Valdas

Adamkus

Président de la Lituanie

Discours prononcé devant l'Assemblée

mercredi, 27 janvier 1999

Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, c’est avec beaucoup de plaisir que je saisis l’occasion de prendre la parole devant cette éminente Assemblée. Depuis cinquante ans, le Conseil de l’Europe a contribué, par son esprit démocratique et son engagement envers les principes des droits de l’homme, du pluralisme et de l’Etat de droit, à améliorer le respect dû à la personne humaine, à la démocratie et au droit, et il en a fait les valeurs fondamentales de l’Europe contemporaine.

Durant ses cinquante années d’activité, le Conseil d’Europe est devenu un forum international reconnu dans le monde entier qui, par ses idées et ses réalisations concrètes, a contribué sensiblement à l’élaboration et à l’application de critères humanistes communs à l’Europe. Il n’est donc pas étonnant que l’Organisation, qui réunissait au départ quelques pays d’Europe occidentale, se soit aujourd’hui ouverte à la quasi-totalité des pays européens.

Je saisis cette occasion pour féliciter le Président nouvellement élu de l’Assemblée parlementaire et lui adresser tous mes vœux dans ses nouvelles fonctions. Je voudrais aussi rendre hommage à la Présidente sortante, Mme Leni Fischer, qui a beaucoup œuvré pour renforcer l’image de l’Assemblée et celle de l’ensemble de l’Organisation.

Tirant profit de son adhésion au Conseil de l’Europe, la Lituanie a rapidement progressé sur la voie de la création d’une société civile. Pour respecter des obligations contractées il y a six ans, le Gouvernement lituanien a mené des réformes fondamentales visant à consolider les principes de l’Etat de droit, les droits de l’homme et les libertés fondamentales. Le développement du mécanisme de protection des droits et de la dignité de l’homme est une conséquence précieuse de la démocratisation de la Lituanie et une de ses plus belles réalisations.

Dès 1992, les citoyens de la Lituanie ont exprimé leur engagement envers les principes des droits de l’homme et des libertés fondamentales en adoptant une Constitution démocratique, dont les dispositions et l’esprit nous guident dans nos décisions quotidiennes. La Cour constitutionnelle, le système des ombudsmen, mais aussi les tribunaux indépendants dans un système judiciaire réformé, sont des institutions qui veillent à garantir les droits de l’homme et les libertés fondamentales au niveau national. Les nouveaux codes – civil et pénal – ont été soumis au Parlement. La mise en conformité du système juridique national avec les dispositions de la Convention européenne des Droits de l’Homme et autres conventions du Conseil de l’Europe a exigé un travail concret en profondeur, qui a permis à la Lituanie de ratifier ces instruments.

La Lituanie a pris la décision de principe d’intégrer pleinement le système de l’Union européenne, et elle ne cesse de travailler dans cette voie. En 1998, le Parlement lituanien a ratifié la Convention européenne pour la prévention de la torture et des sanctions et traitements inhumains ou dégradants. La ratification de la Charte européenne de l’autonomie locale figure à Tordre du jour du parlement pour la session de printemps de cette année.

Comme l’a dit le Président de l’Assemblée, le principal test de la maturité de la société lituanienne a été, en 1998, la décision d’abolir la peine de mort, qui faisait l’objet d’un moratoire depuis 1995. De cette tribune, je déclare formellement et officiellement aujourd’hui que la peine capitale a été abolie en Lituanie. Cela ne s’est pas fait facilement, je dois le dire. Une grande partie de l’opinion publique y était opposée et, pendant trois ans, le pays a connu des débats extrêmement animés. A l’heure actuelle, les mentalités évoluent en Lituanie, mais il faudra encore du temps pour convaincre les sceptiques que les sanctions doivent être un instrument de rééducation et de prévention, et non une forme de vengeance.

Cependant, la société n’a pas contesté la décision de la Cour constitutionnelle selon laquelle la peine de mort était contraire à la Constitution adoptée par les citoyens eux-mêmes. Ce fait démontre l’engagement des Lituaniens envers les droits de l’homme et envers les principes de l’Etat de droit. Après avoir signé le Protocole n° 6 de la Convention européenne des Droits de l’Homme il y a quelques jours, la Lituanie le ratifiera dans un proche avenir, apportant ainsi la preuve qu’elle respecte les obligations internationales qu’elle a contractées.

