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Rapport | Doc. 13000 | 31 juillet 2012

Déontologie des membres de l’Assemblée parlementaire: bonne pratique ou devoir?

Commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles

Rapporteur : M. Oliver HEALD, Royaume-Uni, GDE

Origine - Renvoi en commission: Doc. 12669, Renvoi 3794 du 3 octobre 2011. 2012 - Quatrième partie de session

Résumé

Afin d’offrir aux membres de l’Assemblée parlementaire un cadre de référence transparent et cohérent en ce qui concerne notamment les situations de conflit d’intérêts, les offres de cadeaux ou d’hospitalité, ou l’utilisation de leur mandat – ou des prérogatives des anciens membres – pour la promotion et la défense d’intérêts personnels, la commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles propose que l’Assemblée se dote d’un code de conduite que tous les membres s’engageront à respecter dans l’exercice de leurs fonctions.

Ces nouvelles règles déontologiques, qui complètent la réglementation existante, visent à promouvoir les principes de transparence, de responsabilité, d’intégrité et de primauté de l’intérêt public, indispensables pour maintenir la confiance du public vis-à-vis de l’institution parlementaire et des élus.

A. Projet de résolution 
			(1) 
			Projet
de résolution adopté à l’unanimité par la commission le 27 juin
2012.

(open)
1. A de nombreuses occasions au cours de ses dernières années, l’Assemblée parlementaire a fait part de sa préoccupation face à la critique de la démocratie représentative et de l’institution parlementaire, à la désaffection des citoyens vis-à-vis de la politique et des procédures démocratiques, et à la perte de confiance du grand public dans l’efficacité des assemblées élues et l’intégrité des parlementaires. Dans sa Résolution 1547 (2007) sur la situation des droits de l’homme et de la démocratie en Europe et sa Résolution 1746 (2010) «Démocratie en Europe: crises et perspectives», l’Assemblée s’est attachée à décrypter cette «crise de la démocratie», amplifiée par la crise financière et économique.
2. Les scandales mettant en cause le comportement de parlementaires, qui se sont produits tant au niveau national qu’européen, ont renforcé l’exigence d’exemplarité politique et conduit les parlements nationaux et les institutions parlementaires européennes à élaborer des règles déontologiques. Dans ce contexte, l’Assemblée s’est employée à améliorer son cadre institutionnel, afin de promouvoir les principes de transparence, de responsabilité et d’intégrité auxquels elle est fermement attachée.
3. Ainsi, l’Assemblée a établi des règles visant à prévenir les conflits d’intérêts, le clientélisme et, de façon générale, toute forme de corruption auxquels les parlementaires sont susceptibles d’être exposés pendant la durée de leur mandat, en tenant compte des objectifs et du caractère spécifique des missions dont ceux-ci sont investis. Il en résulte notamment des principes relatifs à la transparence et à la déclaration des intérêts des membres de l’Assemblée, adoptés en 2007, un code de conduite des rapporteurs de l’Assemblée parlementaire, adopté en 2011, ainsi que des dispositions spécifiques figurant dans les lignes directrices sur l’observation des élections par l’Assemblée parlementaire. L’Assemblée considère à présent qu’il y a lieu d’établir des principes et des règles qui doivent régir la conduite de l’ensemble de ses membres, et de se doter d’un cadre de référence transparent et efficace. Ce code de conduite n’entend pas se substituer aux règles déontologiques susmentionnées, qui le complètent.
4. Le besoin de consolider les règles de conduite de ses membres découle également du devoir d’exemplarité auquel l’Assemblée parlementaire est tenue en tant qu’organe statutaire d’une organisation internationale qui se trouve en première ligne pour lutter contre la corruption, y compris dans le domaine politique. L’Assemblée salue tout particulièrement l’action du Groupe d’Etats contre la corruption (GRECO) du Conseil de l’Europe dont elle entend suivre de près les activités s’agissant de son troisième cycle d’évaluation, consacré à la transparence du financement des partis politiques, et de son quatrième cycle d’évaluation, lancé en janvier 2012, qui porte notamment sur la prévention de la corruption des parlementaires.
5. En se dotant d’un code de conduite, l’Assemblée entend faire prévaloir la primauté de l’intérêt public dans son travail et répondre, par la mise en place d’un système de règles cohérentes applicables à l’ensemble de ses membres, aux préoccupations générales exprimées s’agissant notamment du favoritisme politique, des offres de cadeaux ou d’hospitalité faites aux membres, des situations de conflits d’intérêts ou de l’utilisation du mandat pour la promotion et la défense d’intérêts personnels.
6. Le code de conduite contient des dispositions inhérentes au bon fonctionnement d’une assemblée d’élus dans une société démocratique et que les membres sont invités à respecter dans le cadre de l’exercice de leur mandat à l’Assemblée parlementaire. Les principes généraux, qui forment une partie intégrante du code de conduite, devront guider le comportement des membres de l’Assemblée lorsque des situations difficiles ou confuses surviennent.
7. La conduite des membres relève d'abord et avant tout de leurs appréciations et convictions personnelles, mais leur comportement doit répondre aux attentes de ceux qui ont placé leur confiance dans un élu. L'Assemblée considère que l'engagement déclaré des membres à se conformer au code de conduite dépend en premier lieu de leur volonté de le respecter, en toute bonne foi.
8. L’Assemblée souhaite accroître la transparence de ses activités et de son processus décisionnel. Elle est toutefois préoccupée par les pressions que certains représentants d’intérêts, agissant au nom d’entités privées ou d’Etats, ont exercées sur des membres, même dans l’enceinte du Palais de l’Europe. L’Assemblée soutient incontestablement une culture pluraliste, mais elle considère également que des procédures claires et transparentes s’imposent pour réglementer l’accès des représentants d’intérêts à l’Assemblée. Elle rappelle, à cet égard, sa Recommandation 1908 (2010) sur le lobbying dans une société démocratique.
9. Au vu des considérations précédentes, l’Assemblée:
9.1. décide de se doter du code de conduite des membres de l’Assemblée parlementaire ci-annexé, et en conséquence:
9.1.1. de modifier l’article 12 de son Règlement comme suit:
9.1.2.
«Article 12 – Déontologie des membres de l’Assemblée
12.1. Dans l’exercice de leurs fonctions, les membres de l’Assemblée s’engagent à agir dans le respect des principes et des règles établis dans le code de conduite des membres de l’Assemblée, annexé au présent Règlement en tant que texte pararéglementaire.
12.2. Les dispositions régissant la transparence et la déclaration des intérêts des membres de l’Assemblée sont annexées au présent Règlement en tant que texte pararéglementaire.»;
9.2.
9.2.1. décide que ces nouvelles dispositions réglementaires et pararéglementaires entreront en vigueur dès leur adoption;
9.3. en ce qui concerne des règles d’accès et de circulation dans les locaux du Conseil de l’Europe des représentants d’intérêts pendant les sessions de l’Assemblée parlementaire, et afin d’instaurer une identification spécifique des membres des groupes d’intérêts, charge le Bureau de l’Assemblée de réviser les règles d’accès au Palais de l’Europe et d’utilisation des locaux, et les annexes aux règles concernées;
9.4. en ce qui concerne les prérogatives des anciens membres de l’Assemblée, charge le Bureau de l’Assemblée de modifier le règlement spécial sur l’honorariat à l’Assemblée parlementaire, ainsi que le règlement spécial sur le titre et les prérogatives de Président(e) honoraire de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, en application du paragraphe [27] du code de conduite ci-annexé.
10. Par ailleurs, l'Assemblée invite les parlements nationaux des Etats membres du Conseil de l'Europe:
10.1. à coopérer avec le GRECO dans le cadre des troisième et quatrième cycles d'évaluation et de continuer à promouvoir des stratégies anticorruption;
10.2. à s'inspirer des dispositions du code de conduite ci-annexé pour toutes les règles déontologiques et de conduite de leurs membres existantes ou qu'ils pourraient être amenés à élaborer.
11. Enfin, l'Assemblée charge son Bureau de réviser les lignes directrices sur l'observation des élections par l'Assemblée parlementaire à la lumière des dispositions du code de conduite ci-annexé, afin de modifier les dispositions relatives au conflit d'intérêts et de préciser les obligations déclaratives qui s'imposent aux membres des commissions ad hoc.

Annexe – Code de conduite des membres de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe

Objet du code de conduite

12. Le présent code entend fournir un cadre de référence aux membres de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe lorsqu’ils exercent leurs fonctions. Il définit les principes généraux de conduite que l’Assemblée est en droit d’attendre de ses membres. En adhérant à ces règles, les membres garantissent et renforcent l’ouverture et la responsabilité nécessaires pour maintenir la confiance vis-à-vis de l’Assemblée parlementaire.

