Ivo

Sanader

Premier ministre de Croatie

Discours prononcé devant l'Assemblée

mardi, 27 avril 2004

Merci beaucoup. Monsieur le Président de l’Assemblée parlementaire, Monsieur le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe, Mesdames et Messieurs les parlementaires, Excellences, Mesdames, Messieurs, c’est un grand honneur pour le Premier ministre de la Croatie d’être à Strasbourg aujourd’hui. Je suis reconnaissant de l’occasion qui m’est donnée de prendre la parole devant l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, le plus ancien forum parlementaire international du monde. Je tiens à vous dire combien je suis heureux de pouvoir partager avec vous certaines de mes réflexions concernant le développement de mon pays et son programme européen.

Permettez-moi aussi de rendre hommage à l’excellent travail accompli par le Conseil de l’Europe en général, et l’Assemblée parlementaire en particulier, s’agissant de promouvoir la démocratie, de renforcer les normes démocratiques et l’Etat de droit, et d’assurer le respect des droits de l’homme sur l’ensemble de notre continent. Sa contribution à la construction d’une nouvelle Europe sans clivages est d’une importance considérable. Dans ce contexte, j’estime que l’héritage de cette Organisation est la preuve manifeste que les idéaux, normes et principes européens communs ne sont pas simplement une aspiration, mais qu’ils ont aussi une incidence concrète et durable sur l’Europe d’aujourd’hui. Dans cette optique, je suis convaincu que, depuis 1996, année de son adhésion au Conseil de l’Europe, mon pays, la Croatie, a lui aussi contribué à promouvoir nos valeurs européennes communes.

Cette contribution, du reste, a été dûment reconnue il y a une semaine à peine, lorsque dans cette ville même, dans l’enceinte du Parlement européen, mon ministre des Affaires étrangères a été saisi de l’avis recommandant clairement que, à la réunion de juin du Conseil européen, la Croatie obtienne le statut de candidat à l’adhésion à l’Union européenne. En un temps très court, huit ans à peine, nous avons fait beaucoup de chemin. Nous sommes fiers de chacune des mesures prises, de la mise en œuvre des vingt et un engagements que nous avons contractés en 1996, sur l’avis de la Commission européenne.

Pour l’ensemble de l’Europe et de ses citoyens, Strasbourg revêt une importance particulière. Ce n’est pas seulement le siège des institutions européennes, mais aussi, de fait, le véritable symbole d’une nouvelle Europe unie, de ses premiers pas et de son développement fondés sur des principes et des valeurs partagés. Strasbourg revêt aussi une importance particulière pour mon pays. Il y a huit ans, la Croatie est devenue membre du Conseil de l’Europe, au lendemain de la guerre, avec son cortège de graves conséquences pour son économie, pour sa société, pour l’avenir de son peuple, collectivement et individuellement. L’adhésion à l’Organisation a alors représenté la preuve de la capacité de la Croatie à devenir membre de la famille européenne des nations et des valeurs.

Cependant, il y a une semaine, une nouvelle perspective s’est ouverte pour mon pays dans son rapport à l’Union européenne. Cela représente non seulement un pas en avant important dans ce processus, mais aussi une obligation et une indication précises de la nécessité pour la Croatie de poursuivre son développement ainsi que d’adopter et de mettre en œuvre les normes et les principes européens.

Les élections législatives de novembre dernier ont conduit à la formation d’un nouveau gouvernement que j’ai l’honneur de diriger. Nous avons pleinement accepté ce défi et la responsabilité que les électeurs ont confiée à l’Union démocratique croate (HDZ). En tant que parti dont le programme se fonde sur les valeurs démocratiques européennes, son programme d’action est prioritairement axé sur la démocratie et l’Europe. Nous sommes déterminés à faire de la Croatie un Etat tout à fait démocratique et prospère, au bénéfice de tous ses citoyens.

Les principales priorités de mon gouvernement restent l’adhésion à l’Union européenne et à l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (Otan). Nous nous attachons activement, et, au vu de l’avis, avec une détermination encore plus forte, à poursuivre ces objectifs. Nous ne considérons pas l’adhésion éventuelle aux institutions euro-atlantiques comme une fin en soi, mais comme un moyen de garantir notre contribution dynamique et concrète au renforcement de la stabilité démocratique en Europe.

Mon gouvernement s’est engagé à ne ménager aucun effort pour renforcer les valeurs et les principes démocratiques, assurer le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales, et mettre en place un cadre permettant à tous ses citoyens de jouir pleinement de ces droits et valeurs. Nous avons clairement prouvé, dans la pratique, notre engagement sans équivoque à protéger les droits spécifiques de toutes les personnes appartenant à une minorité nationale, dans le plein respect de l’application des mesures dites préférentielles. La pertinence de cette politique est confirmée par le soutien des représentants des minorités nationales dont mon gouvernement jouit au sein du parlement.

Le gouvernement a contribué notablement à créer les conditions nécessaires et a pris les mesures voulues, y compris l’allocation de ressources financières importantes, pour assurer le retour des réfugiés et la reconstruction des biens endommagés à cause de la guerre. Une attention particulière a été accordée à ces questions ainsi qu’à l’instauration de la prospérité et d’un climat de tolérance au sein du pays. Mon gouvernement souhaite tourner une nouvelle page, regarder vers l’avenir et offrir à tous ses citoyens la possibilité de mener une vie meilleure, débarrassée des conflits nationaux et des querelles héritées d’un passé révolu.

Nous sommes toujours fermement engagés dans la poursuite de notre coopération avec le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY). Je voudrais juste souligner que cette coopération, qui représente une part importante du respect et de la mise en œuvre des obligations internationales de la Croatie, a considérablement progressé et qu’elle a été appréciée de manière très positive par le procureur du tribunal. L’évaluation positive de la coopération de la Croatie avec le TPIY a de même été confirmée dans l’avis de la Commission européenne de la semaine dernière.

