Parliamentary Assembly
Assemblée
parlementaire

Pour débat à la Commission permanente – Voir article 15 du Règlement

Doc. 10833
3 février 2006

Pour une politique dynamique du logement, facteur de la cohésion sociale au niveau européen

Rapport
Commission des questions sociales, de la santé et de la famille
Rapporteur : M. Denis Jacquat, France, Groupe du Parti populaire européen


Résumé

L’Assemblée exprime sa profonde préoccupation quant à l’émergence d’une nouvelle crise du logement en Europe qui pose de nombreux problèmes aux pays membres tant en matière de lutte contre l’exclusion sociale que de ségrégation spatiale avec pour conséquences une érosion inquiétante de leur cohésion sociale. Il n’est pas possible de définir une seule voie pour la modernisation des politiques du logement. Il faut cependant que les Etats membres respectent un certain nombre de principes communs ; notamment ils doivent ratifier la Charte sociale européenne révisée, qui reconnaît le droit au logement, et encourager les activités de la Banque de Développement du Conseil de l’Europe en faveur du logement des groupes les plus vulnérables de la population. Une coopération renforcée doit se nouer avec l’Union européenne pour une mise en œuvre effective du droit au logement et l’accès à un logement décent pour tous.

A.       Projet de résolution

1.       L’Assemblée parlementaire constate une profonde évolution de la problématique du logement en Europe, du fait de la conjonction de nombreux facteurs agissant de façon interactive.Parmi ces facteurs figurent la concentration des emplois dans les centres urbains et la flexibilité accrue des emplois ce qui suppose une plus grande mobilité professionnelle mais également une précarisation des revenus, ainsi que l’exclusion durable du marché du travail de groupes de populations.

2.       L’évolution du tissu familial, l’explosion notamment du nombre des divorces et des ménages monoparentaux, l’allongement de la période de cohabitation parentale pour les jeunes, et le vieillissement de la population sont également des facteurs qui contribuent à maintenir un niveau élevé de la demande de logements face à une offre souvent inadaptée et insuffisamment renouvelée.

3.       L’importance des flux migratoires et la concentration de l’immigration dans les villes alimentent également le niveau général de la demande, contribuent à renforcer le niveau de pression sur l’offre de logements et posent plus généralement la question de l’inadaptation du parc de logements existants à la nature des besoins des populations immigrées

4.       Tous ces facteurs contribuent à une évolution considérable de la nature de la demande de logements. La pression sur l’offre de logements et sur l’offre foncière s’est traduite par une augmentation rapide des prix des logements, et plus spécifiquement des loyers.

5.       Ainsi l’extension urbaine mal maîtrisée, les phénomènes de croissance par mitage périurbain, la déqualification de certains territoires aux formes d’habitat périphériques aujourd’hui inadaptées, la réapparition de bidonvilles et de zones de sous logements ou de logements insalubres dans les centres-villes sont autant de signaux témoignant de la dimension structurelle de la crise du logement.

6.        Ces phénomènes sont révélateurs aussi du lien indissociable du logement avec le développement urbain, avec les questions de mixité sociale, de discriminations ethniques et raciales ainsi que des politiques urbaines et foncières.

7.       L’Assemblée parlementaire exprime sa profonde préoccupation quant à l’émergence d’une nouvelle crise du logement à l’échelle européenne, laquelle pose - et posera de plus en plus dans l’avenir- de nombreux problèmes aux pays membres du Conseil de l’Europe, tant en matière de lutte contre l’exclusion sociale que de ségrégation spatiale, avec pour conséquence une érosion inquiétante de leur cohésion sociale.

8.       L’Assemblée souligne que le droit au logement, en tant que droit social fondamental reconnu par la Charte sociale révisée du Conseil de l’Europe en son article 31, est un facteur de cohésion sociale. A ce titre, sa mise en oeuvre effective ne saurait être laissée à la seule appréciation des forces du marché. Ce droit au logement ne peut être qu’universel et ne peut souffrir d’aucune exclusive dans sa mise en œuvre.

9.       L’Assemblée parlementaire tient à affirmer que les coûts pour la collectivité d’une non-politique du logement sont bien supérieurs à ceux d’une politique dynamique du logement s’inscrivant dans la durée, la continuité, l’implication de l’ensemble des acteurs et l’adaptabilité à l’évolution des besoins.