Entre-temps, la Lituanie est confrontée à une tâche importante: poursuivre la réforme de son système juridique et, pour y parvenir, nous envisageons de faire appel aux instruments du Conseil de l’Europe et à la précieuse expérience de ses Etats membres pour réformer les institutions d’application de la loi, les prisons et les mécanismes de prévention du crime. Je suis persuadé que la coopération active avec les organes du Conseil de l’Europe facilitera la mise en œuvre de cette réforme de fond qui renforcera la confiance du public en la justice, envers le droit et, de ce fait, en la démocratie. La confiance des citoyens dépend, pour une part non négligeable, de la façon dont les pouvoirs publics combattent les fléaux sociaux; parmi ceux-ci, la corruption est le plus complexe et le plus difficile à déloger. La Lituanie est déterminée à prendre des mesures rigoureuses pour lutter contre cette gangrène; c’est pourquoi nous nous félicitons de l’initiative prise par le Conseil de l’Europe d’élaborer et d’adopter la Convention pénale sur la corruption. Cet après-midi, la Lituanie – je suis heureux de le dire – sera un des premiers pays à la signer.

Le Conseil de l’Europe a pour mission première de veiller à ce que ses hautes exigences soient appliquées par tous les Etats membres et d’aider les nouveaux membres à mener à bien leurs réformes juridiques, politiques et sociales. Le nombre toujours croissant d’Etats membres oblige l’Organisation à s’adapter à ses nouvelles tâches et à son nouvel environnement. La Lituanie se félicite du travail accompli par le Comité des sages et attend les décisions définitives qui seront prises sur les réformes à entreprendre lors de la prochaine session du Comité des Ministres, à Budapest.

Le Conseil de l’Europe a, selon nous, démontré son efficacité en suivant de près le respect des engagements contractés par les Etats membres. Outre les obligations d’ordre général, l’Assemblée a élaboré, à l’intention de chaque nouveau membre, des obligations spécifiques qu’il doit respecter sans condition au moment de son adhésion. Le système de suivi a donc fait ses preuves; il est important de continuer à l’appliquer.

La Lituanie attache une attention particulière aux engagements auxquels elle a souscrit, et elle attend des autres Etats membres qu’ils fassent de même. Elle figure parmi les tout premiers pays à avoir fait l’objet de procédures de suivi. L’Assemblée parlementaire a reconnu les progrès accomplis, ainsi que la nature irréversible des réformes en cours, en refermant le dossier lituanien en 1997.

De ce point de vue, il serait utile de renforcer la coopération entre l’Assemblée parlementaire, le Comité des Ministres et le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux de l’Europe. La nécessaire procédure de suivi pourrait en effet trouver des prolongements dans le cadre des Activités pour le développement et la consolidation de la stabilité démocratique et du Programme intergouvememental d’activités de l’Organisation.

L’an dernier, à la veille de son 50e anniversaire, le Conseil de l’Europe a mené à bien une réforme majeure dans le domaine de la protection des droits de l’homme en créant une Cour européenne unique. Cette réforme permet d’accroître l’efficacité du mécanisme de protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales, en simplifiant les procédures et en assurant un meilleur accès des citoyens au système. Elle renforce aussi l’autorité de l’Organisation et sa crédibilité auprès de l’opinion publique. Nous sommes fiers qu’un juge lituanien siège à la Cour. En même temps, nous sentons d’autant plus la responsabilité qui nous incombe de défendre et d’appliquer les principes fondamentaux du Conseil de l’Europe.

La nouvelle Cour unique des droits de l’homme marque à sa façon l’avènement du XXI' siècle et la constitution d’une Europe sans clivages qui partage une même conception de la démocratie. Elle ouvre aux Européens de toute nationalité la possibilité de défendre leurs droits devant une cour indépendante et démocratique, mais elle témoigne aussi des progrès de la stabilité et de la confiance que l’on observe sur le continent. Le poste de Commissaire aux droits de l’homme complétera et renforcera ces mécanismes. En créant une Europe nouvelle et une démocratie européenne, en assurant la stabilité sociale, les gouvernements actuels relèvent de nombreux défis qui exigent une étroite coopération entre les organisations internationales, sur la base d’intérêts communs et de compétences distinctes. Je pense à la coopération du Conseil de l’Europe avec l’Union européenne, l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), l’Otan, l’Organisation des Nations Unies et certains organes régionaux de l’Europe, tels que le Conseil des Etats de la mer Baltique.