Une fois que le statut de candidat sera octroyé à la Croatie, notre approche de l’Union européenne nécessitera sans aucun doute de nouvelles réformes, ainsi que l’harmonisation de nombre de lois, de règlements et de pratiques avec l’acquis communautaire afin qu’ils soient pleinement conformes aux normes de l’Union européenne. Nous sommes prêts et déterminés à nous lancer dans ce processus avec un grand dévouement – non seulement le gouvernement, mais aussi les citoyens et la population en général.

Entièrement convaincue que cet avis constitue une avancée historique, mais qu’il ne représente qu’un pas en avant, même s’il s’agit d’un grand pas, dans cette direction, la Croatie, en tant que futur candidate, est prête à poursuivre son chemin sur la voie de l’intégration à l’Union européenne. Il va sans dire que, à ce stade, elle est prête à passer à la vitesse supérieure.

Les relations de la Croatie avec les pays voisins et l’intensification de la coopération régionale constituent par ailleurs un autre aspect fondamental des priorités et objectifs stratégiques de mon gouvernement. La consolidation et l’approfondissement des relations avec nos voisins sont l’une des clés du développement de la stabilité démocratique dans notre région de l’Europe, stabilité à laquelle nous portons un intérêt incontestable à long terme. Car l’Histoire a donné à mon peuple de nombreux rôles différents. Aujourd’hui, la Croatie, en tant que pays totalement indépendant et candidat pleinement qualifié pour l’adhésion à l’Union européenne, est prête à assumer une autre responsabilité d’envergure – qui ne peut qu’être bénéfique à notre propre nation et à la région elle- même -, celle de rapprocher davantage l’Europe de ses régions du Sud-Est et de servir de pont entre l’Europe et le Sud-Est.

La Croatie est déterminée à favoriser ses relations et sa coopération avec tous ses voisins, et elle est convaincue que certains des obstacles actuels pourraient tout à fait être surmontés dans un proche avenir, en particulier dans le contexte des perspectives européennes existantes.

Membre du Conseil de l’Europe depuis 1996, la Croatie a contribué activement aux travaux de cette Organisation. A de nombreuses occasions et avec une inlassable énergie, le Conseil de l’Europe a confirmé son rôle primordial de porte-étendard des valeurs démocratiques, du respect de l’Etat de droit et de la protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Comme je l’ai déjà dit, l’importance portée à l’admission de mon pays dans la «famille des nations démocratiques de l’Europe» s’est concrétisée, comme le montrent nos réalisations dans le domaine du développement démocratique, de l’adoption et de l’application de normes démocratiques pertinentes et du renforcement du cadre juridique assurant la protection des droits de l’homme et des droits des minorités nationales.

Depuis ses premiers jours au Conseil de l’Europe et ses premiers pas «dans la voie de la démocratie européenne», la Croatie est passée par nombre d’étapes importantes. Toutes ont laissé leur marque sur le renforcement de son système démocratique. Au long de ces changements, de ces évolutions, la Croatie a toujours pu compter sur l’aide constructive de cette Organisation, même si les évaluations et les observations concernant la mise en œuvre d’une impressionnante liste de vingt et un engagements pris en liaison avec l’entrée au Conseil de l’Europe ont parfois été critiques ou pas vraiment positives. Nous avons toujours considéré les observations et les évaluations du Conseil de l’Europe comme des avis d’experts objectifs, participant de notre effort conjoint pour asseoir la démocratie croate.

Tout cela a finalement débouché sur des évolutions concrètes et tangibles. Ce processus et ces sentiments ont très probablement été les mêmes dans presque tous les pays qui, au cours des quatorze dernières années, ont parcouru le chemin qui mène du régime totalitaire à celui des démocraties établies. Dans quelques jours, ils seront membres de l’Union européenne. J’aimerais à ce stade les féliciter vivement tous les dix, ainsi que leurs populations, de ce succès historique. J’aimerais dire aussi que la Croatie suit le même cheminement et que nous comptons dans cette marche sur le soutien et l’assistance du Conseil de l’Europe.

Je tiens, à ce propos, à remercier tous les fonctionnaires, les membres du Conseil de l’Europe, tant à l’Assemblée parlementaire qu’au Comité des Ministres, qui ont apporté leur contribution à cette cause. Ma reconnaissance va tout particulièrement au Secrétaire Général, M. Walter Schwimmer, au Président de l’Assemblée parlementaire, M. Peter Schieder, à ses prédécesseurs, Mme Leni Fischer et Lord Russell- Johnston, au Secrétaire général de l’Assemblée parlementaire, M. Bruno Haller, aux rapporteurs de l’Assemblée pour le respect des engagements pris par la Croatie, M. Jaskiernia et Mme Stoyanova, au rapporteur pour le dialogue postsuivi, Mme Durrieu, pour ne citer que quelques noms. Qu’il me soit permis de dire également ma gratitude à tous les autres membres du Secrétariat du Conseil de l’Europe qui participent activement au développement de la coopération entre la Croatie et le Conseil.

Dans la formation de la nouvelle Europe nous percevons le rôle central du Conseil dans la large diffusion et la consolidation des normes européennes communes en matière de démocratie, d’Etat de droit et de promotion et de protection des droits de l’homme. Il doit rester vigilant dans la défense de ces valeurs partagées par toute l’Europe. La démocratie, l’Etat de droit et les droits de l’homme, qui sont un héritage de notre histoire, doivent aussi guider l’Europe de l’avenir – une Europe fondée sur l’unité, sur des principes communs et sur la coopération de tous ses membres.

Quelques mots pour conclure: la Croatie a retrouvé sa voie historique. Son peuple, ses forces politiques et son gouvernement regardent vers l’Europe. Aidez-nous à réaliser ce rêve. Merci, Monsieur le Président. Merci, Mesdames, Messieurs.

LE PRÉSIDENT (traduction)

Merci beaucoup, Monsieur Sanader, pour votre discours fort intéressant et vos propos amicaux sur le Conseil de l’Europe. Des membres de l’Assemblée ont souhaité vous poser des questions. Je leur rappelle qu’ils ont trente secondes pour ce faire, pas davantage. Il s’agit de poser une question, pas de faire un discours. Je n’autoriserai de question supplémentaire qu’à la fin et seulement s’il nous reste du temps.