10.        Elle considère que les politiques du logement les plus pertinentes sont celles qui ont su s’adapter à la territorialisation des problèmes par des mesures appropriées visant à renforcer le rôle des pouvoirs locaux tout en préservant l’exigence de solidarité nationale et l’indispensable engagement des Etats.

11.       Il convient de soutenir une politique du logement qui intègre des actions touchant à la fois à la lutte contre l’exclusion sociale et les discriminations ainsi qu’au développement et renouvellement urbains. Faciliter les conditions d’accès au logement ainsi qu’à la propriété du logement, améliorer les conditions d’habitat et promouvoir un développement équilibré des territoires sont aujourd’hui des exigences au cœur de la préservation de la cohésion sociale européenne et de la paix sociale face à l’affaiblissement des liens sociaux et l’altération du sentiment d’appartenance et de partage de valeurs communes.

12.       L’Assemblée souligne qu’il n’existe pas une réponse unique, univoque et uniforme pour les réformes des politiques du logement, vu les différences de traditions et d’objectifs en matière d’intervention publique d’un pays à l’autre. S’il n’est pas possible de définir une seule voie pour la modernisation des politiques du logement, il faut que les Etats-membres respectent un certain nombre de principes communs.

13.       En conséquence, l’Assemblée invite les Etats membres du Conseil de l’Europe à:

13.1.       poursuivre la ratification de la Charte sociale révisée de façon à ce que l’ensemble des pays membres reconnaisse le droit au logement, en tant que droit social fondamental et facteur de cohésion sociale (article 31 de la Charte révisée);

13.2.       renforcer les mécanismes de contrôle dans le domaine du droit au logement en considérant comme une priorité sa mise en application effective, en particulier dans les cas de discrimination, d’expulsion du logement et de persistance de logements insalubres ;

13.3.       développer la connaissance des situations du logement en termes d’indicateurs statistiques dans les pays membres ;

13.4.       promouvoir l’échange de bonnes pratiques et le développement de projets intégrés en matière de mise en œuvre effective du droit au logement et de son opposabilité ;

13.5.       réfléchir en commun à l’avenir des politiques du logement sur la base d’une évaluation des politiques conduites dans les dix dernières années et de la définition de principes communs à leur développement futur ;

13.6.       approfondir la connaissance de la dimension territoriale des politiques du logement en lien avec les nouvelles formes de gouvernance et d’évaluation des actions qui prévoient la participation de l’ensemble des acteurs parties prenantes.

14.       L’Assemblée encourage les Etats membres de la Banque du développement du Conseil de l’Europe à soutenir les activités de celle-ci dans le domaine du logement social et à lui soumettre, pour financement, des projets d’investissement tout particulièrement en faveur des groupes les plus vulnérables de la population.

15.       L’Assemblée invite enfin les Etats, réunis au Conseil de l’Europe, à mettre en œuvre une coopération renforcée avec l’Union européenne pour une mise en œuvre effective du droit au logement et à l’accès à un logement décent pour tous, compte tenu de leurs objectifs partagés en matière de maintien de la cohésion sociale européenne et du rôle particulier du logement unanimement reconnu par le Conseil de Lisbonne et le Parlement européen.

B.       Exposé des motifs par M. Denis Jacquat

1. Malgré une profonde évolution de l’environnement économique européen de ces trente dernières années, la question du logement reste un problème de société d’une grande actualité et d’une réelle acuité.

2. La nature même des problèmes du logement a cependant profondément évolué, accompagnant ainsi les mutations économiques et sociales que l’Europe a connues et continue de connaître.

3. Cette situation est le fruit de la conjonction de nombreux facteurs agissant de façon interactive : la concentration des emplois et des flux migratoires dans les centres urbains, la flexibilité accrue de ces emplois supposant une plus grande mobilité professionnelle mais également une précarisation des revenus, l’exclusion durable du marché du travail de groupes de populations, l’évolution du tissu familial notamment l’explosion de la divortialité et des ménages monoparentaux, l’allongement de la période de cohabitation parentale pour les jeunes, le vieillissement de la population, autant de facteurs contribuant à une évolution considérable de la nature de la demande de logements.