Il y a lieu de noter que les institutions européennes tendent de nos jours à être complémentaires dans l’édification de la sécurité et de la stabilité démocratiques. En même temps, tout Etat européen qui aspire à tirer pleinement parti de ces structures juge essentiel de rejoindre leurs structures opérationnelles. La Lituanie souhaite intégrer rapidement l’Union européenne et l’Otan, dont la Lituanie partage les valeurs, ces valeurs sur lesquelles le Conseil de l’Europe a construit son œuvre.

Mesdames, Messieurs, parmi les principales questions inscrites à l’ordre du jour de la présente session de l’Assemblée parlementaire figure la création d’une Europe sans clivages. Cette question est d’autant plus importante que le Conseil poursuit jour après jour l’édification de la «maison commune européenne».

Pour créer une Europe unie, il importe de renforcer la confiance entre les Etats. Le Conseil de l’Europe, en offrant un cadre à des débats politiques multilatéraux, aide ses membres à mieux se connaître et se comprendre. La Lituanie essaie, de son côté, de prendre des initiatives pour favoriser de bonnes relations avec ses voisins, dans le plus pur respect du Conseil de l’Europe – initiatives qui démontrent ainsi leur efficacité. C’est un des grands objectifs de notre politique étrangère; en entretenant de bonnes relations avec ses voisins, la Lituanie défend les valeurs européennes au-delà des frontières de l’Europe.

La Lituanie a instauré la stabilité sur son territoire; elle renforce le droit des minorités et développe la coopération transfrontalière. Dans ces domaines, elle dispose aujourd’hui d’une expérience dont d’autres pays peuvent s’inspirer. C’est notamment dans cet esprit qu’a été créé, à Vilnius, l’Institut européen pour les minorités ethniques dispersées. Nous remercions le Conseil de l’Europe d’apporter son soutien à cet institut.

Un autre indicateur de la maturité civique de la Lituanie est l’augmentation du nombre d’organisations non gouvernementales et le renforcement de leur rôle dans la société. Les ONG incitent le gouvernement à prendre en compte la diversité des intérêts qu’elles représentent; souvent aussi, elles s’occupent de domaines où l’Etat n’est pas encore en mesure d’intervenir efficacement. C’est le cas de l’aide sociale, où il est indispensable de pouvoir intervenir rapidement et de pouvoir compter sur l’aide d’institutions financières. Nous nous félicitons que le Conseil de l’Europe dispose de son propre instrument en la matière: le Fonds de développement social. La Lituanie, qui est devenue membre du fonds il y a trois ans, est très satisfaite de la coopération fructueuse qu’elle a instaurée avec cet organisme; elle espère qu’elle s’intensifiera.

Il ne fait aucun doute que chacun des Etats membres du Conseil de l’Europe est déterminé à faire progresser l’esprit démocratique qui règne dans cet hémicycle. Je suis convaincu que tous, y compris la Lituanie, s’associeront aux efforts qui seront entrepris pour améliorer encore le fonctionnement de notre Organisation.

Dans le même temps, le Conseil de l’Europe doit tout mettre en œuvre pour que ses valeurs puissent s’enraciner profondément dans chaque pays européen. Il est de notre devoir d’aider les pays qui ne sont pas encore membres du Conseil à satisfaire aux critères d’adhésion. Tous ces pays, j’en suis convaincu, rejoindront notre Organisation dès lors qu’ils pourront s’engager à défendre les droits de l’homme, la démocratie pluraliste et la prééminence du droit. Nous constatons avec satisfaction que le Conseil de l’Europe poursuit ses objectifs sans relâche, comme le montre le débat en cours sur la candidature de la Géorgie. Nous félicitons la Géorgie et nous sommes persuadés que cette sage décision de l’Assemblée parlementaire devrait inciter fortement les responsables politiques de cette partie de l’Europe à s’employer plus énergiquement à construire une société civile démocratique.

Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, je tiens à vous adresser mes meilleurs vœux de succès dans l’entreprise que vous menez en faveur des idéaux démocratiques; puissent-ils continuer d’animer non seulement la vie politique, mais aussi les relations entre les hommes et les peuples. J’espère que mon allocution aura contribué à enrichir ce débat qui donne tout son sens à notre rencontre.