La première question est posée par M. van der Linden, au nom du Groupe du Parti populaire européen.

M. VAN DER LINDEN (Pays-Bas) (traduction)

Monsieur le Premier ministre, pouvez-vous nous en dire plus sur la manière dont vous envisagez les relations entre la Croatie et ses voisins, notamment la Bosnie-Herzégovine?

M. Sanader, Premier ministre de Croatie (traduction)

Merci de votre question, Monsieur van der Linden. Je peux vous donner un exemple de nos relations avec nos voisins de l’Est, la

Bosnie-Herzégovine et la Serbie-Monténégro, par la présence, la semaine dernière à Sarajevo, de M. Walter Schwimmer, Secrétaire Général du Conseil de l’Europe. Jusqu’alors, la Croatie était un membre observateur du Processus de coopération en Europe du Sud-Est (SEECP). Quelques semaines auparavant, mon gouvernement a décidé, et j’en ai fait part au Sommet de Sarajevo, que la Croatie deviendrait membre titulaire de cette association; c’est dire que nous considérons nos bons rapports avec la Bosnie- Herzégovine et la Serbie-Monténégro comme indispensables à notre avenir commun. Permettez-moi une fois encore de souligner que l’avis est positif. Il est capital pour la Croatie comme pour la région tout entière.

Plus tôt la Croatie deviendra membre à part entière de l’Union européenne et de l’Otan, plus tôt la Serbie et d’autres pays suivront notre exemple. C’est pourquoi j’ai été ravi de recevoir des félicitations au cours de la réunion qui s’est tenue à Sarajevo mercredi dernier. Je crois fermement que le rapprochement de la Croatie et de l’Union européenne consolidera nos relations bilatérales tant avec la Bosnie-Herzégovine qu’avec la Serbie-Monténégro. En tout état de cause, nous savons qu’il nous faut vivre en bonne intelligence avec nos voisins et que nous avons un avenir européen commun.

Je dirai pour conclure que, en termes de politique étrangère, deux priorités s’imposent. La première est de se rapprocher de l’Union européenne et de l’Otan, la seconde de renforcer et d’approfondir nos relations bilatérales avec la Bosnie-Herzégovine, la Serbie- Monténégro et d’autres pays de la région.

Mme DURRIEU (France)

Je vous remercie de votre présence, Monsieur le Premier ministre. Votre pays a consenti d’énormes efforts en faveur de la reconstruction, après la guerre. Il était seul financièrement pour accomplir cette tâche.

Je voudrais savoir ce que vous envisagez de faire pour accélérer le retour des réfugiés serbes.

Par ailleurs, vous avez abordé la question de votre coopération avec le Tribunal pénal international. Pour ce qui est du cas précis du général Gotovina, que pensez-vous faire de plus?

M. Sanader, Premier ministre de Croatie

Merci beaucoup, Madame Durrieu.

(L’orateur poursuit en anglais) (Traduction) En premier lieu, notre coopération avec les représentants de la minorité serbe au sein du Parlement croate est des plus fructueuses. Huit membres du parlement sur 152 représentent les minorités nationales de Croatie. Chacun d’entre eux soutient mon gouvernement, et cela n’est pas rien. Nous avons signé un accord spécial avec les représentants de la minorité serbe – trois sur huit – qui soutiennent le gouvernement. Nous avons également conclu un accord sur le retour des réfugiés et la restitution de leurs biens. Laissez-moi vous dire que cela a créé l’événement en Croatie après les résultats du scrutin du 23 novembre.

La Croatie est indépendante depuis 1992. Pour illustrer l’amélioration du climat général de tolérance, de coexistence et de réconciliation qui règne dans mon pays, sachez que je suis le premier Premier ministre ou chef d’Etat à avoir célébré Noël avec la communauté orthodoxe à Zagreb. Ma délégation incluait le ministre des Affaires étrangères et le président du parlement. A l’époque, j’ignorais même que j’étais le premier Premier ministre ou chef d’Etat à le faire. C’était très peu de chose, un petit geste de courtoisie, mais cela a radicalement changé l’atmosphère en Croatie.

J’ai en quelque sorte récidivé en allant célébrer le Nouvel An avec les membres de notre minorité italienne à Istra; à cette occasion, je me suis adressé à eux en italien. Nous entretenons d’excellentes relations avec la minorité italienne et avons passé avec l’Italie un accord sur la protection des minorités. Tout cela a contribué à une avancée générale de la tolérance et du respect mutuel. Permettez-moi de dire, pour répondre à votre question, Madame Durrieu, que je suis fier de ce qu’a réalisé mon gouvernement en seulement quatre mois pour accélérer le retour des réfugiés et la restitution de leurs biens.

Concernant votre question au sujet de la coopération avec le TPI, sachez que nous avons pris l’engagement de coopérer pleinement avec lui – et le procureur général a rendu un rapport sur le sujet la semaine dernière – avant que la commission ait rendu son avis positif. C’était une des conditions préalables. Comme tous les autres pays, la Croatie doit se conformer aux critères de Copenhague incluant l’acquis communautaire et elle doit respecter trois autres obligations politiques, trois critères politiques: le retour des réfugiés, la coopération avec le Tribunal de La Haye et la réforme de la justice. Nous avons accompli des progrès considérables dans ces trois domaines. C’est ce qui ressort de l’avis, qui n’aurait pas été positif dans le cas contraire. Je vous remercie.

M. MILOJEVIC (Bosnie-Herzégovine) (traduction)

Merci beaucoup, Monsieur le Président. Monsieur le Premier ministre, la Croatie a-t-elle accordé un juste dédommagement aux Serbes déplacés – propriétaires avant guerre – pour les appartements vendus à des tiers? La Croatie prévoit-elle de simplifier la procédure de restitution des biens privés, aujourd’hui trop complexe? Merci.

