Kjell Magne

Bondevik

Premier ministre de Norvège

Discours prononcé devant l'Assemblée

mercredi, 23 juin 2004

Membre distingué de l’Assemblée parlementaire, c’est pour moi un grand plaisir que de revenir à l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe. J’en ai été membre par le passé, comme l’a dit le Président, et je garde de nombreux amis parmi vous. J’ai beaucoup de souvenirs heureux de mes années à l’Assemblée et je continue à suivre vos travaux avec un vif intérêt.

Beaucoup de personnes, en parlant de l’Europe, pensent souvent uniquement à l’Union européenne. Or le Conseil de l’Europe et l’OSCE sont extrêmement importants parce que leurs travaux sont axés sur des domaines des politiques auxquels l’Union européenne ne donne pas un grand poids – des domaines qui approfondissent la compréhension entre les pays et les peuples de notre continent. En outre, certains États membres de ces organisations n’appartiennent pas, pour l’instant, à l’Union européenne. Tel est le cas, au Conseil de l’Europe, pour vingt pays. De ce fait, le Conseil est un lieu de rencontre particulièrement utile entre démocraties établies et nouvelles, et une enceinte primordiale pour favoriser une compréhension commune des valeurs indispensables au développement de la démocratie et des droits de l’homme.

En tant que membre fondateur du Conseil de l’Europe, la Norvège croit fermement en l’Organisation et soutient avec force ses activités. Au cours de notre présidence du Comité des Ministres, nous mettrons tout en œuvre pour la renforcer encore et l’aider à s’adapter à des réalités nouvelles et mouvantes. Il me paraît indispensable que le Conseil de l’Europe soit ouvert à la réforme et au changement, de telle sorte qu’il puisse remplir ses tâches aussi efficacement que possible. Nous devons nous concentrer sur les valeurs et les domaines d’expertise essentiels de l’Organisation.

Tout d’abord, il y a lieu d’accorder toute notre attention à la Cour européenne des Droits de l’Homme. Cet organe a été et reste l’institution déterminante pour les efforts européens en vue de faire progresser les droits de l’homme. La réforme est vitale pour garantir l’efficacité de la Cour. Nous devons engager une action immédiate visant à introduire les changements nécessaires. Cette efficacité à long terme de la Cour ne peut être assurée que si nous, les États membres, faisons des efforts substantiels pour réduire sa charge de travail. C’est pourquoi je vous encourage également, en votre qualité de parlementaires, à prendre l’initiative des évolutions pertinentes au niveau national.

Deuxièmement, le Conseil de l’Europe doit chercher à renouveler et à renforcer ses relations avec d’autres organisations. Nous avons beaucoup à gagner à une amélioration de la coordination avec l’OSCE et l’Union européenne. Il nous faut une coopération et une coordination effectives, et non une concurrence stérile. Un dialogue constructif avec les autres organisations est la condition de notre réussite. En même temps, nous donnerons plus de visibilité au Conseil de l’Europe et à ses activités, ce qui attirera davantage l’attention sur celui-ci.

En troisième lieu, et ce point me tient à cœur, nous avons besoin du dialogue et, en particulier, du dialogue entre cultures et entre religions. L’Histoire nous a montré que les nations et les civilisations sont interdépendantes. Une société uniforme ne peut durer. La tolérance et l’échange d’idées, de produits et de personnes sont des facteurs clés du changement, du développement – et de la paix. Nous ne devons pas laisser les différences de cultures ou de croyances prendre une direction négative et dégénérer en conflit.

Les mouvements extrémistes et populistes exploitent la crainte provoquée chez certains par «ceux qui ne sont pas comme nous». Nous pouvons en observer les conséquences sous la forme du terrorisme et des violences à motivation raciale. Pour combattre plus efficacement le terrorisme, il nous faut en connaître les racines. Pour moi, le fanatisme et la haine sont de ces racines. Ils sont souvent le résultat de l’humiliation et de la peur, qui viennent de l’ignorance, de la frustration et d’une identité mal assurée. Les extrémistes essaient souvent de répandre un message de haine au nom de Dieu. Pourtant, rien n’est plus loin de la foi que la haine. Au contraire, ceux qui ont une foi solide sont souvent mieux à même de comprendre et de respecter les convictions d’autrui. Cela s’appelle la tolérance.