4. La concentration des emplois dans les centres urbains s’est accentuée. Elle s’est accompagnée d’une concentration des populations dans les grands centres urbains et d’une extension urbaine souvent mal maîtrisée. La pression sur l’offre de logements et sur l’offre foncière s’est traduite par une augmentation rapide des prix des logements, et plus spécifiquement des loyers. Dans certaines capitales européennes, la notion de bulle immobilière est de nouveau mise en avant. Cette mobilité de la main d’œuvre se traduit également dans certains pays par une désertification de régions entières et par conséquent par une offre de logements surabondante inexploitée.

5. La flexibilité accrue du marché du travail s’est accompagnée d’une précarisation des emplois par le développement d’emplois temporaires et de l’intérim. Ainsi, les périodes d’activité sont de plus en plus ponctuées de périodes d’inactivité, fragilisant la régularité des revenus des ménages face à des dépenses en logement permanentes et croissantes. Dans certains pays, l’expulsion de ménages insolvables est en augmentation, que se soit en secteur locatif ou en matière d’accession à la propriété par surendettement.

6. Par ailleurs, l’exclusion durable du marché du travail de groupes de populations en raison de leur niveau de qualification ou leur spécialisation dans des activités délocalisées, suppose qu’une prise en charge par la collectivité soit assurée tant du point de vue de la réinsertion et de la qualification que de la solvabilisation par des revenus de transfert affectés ou non au logement.

7. L’importance des flux migratoires et de l’immigration alimente également le niveau général de la demande, contribue à renforcer le niveau de pression sur l’offre de logements et pose plus généralement la question de l’inadaptation du parc de logements existants à la nature des besoins des populations immigrées.

8. Par ailleurs, l’évolution du tissu familial, notamment par l’accroissement de la divortialité, le développement des ménages monoparentaux, l’allongement de la période de cohabitation parentale contribuent également à maintenir un niveau élevé de la demande face à une offre souvent inadaptée et insuffisamment renouvelée.

9. Enfin, le vieillissement de la population représente un des enjeux majeurs quant à l’adaptation de l’offre de logements existants à la nature des besoins, tant du point de vue de l’adaptation physique des logements que du développement de structures de services permettant le maintien à domicile.

10. Cette profonde évolution de la demande, tant quantitative que qualitative, ne saurait être spontanément satisfaite par une offre de logements contrainte par les exigences de concentration dans les zones urbaines, par la flambée consécutive des valeurs foncières et la lenteur structurelle de son adaptation physique.

11. A cet égard, l’Assemblée parlementaire exprime sa profonde préoccupation concernant l’émergence d’une nouvelle crise du logement à l’échelle européenne, laquelle pose de nombreux problèmes aux pays membres du Conseil de l’Europe, tant en matière de lutte contre l’exclusion sociale que de ségrégation spatiale, et qui induit une érosion inquiétante de leur cohésion sociale.

12. L’affaiblissement du lien social par la spécialisation des territoires, la progression de l’exclusion sociale par la précarisation concomitante du logement et de l’emploi, le rejet croissant du politique et de l’institutionnel au profit du repli communautaire contribuent en effet à altérer le sentiment d’appartenance à une seule et même communauté et le partage de valeurs communes.

13. La cohésion sociale européenne ne saurait se réduire à la juxtaposition de territoires socialement spécialisés, communautarisés et repliés sur eux-mêmes autour d’une identité territoriale caractérisée par des conditions de vie, d’habitat et d’intégration sociales spécifiques.

14. Les conditions d’accès au logement, d’habitat et de développement équilibré des territoires sont aujourd’hui au cœur de la préservation de la cohésion sociale européenne et de la paix sociale face à un éclatement du marché de l’emploi ne permettant plus de reproduire les liens sociaux existants.

15. Or, cette crise du logement est pour partie la conséquence directe du désengagement progressif des gouvernements en matière de politique du logement, par la réduction des budgets publics, la privatisation du logement public ou social et la dérégulation des marchés locatifs, que ce soit dans les pays en transition ou dans les autres Etats membres.

16. L’Assemblée parlementaire tient à souligner que le droit au logement, en tant que droit social fondamental reconnu par la Charte sociale révisée du Conseil de l’Europe en son article 31, est un facteur de cohésion sociale. A ce titre, sa mise en oeuvre effective ne saurait être laissée à la seule appréciation des forces du marché. Ce droit au logement ne peut être qu’universel et ne peut souffrir d’aucune exclusive dans sa mise en œuvre.