M. Sanader, Premier ministre de Croatie (traduction)

Je ne suis pas d’accord avec vous. Nous avons considérablement simplifié la procédure au cours des quatre derniers mois. De fait, nous avons créé une commission spéciale, chargée de mettre en œuvre l’accord que j’ai signé au nom du gouvernement avec les représentants de la minorité serbe au Parlement croate. C’est ainsi que nous procédons et nous ferons tout notre possible pour faciliter le retour de l’ensemble des réfugiés et la restitution de leurs biens. Nous avons fixé une date précise pour la restitution des maisons et des appartements inhabités depuis l’expulsion des Croates de la Republika Srpska et de la Yougoslavie pendant la guerre.

Le problème dont je dois informer tous les parlementaires présents à l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe est que les Croates qui ont été expulsés de Bosnie, de Serbie et du Monténégro durant la guerre occupent désormais ces logements. En tant que Premier ministre, je garantis que tous ces bâtiments seront restitués aux réfugiés serbes qui commencent maintenant à revenir. Pour le moment, aucun Croate ne veut revenir. Nous souhaiterions aussi encourager les Gouvernements serbe et bosniaque à inviter les Croates qui, à l’époque, ont fui ou ont été expulsés vers la Croatie, à rentrer en Bosnie- Herzégovine et en Serbie-Monténégro. Cependant, s’ils ne le souhaitent pas, nous trouverons d’autres solutions pour les Croates qui ne sont pas en mesure de rentrer en Bosnie et en Serbie. Aucun réfugié serbe ne partira tant que les Croates ne souhaiteront pas récupérer leur bien.

M. RAGUZ (Bosnie-Herzégovine) (traduction)

Félicitations, Monsieur Sanader, pour les résultats impressionnants que vous et votre pays avez obtenus. La Croatie est signataire des Accords de Dayton. Comment envisagez-vous l’application des accords de paix compte tenu des incertitudes qui planent sur l’avenir européen de la Bosnie-Herzégovine, notamment au vu de la position de ses trois peuples constitutifs?

M. Sanader, Premier ministre de Croatie (traduction)

Les Accords de Dayton auront dix ans en 2005. Ils ont été signés en 1995. Nous savions pertinemment qu’ils étaient imparfaits, mais ils ont néanmoins mis un terme à la guerre. C’est là le plus beau succès des Accords de Dayton: toute activité guerrière a alors cessé. Je souhaite en remercier les gouvernements des pays de l’Union européenne et surtout le Gouvernement des Etats-Unis. Leur travail a abouti à une solution pacifique et à la cérémonie de signature à Dayton et Paris.

Dix années ont passé. Durant ces deux dernières semaines, j’ai rencontré à deux reprises, à Sarajevo et à Zagreb, le haut-commissaire Lord Paddy Ashdown. J’ai aussi rencontré en Bosnie-Herzégovine des représentants des trois peuples constitutifs, notamment le Président Tihic, M. Sehovic et le ministre Ivanic. Si Paddy Ashdown, les membres du gouvernement et le peuple de Bosnie-Herzégovine me demandaient de définir notre position, je leur répondrais simplement que, en premier lieu, la Croatie et la Bosnie- Herzégovine sont des pays amis. Nous partageons la plus longue frontière d’Europe. Nous voulons que la Bosnie-Herzégovine trouve le moyen de maintenir la qualité de vie de ses trois peuples constitutifs – les Serbes, les Bosniaques et les Croates. C’est pourquoi nous sommes tout disposés à contribuer aux actions de la communauté internationale pour trouver une solution menant à la stabilité et à la prospérité, dix ans après les Accords de Dayton.

Les accords ont été modifiés à plusieurs reprises par d’anciens hauts-commissaires. Je souligne une fois encore que, bien que ces accords n’aient pas été la panacée, il était vital de faire cesser le conflit. Il appartient désormais à la Bosnie de bien traiter ses peuples constitutifs et de coopérer davantage avec la communauté internationale. La Croatie prendra part à ces efforts multilatéraux. Elle ne cherche pas à agir seule. Notre intérêt est que les Croates demeurent en Bosnie- Herzégovine. Malheureusement, une tendance fâcheuse s’est dessinée l’année dernière et des Croates quittent ce pays. Il faut donc que la communauté internationale trouve un moyen, avec la présidence et les deux entités, de retenir les Croates en Bosnie- Herzégovine. Il nous faut trouver une formule qui réponde aux besoins vitaux des trois peuples constitutifs.

M. MARKOWSKI (Pologne) (traduction)

Les récents affrontements survenus au Kosovo entre Serbes et Albanais, dans lesquels 28 personnes ont été tuées et plus de 600 blessées, semblent avoir déclenché dans la vie sociale et politique serbe des processus qui pourraient avoir des répercussions à long terme dans la région. Cette évolution est très dangereuse, car le conflit ethnico-politique, en prenant un caractère religieux, pourrait se régionaliser ou même prendre l’allure d’un choc de civilisations. Ces deux phénomènes ont déjà été observés. En Bosnie, une église orthodoxe et une mosquée ont été attaquées. Dans la province de Sanjak, des activistes musulmans ont tenté de mobiliser des musulmans d’origine slave vivant en Serbie- Monténégro et en Bosnie. Comment décririez-vous les relations actuelles entre Serbes et Croates dans votre pays? Peut-on observer l’activité d’un mouvement panserbe après les récents événements du Kosovo?

M. Sanader, Premier ministre de Croatie (traduction)

Merci de votre question. En Croatie, nous suivons l’évolution du Kosovo avec beaucoup d’intérêt et d’anxiété. Nous avons condamné les récentes violences et agi de concert avec la communauté internationale pour éviter l’escalade. La Croatie considère la Résolution 1244 du Conseil de sécurité des Nations Unies comme la base possible d’une solution pour le Kosovo. Ce texte, joint aux efforts de la communauté internationale, devrait favoriser la stabilité au Kosovo. Le futur statut du Kosovo devrait être déterminé grâce à des actions communes visant à créer un environnement, une infrastructure et une économie stables et durables, conduisant au renforcement global des institutions démocratiques. Je n’ai pas de solution immédiate à proposer, mais je suis sûr qu’une présence internationale est indispensable et qu’un dialogue entre Pristina et Belgrade est et restera nécessaire.