Je vous remercie de votre attention.

LE PRÉSIDENT (traduction)

Je vous remercie beaucoup, Monsieur le Président. Nos membres ont écouté votre allocution avec attention et avec un vif intérêt. Je crois que vous avez indiqué que vous étiez prêt à répondre à quelques questions. Treize membres en tout ont demandé s’ils pouvaient vous poser une question; avec un peu de chance et de concision, nous devrions pouvoir les prendre toutes.

J’ai groupé certaines de ces questions. Le premier groupe de questions a trait à la Lituanie et aux institutions européennes. Tant M. Sinka – votre voisin de Lettonie – et M. Volcic, d’Italie, souhaitent poser des questions.

Je rappelle aux membres que les questions doivent être limitées à trente secondes. Nos collègues sont appelés à poser des questions et non à faire des discours.

M. SINKA (Lettonie) (traduction)

En premier lieu, au nom de la délégation lettonne, je voudrais souhaiter la bienvenue à M. Adamkus au sein de cette auguste Assemblée.

Il est évident que la Lituanie a porté un grand intérêt aux activités du Conseil de l’Europe. Cette attention se maintiendra-t-elle quand elle deviendra membre à part entière de l’Union européenne, ce qui nous l’espérons se produira dans un proche avenir?

M. VOLCIC (Italie) (traduction)

Monsieur le Président, quand votre pays a recouvré son indépendance, on avait l’impression que jamais plus un Russe, jamais plus un communiste n’occuperaient un poste de premier plan. Or, voilà que M. Brazauskas, tout d’abord, puis vous, maintenant, avez été élus, ce qui est, à mon avis, une preuve de la maturité démocratique du pays, un retour à la normale dans un pays démocratique comme les autres.

Dans ce contexte de normalité, je voudrais vous demander ce qu’il en est du problème des minorités; je veux naturellement parler des Russes, mais aussi des Juifs qui constituaient, dans votre pays, Tune des principales communautés mondiales, dont les membres ont été dispersés pendant la seconde guerre mondiale mais qui sont à présent, pour certains d’entre eux, sur le chemin du retour.

M. Adamkus, Président de la Lituanie (traduction)

En réponse à la première question, je voudrais confirmer que j’adhère à un seul et même but. Le Conseil de l’Europe et l’Union européenne se complètent, si bien qu’en soutenir une et s’abstenir d’adhérer à la seconde constituerait la plus grave erreur que nous puissions commettre. La Lituanie continuera, avec la même détermination, à prêter attention au Conseil de l’Europe et à l’Union européenne et à les soutenir. Je crois que nous avons non seulement le privilège, mais le droit, de figurer parmi les pays européens participant à l’édification de l’avenir de l’Europe au sein de toute organisation qui marche dans cette voie. Ma ferme réponse à cette question est donc que la Lituanie coopérera de toutes ses forces avec les membres du Conseil de l’Europe tout en s’attachant à renforcer le potentiel dont elle dispose parmi les membres de l’Union européenne.

Je suis heureux de pouvoir répondre à la question concernant les minorités. Je souhaite préciser ma position. Personnellement, je suis extrêmement sensible au problème des minorités. Je pense qu’en principe toute minorité a le droit de préserver sa culture, d’encourager la fierté nationale et d’offrir à ses enfants la possibilité d’apprendre sa langue et de la pratiquer sur les lieux où ils vivent. J’ai énoncé ce principe maintes fois et je le réitère maintenant devant ce distingué public. La Lituanie respectera les droits des minorités et veillera à ce que chacune d’elles, et non simplement la plus importante, puisse exercer ses droits. Dans le même temps, nous voulons renforcer la loyauté des personnes appartenant à ces minorités en tant que citoyens du pays dans lequel elles vivent. Si seulement nous pouvions tous adhérer à ces règles générales, le monde serait meilleur qu’il ne l’est aujourd’hui.

M. GLIGOROSKI («L’ex-République yougoslave de Macédoine») (traduction)

La nécessité d’établir de meilleures communications et une meilleure coopération entre les pays du nord et de l’est de l’Europe a déjà été affirmée. J’aimerais connaître les vues de la Lituanie sur la réglementation contractuelle et le développement des relations bilatérales avec les pays du sud-est de l’Europe, et notamment avec la République de Macédoine avec laquelle certains des accords fondamentaux entre Etats n’ont pas encore été conclus.