17. Les politiques de libéralisation des marchés locatifs, de privatisation du logement social ou de réduction de l’offre de logements sociaux conduites dans de nombreux Etats membres ont clairement fait la preuve de leur incapacité à faire face durablement aux défis en présence.

18. La pression accrue sur les finances publiques conduit in fine à renforcer le rôle des mécanismes de régulation par le marché dans le domaine du logement et du développement urbain, par la contraction des budgets publics et l’affaiblissement de l’intervention directe sur le niveau de l’offre, notamment l’offre de logements sociaux et accessibles.

19. De même, les politiques foncières et d’aménagement du territoire ne contribuent plus à canaliser l’étalement urbain et la spécialisation des territoires résultant du renforcement du rôle des mécanismes de marché et du jeu de l’offre et de la demande.

20. L’Assemblée parlementaire tient à affirmer que les coûts pour la collectivité d’une non politique du logement sont bien supérieurs à ceux d’une politique dynamique du logement s’inscrivant dans la durée, la continuité, l’implication de l’ensemble des acteurs et l’adaptabilité à l’évolution des besoins.

21. Compte tenu des défis en présence, l’Assemblée parlementaire réaffirme la nécessité de maintenir et de développer des politiques dynamiques de logement fondées sur les solidarités, équitables et équilibrées quant aux actions conduites en direction de la demande et de l’offre, et fondées sur le rôle de l’Etat en tant que garant de la cohésion sociale et de la mise en œuvre effective des droits sociaux fondamentaux.

22. Le devenir des politiques du logement représente un défi d’autant plus grand pour l’Europe que la territorialisation des problèmes est croissante en raison de leur ancrage dans le développement des villes européennes et plus globalement dans l’aménagement du territoire européen.

Les phénomènes de croissance par mitage périurbain, la ségrégation spatiale inhérente à la déqualification de certains territoires aux formes d’habitat périphériques aujourd’hui inadaptées, la réapparition de bidonvilles et de zones de sous logements ou de logements insalubres dans les centres ville sont autant de signaux témoignant de la dimension structurelle de la crise du logement et de son indissociable lien avec le développement urbain, avec les questions de mixité sociale, de discriminations ethniques et raciales, de politiques urbaines et foncières.

23. L’Assemblée considère que les politiques du logement les plus pertinentes sont celles qui ont su s’adapter à la territorialisation des problèmes par des mesures appropriées visant à renforcer le rôle des pouvoirs locaux tout en préservant l’exigence de solidarité et l’indispensable engagement des Etats. Car trop souvent, la décentralisation s’est accompagnée d’un désengagement de l’Etat et d’un renoncement à assurer son devoir de solidarité nationale à travers le logement.

24. Les politiques du logement qui ont su concilier la nécessité d’actions plus intégrées touchant à la fois à l’exclusion sociale, à la discrimination, au développement et renouvellement urbains se sont développées progressivement et doivent être soutenues.

25. Mais ces politiques intégrées ne doivent pas conduire à renoncer au développement d’interventions publiques directes ou indirectes sur les marchés du logement et sur les causes structurelles de la crise. Elles doivent poursuivre la recherche d’un équilibre entre la solvabilisation des ménages et l’incitation au développement d’une offre nouvelle de logements accessibles, entre la promotion d’une offre de logement social de qualité et une régulation de l’offre de logements privés, entre une incitation au renouvellement de l’offre et des mesures coercitives en matière de politique foncière, d’offre nouvelle de logements et de mixité sociale.

26. Aussi, l’Assemblée parlementaire est-elle persuadée de la nécessité de dynamiser ces politiques du logement compte tenu de la permanence des problèmes et des changements sociodémographiques, de l’intensification des flux migratoires en Europe, et de son indissociable lien avec les politiques de protection sociale et les politiques de développement urbain.

27. Cette évolution est d’autant plus nécessaire que les exigences de développement durable, tant en matière de développement urbain et de transport qu’en matière énergétique, ne peuvent que s’intensifier dans l’avenir et contribuer à peser sur les orientations des politiques publiques.