Champ d’application du code de conduite

13. Le présent code s’applique aux membres dans tous les aspects de leur vie publique en rapport avec leur fonction de membres de l’Assemblée parlementaire.
14. Ses dispositions s’ajoutent à l’obligation faite aux membres de l’Assemblée parlementaire de respecter les Règles de conduite, ainsi que les résolutions de l’Assemblée et les décisions du Président relatives à la conduite et à la discipline des membres.
15. L’application du présent code relève de la compétence de l’Assemblée. Des orientations sur toutes les questions couvertes par le présent code de conduite et toutes les situations susceptibles de découler de son application peuvent être demandées au Secrétaire Général de l’Assemblée parlementaire.

Principes généraux de conduite

16. Dans l’exercice de leur mandat en tant que membres de l’Assemblée parlementaire, les membres:
16.1. remplissent leurs fonctions de manière responsable, avec intégrité et honnêteté;
16.2. prennent des décisions uniquement dans l’intérêt public, sans être soumis à aucune instruction qui compromettrait leur capacité à respecter le présent code;
16.3. s’abstiennent de tout acte susceptible de porter atteinte à la réputation de l’Assemblée ou de ternir son image;
16.4. utilisent les ressources mises à leur disposition de manière responsable;
16.5. n’utilisent pas leur mandat pour servir leurs intérêts privés ou ceux d’un tiers;
16.6. déclarent tous les intérêts ayant un rapport avec leur mandat et prennent des mesures en vue de résoudre tout conflit de manière à protéger l’intérêt public;
16.7. adhèrent à ces principes et les défendent en prenant des initiatives et en montrant l’exemple;
16.8. s’engagent à respecter les règles de conduite ci-dessous.
17. Ces principes seront pris en considération pour l’examen de toute plainte relative à une violation du présent code de conduite.

Règles de conduite

18. Les membres respectent les valeurs du Conseil de l’Europe et les principes généraux de conduite de l’Assemblée et n’entreprennent aucune action susceptible de porter atteinte à la réputation et à l’intégrité de l’Assemblée ou de ses membres.
19. Les membres évitent tout conflit entre, d’une part, un intérêt économique, commercial, financier ou autre, réel ou potentiel, à titre professionnel, personnel ou familial et, d’autre part, l’intérêt public dans le travail de l’Assemblée, en résolvant tout conflit en faveur de l’intérêt public; tout conflit d’intérêts que le membre ne peut résoudre sera rendu public.
20. Les membres signalent ces intérêts en faisant une déclaration orale, lors d’une séance de l’Assemblée ou d’une réunion de commission, ainsi que dans toute autre communication pertinente.
21. Aucun membre n’agira en tant que promoteur rémunéré d’intérêts dans les travaux de l’Assemblée.
22. Les membres s’engagent à ne pas solliciter ni accepter de rémunération, d’indemnité ou de gratification visant à les influencer dans leur conduite en tant que membre, et plus particulièrement dans leur décision de soutenir ou de s’opposer à une proposition de texte, un rapport, un amendement, une déclaration écrite, une recommandation, une résolution ou un avis. Les membres éviteront toute situation susceptible d’être perçue comme un conflit d’intérêts et n’accepteront aucune rémunération ou cadeau inapproprié.
23. Les membres n’exploiteront pas leur position en tant que membre de l’Assemblée parlementaire pour servir leurs propres intérêts ou ceux d’une autre personne ou entité de manière incompatible avec le présent code de conduite.
24. Les membres ont une obligation de discrétion en ce qui concerne l’utilisation des informations et s’engagent en particulier à ne pas exploiter à des fins personnelles les renseignements confidentiels dont ils ont connaissance dans l’accomplissement de leurs fonctions.
25. Tout cadeau ou tout avantage similaire (tel que la prise en charge de frais de voyage, d’hébergement, de séjour, de repas ou de divertissement) d’une valeur supérieure à 200 euros accepté par les membres dans l’exercice de leur fonction de membre de l’Assemblée devra être enregistré auprès du Secrétariat de l’Assemblée.
26. Les membres veilleront à ce que l’utilisation qu’ils font des notes de frais, des indemnités, des locaux et des services mis à disposition par le Conseil de l’Europe soit strictement conforme aux règles applicables en la matière.
27. Les anciens membres de l’Assemblée parlementaire qui s’engagent dans la représentation et la défense des intérêts d’une autre personne ou entité devant l’Assemblée parlementaire ne peuvent, pendant toute la période où ils exercent cette activité, jouir des prérogatives liées au statut de membre associé ou de président honoraire de l’Assemblée parlementaire, en ce qui concerne la diffusion des documents et l’accès aux bâtiments et aux salles de réunion.

Respect du code de conduite

28. Si un membre est soupçonné d’avoir agi en violation du présent code de conduite, le Président de l’Assemblée peut demander des éclaircissements et des compléments d’information au membre en question, au président de sa délégation nationale, au président de son groupe politique ou au président de la commission dont le membre concerné fait partie.
29. S’il y a lieu, le Président de l’Assemblée peut saisir la commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles, qui examinera les circonstances de la violation alléguée et formulera une recommandation quant à une éventuelle décision à prendre par le Président.
30. Si le Président de l’Assemblée conclut que le membre n’a pas respecté le présent code de conduite, il pourra préparer une déclaration motivée qui sera, s’il y a lieu, lue devant l’Assemblée.
31. Les membres s’engagent à coopérer, et ce à tous les stades, à toute enquête sur leur conduite menée par l’Assemblée ou sous l’autorité de l’Assemblée.

B. Exposé des motifs, par M. Heald, rapporteur

(open)