M. Adamkus, Président de la Lituanie (traduction)

Je répondrai en termes généraux. Nous vivons dans un univers où les communications sont désormais si accessibles que la distance ne constitue plus un problème. Quand je parle de l’est et de l’ouest ou du nord et du sud, je n’envisage tout simplement aucune difficulté de communication. Le problème tient plutôt à une attitude d’esprit. Sommes-nous disposés à coopérer, à admettre les problèmes et à échanger des idées? Je crois que la Lituanie édifie une société et vit suivant des règles qui nous permettront d’être un membre actif du continent européen.

Il y a quelques mois, j’ai eu le privilège de rencontrer le Président de Macédoine à Berlin, à une réunion au sommet. Nous nous sommes entretenus de questions qui intéressent nos deux pays et nous étions totalement d’accord à leur sujet. J’admets toutefois que certains des accords entre États n’ont pas encore été conclus. Nous avons transmis quelques propositions à la Macédoine et nous espérons recevoir bientôt une réponse de manière à pouvoir conclure les accords nécessaires pour assurer une active collaboration.

LE PRÉSIDENT (traduction)

Il y a deux questions sur la coopération dans la région de la mer Baltique qui ont été présentées par M. Kelam et M. Iwinski.

M. KELAM (Estonie) (traduction)

En premier lieu, je souhaite la bienvenue à M. Adamkus qui a eu le mérite, tout en vivant en Amérique, de contribuer au maintien de la continuité juridique des Etats baltes durant l’occupation soviétique.

Ma question a trait à l’expérience que M. Adamkus a des problèmes écologiques. J’aimerais avoir son opinion sur les améliorations qui pourraient être apportées à l’état de l’environnement dans la région de la mer Baltique et sur le rôle éventuel du Conseil de l’Europe à cet égard.

M. IWINSKI (Pologne)

Les rapports de la Pologne avec la Lituanie ont un caractère historique particulier. Nous avons vécu 500 ans ensemble dans un même Etat. Aujourd’hui, notre relation spéciale est attestée par l’existence – de caractère unique – de l’Assemblée parlementaire polono-lituanienne.

Ma question a trait à la coopération régionale dans la région de la Baltique. J’aimerais connaître l’avis de M. Adamkus sur les eurorégions telles que Nemunas, Niemen et Baltique. Comment la Lituanie, en sa qualité de présidente actuelle du Conseil des Etats de la mer Baltique, voit-elle l’activité de cette organisation?

M. Adamkus, Président de la Lituanie (traduction)

En réponse à la question de l’estimé représentant de l’Estonie, je puis dire que les questions écologiques dans les pays de la Baltique m’ont personnellement beaucoup préoccupé au cours des vingt-cinq dernières années. Ces préoccupations ont trouvé un cadre institutionnel dans les programmes d’assistance technique de protection de l’environnement des Etats-Unis auxquels j’ai personnellement participé. Les problèmes auxquels nous sommes confrontés aujourd’hui me sont familiers. L’Estonie a assumé un rôle directeur à cet égard et les trois pays ont fait d’énormes progrès. Comparer la situation de 1972 à la situation actuelle équivaut à comparer le jour et la nuit. Il n’en demeure pas moins des problèmes, notamment en mer Baltique. Dernièrement, les gouvernements des Etats-Unis et du Canada ont décidé de mettre à profit l’expérience acquise à l’occasion de travaux de recherche dans les Grands Lacs pour aider la mer Baltique, et ils ont offert un soutien financier aux travaux la concernant. J’espère que ce concours transformera radicalement les conditions existantes.

En réponse à la question du représentant de la Pologne, je peux dire que les améliorations apportées aux rapports entre les deux pays ont une portée historique. Devant cette éminente Assemblée, je puis assurer que la coopération et la compréhension sur les engagements communs conclus entre les deux pays sont meilleures qu’elles ne l’ont jamais été. La Lituanie préside actuellement le Conseil des Etats de la mer Baltique et nous comptons étendre les activités et la participation de tous les pays riverains de la mer Baltique. Nous souhaitons leur active participation et tentons même d’élargir l’idée en invitant d’autres pays intéressés à participer à notre action, peut-être en qualité d’observateurs. L’avenir s’annonce positif. Nous comptons utiliser les six mois pendant lesquels nous exerçons la présidence du conseil pour promouvoir ces idées et espérons que les présidents à venir poursuivront ce travail.