Je suis convaincu que, en examinant les similitudes et les différences entre les religions, nous pourrons identifier des valeurs communes, comme le respect de ce qui est sacré, de la dignité humaine et de la réconciliation.

Au cours de certains de mes voyages à l’étranger, j’ai rencontré les représentants au plus haut niveau de différentes religions. Je l’ai fait à Sarajevo, à Jérusalem, à Bethléem, au Caire, à New York et à Genève. Dans de nombreux conflits, la religion est considérée comme une cause du problème. A mon avis, ce devrait être l’inverse. Nous devons faire en sorte que la religion soit une partie de la solution. Une relation harmonieuse entre religions ne résout pas, par elle-même, les conflits, mais elle peut, dans certaines régions où l’hostilité est omniprésente, ouvrir la voie à des solutions politiques, pacifiques et durables. Cette remarque s’applique non seulement au Proche-Orient et aux Balkans, mais aussi à l’Afrique et à d’autres continents.

Le Conseil de l’Europe s’attache à promouvoir la démocratie, les droits de l’homme et la bonne gouvernance dans notre partie du monde. Nous avons un ensemble unique de valeurs communes – la dignité humaine, la primauté du droit, le respect mutuel et la réconciliation. Ces valeurs sont vitales pour contribuer à la réconciliation et pour prévenir les conflits.

En tant qu’hommes politiques, nous devons tout mettre en œuvre pour favoriser et protéger ces valeurs essentielles. En tant que responsables politiques nous avons le devoir d’adopter une approche humaniste pour abattre les barrières religieuses et culturelles qui ont été érigées entre les peuples, les sociétés et les individus. La responsabilité nous incombe d’édifier des ponts entre les différentes confessions et cultures, et de promouvoir le dialogue et la tolérance.

La diversité culturelle a toujours existé en Europe, mais de nos jours, en cette époque de mondialisation, tout change plus vite que jamais auparavant. Même des pays comme le mien, qui avaient encore naguère une population homogène, deviennent de plus en plus multiculturels. Cette évolution offre de grandes possibilités, mais nous oblige à prendre des initiatives pour promouvoir la compréhension mutuelle.

Quatrièmement, d’innombrables enfants sont partout élevés dans une atmosphère de haine et d’intolérance. D’innombrables enfants sont privés de leurs droits de l’homme fondamentaux. Veillons à ce que les enfants connaissent leurs droits. Enseignons à nos enfants que l’Europe milite pour l’harmonie, non pour les conflits; pour la coopération et la coexistence, non pour l’aliénation et l’hostilité.

Les enfants sont notre avenir. Il nous faut promouvoir de saines valeurs dans nos écoles. Celles-ci doivent favoriser la tolérance et la compréhension, être un moyen de combattre la haine et la crainte de l’autre. Il faut qu’à l’école les élèves apprennent la compassion et la considération des autres.

Le pasteur et écrivain anglais Dean Inge – je suis moi-même pasteur – l’a exprimé en ces termes: «Le but de l’éducation est la connaissance non pas des faits, mais des valeurs.» L’éducation est capable d’améliorer concrètement les choses dans nos sociétés. Selon les paroles de l’écrivain américain James Baldwin, que je cite: «Le paradoxe de l’éducation réside précisément en ceci que lorsqu’on commence à devenir conscient, on commence du même coup à examiner la société dans laquelle on est éduqué.»

Il importe de promouvoir l’information systématique sur la manière dont la connaissance d’autres cultures et religions peut contribuer au développement de la compréhension et du respect mutuels. Le Conseil de l’Europe a un rôle important à jouer dans ces efforts. Je propose que ce soit un des thèmes importants des préparations du prochain sommet du Conseil de l’Europe.

Il y a quinze jours, nous avons accueilli à Oslo une conférence du Conseil de l’Europe sur la dimension religieuse de l’éducation interculturelle. En discutant des analogies et des différences entre les diverses religions, nous serons à même d’identifier des valeurs communes telles que le respect de la dignité humaine, de la réconciliation et de l’amour du prochain, et la bonne gouvernance.