1. Introduction

1. Les membres de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe exercent diverses fonctions: en particulier, ils adoptent des résolutions politiques portant sur des questions d’intérêt stratégique pour les Etats européens, ils participent à des missions d’observation d’élections, soutiennent les activités de divers organismes intergouvernementaux ou autres et élisent les juges de la Cour européenne des droits de l’homme, le Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe, le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe, le Secrétaire général de l’Assemblée parlementaire ainsi que d’autres titulaires de fonctions importantes au sein de l’Organisation.
2. Il est important que les citoyens au nom desquels les parlementaires agissent soient convaincus que les membres de l’Assemblée exercent leurs fonctions en toute bonne foi et non pas pour servir des intérêts privés. Par ailleurs, l’Assemblée doit aussi avoir les moyens de demander des comptes à tout membre qui risquerait de porter atteinte à la réputation de l’institution.
3. Jusqu’à récemment, le Règlement de l’Assemblée ne contenait aucune disposition spécifique relative à la conduite de ses membres. Il semblait tout naturel que ces derniers respectent des principes tels que l’intégrité et l’honnêteté, étant tenus, en leur qualité de parlementaires nationaux, de se conformer aux règles d’éthique et aux dispositions de lutte contre la corruption en vigueur dans leur pays. Dans un premier temps, des règles de conduite n’ont été établies que pour les corapporteurs de la commission pour le respect des obligations et engagements des Etats membres du Conseil de l’Europe (commission de suivi); elles figurent dans le code de conduite à l’usage des corapporteurs, approuvé par la commission en 2001.
4. Lorsqu’elle a examiné les questions relatives à la démocratie et à la lutte contre la corruption dans les années 2000, l’Assemblée a souligné à plusieurs reprises la nécessité pour les parlementaires de déclarer leurs intérêts financiers. Cela a conduit à l’adoption en 2007 de la Résolution 1554 (2007) sur le conflit d’intérêts, qui inscrit dans le Règlement de l’Assemblée l’obligation pour tous les rapporteurs de l’Assemblée de faire une déclaration orale concernant tout intérêt professionnel, personnel, financier ou économique susceptible d’être jugé pertinent ou d’entrer en conflit avec le sujet du rapport. Les membres sont également encouragés, s’il y a lieu, à faire de telles déclarations d’intérêt orales avant de prendre la parole en commission ou en séance plénière.
5. En 2006, l’expérience acquise par la commission de suivi a abouti à une demande d’actualisation des dispositions du code de conduite à l’usage des corapporteurs. Cette initiative a finalement conduit à l’élaboration d’un code de conduite applicable à tous les rapporteurs de l’Assemblée parlementaire, qui a été adopté en 2011 
			(2) 
			Résolution 1799 (2011) relative au code de conduite des rapporteurs de l’Assemblée
parlementaire et Doc. 12524, rapport de la commission du Règlement, des immunités
et des affaires institutionnelles (rapporteur: M. Jean-Claude Mignon,
France, PPE/DC)..
6. Le présent rapport sur le code de conduite des membres de l’Assemblée fait suite à deux propositions de résolution présentées en 2011, qui ont été renvoyées à la commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles pour rapport et fusionnées par décision de cette dernière.
7. En juin 2011, M. Mignon et plusieurs de ses collègues ont présenté une proposition de résolution (Doc. 12669) soulignant la nécessité d’instaurer des règles déontologiques pour l’ensemble des membres de l’Assemblée. Il a notamment été demandé à la commission de régler la question des cadeaux et de prévoir des garde-fous appropriés contre l’acceptation d’offres d’hospitalité en échange de faveurs politiques. Une deuxième proposition de résolution sur le renforcement du mécanisme de déclaration des conflits d’intérêts (Doc. 12754) a été présentée en octobre 2011 par M. Harutyunyan et plusieurs de ses collègues, appelant à une réglementation des activités des groupes d’intérêts (organisations non gouvernementales (ONG), lobbyistes représentant des entités privées ou des Etats), dont l’implication dans les travaux de l’Assemblée s’est accrue ces dernières années. Elle demandait notamment que des règles soient établies sur la transparence et l’obligation de rendre des comptes des membres de l’Assemblée. A ces propositions s’ajoutent les démarches individuelles de certains membres de l’Assemblée 
			(3) 
			Par exemple, un courrier
de la Baroness Nicholson of Winterbourne au Secrétaire général de
l’Assemblée parlementaire du 16 décembre 2011 concernant la présence
devant l’hémicycle de membres des Moudjahidines (MEK – Mudjahaden-e-Kalq)
menant leur activité de lobbying. demandant que soient renforcées les règles d’accès au Palais de l’Europe, principal bâtiment du Conseil de l’Europe.
8. Dans le cadre de la préparation du présent rapport, la commission du Règlement a tenu deux auditions, le 1er décembre 2011 à Vilnius 
			(4) 
			Audition
sur «un code de conduite des membres de l’Assemblée parlementaire»
avec la participation de: M. John Lyon, Parliamentary Commissioner
for Standards, Royaume-Uni; M. Vaidotas Bacevičius, membre de la
commission d’éthique et des procédures du Seimas; M. Sergej Muravjov,
directeur exécutif de Transparency International Lithuania. et le 24 janvier 2012 à Strasbourg 
			(5) 
			Audition sur «Les activités
des groupes d’intérêt à l’Assemblée parlementaire» avec la participation
de: M. Dick Marty, ancien président de la commission de suivi de
l’Assemblée parlementaire (2010‑2011), ancien rapporteur de l’Assemblée;
M. Göran Lindblad, ancien président de la commission des questions
politiques de l’Assemblée parlementaire (2008-2009), ancien rapporteur
de l’Assemblée; M. José Lalloum, président, European Public Affairs Consultancies’
Association (EPACA); M. Christian D. de Fouloy, président, Association
of Accredited Lobbyists to the European Union (AALEP); M. Gregor
Puppink, directeur, Centre européen pour la justice et les droits
de l’homme.. Le rapporteur tient à remercier chaleureusement tous les participants, dont les contributions ont servi à l’élaboration de ce rapport.
9. Les préoccupations exprimées dans les propositions de résolution précitées coïncident avec un appel général au renforcement de la transparence des assemblées élues. En 2007 déjà, l’Assemblée s’était inquiétée du dysfonctionnement des institutions politiques observé dans les Etats membres du Conseil de l’Europe et avait établi que la perte de confiance du public dans l’intégrité des parlementaires était l’une des causes de la crise de la démocratie en Europe 
			(6) 
			Voir les rapports présentés
par la commission des questions politiques en 2007 sur la situation
de la démocratie en Europe (Doc. 11203) et en 2010 sur «La démocratie en Europe: crises et
perspectives» (Doc. 12279), rapporteur: M. Andreas Gross (Suisse, SOC).. Le mécontentement de l’opinion publique s’est amplifié avec les scandales de corruption qui ont éclaté dans plusieurs pays et la crise financière et économique qui a débuté en 2008. Dans ce contexte sensible, les parlements, et notamment l’Assemblée, se sont employés à réaffirmer leur attachement aux principes de transparence et d’intégrité.
10. Par ailleurs, en matière de corruption, les normes générales inscrites dans la Convention des Nations Unies contre la corruption et la Convention pénale du Conseil de l’Europe sur la corruption (STE n° 173) devraient être mises en œuvre au niveau de l’Assemblée également. Le Groupe d’Etats contre la corruption (GRECO) du Conseil de l’Europe a lancé en janvier 2012 son quatrième cycle d’évaluation, portant sur la prévention de la corruption des parlementaires, des juges et des procureurs. Par conséquent, le moment semble opportun pour l’élaboration par l’Assemblée de son propre code de conduite.
11. L’Assemblée reconnaît aujourd’hui le risque de voir les intérêts financiers, économiques, commerciaux ou autres d’un parlementaire entrer en conflit avec ses obligations en tant que membre de l’Assemblée, en particulier dans le cas des rapporteurs ou des membres de missions d’observation des élections. Le but de ce rapport est de clarifier les dispositions du projet de code de conduite des membres de l’Assemblée (figurant en annexe du projet de résolution) et de montrer qu’en dépit des diversités nationales et juridiques, il est possible de parvenir à un consensus sur des grands principes essentiels au bon fonctionnement d’une assemblée d’élus dans une société démocratique, notamment en ce qui concerne la déclaration des cadeaux, des offres d’hospitalité et des conflits d’intérêt, ainsi que l’interdiction de la promotion rémunérée d’intérêts 
			(7) 
			Pour
un tour d’horizon complet de la situation dans l’Union européenne
et les parlements des Etats membres de l’Union, voir le rapport
«Parliamentary Ethics – a question of trust”, Bureau de promotion
de la démocratie parlementaire, Parlement européen, 2011 – <a href='http://www.europarl.europa.eu/pdf/oppd/Page_8/codes_of_conduct_FINAL-ENforweb.pdf'>www.europarl.europa.eu/pdf/oppd/Page_8/codes_of_conduct_FINAL-ENforweb.pdf</a> (en anglais uniquement)..
12. Le rapporteur tient à souligner que l’efficacité du code de conduite dépendra de la disposition des membres à s’y conformer 
			(8) 
			«Aucun ensemble de
règles ne peut s’imposer de manière effective à ceux qui ne sont
pas disposés à en observer l’esprit, et aucune règle de droit ne
peut prévoir toutes les éventualités susceptibles de se présenter
ou d’être imaginées par l’ingéniosité humaine. Le présent code de
conduite a été formulé de manière aussi simple et directe que possible.
Son succès dépend de l’intégrité et du bon jugement de ceux auxquels
il s’applique», extrait du code de conduite de l’Assemblée nationale
d’Afrique du Sud. mais aussi de l’existence d’instruments et d’éléments administratifs permettant d’assurer son application. Après l’adoption du code, sa mise en œuvre sera le prochain défi que l’Assemblée devra relever pour être crédible sur cette question.

2. Champ d’application du code de conduite

13. Le projet de code de conduite vient compléter les règlements internes existants en définissant les normes générales que tous les membres de l’Assemblée sont invités à respecter dans l’exercice de leurs fonctions. Il n’entend pas se substituer au code de conduite des rapporteurs de l’Assemblée, qui a été élaboré en tenant compte de la nature spécifique des fonctions des rapporteurs, ni aux règles applicables, par exemple, à l’observation des élections 
			(9) 
			Les
règles spécifiques concernant les membres chargés de l’observation
d’élection sont énoncées dans les lignes directrices pour l’observation
d’élections par l’Assemblée parlementaire (AS/Bur (2012) 09 rev),
qui demandent notamment aux candidats de déclarer tout conflit d’intérêts:
«18. Au moment de la présentation de leur candidature, tous les
candidats à une commission ad hoc devront déclarer par écrit tout
intérêt économique, commercial, financier ou autre, réel ou potentiel,
à titre professionnel, personnel ou familial, en relation avec le
pays dans lequel se déroulera l’observation des élections. Ils déclareront
également tout cadeau ou avantage en nature importants, y compris
la prise en charge des frais de déplacement, reçus du pays en question.» ou aux membres de la sous-commission chargée de mener les entretiens avec les candidats à l’élection de juge à la Cour européenne des droits de l’homme.
14. Le projet de code de conduite s’applique aux parlementaires en leur qualité de membres de l’Assemblée parlementaire et englobe les situations qui se présentent dans leur vie publique. Le fait qu’il soit adopté par l’Assemblée elle-même lui garantira légitimité et valeur morale; sa crédibilité dépendra quant à elle de son application par les membres et par l’Assemblée.