28. Cette complexité croissante des conditions de définition et de mise en œuvre des politiques du logement, tant du point de la gouvernance des acteurs impliqués que de la globalité des processus en cause est un défi qui doit être relevé.

29. L’Assemblée parlementaire considère qu’il relève de la compétence du Conseil de l’Europe de relever ce défi et qu’il est de sa responsabilité de promouvoir les échanges et la confrontation des politiques du logement des Etats-membres en la matière compte tenu de son incidence sur la cohésion sociale européenne.

30. Toutefois, l’Assemblée parlementaire tient à souligner qu’il n’existe pas une réponse unique, univoque et uniforme pour les réformes des politiques du logement, vu les différentes traditions et objectifs en matière d’intervention publique d’un pays à l’autre.

31. S’il n’est pas possible de définir une seule voie pour la modernisation des politiques du logement, il faut rappeler en revanche un certain nombre de principes que les Etats-membres se doivent de respecter.

32. La mise en œuvre de l’article 31 de la Charte sociale révisée du Conseil de l’Europe doit constituer le fondement des politiques du logement des Etats-membres et guider les priorités d’intervention de façon à assurer une mise en œuvre effective de ce droit social fondamental.

33. Bien de première nécessité par excellence, le logement ne saurait être considéré comme un simple produit ou bien marchand. En tant que droit social fondamental, son accès doit être garanti pour tous et seule une politique dynamique du logement structurée et durable peut conduire à atteindre l’objectif d’universalité de son accès.

34. Compte tenu de la pression s’exerçant sur les budgets publics, les politiques du logement doivent veiller à une allocation optimale des ressources publiques. L’efficacité économique et sociale des actions engagées doit faire l’objet d’évaluations régulières, notamment quant à leur d’impact effectif sur l’accessibilité de l’offre de logements et la solvabilisation de la demande.

35. L’équité sociale des mesures mises en œuvre doit guider les politiques du logement, y compris en matière d’intervention sur l’offre pour laquelle des contreparties sociales doivent accompagnées les mesures incitatives en direction des opérateurs privés.

36. La dimension territoriale des politiques du logement doit être assurée par une adaptation locale des instruments d’intervention à la nature des besoins et des situations.

37. Enfin, la bonne gouvernance des politiques du logement doit être assurée par une association de l’ensemble des acteurs partie prenantes, y compris des habitants et de leurs associations.

38. Bien que l’organisation territoriale des Etats membres dispose d’une grande richesse de situations, l’implication des pouvoirs régionaux et locaux est aujourd’hui indispensable dans le cadre d’une claire répartition des compétences et des responsabilités. Toutefois, cette indispensable décentralisation des politiques du logement ne doit pas conduire les Etats à se désengager et à remettre en cause le principe de solidarité.

39. Au-delà de ces principes, l’Assemblée se prononce pour une application généralisée à l’ensemble des Etats membres du Conseil de l’Europe du droit au logement en tant que droit social fondamental reconnu dans la Charte sociale révisée du Conseil de l’Europe par une relance du processus de ratification.

40. La reconnaissance du droit au logement est en effet le fondement premier des politiques du logement, elle doit tendre vers son application effective, vers un accès universel au logement garanti pour tous et privilégiant la prévention de l’exclusion à l’expulsion et garantissant le relogement dans un logement permanent et salubre sans discrimination.

41. A ce titre, l’Assemblée ne peut que condamner à nouveau les pratiques de discrimination actives ou passives touchant notamment les Roms et les familles d’origine africaines dans certains Etats membres du Conseil de l’Europe.

42. Les événements tragiques intervenus cet été en France témoignent de l’impuissance des autorités publiques à mettre en œuvre ce droit au logement pour tous et de la discrimination continuant à toucher certaines catégories de population dans l’accès à un logement salubre et permanent. La complexité des situations en présence ne saurait expliquer à elle seule l’impuissance des autorités publiques à mettre en œuvre le droit au logement décent pour tous et à lutter contre toutes les formes de discrimination.

43. Par contre, l’Assemblée se félicite que le Conseil Européen de Lisbonne de juin 2000 ait adoptée une stratégie européenne d’inclusion sociale et ait érigé en objectif commun aux Etats-membres la mise en œuvre de politiques du logement visant à permettre à chacun d’accéder à un logement décent et aux services qui y sont liés. Le reconduction a mi parcours de ces objectifs ne peut être que saluée.