En 1997, nous avons introduit dans les écoles norvégiennes la matière «Chrétienté et éducation religieuse et morale générale». Cette matière a pour but de faire connaître et comprendre d’autres religions et croyances aux élèves. Elle aidera à transmettre des traditions et à sauvegarder l’identité nationale, ainsi qu’à jeter des ponts favorables au développement de la compréhension, de la tolérance et du dialogue. Il s’agit par là de contribuer à la tolérance mutuelle et au respect d’autres opinions et croyances que les siennes.

Chaque société doit veiller continuellement à ce que le respect et la confiance mutuels soient les valeurs qui déterminent chaque aspect de la société: culture, relations sociales, rapports interethniques et religion. Au niveau international, cet objectif est à atteindre au moyen de discussions, d’accords et d’échanges d’informations.

Grâce à l’éducation, nous pouvons jeter des ponts entre les croyances et les cultures. Grâce à elle, nous pouvons assurer la compréhension et le respect de toutes les religions et cultures. Par conséquent, attribuons aujourd’hui au Conseil de l’Europe un rôle de premier plan dans ces efforts.

Mon cinquième et dernier point est la nécessité de travailler ensemble et de construire des réseaux. Depuis la dernière fois que la Norvège a présidé le Comité des Ministres – c’était en 1989, et j’étais alors ministre des Affaires étrangères de Norvège -, le nombre de pays membres du Conseil de l’Europe a doublé. On a vu se mettre en place tout un réseau de coopération reposant sur près de 200 conventions de l’Organisation. Ces textes traitent d’un grand nombre de domaines tels que la coopération juridique, la cohésion sociale, les droits de l’homme, les médias, l’éducation, la santé, la culture, la jeunesse, la coopération locale et l’environnement. Autrement dit, ce vaste réseau assure les droits fondamentaux de 800 millions de citoyens.

La force de cette coopération tient à ce qu’elle nous permet de contribuer à améliorer les normes par l’échange de vues, la concertation et la négociation. Pour mener à bien une telle tâche, le Conseil de l’Europe peut compter sur un grand nombre de ministres et d’experts des pays membres.

Il est rassurant que nous disposions de vigoureux organes élus pour soutenir les travaux du Conseil de l’Europe. Aussi bien l’Assemblée parlementaire que le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l’Europe comptent, aux yeux de la Norvège, parmi les locomotives de notre Organisation. Je mentionnerai, à cet égard, l’amélioration des lignes directrices à l’attention des secteurs intergouvemementaux du Conseil de l’Europe et les initiatives importantes prises en ce qui concerne les nouvelles conventions et les principales questions d’actualité. De même, les activités de suivi de l’Assemblée parlementaire sont largement respectées et appréciées.

Je suis fermement convaincu que le Conseil de l’Europe a un rôle unique à jouer dans la prévention des conflits et la création de la stabilité.

En résumé, renforçons la Cour européenne des Droits de l’Homme, tout en fournissant des efforts substantiels pour réduire son volume de travail. Renouvelons et consolidons la coopération avec d’autres organisations internationales, telles que l’OSCE et l’Union européenne. Prenons des initiatives nouvelles et audacieuses pour assurer le dialogue entre cultures et religions. Et attachons-nous en particulier à l’éducation. Enfin, construisons des réseaux solides et efficaces.

Chers membres de l’Assemblée, vous pouvez compter sur notre soutien. Durant notre présidence du Comité des Ministres, nous ferons le maximum pour aider à renforcer cette Organisation, ainsi que les valeurs et les normes qu’elle représente.

LE PRÉSIDENT (traduction)

Merci infiniment, Monsieur le Premier ministre, pour ce discours extrêmement intéressant et édifiant. Certains membres de l’Assemblée ont exprimé le souhait de vous poser quelques questions. Je leur rappelle que ces questions ne devront pas excéder trente secondes.

Il s’agit pour nos collègues de formuler une question et non de prononcer un discours. J’accorderai à chacun la possibilité de poser deux questions supplémentaires. La parole est à M. Atkinson, pour la première question.