3. Principes généraux de conduite

15. Le succès d’un cadre déontologique, quel qu’il soit, repose sur l’acceptation de principes fondamentaux par tous ceux à qui il s’applique, indépendamment de leur position idéologique ou politique. Souvent appelés normes éthiques, ces principes généraux offrent un point de repère quant aux comportements que l’on est en droit d’attendre d’une personne donnée. Plutôt qu’imposer des obligations, les principes généraux sont incitatifs et permettent de couvrir toutes les nouvelles situations auxquelles seront confrontés les membres et toutes les nouvelles circonstances dans lesquelles ils pourront être appelés à agir. Ces principes n’étant pas opposables, ils servent à évaluer les plaintes.
16. Les principes généraux figurant au paragraphe [16] du projet de code de conduite s’inspirent des sept principes de la vie publique énoncés en 1995 par la commission sur les normes de la vie publique du Royaume-Uni (la commission Nolan). Des principes similaires, avec des interprétations parfois légèrement différentes, ont été intégrés dans la plupart des codes de déontologie ou de conduite parlementaires et sont aujourd’hui à la base du fonctionnement de toute institution publique dans une société démocratique 
			(10) 
			Ces normes générales
s’inspirent également de celles proposées dans le Guide technique
de la Convention des Nations Unies contre la corruption: «Ces normes
[du code] doivent porter sur des éléments comme les suivants: équité, impartialité,
non-discrimination, indépendance, honnêteté, intégrité, loyauté
à l’égard de l’organisation, diligence, correction du comportement
personnel, transparence, obligation redditionnelle, utilisation
responsable des ressources de l’organisation et comportement approprié
à l’égard du public.».
17. Tout en agissant à titre individuel, les membres représentent l’Assemblée. Ils sont donc tenus de ne pas porter atteinte à la réputation de l’institution par leurs activités publiques. En outre, les parlementaires sont censés ne pas exploiter les ressources disponibles à leur profit ou au profit d’un tiers et faire prévaloir l’intérêt public sur tout autre intérêt dans l’exercice de leurs activités. Les parlementaires étant exposés à une multitude de conflits d’intérêts, le projet de code de conduite entreprend d’établir une distinction claire entre, d’une part, les conflits légitimes relatifs aux services rendus à la population et, d’autre part, les conflits d’intérêts privés. Il importe que ces derniers soient résolus de manière à protéger l’intérêt public. Leur position de premier plan et l’exemplarité requièrent des membres qu’ils soient fidèles aux valeurs qu’ils promeuvent et les invitent à développer leur culture politique et à maintenir une cohésion en termes de déontologie au sein de l’Assemblée 
			(11) 
			L’article 17 du Code
de déontologie des membres de la Saeima de la République de Lettonie
invite les membres à continuer d’acquérir des connaissances sur
la culture démocratique et politique..

4. Règles de conduite

4.1. Réputation de l’Assemblée

18. Le paragraphe [18] du projet du code de conduite vise à protéger la réputation de l’institution elle-même. Les membres peuvent jeter le discrédit sur l’institution par divers actes susceptibles d’être contraires à l’éthique, illégaux ou considérés comme inappropriés par l’Assemblée. Ces actes sont en général incompatibles avec l’obligation des membres d’agir dans l’intérêt public. A titre d’exemple, on peut citer une attitude qui témoignerait d’un manque de respect manifeste et systématique à l’encontre de personnes en raison de leur sexe, de leur race ou de leur religion, ou encore une utilisation inappropriée des locaux de l’Assemblée à des fins personnelles. Il se peut aussi que des actes illicites ne soient pas directement rattachés à la fonction du membre au sein de l’Assemblée, mais qu’ils soient si préjudiciables à la réputation de l’institution qu’ils appelleront une action de l’Assemblée. Une mise en examen d’un membre pour détournement de fonds ou fraude, par exemple, entrerait dans cette catégorie.

4.2. Conflits d’intérêts

19. Le paragraphe [19] oblige les membres de l’Assemblée à éviter certains types de conflit d’intérêts. Or, certains conflits sont inévitables: ainsi, les membres de l’Assemblée peuvent représenter des agriculteurs qui auront des points de vue divergents de ceux des entreprises sur les questions relatives à l’occupation des sols, être des médecins en désaccord avec des théologiens sur le commencement de la vie ou encore des promoteurs immobiliers en conflit avec des défenseurs de l’environnement. Ce n’est pas à ces conflits que s’appliquent les dispositions du paragraphe en question. En revanche, il est demandé aux membres de faire prévaloir l’intérêt public sur tout autre intérêt et de déclarer tout conflit qu’ils ne parviennent pas à résoudre 
			(12) 
			Par exemple, un membre
pourrait présenter une brève déclaration orale avant de prendre
la parole au sein de l’Assemblée ou d’une commission.. Les conflits à éviter découlent souvent d’intérêts personnels et impliquent dans bien des cas des avantages financiers pour un membre, sa famille ou ses amis.
20. La divulgation des intérêts, outre le fait qu’elle favorise la transparence, rappelle également aux membres de l’Assemblée qu’il y a toujours un risque que le public ou leurs collègues considèrent certains de leurs actes comme étant biaisés 
			(13) 
			Toute décision ou action
peut être considérée comme potentiellement faussée si, par exemple,
un membre de l’Assemblée participant à une mission d’observation
des élections dans un pays donné fait partie des actionnaires principaux
ou du conseil d’administration d’un groupe qui essaie d’entrer sur
le marché dans ce pays ou d’y renforcer sa position, ou s’il appartient
à un groupe d’amitié entre son parlement national et le parlement
du pays en question. Dans ce cas, la déclaration des intérêts n’empêcherait
pas les membres concernés d’exercer leurs fonctions, mais apporterait davantage
de transparence et leur rappellerait que tous leurs actes sont susceptibles
d’être passés au crible..
21. La quasi-totalité des Etats membres du Conseil de l’Europe disposent de lois, de règles ou de lignes directrices sur les conflits d’intérêts concernant les membres de leurs assemblées législatives. L’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) a produit plusieurs études importantes sur la nécessité de gérer les conflits d’intérêts et de créer des systèmes à cette fin 
			(14) 
			Par exemple, «Renforcer
l’éthique dans le service public: les mesures des pays de l’OCDE»
et «Gérer les conflits d’intérêts dans le service public».. Parmi les dispositifs permettant de prévenir les conflits d’intérêts, on trouve la divulgation des intérêts financiers et autres, la mise en place d’une structure de conseil en matière de déontologie pour les membres et une formation régulière aux questions d’éthique.
22. Le paragraphe [19] fait référence aux conflits réels et potentiels. L’identification des conflits potentiels consiste pour les membres à envisager les situations dans lesquelles leurs actions et décisions risquent de donner lieu à un véritable conflit d’intérêts ou d’apparaître a posteriori comme inappropriées aux yeux de leurs collègues ou des citoyens. L’avis du Secrétaire général de l’Assemblée pourrait être sollicité pour une telle identification.
23. Le paragraphe [20] encourage les membres à faire des déclarations d’intérêts ad hoc 
			(15) 
			Transparence
et déclaration d’intérêts des membres, article 2, textes complémentaires.. Toutefois, une déclaration écrite est jugée plus appropriée dans certains cas, par exemple pour les membres chargés d’observer les élections. Ainsi, les lignes directrices pour l’observation des élections par l’Assemblée parlementaire prévoient, depuis leur dernière modification le 27 janvier 2012, que tout candidat à une mission d’observation doit remplir un formulaire de déclaration spécial incluant des informations sur les domaines dans lesquels des conflits d’intérêts, réels ou potentiels, pourraient survenir compte tenu des tâches spécifiques liées à l’observation d’élections.

4.3. Interdiction de la promotion rémunérée d’intérêts

24. Le paragraphe [21] donne un exemple de conflit d’intérêts lorsqu’un membre devient un promoteur rémunéré d’intérêts – par un groupe ou une personne extérieure – pour défendre une cause ou soulever une question devant l’Assemblée. Même si le membre en question affirme que cette rémunération extérieure n’a pas d’impact sur ses décisions, le fait que le public puisse y voir une influence est susceptible de nuire à la réputation de toute l’institution. Cela n’empêche toutefois pas les membres d’exercer des activités rémunérées (comme consultant ou conseiller juridique) ou d’être employés conformément aux réglementations nationales en vigueur, à condition qu’ils ne perçoivent aucune rémunération ou avantage en nature pour défendre un intérêt donné auprès de l’Assemblée.