M. ZHEBROVSKY (Fédération de Russie) (interprétation)

constate que, sous la présidence de M. Adamkus, la politique étrangère de la Lituanie prend un tour délibérément «euro-atlantique». Dans un tel contexte, comment envisage-t-il le futur des relations entre la Russie et la Lituanie?

M. Adamkus, Président de la Lituanie (traduction)

Je puis dire avec fierté que nos rapports avec la Russie bénéficient d’une priorité relativement aux pays voisins. Nous apprécions la bonne relation de travail que nous avons établie. J’ai eu l’occasion de le prouver en m’entretenant directement avec votre Président et votre Premier ministre. Parlant de nos relations, nous sommes convenus que nous avons des rapports de bon voisinage, fondés sur le respect de soi et sur les avantages que les deux pays peuvent retirer d’une collaboration destinée à assurer la sécurité dans notre partie du monde. Le fait que la Lituanie cherche à établir des rapports plus étroits avec l’ouest ne signifie pas que nous nous détournions de nos proches voisins. Nous devons clore le pénible chapitre qu’ont été les cinquante dernières années et poursuivre les relations amicales que nous avons établies entre les deux pays.

M. GLOTOV (Fédération de Russie) (interprétation)

demande ce qui justifie le procès politique qui est fait à MM. Mitsevic et Ivanov, ainsi qu’aux quatorze personnes dont les cas ont été soumis à la sous-commission des droits de l’homme, pour enquête. Qu’en pense M. Adamkus?

M. Adamkus, Président de la Lituanie (traduction)

Je voudrais préciser ma position. Je crois que la première place devrait être donnée à la primauté du droit dans un pays et je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour y veiller. Je suis convaincu que nous satisfaisons aux critères. Je peux vous rassurer, ainsi que l’Assemblée, que nous n’avons pas de prisonniers politiques qui aient été traduits en justice ou condamnés à cause de leurs convictions. Je ne crois pas en une telle approche. Nous avons connu par le passé une époque tragique où des individus et des nations en Europe – et dans le monde entier – ont souffert pour leurs convictions. Cet état de choses ne saurait être toléré et ne le sera pas en Lituanie. Je vous en donne ma parole.

Parce que nous sommes un Etat de droit, aucun gouvernement ne peut intervenir dans la procédure judiciaire. En tant que président, je peux observer la procédure, mais je ne peux pas l’influencer. Je puis toutefois vous assurer que les cas particuliers que vous avez mentionnés ne sont pas politiques. Nous devons laisser les tribunaux et les juges déterminer si la loi lituanienne a été violée et je ne peux faire de commentaire à ce sujet tant que cela n’a pas été fait.

LE PRÉSIDENT (traduction)

Je crains que nous ne soyons à court de temps, mais nous pouvons laisser M. Muehlemann poser une question.

M. MÜEHLEMANN (Suisse) (traduction)

Monsieur le Président, la Lituanie occupe une importante position stratégique entre l’Ouest et l’Est – tout comme le Bélarus, mais ce dernier est presque totalement isolé en raison de l’entêtement de son président. Que devrait faire M. Loukachenko pour que son pays retrouve au moins son statut d’invité spécial auprès du Conseil de l’Europe?

M. Adamkus, Président de la Lituanie (traduction)

Ma réponse sera fondée sur un entretien personnel avec le Président du Bélarus. Il a, dans le domaine politique, des idées qu’il tente de mettre en œuvre dans son pays. La frontière la plus longue de la Lituanie est sa frontière avec le Bélarus et nous menons notre politique étrangère de manière à laisser au Bélarus la possibilité de communiquer et de coopérer à son gré avec le reste du monde. Nous essayons d’influencer l’attitude du président, mais le problème du Bélarus est qu’il ne se presse pas suffisamment d’introduire des droits de l’homme fondamentaux. Si la direction actuelle du Bélarus acceptait cette notion, personne n’aurait d’objection à la participation active de son pays.

Je crois pouvoir dire que chaque membre de cette Organisation pense que le Bélarus sera le bienvenu s’il accepte les principes que défend l’Organisation.

LE PRÉSIDENT (traduction)

Je vous remercie beaucoup, Monsieur le Président, pour la manière franche et ouverte avec laquelle vous avez répondu à nos questions.