Mme PETROVA-MITEVSKA («l’ex-République yougoslave de Macédoine») (traduction)

Ma question a reçu une réponse partielle au début de notre débat. Je me félicite de la participation de la Croatie au Processus de coopération en Europe du Sud-Est. Les pays engagés dans ce processus, dont le mien, «l’ex-République yougoslave de Macédoine», souhaitent développer la coopération entre Etats membres. Quelle est votre vision de la coopération régionale sous les auspices de ce processus, notamment dans le contexte de l’intégration de pays d’Europe du Sud-Est?

M. Sanader, Premier ministre de Croatie (traduction)

Merci, Madame Petrova-Mitevska. Je commencerai par féliciter votre pays pour le premier pas accompli sur la voie de l’adhésion à l’Union européenne. Nous participons tous deux au plan d’action pour l’adhésion à l’Otan. Nous pensons que le Sommet d’Istanbul sera l’occasion d’affirmer clairement les perspectives d’adhésion à l’Otan de nos deux pays et de l’Albanie.

Je vous remercie de vos félicitations pour notre décision concernant le Processus de coopération en Europe du Sud-Est. Cela signifie, selon nous, que nous pouvons contribuer à la stabilité globale et à la coopération dans notre région. En approuvant l’avis positif, nous tous en Croatie ferons tout ce qui est en notre pouvoir pour obtenir une décision favorable du Conseil européen quant à notre statut de pays candidat et fixer une date claire et précise pour le début des négociations. Notre adhésion ne signifiera en aucun cas que nous nous désintéresserons de notre région. Nous continuerons de collaborer avec vous et avec d’autres pays. Nous nous considérons comme un pont – voire un chef de file. Nous essayons de démontrer que tout est possible et que, si nous adoptons les réformes nécessaires pour nous aligner sur les normes et les valeurs européennes les plus élevées, nous réussirons.

Je voudrais profiter de votre question pour exprimer ma gratitude à l’Union européenne qui a pris l’an dernier, à Thessalonique, la décision d’offrir à tous les pays de la région la possibilité de prétendre à l’adhésion à l’Union européenne. La Croatie a été la première, la Macédoine et les autres suivront. Nous devons coopérer davantage pour obtenir notre adhésion de plein droit. Notre secrétaire d’Etat se rendra à Belgrade pour fixer un programme destiné à améliorer nos relations. J’ai eu un entretien fructueux avec votre Premier ministre et nous verrons s’il parviendra à atteindre son objectif, à la satisfaction du Président, M. Branko Crvenkovski. Nous avons déjà discuté de ma visite à Skopje. Je suis sûr que, grâce à une coopération renforcée, nous réduirons cette zone d’instabilité qui nous préoccupe tous, nous comme le reste de l’Europe.

Mme ZAPFL-HELBLING (Suisse) (traduction)

Monsieur le Premier ministre, je vous remercie de votre allocution. Je rappelle que, lors du dernier weekend, vous avez été réélu à la présidence du parti avec 99 % des voix. Nous avons là de toute évidence un vote de confiance récompensant la politique cohérente que vous avez menée des années durant. Ce succès personnel couronne les efforts que vous avez entrepris pour démocratiser et stabiliser votre pays.

Dans votre allocution, vous avez apporté les réponses à beaucoup de questions que je me posais. J’aimerais maintenant vous en poser une autre: êtes- vous en mesure de maintenir votre engagement, pour que les futurs pays de l’Union européenne, entre autres la Bosnie-Herzégovine, soient totalement respectés par vous, par votre politique et par vos concitoyens?

M. Sanader, Premier ministre de Croatie (traduction)

Madame Zapfl- Helbling, je vous remercie pour votre question et pour vos félicitations. Au cours du congrès de mon parti, qui a eu lieu samedi à Rijeka, j’ai été élu président pour la troisième fois. J’ai de bonnes raisons de me réjouir particulièrement du pourcentage élevé de voix qui se sont portées sur mon nom: jusqu’à présent, certains observateurs politiques trouvaient, certes, que j’étais a good guy et pro-européen, mais que la base de mon parti ne l’était pas. Il y a quatre ans, en avril 2000, j’ai accédé à la présidence du parti. Depuis cette époque, je conduis une politique de réforme, dont on voit bien qu’elle est acceptée maintenant non seulement par la base du parti – c’est-à-dire par plus de 2 500 délégués présents au congrès -, mais aussi par toutes les organisations du parti et dans toute la Croatie. Aucun fossé ne sépare donc le président du parti de la base.

Jusqu’à présent beaucoup posaient cette question restée sans réponse: les déclarations de Sanader, le président du parti, sont-elles exactes, ou est-ce que l’Union démocratique de Croatie est quand même un autre parti? Eh bien non, au cours des dix premières années, l’Union démocratique de Croatie a été le parti qui a mené la Croatie à l’indépendance. Elle est aujourd’hui un parti réformé. Ces quatre dernières années, nous avons fait toute une série de réformes. C’est ainsi que nous avons adopté, dans le parti, le principe de subsidiarité, et bien d’autres choses encore. Nous sommes ouverts vis-à-vis d’autres partis du centre et du centre droit. Le Parti populaire européen (PPE) l’a reconnu et M. van der Linden s’est exprimé aujourd’hui au nom du PPE. Depuis deux ans, nous avons le statut d’observateur et dans deux jours nous deviendrons membre associé du Parti populaire européen.

C’est dans cet esprit que le parti tout entier me suit, moi et toutes ces réformes. Au congrès du parti, samedi à Rijeka, j’ai justement parlé de la Bosnie- Herzégovine, de la Serbie-Monténégro, du retour des réfugiés et de la collaboration avec le Tribunal de La Haye. Les délégués ne m’ont pas seulement applaudi, ils m’ont aussi élu avec ce score élevé. Je suis donc très optimiste pour l’avenir. La Croatie entend suivre en même temps deux voies politiques: se rapprocher de l’Union européenne et de l’Otan, mais aussi de ses voisins. Nous souhaitons avoir avec la Serbie-Monténégro des relations de bon voisinage. C’est justement avec la Serbie-Monténégro, c’est justement avec la Bosnie que nous élaborons un agenda de collaboration. Il y a encore des problèmes et des questions non résolus que nous devons clarifier, mais la volonté de collaboration existe.