4.4. Acceptation de rétributions, indemnités, cadeaux et autres avantages similaires

25. La disposition prévue au paragraphe [22], interdisant aux parlementaires de solliciter ou d’accepter une indemnité, une gratification ou des cadeaux extérieurs pour les influencer dans leur rôle législatif, est courante en Europe. En outre, la question de l’acceptation d’un cadeau entraînant un conflit d’intérêts apparent revêt également de l’importance car souvent, «les citoyens ne peuvent juger de la conduite de leurs dirigeants que sur les apparences. Pour une personnalité politique, faire fi des apparences reviendrait donc à refuser une certaine forme de responsabilité démocratique 
			(16) 
			Stuart
C. Gilman, «Appearance of Impropriety», Encyclopedia
of Public Administration and Public Policy (NY: Crc Pr I
Llc, 203).».
26. La plupart des pays donnent une définition large des «cadeaux», couvrant les objets dont la valeur est supérieure à un certain montant, les frais de déplacement, les billets pour des événements culturels ou sportifs, les services rendus ou cadeaux offerts à la famille proche et les prêts personnels accordés par des entités privées ou par des administrations publiques. Les dispositions applicables concernent tout avantage offert par un tiers, que ce soit de la part des pouvoirs publics ou de personnes ne représentant pas des intérêts publics.
27. Offrir des cadeaux est une expression du savoir-vivre qui s’inscrit dans le cadre des relations humaines normales. En outre, les déjeuners de travail ou événements sociaux donnent souvent l’occasion aux parlementaires de débattre d’une question ou d’établir des relations de travail constructives avec d’autres.
28. En matière de cadeaux, les politiques, coutumes et niveaux d’hospitalité varient selon les pays. Cela étant, quelques indicateurs, quoique subjectifs, permettent de déterminer si un avantage donné peut être considéré comme inapproprié ou constituer un conflit d’intérêts. Il convient toujours de se poser les questions suivantes avant d’accepter un cadeau ou une rémunération: l’information concernant ce cadeau ou cette rémunération serait-elle embarrassante pour celui qui les reçoit («sunshine test») si elle était rendue publique? Ce cadeau ou cette rémunération peuvent-ils être considérés comme proportionnés aux objectifs légitimes poursuivis? Leur financement provient-il de sources dignes de confiance?

4.5. Utilisation de la fonction pour servir des intérêts privés

29. Des dispositions similaires à celles du paragraphe [23] concernant l’utilisation de la fonction pour servir des intérêts privés se retrouvent sous une forme ou une autre dans la plupart des codes de conduite 
			(17) 
			Principes de déontologie
des députés du Sejm de la République de Pologne, article 3.. Cette problématique concerne particulièrement les membres d’assemblées législatives, car bon nombre de leurs décisions entraînent des gains pour une ou plusieurs parties privées. La différence entre un processus de décision acceptable et une décision illicite réside dans le fait que, dans le deuxième cas, l’action a été menée dans le but d’enrichir le membre concerné, sa famille ou ses amis, et non dans l’intérêt public 
			(18) 
			Notons
que, dans la pratique, il y a lieu d’établir une distinction entre
les avantages limités et ceux qui profitent à un vaste groupe de
citoyens. De nombreux actes législatifs entrent dans la deuxième
catégorie. A titre d’exemple, un parlementaire qui vote en faveur
d’une mesure s’adressant à une vaste catégorie de citoyens (ceux
qui ont des actions ou des obligations, par exemple) pourra également
bénéficier de cette mesure s’il appartient à la catégorie de personnes
en question..

4.6. Utilisation impropre de l’information

30. L’utilisation abusive de l’information (paragraphe [23]) à des fins personnelles, économiques ou politiques est l’une des formes de corruption les plus pernicieuses dans les assemblées législatives 
			(19) 
			Code
de déontologie des membres de la Saeima de la République de Lettonie,
article 12; code de conduite de la Chambre des communes du Royaume-Uni,
règle 13; code de conduite des rapporteurs de l’Assemblée parlementaire, paragraphe 1.2.. Récemment, aux Etats-Unis, des modifications ont été apportées aux règles en vigueur pour empêcher les législateurs d’utiliser des renseignements confidentiels pour réaliser des opérations d’initiés. En effet, les parlementaires avaient utilisé des informations recueillies dans le cadre d’entretiens privés ou à huis clos pour acheter ou vendre des actions ou d’autres intérêts financiers (par exemple patrimoine immobilier). Ils n’étaient pas visés par les lois relatives au délit d’initiés car ils bénéficiaient d’une immunité en tant que législateurs. Paradoxalement, personne d’autre qu’eux au sein du gouvernement n’était exempté des sanctions pénales strictes applicables en la matière 
			(20) 
			<a href='http://www.cbsnews.com/8301-18560_162-57323527/congress-trading-stock-on-inside-information/'>www.cbsnews.com/8301-18560_162-57323527/congress-trading-stock-on-inside-information/</a>.. Cette problématique apparaît clairement dans la Convention des Nations Unies contre la corruption 
			(21) 
			Guide technique de
la Convention des Nations Unies contre la corruption, article 8.II.2. et plusieurs études de l’OCDE 
			(22) 
			Voir
par exemple «Renforcer l’éthique dans le service public», OCDE,
2000, p. 28-35.; elle figure également parmi les points à examiner dans le questionnaire utilisé pour le quatrième cycle d’évaluation du GRECO.

4.7. Seuil d’enregistrement des cadeaux et avantages similaires

31. Il n’est pas rare que des citoyens, souhaitant manifester leur reconnaissance envers les membres du corps législatif, leur offrent un cadeau – un café, un déjeuner bon marché, des stylos, des livres, des bouteilles de vin ou encore une corbeille de fruits provenant d’un agriculteur, par exemple. Le problème se pose lorsque ce cadeau va au-delà du geste symbolique. Le paragraphe [25] tente de remédier à cela en prévoyant un seuil de valeur qui permettra de faire la différence entre un simple cadeau de courtoisie et un cadeau inapproprié. L’objectif est d’éviter les plaintes visant un membre qui se serait vu offrir un thé et un croissant au café local 
			(23) 
			The Telegraph a signalé que des
membres de la Chambre des communes du Royaume-Uni avaient enregistré
des pots de miel ou des bouquets de fleurs..
32. Il sera demandé aux membres de l’Assemblée d’enregistrer tous les cadeaux et avantages similaires acceptés dont la valeur est supérieure à un montant minimal prédéfini. Les seuils d’enregistrement peuvent être fixés de différentes manières. Certains parlements prévoient un montant fixe 
			(24) 
			1 500 rand
(environ 147 euros), code de conduite des membres de l’Assemblée
et du Conseil permanent, Afrique du Sud; 750 AUD (environ 585 euros)
dans le cas d’un cadeau offert par une source gouvernementale officielle
et 300 AUD (environ 234 euros) si le donateur est un particulier
ou un organisme non gouvernemental, Sénat d’Australie; les membres du
Parlement européen s’interdisent d’accepter tout cadeau dont la
valeur approximative est supérieure à 150 euros, article 5 du code
de conduite., d’autres le déterminent en fonction du salaire mensuel des parlementaires 
			(25) 
			Supérieur à 570 £,
soit 1% du salaire annuel d’un membre du Parlement écossais. ou encore par rapport au salaire national moyen 
			(26) 
			Supérieur au salaire
mensuel moyen aux termes de la loi de Croatie sur la prévention
des conflits d’intérêts dans l’exercice de fonctions publiques (environ
725 euros, source: croatiatime.com).. En ce qui concerne l’Assemblée, il serait difficile de faire la moyenne des montants autorisés par les 47 parlements des Etats membres du Conseil de l’Europe, étant donné que certains parlements ne fixent aucune limite tandis que certains pays prévoient un montant supérieur au salaire moyen observé dans d’autres Etats membres. Le rapporteur propose donc de fixer le seuil à 200 euros, jugeant que ce montant permet d’exprimer une marque de courtoisie sans être considéré comme excessif par le citoyen européen moyen. En outre, pour éviter toute allégation d’influence ou de corruption, l’obligation d’enregistrer tous les cadeaux, divertissements, repas, hébergements etc. d’une valeur supérieure à 200 euros permettrait aux membres d’invoquer cette obligation d’enregistrement pour refuser de tels cadeaux ou avantages similaires dans des pays ayant une forte tradition d’hospitalité. Ce seuil concorde également avec les dispositions qui s’appliquent aux agents du Conseil de l’Europe, leur demandant de ne pas accepter des cadeaux d’une valeur supérieure à 100 euros 
			(27) 
			Arrêté n° 1296 du 18
décembre 2008 relatif à l’acceptation de rétributions, cadeaux,
décorations ou distinctions, invitations et autres avantages provenant
de sources extérieures à l’Organisation..

4.8. Utilisation abusive des ressources

33. La question de l’utilisation abusive des ressources de l’Assemblée est traitée au paragraphe [22]. Servir le public est un privilège et les membres ne doivent pas utiliser de manière abusive les aides financières ou autres dont ils bénéficient dans le cadre de leurs fonctions 
			(28) 
			L’article 3 des principes
de déontologie applicables aux députés en Pologne et l’article 9
du code de conduite des membres de la Dail Eireann traitent notamment
des dépenses abusives et de l’usage abusif des locaux et services.. Il y a trois ans à peine, les journaux britanniques ont révélé de vastes abus dans l’utilisation des notes de frais par les parlementaires. En conséquence, les règles en la matière ont été renforcées et les autorités exigent maintenant plus de transparence concernant les sommes versées aux parlementaires par le biais de la publication des informations sur le site web 
			(29) 
			<a href='http://www.public-standards.gov.uk/OurWork/MPs__Expenses_and_Allowances_x.html'>www.public-standards.gov.uk/OurWork/MPs__Expenses_and_Allowances_x.html</a>.. D’autres parlements mettent à disposition, sur demande, les informations concernant les rémunérations et indemnités versés aux députés 
			(30) 
			L’Eduskunta
de Finlande..