M. ATKINSON (Royaume-Uni) (traduction)

Monsieur le Premier ministre, vous venez d’évoquer en termes émouvants votre visite à Bethléem et à Jérusalem. Comme vous le savez, l’initiative d’Oslo lancée il y a près de dix ans a débouché sur la paix au Moyen-Orient. N’est-il pas temps aujourd’hui de recourir à une nouvelle initiative d’Oslo, de manière à engager la feuille de route du Moyen-Orient sur la voie de la paix?

M. Bondevik, Premier ministre de Norvège (traduction)

La Norvège a effectivement contribué au processus de paix qui a conduit aux Accords d’Oslo. Mais la situation est à présent différente. Il existe une feuille de route pour le Moyen-Orient, qui a été mise en place par le quartette que constituent les Nations Unies, l’Union européenne, la Fédération de Russie et les États-Unis. Je pense que les efforts de paix et de réconciliation entre Israéliens et Palestiniens se sont inscrits essentiellement dans le cadre de ce quartette. Nous devons engager les parties en présence à suivre cette feuille de route, car celle-ci représente aujourd’hui une série de lignes directrices pour la paix.

Les Accords d’Oslo et la feuille de route sont d’ailleurs assez similaires – les différences entre ces deux documents ne sont guère importantes – mais la seconde est plus détaillée encore que les premiers. La Norvège est prête à contribuer aux efforts de paix et elle s’y emploie. J’ai le sentiment que la Norvège a la confiance des deux parties, ce qui nous permet de jouer un rôle dans ce processus. C’est précisément ce que nous faisons en ce moment par l’intermédiaire de la présidence du Groupe de liaison ad hoc – le groupe des donateurs – pour la Palestine. Si les Israéliens doivent se retirer de la bande de Gaza, comme ils s’y sont engagés, il est primordial que l’ensemble des pays les encouragent en ce sens. Nous constaterons alors que le groupe de liaison ad hoc jouera un rôle plus important encore pour l’amélioration des conditions de vie sociales et économiques, notamment dans la bande de Gaza.

L’initiative devrait à présent consister à ramener les parties à la table des négociations. L’action du quartette est déterminante, car il lui appartient d’exercer sur elles les pressions nécessaires. La Norvège y contribuera. Nous entretenons des contacts fréquents avec les parties concernées et nous assumerons notre rôle, notamment à la présidence du groupe de liaison ad hoc. Si un accord définitif était conclu, il pourrait être confirmé par le Conseil de sécurité des Nations Unies, ce qui améliorerait et renforcerait la légitimité de la solution négociée à laquelle nous espérons parvenir.

M. ATKINSON (Royaume-Uni) (traduction)

Comme vous le savez, Monsieur le Premier ministre, l’une des questions en suspens au Moyen-Orient est celle du sort des 3,5 millions de réfugiés, dont 1.5 million vit dans des camps sordides, qui alimentent le terrorisme, et pour lesquels la possibilité d’un droit de retour n’est pas réaliste. Savez-vous que cette Assemblée a adopté une résolution qui propose une solution à cette situation, sous la forme d’un fonds d’affectation définitive destiné à financer le futur logement de ces réfugiés? Appuierez-vous ce projet comme une solution à ce problème?

M. Bondevik, Premier ministre de Norvège (traduction)

C’est une excellente idée. Je vous concède que le retour de 3.5 millions de réfugiés dans une aussi petite région serait extrêmement difficile à réaliser, mais il s’agit précisément de l’une des questions les plus complexes des ultimes négociations. Il reste en effet à régler le problème des frontières, des réfugiés, des colonies et, bien entendu de Jérusalem – question épineuse entre toutes, qui a fait l’objet de négociations et de discussions à Camp David sous l’égide du Président Clinton. Je me suis entretenu avec le Président Clinton à ce sujet. Ils ont été tout près de parvenir à une solution – plus près encore que bien des gens ne l’imaginent – mais ils ont malheureusement échoué. Ces négociations se sont poursuivies à Taba, sans qu’une solution finale puisse être dégagée.

En ce qui concerne les réfugiés, il me semble qu’ils disposent en principe d’un droit de retour, mais il sera extrêmement difficile de le mettre en pratique pour chacun d’eux. La constitution d’un fonds pour améliorer leur logement est une bonne idée, qui devrait être incorporée dans les négociations finales.