Pour se réconcilier, il faut du courage. Après la guerre – l’an prochain, dix années se seront écoulées depuis la fin du conflit – il faut absolument bâtir pour tous les peuples, pour tous les Etats de l’ancienne Yougoslavie une perspective et un avenir pro-européens. La Croatie a l’intention d’y apporter une large contribution, ainsi qu’à la réconciliation. Si j’ai donné ce petit exemple et si je le «ressers» une fois de plus, c’est parce que j’ai été surpris de l’effet considérable produit par la participation du Premier ministre à une fête de Noël orthodoxe. C’était, de ma part, un petit geste. J’y suis allé avec mon épouse pour bien montrer que je participais non seulement en tant que Premier ministre, mais aussi en tant que personne. En Croatie, l’impact a été énorme. Dans tout le pays, l’atmosphère a changé, et nous poursuivrons dans cette voie.

M. JAKlC (Slovénie) (traduction)

Monsieur le Premier ministre, félicitations pour votre avis positif. La Slovénie soutient sans réserve l’aspiration et la détermination de la Croatie à prendre part à l’intégration européenne, facteur important de la stabilisation politique et économique de la région. Monsieur Sanader, selon vous, comment et dans quels domaines la Slovénie peut-elle aider la Croatie dans le processus d’intégration dans l’Union européenne?

M. Sanader, Premier ministre de Croatie (traduction)

Monsieur Jakic, laissez-moi tout d’abord vous féliciter de votre adhésion à l’Otan et à l’Union européenne, le samedi 1er mai, qui restera une journée historique pour votre pays. En qualité de pays ami et voisin, nous sommes de tout cœur avec vous et je vous félicite pour vos succès dans tous les domaines. Je suis convaincu que la Slovénie peut se faire l’avocate de l’adhésion de la Croatie à l’Union européenne et à l’Otan. Qui, mieux que la Slovénie, connaît la situation en Croatie? Pour l’information des autres parlementaires, quelques différends nous opposent, mais nous souhaitons les résoudre de manière bilatérale. Si nous n’y parvenions pas, nous demanderions un arbitrage international. Quoi qu’il en soit, aucun de ces différends ne peut mettre en péril nos relations d’amitié et je vous remercie de votre question. Je suis persuadé que le Gouvernement slovène, notamment le Premier ministre Rop et le ministre des Affaires étrangères Rupel, ainsi que les parlementaires de l’Assemblée, le Parlement européen et l’Otan, se prononceront en faveur de l’adhésion de la Croatie, parce que, comme nos amis et voisins de Hongrie et d’Italie, ils sont plus au fait que d’autres Européens de la situation en Croatie. Concrètement, je dirai que nous souhaitons profiter de votre expérience. Le ministre Zuzul entretient d’excellentes relations avec le ministre Rupel et nous nous accordons à penser que nous pouvons tirer parti des compétences expertes de vos représentants, qui ont négocié avec l’Union européenne et l’Otan. Nous sommes conscients que c’est votre expérience qui a permis d’obtenir l’adhésion pleine et entière aux deux organisations.

M. BUDIN (Italie) (traduction)

Monsieur le Premier ministre, deux questions. La première porte sur la controverse concernant la zone halieutique et environnementale de l’Adriatique: êtes-vous d’accord sur le fait que la gestion de l’Adriatique doit être multilatérale et, dans l’affirmative, selon quelles modalités?

La deuxième question est la suivante: vous parlez de réconciliation, je voudrais savoir si, outre d’autres mesures, vous jugez utile d’accomplir des actes symboliques à valeur morale et de réconciliation, traduisant aussi une reconnaissance mutuelle des responsabilités pour ce qui s’est produit par le passé.

M. Sanader, Premier ministre de Croatie (traduction)

Merci pour vos deux questions. S’agissant de la première, j’estime qu’une telle gestion dans la zone de l’Adriatique est une démarche conforme à la pratique européenne.

Lors des deux ou trois entretiens que j’ai eus avec M. Berlusconi, président du Conseil, je lui ai dit qu’en Croatie nous comprenions que les Italiens aient des intérêts à défendre en matière de pêche et que nous étions prêts, d’une part, à veiller à ce que cette loi, adoptée par le Parlement croate, soit respectée comme toutes les autres lois, et, d’autre part, à chercher des solutions pour répondre aux intérêts des Italiens. Nos pêcheurs croates n’ont, du reste, pas la capacité de pêcher tout le poisson disponible et, par conséquent, il y a aussi de la place pour nos amis italiens; pourquoi en serait-il autrement?

Nous avons aussi abordé cette question avec le commissaire Fischler, qui est prêt à apporter son concours à la recherche d’une solution. Il y a, en tout cas, un climat de bonne volonté et d’amitié entre la Croatie et l’Italie, et nous espérons que l’Italie aussi nous soutiendra dans la voie européenne que nous suivons.

Je n’ai pas bien compris votre deuxième question. Pouvez-vous la répéter, s’il vous plaît?

LE PRÉSIDENT (traduction)

Oui, Monsieur Budin, voulez-vous répéter votre deuxième question?

M. BUDIN (Italie) (traduction)

Outre toutes les initiatives que vous avez déjà énumérées, estimez-vous utile d’accomplir des actes symboliques de réconciliation, à travers lesquels chacune des parties en présence, et surtout la Serbie bien sûr, assumerait ses propres responsabilités concernant le passé?