4.9. Anciens membres

34. Le paragraphe [23] concerne l’un des problèmes les plus délicats auxquels sont confrontés les membres d’assemblées législatives: comment trouver un juste équilibre entre les prérogatives légitimes des anciens membres de l’Assemblée et le risque que ces derniers utilisent abusivement l’accès spécial qui leur est accordé pour en tirer un avantage financier? Deux questions seront examinées ici, qui se posent concernant les anciens membres de l’Assemblée: d’une part, les restrictions applicables à l’activité des membres à l’issue de leur mandat et, d’autre part, l’accès des anciens membres aux documents et bâtiments de l’Assemblée.

4.9.1. Restrictions applicables aux anciens membres

35. Leur connaissance des membres et des procédures de l’Assemblée font des anciens membres des cibles de recrutement toutes trouvées pour les organisations de lobbying; cela leur donne également tous les outils nécessaires pour créer eux-mêmes de telles organisations. Il n’est ni utile ni raisonnable que l’Assemblée ait le pouvoir de les empêcher d’avoir des sources de revenus ou d’accéder à un emploi.
36. Bien que relativement récentes dans les Etats membres du Conseil de l’Europe, des restrictions applicables aux anciens membres sont adoptées ou envisagées dans de nombreux pays européens; elles s’inscrivent dans un souci plus général d’éviter les abus de pouvoir par les anciens membres d’assemblées. Une étude de l’OCDE a examiné les différentes approches nationales de l’après-mandat dans les pays membres de l’OCDE 
			(31) 
			OCDE, L’emploi d’après mandat: Bonnes pratiques en
matière de prévention des conflits d’intérêts. . Les mesures prises prennent généralement la forme de périodes de restriction des contacts ou de la représentation vis-à-vis des parlementaires, qui s’étendent de une à quelques années; aux Etats-Unis, elles peuvent même prendre la forme d’une interdiction à vie pour un nombre limité de personnes 
			(32) 
			Voir
18 USC 207 et réglementations annexes. En outre, d’après le code
ministériel du Royaume-Uni, 7.25, les ministres qui ont quitté leur
poste doivent s’abstenir de toute activité de lobbying auprès du
gouvernement pendant une période de deux ans..
37. De l’avis du rapporteur, il n’est pas nécessaire, du moins à ce stade, d’imposer de telles restrictions aux anciens membres de l’Assemblée. Bien qu’un certain nombre d’entre eux exercent aujourd’hui officiellement des activités de lobbying, l’étendue du problème n’appelle pas la mise en place de telles restrictions. Cela dit, afin de garantir des conditions égales pour tous, les anciens membres devraient avoir les mêmes prérogatives en termes d’accès aux documents et aux bâtiments que les représentants d’intérêts venant de l’extérieur.

4.9.2. Accès des anciens membres aux documents et aux bâtiments

38. En Europe, la plupart des parlements accordent à leurs anciens membres des privilèges incluant un accès complet à l’ensemble de leurs bâtiments et installations. Toutefois, certaines assemblées législatives d’Europe et d’Amérique du Nord ont connu des scandales politiques retentissants, provoqués par l’octroi d’un tel accès libre à leurs anciens membres. La Chambre des communes du Royaume-Uni a réglé ce problème en adoptant au milieu des années 1990 des règles couvrant les activités de lobbying par les membres, leur famille, les journalistes et autres personnels 
			(33) 
			OCDE, op. cit., p. 74-75.. Actuellement, elle examine le problème de l’utilisation par les anciens membres de leur accès illimité pour exercer des activités de lobbying 
			(34) 
			Récemment, le Bureau
of Investigative Journalism a révélé que «sur les 79 députés [britanniques]
ayant demandé une carte d’accès d’ancien membre après les élections
de 2010, un sur cinq travaille pour une société ou une organisation susceptible
d’avoir un intérêt à influencer les députés actuels. Plusieurs d’entre
eux ont travaillé pour des organisations de lobbying. 326 anciens
députés détiennent une carte d’accès d’ancien membre, qui leur permet
de rencontrer des députés de manière informelle, de faire entrer
des invités à la Chambre des communes et de réserver un restaurant
avec leur famille au Palais de Westminster», source: «Lobbying:
calls for transparency over former MPs’ access to Parliament», The Independent, 15 décembre 2011,
p. 1..
39. Le Règlement actuel de l’Assemblée prévoit des prérogatives spéciales pour les associés et présidents honoraires de l’Assemblée. En particulier, les associés honoraires, c’est-à-dire tous les membres ayant fait partie de l’Assemblée pendant plus de cinq ans ou ayant occupé les fonctions de président ou de vice-président de l’Assemblée, de président de commission ou de président d’un groupe politique, ont accès aux mêmes lieux que les membres actuels, y compris à l’hémicycle, à l’exception des salles de réunion des commissions pendant les réunions de celles-ci 
			(35) 
			Règlement
spécial sur l’honorariat à l’Assemblée parlementaire. Voir également
Règlement spécial sur le titre et les prérogatives de président(e)
honoraire de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, paragraphe 2.. Les associés honoraires peuvent également demander à être inscrits sur les listes d’envoi des documents officiels de l’Assemblée et de certains documents de commission non confidentiels.
40. Le rapporteur propose que tout ancien membre qui est invité, de manière formelle ou informelle, à défendre des intérêts auprès de l’Assemblée, se voie refuser ces prérogatives pendant la période où il exerce une telle activité. Il continuera toutefois d’avoir accès au Palais de l’Europe et aux documents de l’Assemblée dans les mêmes conditions que d’autres représentants d’intérêts. Par conséquent, le Bureau de l'Assemblée est invité à modifier le règlement spécial sur l’honorariat à l’Assemblée parlementaire et le règlement spécial sur le titre et les prérogatives de Président(e) honoraire de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe.