M. BANKS (Royaume-Uni) (traduction)

Monsieur le Premier ministre, l’image que nous avons de la Norvège est celle d’un pays civilisé et prospère, signataire de plusieurs accords internationaux. Cela étant, pourquoi la Norvège poursuit-elle l’abattage des baleines minke au nom de la science, au mépris de la Commission baleinière internationale et de l’opinion mondiale?

M. Bondevik, Premier ministre de Norvège (traduction)

Je suis un fervent défenseur de l’environnement. J’ai d’ailleurs démissionné de mon poste de Premier ministre en 2000 précisément par refus de toute compromission sur une importante question environnementale. La préservation de la diversité biologique des espèces est une priorité de mon gouvernement. Il s’ensuit que nous soutenons énergiquement la protection de toutes les espèces menacées de baleines. Comme vous l’avez dit vous- même, la chasse à la baleine norvégienne est limitée à la population de baleines minke de l’Atlantique Nord. Le comité scientifique de la Commission baleinière internationale a clairement démontré que cette espèce n’était en aucun cas menacée d’extinction.

La politique baleinière norvégienne demeure de ce fait inchangée. Elle se fonde sur la Convention internationale pour la réglementation de la chasse à la baleine et sur le principe du prélèvement durable et des ressources renouvelables et naturelles, dont font partie les baleines. Le gouvernement a récemment présenté au parlement un livre blanc sur la gestion des mammifères marins. Le gouvernement fixe des quotas de chasse sur la base des recommandations scientifiques les plus précises et conformément au dispositif mis en place par la Commission baleinière internationale – la procédure de gestion révisée. Le quota est cette année de 670 baleines. Le gouvernement n’a encore fixé aucun quota pour l’année 2005 ni pour les années à venir. Il sera déterminé en temps voulu en fonction des recommandations scientifiques.

M. BANKS (Royaume-Uni) (traduction)

Je remercie M. le Premier ministre de sa réponse. Il sait parfaitement que la Commission baleinière internationale n’est pas favorable à la chasse scientifique pratiquée par la Norvège. La seule connaissance scientifique élémentaire qu’il soit nécessaire de posséder est de savoir que lorsqu’on tue 670 baleines minke, il en reste 670 de moins que la saison passée. Tuer des mammifères marins est indigne d’un être humain. Pourquoi M. le Premier ministre croit-il que les autres nations baleinières traditionnelles ont abandonné toute forme de chasse à la baleine, y compris celle pratiquée à des fins scientifiques?

(traduction)

La population de baleines minke est estimée à 170 000 individus; nous en prélevons 670. Vous devriez connaître cette proportion. Notre prélèvement de baleines minke se fonde sur les données scientifiques fournies par le comité scientifique de la Commission baleinière internationale. J’attire votre attention sur le fait qu’il s’agit d’une question d’équilibre entre les différentes espèces marines. Pour dire les choses simplement, l’absence de prélèvement des baleines minke entraînerait un déséquilibre des fonds marins, car celles-ci consommeraient davantage de poissons. Il y va de l’équilibre écologique entre les espèces marines.

M. BANKS (Royaume-Uni) (traduction)

J’aimerais faire une dernière observation: la diminution des ressources halieutiques est due à la pêche intensive pratiquée par les hommes et non à la prédation nécessaire des réserves de poissons par les mammifères marins. Je prie M. le Premier ministre de méditer cette question: comment peut-on humainement tuer une baleine minke? C’est de cela qu’il s’agit et non de l’attitude de la Norvège à l’égard de l’activité traditionnelle de chasse à la baleine.

M. Bondevik, Premier ministre de Norvège (traduction)

Les hommes ont le droit de prélever – ou, pour reprendre vos propres termes, de tuer – les animaux, car nous parlons d’un animal. Il s’agit de préserver l’équilibre entre les espèces marines – il n’y a pas le moindre doute à ce sujet. Vous avez bien entendu raison de préciser que certains problèmes découlent parfois de la pêche intensive, mais, cela peut paraître incroyable, il est un fait que ces baleines se nourrissent de poissons. Un déséquilibre entre les espèces marines serait un problème pour l’écologie. Vous devriez savoir que nous partageons tous deux un engagement en faveur des questions de politique environnementale et d’écologie.