44. Elle se félicite également de la constitution au sein du Parlement européen d’un intergroupe sur les questions urbaines et de logement et de la prise en considération du logement en tant qu’élément à part entière de la politique de cohésion de l’Union européenne et du modèle social européen.

45. Dans ce contexte de prise en considération du logement par l’Union européenne, elle considère que le domaine des politiques du logement doit être un domaine prioritaire de la coopération entre le Conseil de l’Europe et l’Union européenne en matière de cohésion sociale, avec une meilleure planification des activités communes relative à la mise en œuvre effective du droit au logement et à la préservation de la cohésion sociale européenne.

46. L’Assemblée invite les parlementaires des Etats membres à lancer à cette occasion un débat au niveau national et européen sur la réalisation de l’objectif d’accès pour tous à un logement décent, de même qu’à promouvoir les outils juridiques du Conseil de l’Europe pour trouver les solutions durables à la mise en oeuvre de ce droit.

48.        Conformément à son mandat, la Banque de développement du Conseil de l’Europe (CEB) contribue à la réalisation de projets d’investissement à caractère social, notamment dans le secteur du logement social pour les personnes à faibles revenus. Elle joue un rôle important dans le financement de projets de logements sociaux dans ses Etats membres et contribue ainsi au développement de l’action publique dans ce domaine.

49.       Les interventions de la CEB visent à fournir des logements sociaux et les infrastructures connexes aux populations à faibles revenus, et plus particulièrement aux réfugiés, aux immigrés, aux populations déplacées, aux victimes de catastrophes naturelles ainsi qu’aux populations vulnérables ciblées, telles que les personnes vivant en dessous du seuil de pauvreté, les enfants abandonnés, les personnes handicapées et les minorités ethniques (Roms).

De plus, elle s’efforce de lever les obstacles à l’accès au logement, de soutenir les politiques nationales du logement et de contribuer au développement des infrastructures municipales liées au logement social.

50.       Depuis 1995, les prêts approuvés par la CEB dans ce domaine d’action se montent à 5 milliards d’euros, répartis entre plus de 120 projets. Pour la seule année 2005, elle a approuvé huit projets et deux dons concernant le logement social en Bosnie-Herzégovine, au Danemark, en Finlande, en Hongrie, en Roumanie, en Serbie-Monténégro et en Espagne.

51.       En avril 2003, la CEB a organisé une Conférence ministérielle de haut niveau, à Paris, en collaboration avec la Banque mondiale, pour la promotion de politiques durables du logement social en Europe du Sud-Est, visant en particulier les réfugiés et les populations vulnérables.

52.       Elle a également publié deux rapports concernant ce domaine d’action : « Social housing in South Eastern Europe – Solving a puzzle of challenges » (2004, en coopération avec la Banque mondiale) et « Trends and Progress in social housing reforms in South Eastern Europe » (2005, en coopération avec le Conseil de l’Europe et la Commission économique des Nations Unies pour l’Europe – CENUE).

53.       La CEB coopère activement avec la Direction générale de la politique régionale de la Commission européenne et avec la Banque européenne d’investissement (BEI) pour promouvoir, dans les pays intéressés, des projets de logement social dans le cadre de plans intégrés de rénovation et de développement urbains.

54.       L’Assemblée parlementaire recommande au Comité des Ministres du Conseil de l’Europe:

i.       de poursuivre la ratification de la Charte sociale révisée de façon à étendre à l’ensemble des pays membres la reconnaissance du logement en tant que droit social fondamental ;

ii.       de renforcer les mécanismes de contrôle dans le domaine du droit au logement en considérant comme une priorité sa mise en application effective, en particulier dans les cas de discrimination, d’expulsion du logement et de persistance de logements insalubres ;

iii.       de développer la connaissance des situations du logement en termes d’indicateurs statistiques dans les pays membres ;

iv.       de promouvoir l’échange de bonnes pratiques et le développement de projets intégrés en matière de mise en œuvre effective du droit au logement et de son opposabilité ;

v.       d’approfondir la réflexion commune sur l’avenir des politiques du logement sur la base d’une évaluation des politiques conduites dans les dix dernières années et de la définition de principes communs à leur développement futur ;

vi.       d’approfondir la connaissance de la dimension territoriale des politiques du logement en lien avec les nouvelles formes de gouvernance et d’évaluation des actions ;

vii.       de mettre en œuvre une coopération renforcée avec l’Union européenne en matière de mise en œuvre effective du droit au logement et d’accès à un logement décent pour tous compte tenu des objectifs partagés entre le Conseil de l’Europe et l’Union européenne en matière de maintien de la cohésion sociale européenne et du rôle particulier du logement unanimement reconnu par le Conseil de Lisbonne et le Parlement européen.