5. Accès des représentants de groupes d’intérêts aux bâtiments au cours des sessions de l’Assemblée parlementaire

41. Le rapporteur fait remarquer que, même si cette question n’est pas traitée dans le projet de code de conduite des membres de l’Assemblée, elle doit être examinée pour répondre à l’une des préoccupations soulevées dans la proposition de résolution intitulée «Renforcer le mécanisme de déclaration des conflits d’intérêts à l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe». Aux fins du présent chapitre, le rapporteur a examiné les normes élaborées par l’OCDE 
			(36) 
			OCDE, Lobbying, pouvoirs publics et confiance, Volume 1
– Quel cadre législatif pour plus de transparence?, la législation en vigueur dans les Etats membres du Conseil de l’Europe et les lignes directrices suivies par d’autres pays en la matière 
			(37) 
			Pour une approche complète
de la question, on se reportera à la Recommandation 1908 (2010) et au rapport de l’ancienne commission des questions
économiques et du développement sur le lobbying dans une société
démocratique (Code européen de bonne conduite en matière de lobbying)
(Doc. 11937), rapporteur: M. José Mendes Bota (Portugal, PPE/DC)..
42. Il en a conclu – eu égard en particulier au mode de fonctionnement de l’Assemblée – qu’il n’y avait pas lieu, à ce stade du moins, de définir la notion de lobbyiste professionnel et de différencier ce dernier d’autres catégories de personnes ayant un intérêt personnel ou financier à défendre leur cause auprès de l’Assemblée.
43. La plupart des parlements modernes s’orientent vers une maîtrise des effets des influences extérieures, reconnaissant que des abus peuvent se produire. D’après une étude récente, «près de 80% des amendements déposés» dans les commissions du Parlement européen émanaient directement de représentants d’intérêts et «les 20% restants trouvaient souvent leur inspiration en dehors du Parlement» 
			(38) 
			«Lobbying the European
Parliament: A necessary evil», Maja Kluger Rasmussen, n° 242, mai 2011,
CEPS.. Lorsqu’ils sont confrontés à des questions techniques, complexes ou urgentes, les parlementaires et leurs assistants s’appuient souvent sur les informations fournies par les groupes d’intérêts. Dans le cas de l’Assemblée, cette remarque pourrait s’appliquer à la rédaction de rapports, en totalité ou en partie, ainsi qu’à l’élaboration de propositions de texte et d’amendements par des représentants externes. Des considérations similaires ont été émises par les participants à une discussion sur un nouveau code de conduite des membres du Parlement européen lorsque la question de «l’empreinte législative» 
			(39) 
			«Une
liste indicative (…) des représentants d’intérêts accrédités qui
ont été consultés et ont eu un rôle important durant la préparation
du rapport». a été examinée. Une telle «empreinte législative» exigerait que toutes les personnes ayant apporté leur concours à la rédaction d’un document donné soient citées 
			(40) 
			L’insuffisance du registre
des représentants de groupes d’intérêts pour garantir la transparence
a été soulignée par une étude sur l’influence à l’Assemblée nationale
française, menée par Transparence International France et Regards citoyens
en 2009-2010. L’étude a mis en évidence le décalage entre le nombre
de groupes inscrits au registre officiel (120) et le nombre d’organismes
(5 000) qui ont été entendus dans le cadre de la préparation de
1 174 rapports; <a href='http://www.regardscitoyens.org/transparence-france/etude-lobbying/'>www.regardscitoyens.org/transparence-france/etude-lobbying/</a>., contribuant ainsi à l’objectif de transparence visé déjà par le registre. Cette idée a toutefois rencontré l’opposition de députés européens qui souhaitaient protéger leurs sources d’information.
44. Beaucoup de ces abus sont souvent liés à l’accès à l’information interne, aux locaux ou aux services. Actuellement, les représentants de groupes d’intérêts ne rencontrent que peu, voire pas de difficultés à accéder aux espaces réservés aux membres de l’Assemblée parlementaire ou à son personnel, comme le bar des parlementaires, le service de la séance et les bureaux des délégations situés à l’étage.
45. Les bons professionnels connaissent l’emplacement des bureaux des parlementaires et le chemin qu’ils empruntent pour se rendre aux séances; ils savent également où se tiennent les réunions et où se procurer des documents. Cela est susceptible d’avoir des répercussions négatives sur le travail et la réputation de l’Assemblée. D’un autre côté, cet accès et cette transparence sont essentiels pour le processus démocratique et doivent être protégés. Certains affirment que le droit de savoir qui cherche à influencer les législateurs est un droit fondamental des citoyens 
			(41) 
			Voir Henri Brun et
Guy Tremblay, «Le droit du public de savoir qui cherche à influencer
le gouvernement: un droit fondamental», Ethique
publique, 2006, vol. 8, n° 1, p. 123-136..
46. Bien que la transparence et l’ouverture soient nécessaires pour maintenir la confiance du public dans ses institutions démocratiques, il est aussi important que les membres des assemblées disposent d’un espace privé pour travailler. Les espaces privés au sein des bâtiments législatifs (hémicycle, certaines salles de réunion, bureaux des délégations) leur permettent de tenir des discussions informelles avec leurs collègues avant de rédiger des documents importants ou d’organiser leur emploi du temps pour pouvoir rencontrer des citoyens ou des représentants de groupes d’intérêts. L’absence d’espace permettant de débattre en privé, sans la présence de représentants d’intérêts ou des médias, est une entrave à l’efficacité et à la rapidité du travail des parlements.
47. En ce qui concerne l’Assemblée, les règles en vigueur semblent autoriser un accès relativement large aux locaux de l’Assemblée. Certaines personnes possèdent déjà leurs badges (par exemple, des représentants des ONG internationales ayant un statut participatif auprès du Conseil de l’Europe) ou peuvent se voir attribuer des badges sur demande d’un membre de l’Assemblée, du Secrétaire général de l’Assemblée ou du personnel du secrétariat 
			(42) 
			Ces
considérations ainsi que l’analyse ci-dessous concernent l’accès
au Palais de l’Europe durant les sessions de l’Assemblée parlementaire.
Aucune autorisation d’accès n’est requise pour assister aux réunions
de la Commission permanente de l’Assemblée parlementaire., permettant ainsi à des représentants de groupes d’intérêts d’accéder sans grande difficulté aux espaces publics et d’accès restreint du Palais de l’Europe.
48. La plupart des pays répondent au souhait des citoyens d’en apprendre davantage sur le travail des assemblées législatives en organisant des visites guidées de certaines parties des bâtiments. Toutefois, le public est souvent isolé dans des tribunes; il n’a pas le droit d’entrer dans l’hémicycle ou dans les salles donnant accès à l’hémicycle, où se tiennent les débats relatifs aux travaux des législateurs 
			(43) 
			Conformément
à l’article 22.2 du Règlement, sont admises dans les tribunes les
personnes qui y sont autorisées par le Secrétaire général de l’Assemblée
parlementaire.. La majorité des parlements ont un règlement qui autorise une personne à accéder aux bâtiments sur invitation d’un membre du personnel ou d’un parlementaire, mais pour une durée très limitée seulement et à condition qu’elle soit accompagnée d’un membre du personnel ou d’un parlementaire tout au long de son séjour dans le bâtiment. Le Parlement européen et le Sejm polonais, qui garantissent un accès plus flexible aux représentants d’intérêts accrédités, imposent toutefois des restrictions en ce qui concerne les zones accessibles 
			(44) 
			Le
seul pays européen qui dispose de règles détaillées sur l’accès
des lobbyistes accrédités aux bâtiments est la Pologne. L’article 201b, paragraphe 2, du Règlement du
Sejm est rédigé comme suit: «les détenteurs d’un laissez-passer temporaire,
délivré pour une durée déterminée, seront autorisés à utiliser une
entrée particulière et à se déplacer dans les zones indiquées, définies
par la Chancellerie du Sejm»..
49. De l’avis du rapporteur, l’Assemblée se doit de suivre la tendance générale visant à accroître la transparence du fonctionnement des institutions et, en même temps, d’obliger les membres à se montrer plus responsables et à rendre des comptes quant aux personnes auxquelles ils adressent une invitation.
50. Le Bureau doit envisager de réviser les règles actuelles régissant l'accès au Palais de l'Europe et l’utilisation des locaux en tenant compte des considérations ci-dessus et des éléments suivants: la possibilité d'introduire des badges spéciaux pour les représentants des groupes d'intérêts, de garantir une distinction clairement établie entre les espaces publics et d’accès restreint et d’assurer la mise en œuvre effective des règles d'accès ainsi révisées par des agents de sécurité et les membres du personnel.
51. La révision envisagée a pour objet d’apporter plus de transparence et d'efficacité et d’améliorer le fonctionnement de l'Assemblée. Elle ne vise ni à restreindre le droit des parlementaires de recevoir des informations de la part de représentants de groupes d’intérêts, ni à fermer la porte à ceux qui souhaitent faire connaître leur point de vue. Par ailleurs, le rapporteur est pleinement conscient du fait qu’aucune règle, si détaillée soit-elle, ni aucune déclaration formelle – y compris des badges facilement identifiables pour les représentants de groupes d'intérêts ou une déclaration des membres relative à l'absence de conflits d'intérêts – ne constituent des garanties suffisantes contre ceux qui choisiront de contrevenir à l'esprit de ces règles.