M. LLOYD (Royaume-Uni) (traduction)

M. le Premier ministre est conscient comme moi que l’ensemble des membres de notre famille européenne sont confrontés aux menaces que font peser sur eux la criminalité organisée, la drogue, le terrorisme et la traite des êtres humains. La nouveauté aujourd’hui est que ces différentes formes d’activités criminelles sont de plus en plus inextricablement liées entre elles, ce qui représente un nouveau danger pour nos sociétés. A-t-il prévu de prendre des initiatives pour élaborer une défense commune sur ces questions durant la présidence norvégienne?

M. Bondevik, Premier ministre de Norvège (traduction)

M. Lloyd aborde une question essentielle. Il est important, à mon sens, de reconnaître et de comprendre la menace que représentent le terrorisme et la criminalité organisée. Le Conseil de l’Europe est bien placé pour contribuer de manière importante à nos efforts. Tout d’abord, nous devrions prendre des mesures déterminées, en vue de renforcer le droit international contre le terrorisme et de mettre en place des instruments efficaces destinés à combler toute lacune dans ce domaine. Nous soutenons énergiquement les efforts déployés pour l’adoption d’une convention européenne sur la lutte contre la traite des êtres humains et mon gouvernement a élaboré un plan d’action pour combattre cette pratique. Ce plan contribue à définir l’action nationale et internationale de la Norvège, y compris les mesures visant à identifier, à assister et à protéger les victimes, à assurer la protection des témoins, à encourager le retour volontaire des personnes victimes de la traite et leur réinsertion, ainsi qu’à intensifier le travail d’enquête et la poursuite des trafiquants.

J’invite tous les États membres à œuvrer ensemble à l’adoption d’une convention européenne dès que possible. Nous appuyons également énergiquement d’autres actions importantes menées en matière juridique, telles que les mesures de lutte contre la corruption et le blanchiment d’argent, ainsi qu’une série de défis considérables relevés par le Conseil de l’Europe et diverses organisations internationales.

M. LLOYD (Royaume-Uni) (traduction)

Je remercie chaleureusement M. le Premier ministre pour sa réponse. Il a évoqué précédemment les nouvelles démocraties et les démocraties plus solidement établies. Admet-il que les enjeux mêmes qu’il vient d’évoquer représentent une menace pour l’ensemble de nos démocraties et pour les droits de l’homme? Convient-il qu’il nous faut trouver un juste équilibre entre la prise de toutes les mesures nécessaires à la lutte contre le terrorisme et la criminalité et l’assurance que ce combat s’inscrive dans le respect des droits de l’homme et de la démocratie? Ces dangers peuvent causer notre perte de deux manières: directement, d’une part, et par notre incapacité à réagir de façon adéquate et acceptable, d’autre part.

M. Bondevik, Premier ministre de Norvège (traduction)

Je conviens totalement que nous ne devons pas combattre le terrorisme en portant atteinte aux droits de l’homme. La lutte contre le terrorisme, la criminalité organisée et la traite des êtres humains doit être menée dans le respect des droits de l’homme. Cela va de soi. Mais je reconnais que cette attitude n’est pas systématique. Il est important de souligner auprès de l’ensemble des pays, y compris les nouvelles démocraties, que cette lutte contre le terrorisme, la criminalité organisée et la traite des êtres humains doit s’inscrire dans le respect des droits de l’homme. Cela vaut également pour les anciennes démocraties. Le recours aux forces armées pour combattre le terrorisme dans les pays arabes et musulmans, doublé d’une atteinte aux droits de l’homme, donnera une image déplorable du monde démocratique dans cette région. Pour parler franchement, je songe également au sort de certains prisonniers en Irak. Cette situation est regrettable, mais je suis heureux que les dirigeants américains aient réagi. Ces actes ont considérablement terni l’image de l’Occident dans cette partie du monde.

LE PRÉSIDENT (traduction)

Je vous remercie. Cela clôt la série de questions posées au Premier ministre norvégien, M. Bondevik. Je le remercie chaleureusement au nom de l’Assemblée pour le discours qu’il a prononcé et les observations qu’il a formulées en réponse aux questions posées. Je remercie également le secrétaire d’État Odd Jostein Sæter. Nous adressons nos meilleurs vœux à votre pays.