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Commission chargée du rapport : Commission des questions sociales, de la santé et de la famille

Renvoi en commission : Doc. 10166, Renvoi N° 2964 du 30 avril 2004

Projet de résolution adopté à l’unanimité le 26 janvier 2006

Membres de la Commission: M. Marcel Glesener (Président), Mme Christine McCafferty (1ère Vice-Présidente), Mme Patrizia Paoletti Tangheroni (2ème Vice-Présidente), Mme Helena Bargholtz (3ème Vice-Présidente), MM. Vicenç Alay Ferrer, Giuseppe Arzilli, Jorodd Asphjell, Miguel Barcelo Perez, Miroslav Benes, Andris Berzins, Jaime Blanco, Božidar Bojovic, Mme Marida Bolognesi (remplaçante: Mme Marisa Abbondanzieri), Mme Monika Bruning, MM. Saulius Bucevicius, Igor Chernyshenko (remplaçante: Mme Svetlana Smirnova), Doros Christodoulides (remplaçant: Marinos Sizopoulos), Dessislav Chukolov, Mme Minodora Cliveti, MM. Telmo Correira, András Csaky, Imre Czinege, Mme Helen D’Amato (remplaçant: M. Joseph Falzon), MM. Dirk Dees, Stepan Demirchayan, Karl Donabauer (remplaçant: Ewald Lindinger), Ioannis Dragassakis, Sören Espersen, Claude Evin (remplaçant: Jean-Marie Bockel), Paul Flynn, Mme Margrét Frimannsdottir, Mme Doris Frommelt, MM. Jean-Marie Geveaux, Stepan Glävan, Mme Claude Greff (remplaçant: Alain Cousin), MM. Igor Glukhovskiy (remplaçant: Victor Kolesnikov), Ali Riza Gülçiçek, Michael Hancock, Mykhailo Hladiy, Mme Sinikka Hurskainen, MM. Rafael Huseynov, Mustafa Ilicali, Mme Halide Incekara, M. Denis Jacquat, Mme Katerina Konecná, M. Bohdan Kostynuk, Mme Marie-José Laloy, MM. Slaven Letica (remplaçante: Mme Ruza Lelic), Jan Filip Libicki, Gadzhy Makhachev (remplaçant: Yuri Kovalev), Bernard Marquet, Paddy McHugh, Mme Ljiljana Milicevic, M. Philippe Monfils (remplaçant: M. Luc Goutry), Mme Nino Nakashidzé, MM. Nikolaos Nikolopoulos (remplaçante : Mme Krinio Kanellopoulou), Conny Öhman, Mme Vera Oskina, Mme Lajla Pernaska, MM. Fiorello Provera, Cezar Florin Preda, Anatoliy Pysarenko, Mme Adoración Quesada, Mme Valentina Radulovic-Scepanovic, MM. Andrea Rigoni, Walter Riester, Mme Marlene Rupprecht (remplaçant: M. Wolfgang Wodarg), Mme Maria de Belém Roseira, M. Walter Schmied, Mme Anna Sobecka, Mme Darinka Stantcheva, Mme Ewa Tomaszewka (remplaçante: Mme Janina Fetlinska), MM. Oleg Tulea, Alexander Ulrich, Milan Urbani, Bart van Winsen, Mme Ruth-Gaby Vermot-Mangold (remplaçant: M. John Dupraz), Angela Watkinson, Mme Gisela Wurm, M. Andrej Zernovsksi, Mme Barbara Žgajner-Tavs (remplaçante: Mme Mojca Kucler-Dolinar), N.…., N.…

NB : Les noms des membres présents à la réunion sont indiqués en caractères gras

Chef du Secrétariat : M. Géza Mezei

Secrétaires : Mme Agnès Nollinger, Mme Christine Meunier