6. Mécanisme d’application

52. Des voix, celles des citoyens, des groupes d’intérêts et des médias, s’élèvent dans la société pour exiger une surveillance accrue de l’intégrité des parlementaires.
53. De nombreuses législations nationales accordent aux membres des parlements une immunité spéciale qui leur permet d’échapper à toute responsabilité pénale et civile pour les actes accomplis dans l’exercice de leurs fonctions parlementaires, voire lorsqu’ils agissent en tant que simples citoyens. L’étendue et la nature de ces immunités, qui ont été créées à l’origine pour garantir l’indépendance des parlementaires vis-à-vis de l’exécutif, sont le fruit du contexte culturel, historique et constitutionnel propre à chaque pays. On exige aujourd’hui une surveillance plus étroite des parlements, qui passe notamment par une réduction de l’étendue des immunités et la mise en place de garde-fous contre l’abus de privilèges 
			(45) 
			On trouvera davantage
d’informations sur les régimes de l’immunité parlementaire dans
les parlements nationaux dans le rapport de 2003 de la commission
sur le Règlement et les immunités intitulé «Immunités des membres
de l’Assemblée parlementaire» (Doc. 9718 rev), en particulier aux paragraphes 92-98. En outre,
certains pays prévoient la possibilité pour les citoyens (Ouganda)
ou les partis (Guyane) de révoquer un représentant élu inefficace.
Six cantons suisses prévoient ce droit. D’autres pays ont récemment
envisagé la mise en place de mécanismes similaires pour accroître
l’obligation de rendre compte des représentants élus.. En réponse à ces demandes, plusieurs parlements ont établi des dispositifs qui leur permettent de demander des comptes à leurs membres, y compris en cas de violation des règles internes telles que les codes de conduite.
54. Le projet de code de conduite propose d’instaurer un mécanisme d’application pour assurer le respect des règles de conduite, mécanisme qui serait basé sur trois composantes: la prévention, les enquêtes et les sanctions.
55. La prévention englobe la diffusion d’informations et d’orientations. Les orientations sont importantes pour garantir une application effective du code de conduite, et ce à plusieurs égards: tout d’abord, elles permettent de donner un ton positif en soulignant que l’on attend de tous les membres qu’ils fassent preuve d’honnêteté et se comportent de manière conforme à l’éthique. Motivés par l’intégrité, tous les membres demanderont à recevoir des conseils s’ils ont des questions sur l’application du code. Cela est susceptible de réduire le nombre de violations. Deuxièmement, aucun code ne saurait être exhaustif: par conséquent, des individus responsables chercheront à obtenir de l’aide sur les aspects qui ne sont pas spécifiquement ou directement abordés dans le texte. Troisièmement, le langage employé dans le code peut avoir des significations différentes d’un individu à l’autre, par exemple en ce qui concerne la notion de «cadeau». Enfin, l’Assemblée représentant une multitude de pays, avec des cultures politiques et des langues différentes, ses membres doivent avoir l’occasion de clarifier certains points pour éviter tout acte illicite découlant d’une mauvaise interprétation des règles.
56. Le paragraphe [15] du projet de code de conduite donne au Secrétaire général de l’Assemblée parlementaire la possibilité de donner des orientations sur le code, en tant que tierce partie neutre. On trouve des dispositions similaires dans d’autres codes de conduite, autorisant un organe indépendant 
			(46) 
			Commissaire parlementaire
aux normes de conduite de la Chambre des communes du Royaume-Uni., le service juridique d’un parlement 
			(47) 
			Les services compétents
du secrétariat du Folketing danois ou du Bundestag allemand fournissent
une assistance et des informations pour le compte du président., ou encore le secrétaire général du parlement ou son adjoint 
			(48) 
			L’Eduskunta de Finlande. à formuler des recommandations. Le rapporteur considère qu’il y a lieu d’ajouter une séance d’information sur le code de conduite aux ateliers que le secrétariat de l’Assemblée parlementaire organise pour les nouveaux membres de l’Assemblée 
			(49) 
			Au sein de la Chambre
des communes britannique, le Commissaire parlementaire aux normes
de conduite et le responsable du registre des intérêts financiers
des membres donnent des conseils sur le code de conduite; des sessions d’information
sont organisées et le code est disponible en format de poche pour
les membres..
57. En ce qui concerne les procédures d’investigation mises en place par les parlements nationaux, une enquête peut être ouverte par un organe indépendant 
			(50) 
			Commissaire
parlementaire aux normes de conduite de la Chambre des communes
du Royaume-Uni; déontologue de l’Assemblée nationale française., par le président du Parlement 
			(51) 
			Bundestag
allemand, article 8 du code de conduite. ou encore par une commission parlementaire compétente, de son propre chef ou à la suite d’une plainte, même anonyme 
			(52) 
			Croatie, loi sur la
prévention des conflits d’intérêts dans l’exercice de fonctions
publiques, article 18(2).. A ce stade, des informations complémentaires peuvent être obtenues directement auprès du membre concerné ou auprès d’un organe ou des fonctionnaires compétents 
			(53) 
			Par exemple, il pourrait
être demandé au président de la délégation nationale concernée de
fournir un complément d’informations..
58. De l’avis du rapporteur, la procédure envisagée dans le projet de code de conduite est conforme à l’esprit du Règlement en vigueur et cadre avec les politiques existantes. Aux termes du Règlement, le bon déroulement des travaux de l’Assemblée relève de manière générale de la responsabilité de son président; en toute logique, ce dernier devrait donc être le premier à enquêter sur des allégations de mauvaise conduite d’un membre. Dans plusieurs parlements, la supervision de la conduite des membres relève du président du parlement 
			(54) 
			Bundestag allemand, op. cit., qui peut demander l’aide d’autres organes et commissions parlementaires 
			(55) 
			Commission consultative
du Parlement européen, Commission d’éthique des députés du Sejm
de Pologne. ou d’un groupe politique 
			(56) 
			Bundestag allemand, op. cit. pour clarifier la question.
59. Lors de l’enquête, le Président de l’Assemblée devrait pouvoir demander des informations et des éclaircissements au président de la délégation nationale, au président de la commission ou au président du groupe politique auxquels le membre appartient. Cette dernière possibilité serait particulièrement intéressante pour les violations présumées commises dans le cadre de l’observation des élections, les membres des missions d’observation des élections étant nommés par leurs groupes politiques respectifs 
			(57) 
			Elle serait également
pertinente pour toutes les commissions ad hoc du Bureau, dont les
membres sont généralement désignés par les groupes politiques..
60. Le Président de l’Assemblée devrait également avoir la possibilité de demander à la commission du Règlement de formuler une recommandation. En effet, étant donné sa composition et son mandat, qui consiste notamment à examiner toute demande de levée d’immunité et toute contestation des pouvoirs (des procédures qui donnent lieu à une audition contradictoire), la commission du Règlement est bien placée pour recueillir les données nécessaires, organiser une audition équitable et évaluer les faits à la lumière des précédents.
61. La plupart des parlements ont la possibilité de sanctionner les membres dont la conduite est jugée inappropriée. Ces sanctions, si elles sont imposées par les pairs plutôt que par une autorité indépendante, pourraient être perçues par le public comme manquant d’impartialité. Cela dit, toute évaluation d’une allégation de mauvaise conduite d’un parlementaire nécessite de comprendre la spécificité du fonctionnement d’un organe politique, et notamment des interactions particulières que cet organe peut avoir avec les représentants de groupes d’intérêts. C’est pourquoi, bien que dans certains parlements la phase d’enquête soit confiée à une autorité indépendante 
			(58) 
			Si une plainte pour
violation du code de conduite est déposée contre un membre de la
Chambre des communes du Royaume-Uni, le Commissaire parlementaire
aux normes de conduite, qui est une autorité indépendante, a compétence discrétionnaire
pour ordonner une enquête complémentaire, après avoir examiné les
éléments fournis. Si une violation est constatée après l’enquête,
le Commissaire peut trancher lui-même la question. Dans des cas
graves ou sur demande d’un membre, un rapport du Commissaire est
renvoyé à la Commission sur les normes et privilèges de la Chambre
des communes, qui établit ses propres conclusions. Si une sanction
doit être proposée, cela relève de la compétence de la Chambre des
communes., les sanctions qui en découlent sont souvent imposées par des commissions spécialisées constituées en totalité 
			(59) 
			Commission
du Règlement et des affaires des députés du Sejm de Pologne. ou en partie 
			(60) 
			Croatie,
«loi sur la prévention des conflits d’intérêts dans l’exercice de
fonctions publiques», article 16. de parlementaires, ou par l’assemblée en formation collégiale. La majorité des sanctions prévues par les parlements remontent à une époque à laquelle la principale préoccupation des règlements internes, y compris celui de l’Assemblée, était de garantir le bon déroulement des sessions et le maintien de l’ordre au sein de la salle des séances; il s’agit donc de sanctions comme le rappel à l’ordre ou l’exclusion de la salle. De nouvelles sanctions ont ensuite été mises en place, comme le blâme ou la perte du droit à l’indemnité de séjour, y compris pour les actes commis en dehors de la salle des séances 
			(61) 
			Par
exemple, en cas de manquement à l’obligation de déclarer les dépenses
ou les intérêts pertinents..
62. Le code de conduite doit être suffisamment flexible pour permettre de traiter toutes les nouvelles situations qui pourraient se présenter et d’examiner comme il se doit un cas classique pouvant nécessiter une interprétation spécifique compte tenu de circonstances particulières. Le rapporteur propose d’adopter la même approche flexible en ce qui concerne les sanctions infligées. Le Président de l’Assemblée doit jouir d’un certain pouvoir d’appréciation quant à la réaction à adopter face aux conclusions d’une enquête.
63. L’éventail de sanctions dont disposerait le Président de l’Assemblée devrait être similaire à celui qui existe dans la majorité des parlements nationaux européens et au Parlement européen 
			(62) 
			Les sanctions du Parlement
européen englobent le blâme, la perte du droit à l’indemnité de
séjour ou une suspension temporaire de la participation à l’ensemble
ou à une partie des activités du Parlement. Les sanctions sont prononcées
par le président et peuvent faire l’objet d’un recours devant le
bureau (articles 153 et 154). En cas de faute grave, le règlement
autorise la Conférence des présidents à mettre fin au mandat du
député en question (article 19).: blâme, présentation d’excuses, expulsion du membre concerné des séances au moyen d’une motion de censure, lettre au président du parlement concerné ou divulgation des circonstances de l’affaire.
64. En ce qui concerne la dernière de ces sanctions, il appartiendrait au Président de l’Assemblée de décider de l’opportunité de rendre publiques les conclusions de l’enquête et les sanctions imposées. Un manquement mineur, suivi d’une sanction même légère, peut, s’il est rendu public, avoir des répercussions non négligeables sur la carrière politique d’un membre ou sur son image au sein de sa délégation nationale. L’éventuelle reprise de ces informations par les journaux locaux peut saper la confiance de l’électorat dans le parlementaire en question et aller jusqu’à lui faire perdre son siège aux élections suivantes. A cet égard, le pouvoir discrétionnaire du Président quant à la divulgation d’une affaire permettrait également de prévenir tout recours abusif au mécanisme par des parlementaires qui chercheraient ouvertement à attirer l’attention du public sur leurs actions.