M. Sanader, Premier ministre de Croatie (traduction)

Oui. Je crois que la réconciliation doit être telle que chacune des parties elle-même, non seulement pour ces quinze dernières années mais aussi pour toute l’histoire européenne du passé, du XXe siècle... Je voulais répondre en italien, mais je ne trouve pas les mots. Disons que je suis d’accord avec ce que vous avez dit; il faut comprendre que, en Croatie, dans les pays voisins et dans toute l’Europe, la population ressent le besoin d’oublier le passé mais sans l’effacer; il faut, en d’autres termes, clore le chapitre du passé et se concentrer sur l’avenir de l’Europe.

Mme AZEVEDO (Portugal)

Monsieur le Premier ministre, vous avez fait un exposé clair et complet de la situation en Croatie. Toutefois, pouvez-vous nous donner davantage de détails sur le volet économique, et notamment l’économie de marché, autre critère très important qui a été défini à Copenhague?

M. Sanader, Premier ministre de Croatie (traduction)

Merci de votre question, Madame Azevedo. Le bilan de l’économie croate ne répond pas totalement à nos espérances, mais nous jouissons, depuis 1993, d’une stabilité macroéconomique. Le commissaire Verheugen a déclaré devant le Parlement européen que la Croatie est un pays doté d’un environnement macroéconomique et d’un système monétaire stables, ce qui en fait un pays beaucoup plus avancé que d’autres candidats à l’adhésion à l’Union européenne.

Nous connaissons néanmoins certains problèmes; un fort taux de chômage, un déficit budgétaire excédant la limite fixée par l’Union européenne et une dette étrangère toujours croissante que nous tentons d’honorer. En dépit de ces difficultés, la Croatie est bien placée pour satisfaire sur le plan démocratique aux critères de Copenhague – selon l’acquis communautaire – mais aussi pour parvenir à une certaine stabilité économique. Dans nos négociations avec l’Union européenne, nous montrerons que l’économie croate deviendra compétitive une fois que nous aurons rejoint l’Union européenne. Je demeure optimiste et convaincu que nous pouvons concurrencer les économies les plus avancées de l’Union européenne et nous nous y préparons.

M. BERISHA (Albanie) (traduction)

Je félicite M. le Premier ministre de la Croatie pour son discours et plus particulièrement pour ce qu’il a réalisé en quatre mois. Il a pris des mesures concrètes en vue d’engager un processus de réconciliation. Considérant que la Croatie avait subi une agression, le Premier ministre a pris des mesures décisives.

Ma question concernant les Accords de Dayton – dont nous avons déjà parlé – n’a plus lieu d’être. Je réitère mes remerciements au Premier ministre pour son discours.

Mme HADZIAHMETOVIC (Bosnie-Herzégovine) (traduction)

Je saisis l’occasion de féliciter le Premier ministre Sanader pour sa célérité et la manière dont le Gouvernement croate a dirigé le pays au cours de ces dernières années. Vous avez évoqué la concurrence dans votre région. Comment envisagez-vous les relations avec vos voisins à la suite de vos nouveaux engagements?

M. Sanader, Premier ministre de Croatie (traduction)

Je répondrai que nous poursuivrons la stratégie européenne. En acceptant cet avis et en renforçant le statut du pays, la Croatie plaidera pour l’adhésion de la Bosnie- Herzégovine à l’Union européenne. Nous ferons de même pour tous nos voisins. Nous militerons aussi en faveur de l’Europe dans notre voisinage. Nous pensons que l’Union européenne a envoyé un signal clair à tous les pays de notre région: chaque pays peut accomplir des progrès semblables sur la voie de l’adhésion à l’Union européenne, non seulement en appliquant et en remplissant les critères de Copenhague, mais aussi en partageant les valeurs européennes. Au vu de ce nouvel avis positif, nous pouvons prôner l’adhésion de nos voisins – Bosnie-Herzégovine et Serbie- Monténégro – à l’Union européenne et défendre nos opinions au sein de l’Union européenne.

M. FIGEL’ (Slovaquie) (traduction)

Merci, Monsieur le Président. Monsieur le Premier ministre, permettez-moi de vous adresser nos félicitations, non seulement pour l’avis, mais aussi pour l’évolution de votre pays et, notamment, pour le dynamisme, le climat social et le consensus que l’on peut y constater – je m’y suis rendu la semaine dernière. il vous faut conforter ces avancées, que cela concerne les réformes internes, les relations extérieures ou l’intégration européenne – et vous pouvez compter sur le soutien et la sympathie de la Slovaquie. Ma question est la suivante: dans quelle mesure ce climat social, ce dynamisme et ce consensus sont-ils partagés par les partis politiques et par le grand public?

M. Sanader, Premier ministre de Croatie (traduction)

Merci de votre question, Jan. Laissez-moi tout d’abord vous complimenter, vous et votre pays, pour le succès historique que représente votre adhésion à l’Otan et à l’Union européenne. J’ai eu l’honneur d’assister, avec votre Premier ministre et les Premiers ministres de sept des nouveaux pays adhérents de l’Otan, aux célébrations qui ont eu lieu à Washington. Avant de répondre directement à votre question, permettez-moi d’abord de dire que la Slovaquie est un exemple de la manière dont un pays peut rapidement et brillamment rejoindre ces deux organisations de premier plan. Lorsque des journalistes de l’Europe entière m’ont demandé combien de temps il faudrait à la Croatie pour conclure les négociations avec l’Union européenne, je n’ai eu aucun mal à leur répondre: je cite toujours l’exemple de Jan Figel’ et de Mikulas Dzurinda, qui ont beaucoup fait pour leur pays. Votre question me donne l’occasion de vous réitérer nos félicitations.

Pour répondre à votre question, il existe en Croatie, grâce à Dieu, un consensus général tant dans les différents partis politiques, de gauche comme de droite, qu’au sein de la population. Vous l’avez dit, il importe de préserver cet élan. Par exemple, il y a 30 % d’écart entre le soutien accordé par la population à l’Union européenne et celui accordé à l’Otan. 80 % de la population est favorable à l’adhésion à l’Union européenne et 50 % seulement à l’Otan. Il en a peut-être été de même dans d’autres pays qui ont rejoint l’Otan, raison pour laquelle nous devons davantage sensibiliser la population à cette organisation. En revanche, il n’y a pas vraiment lieu de faire campagne pour l’Union européenne, mais nous sommes tout à fait d’accord avec vous sur la nécessité de conserver cette dynamique.

