie, la recherche sur l’environnement, la recherche médicale et la recherche sur les technologies de l’information, notamment en ce qui concerne le transfert de technologies et l’échange de données sur les tout derniers progrès en matière d’instruments de mesure et d’analyse, afin de pouvoir améliorer les techniques de production? Car tout cela a des incidences très concrètes et contribue à accélérer le processus de démocratisation, à renforcer l’économie et à améliorer les conditions de vie dans toutes ces régions.

M. Nemeth, Premier ministre de Hongrie (interprétation)

est d’avis que la rigueur du Cocom est anachronique au moment où l’on veut éliminer les confrontations. Il espère que les règles seront assouplies pour l’avantage de tous.

M. LE PRÉSIDENT (traduction)

Je vous remercie, Monsieur le Premier ministre. Au nom de l’Assemblée, je vous remercie d’avoir eu la gentillesse de répondre à la vingtaine de questions qui vous ont été posées.

Lorsque je suis allé à Budapest en octobre dernier, un Hongrois – votre Président par intérim – m’a dit qu’en 1956 la Hongrie s’était retrouvée seule. Je peux vous assurer, Monsieur le Premier ministre, que vous ne serez pas abandonné par vos amis du Conseil de l’Europe. Nous attendons avec impatience que la Hongrie devienne membre à part entière de cette Organisation et nous vous remercions vivement de tous les efforts que vous déployez personnellement pour restaurer la démocratie dans votre pays.

M. Nemeth, Premier ministre de Hongrie (traduction)

Je répondrai d’une seule phrase, le proverbe anglais qui dit: «A friend in need is a friend indeed» (c’est dans le besoin qu’on reconnaît ses vrais amis).

J’espère que la Hongrie deviendra bientôt membre à part entière du Conseil de l’Europe.