Dans les mois à venir – six peut-être – nous comptons sur le Conseil pour qu’il fixe une date vers la fin de l’année en cours ou au début de 2005. Nous espérons être en mesure de suivre votre exemple et de négocier tous les chapitres de l’acquis communautaire en quelques années, tout en sensibilisant davantage encore l’opinion, en lui expliquant et en faisant valoir les valeurs européennes et les raisons pour lesquelles la Croatie devrait devenir membre à part entière de l’Union européenne, même si nous bénéficions déjà de 76 % à 80 % du soutien de la population dans tous les domaines.

M. CEKUOLIS (Lituanie) (traduction)

Monsieur le Premier ministre, la délégation parlementaire lituanienne se joint aux félicitations qui vous ont été adressées aujourd’hui au sein de l’hémicycle. Ma question a trait à vos affaires économiques intérieures. Quelle est la position de votre gouvernement sur l’accélération attendue du processus de privatisation en Croatie? Avez-vous l’intention de privatiser l’une ou l’autre infrastructure dans un avenir proche?

M. Sanader, Premier ministre de Croatie (traduction)

Merci de votre question et de vos félicitations. Puis-je à mon tour vous féliciter de la réussite historique que représente votre adhésion à l’Otan et à l’Union européenne? Je félicite également tous les autres pays Baltes.

La privatisation est pour moi comme pour mon gouvernement et l’ensemble de la population croate un processus d’une importance capitale. En raison des années de guerre, nous avons pris du retard et nous nous trouvons malheureusement dans une position différente de celle d’autres pays en transition comme le vôtre, la Slovaquie, la République tchèque, la Pologne, la Hongrie et la Slovénie. A cause de la guerre, de cette terrible agression et de l’occupation de la Croatie, nous avons perdu cinq, six, voire sept ans – qui sait combien? –, pas seulement pendant la guerre, mais après aussi, car il a fallu reconstruire et réhabiliter de nombreuses régions. Aujourd’hui, le processus de privatisation est en bonne voie. Nous privatisons certaines compagnies et, nous inspirant de cas similaires en Irlande, aux Etats-Unis et en Finlande, nous proposons soit une privatisation directe soit, dans certains secteurs, un partenariat entre secteur public et secteur privé. Cela signifie que, si quelqu’un souhaite aujourd’hui s’associer à une entreprise aux côtés de l’Etat, d’ici quelques années – si le projet réussit – nous serons en mesure de privatiser. Même dans ce schéma, l’objectif final reste la privatisation de l’entreprise, mais, en optant pour un partenariat public/privé, nous pensons parvenir à une privatisation plus rapide et mieux réussie.

M. JARAB (République tchèque) (traduction)

Monsieur le Premier ministre Sanader, permettez-moi de vous féliciter pour l’évolution positive de votre pays et de vous offrir mon soutien pour votre adhésion à l’Union européenne. L’autonomie des universités est l’une des exigences primordiales de la Magna Charta Universitatum de Bologne, dont l’université de Zagreb est signataire. J’ai néanmoins pu constater, lors de mes deux visites à l’université en tant que membre d’un groupe d’experts consultants, que, au vu des documents juridiques en vigueur, l’autonomie de l’université est sensiblement réduite par la division de l’institution en trente facultés autonomes, qui bénéficient du statut d’entité légale et du droit de négocier directement leur budget avec le ministère. Cette fragmentation ne constitue-t-elle pas un obstacle juridique superflu, empêchant votre plus grand établissement d’enseignement supérieur d’exploiter son plein potentiel?

M. Sanader, Premier ministre de Croatie (traduction)

En premier lieu, je vous remercie de vos félicitations et vous complimente à mon tour pour vos succès, comme je l’ai fait pour les autres pays rejoignant l’Union européenne et l’Otan. Dans votre cas, je parle essentiellement de l’Union européenne; en effet, vous êtes membre de l’Otan depuis déjà quelques années.

Nous sommes tout acquis au processus de Bologne et il n’y a pas lieu de le remettre en cause. L’université de Zagreb est totalement autonome et aucun gouvernement ne peut interférer dans ses décisions. La pleine autonomie a été accordée à l’université et elle sera préservée.

M. TOSHEV (Bulgarie) (traduction)

Merci, Monsieur le Président. Monsieur le Premier ministre, bienvenue à l’Assemblée du Conseil de l’Europe et félicitations pour votre succès électoral. Je vous souhaite un mandat fécond en tant que Premier ministre de la Croatie et vous assure de notre soutien dans l’évolution européenne de votre pays. Ma question concerne le contrôle civil exercé sur les services de sécurité. Quels progrès avez-vous jusqu’ici réalisés en ce domaine et quels sont vos engagements en la matière?

M. Sanader, Premier ministre de Croatie (traduction)

Je vous remercie de vos félicitations et de votre soutien. Nous entretenons des relations bilatérales intensives et très dynamiques. Hier, nos deux ministres de l’Intégration européenne ont signé un accord de coopération à Zagreb. Permettez-moi de déclarer sans ambages que, en Croatie, une loi relative aux services de sécurité a permis de créer une commission de particuliers indépendants du parlement. Nous disposons donc d’une commission parlementaire, mais également d’une commission de citoyens – des personnalités marquantes de la vie publique croate – qui contrôlent l’ensemble du système de sécurité. Tout cela se fait dans la transparence et le respect des normes européennes les plus rigoureuses. La loi a été votée sous le précédent gouvernement et certaines initiatives visent aujourd’hui à la modifier et à l’améliorer, mais nous tenons à la plus grande transparence dans le contrôle de la société civile.

LE PRÉSIDENT (traduction)

Voilà qui met fin aux questions posées à M. Sanader. Je le remercie chaleureusement, au nom de l’Assemblée, pour son discours et ses remarques. Je remercie les ministres et hauts fonctionnaires qui l’ont accompagné. Merci d’être venus. Tous nos vœux vous accompagnent.