1. Introduction
1. En juin 2011, l’Assemblée parlementaire
a décidé certaines réformes de ses structures et une nouvelle répartition
des tâches. Ainsi, le nouveau mandat de la commission des questions
politiques et de la démocratie indique que «[l]a commission établit
des rapports sur les activités de l'Organisation de coopération
et de développement économiques (OCDE) et de la Banque européenne
pour la reconstruction et le développement (BERD). En vue de la
préparation des rapports et des débats à l'Assemblée, la commission
entretient des relations avec l'OCDE et la BERD, ainsi qu’avec les
parlements des Etats non membres participant à ces débats».
2. La réforme étant entrée en vigueur en janvier 2012, la commission
des questions politiques et de la démocratie m’a nommé rapporteur
sur les activités de l’OCDE en 2011-2012.
3. Le débat sur les activités de l'OCDE, auquel participe le
Secrétaire général de cette organisation, a lieu sur la base d’un
règlement spécial, dans le cadre d'une «Assemblée élargie» composée
de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe et des délégations
des parlements nationaux des pays non européens membres de l’OCDE:
l'Australie, le Canada, le Chili, la Corée, les Etats-Unis d'Amérique,
Israël, le Japon, le Mexique et la Nouvelle-Zélande, ainsi que du
Parlement européen.
4. Par le passé, d’autres commissions de l'Assemblée ont présenté,
sur une base plus ou moins régulière, des contributions au rapport
et au projet de résolution. Etant donné l’orientation plus politique
que l’Assemblée veut donner au débat, il me paraît que cette procédure
pourrait être allégée en éliminant des contributions «obligatoires»
mais en laissant aux commissions qui le souhaiteraient la possibilité
de demander à être saisies pour avis chaque fois que cela serait
nécessaire.
5. Jusqu’à présent, le rapport sur les activités de l'OCDE était
adopté à titre provisoire en juin et envoyé aux délégations des
pays non européens membres de l’OCDE, pour leur laisser le temps
de préparer des amendements qui, en sus de ceux des autres commissions
contribuant au débat, étaient ensuite ajoutés au projet de résolution,
juste avant son adoption par la commission pendant la partie de
session d’octobre. Cette procédure paraît trop lourde.
6. Dans le débat sur la réforme de l'Assemblée, certains membres
de l’ancienne commission des questions économiques et du développement
ont proposé que les rapports sur les activités de l'OCDE (et de
la BERD) soient préparés par la commission des questions sociales,
de la santé et du développement durable (qui a hérité d’autres compétences
de la commission économique) et non par la commission des questions
politiques et de la démocratie, proposition à laquelle M. Robert
Walter répondit: «La logique de confier cette tâche à la commission
des questions politiques, c'est que le travail de ces deux institutions
est éminemment politique. C’est de l'examen de ces institutions
dont nous parlons (…) et cela relève très logiquement de la commission des
questions politiques.
»
7. Les rapports de l'Assemblée sur les activités de l'OCDE devraient
donc se concentrer davantage sur une évaluation politique du travail
de l'institution et non pas tant sur ses activités dans le domaine
économique, comme par le passé. En conséquence, j’ai proposé que,
pour cette année, le rapport se concentre sur les réponses à la
crise de la zone euro et les activités de soutien au Printemps arabe,
deux questions sur lesquelles notre commission est déjà active.
8. Le 18 avril 2012, je me suis rendu à l'OCDE et y ai rencontré
M. Yves Leterme, Secrétaire général adjoint, accompagné par M. Luiz
de Mello, chef adjoint du Cabinet du Secrétaire général, et par M. Andreas Schaal,
conseiller au Cabinet du Secrétaire général. J’ai aussi rencontré
M. Jean-Luc Schneider, directeur adjoint au Service économique.
Nous avons discuté des relations entre l’OCDE et l’Assemblée parlementaire,
à la suite de la réforme de l’Assemblée en général, et de mon rapport
en particulier. Le 23 mai, j’ai participé à la présentation des
«Perspectives économiques de l’OCDE» dans le cadre du Forum et de
la Réunion ministérielle de l’OCDE.
9. A la suite de nos contacts avec l’OCDE, la commission des
questions politiques et de la démocratie a approuvé le programme
suivant pendant la partie de session d’avril 2012 (Strasbourg, 23-27
avril):
- le 30 mai, à Paris:
la commission tient une première discussion sur un avant-projet
de rapport, avec la participation de M. Yves Leterme, Secrétaire
général adjoint de l’OCDE;
- pendant la partie de session de juin (Strasbourg, 25-29
juin): la commission donne son accord sur un projet de rapport,
qui est ensuite envoyé aux délégations des pays non européens membres
de l’OCDE, qui sont invitées à envoyer leurs commentaires par écrit
à temps pour être inclus dans le rapport (mi-août);
- 10-11 septembre, à Helsinki: la commission élargie approuve
le rapport, dans lequel les contributions ont été incorporées (les
délégations des pays non européens membres de l’OCDE et un représentant de
l'OCDE sont invités); le projet de résolution devrait inclure les
modifications nécessaires au règlement spécial;
- 2 octobre, à Strasbourg: la commission élargie prend position
sur les éventuels amendements et organise le dîner traditionnel
avec les délégations des pays non européens membres de l’OCDE et
le secrétariat de l'OCDE;
- 3 octobre, à Strasbourg: débat de l'Assemblée élargie
sur les activités de l'Organisation de coopération et de développement
économiques (OCDE) en 2011-2012 avec la participation du Secrétaire
général de l'OCDE et les délégations des pays non européens membres
de l’OCDE.
10. Au cours du débat de l’année dernière, l’Assemblée élargie
a adopté un amendement à la résolution qui encourageait l’OCDE à
explorer les pistes d’introduction d’une taxe globale sur les transactions
financières. Dans nos contacts avec l’organisation, nous avons demandé
son avis sur le rôle des agences de notation dans le cadre de la
crise de la dette souveraine en Europe. L’OCDE, à qui j’adresse
mes remerciements, m’a fait parvenir ses réflexions sur les deux
questions, que je mentionne dans les chapitres 5 et 6 de ce rapport
et que je présente en annexe.
11. Enfin, les amendements proposés au règlement relatif aux débats
élargis de l’Assemblée parlementaire sur les activités de l’OCDE
présentés dans l’annexe au projet de résolution tiennent compte
de la réforme des structures de l’Assemblée et de la nouvelle répartition
des tâches entre ses commissions. Mon souci a été de simplifier
la procédure tout en maintenant les possibilités de participation
des délégations des parlements nationaux des Etats membres de l’OCDE
non membres du Conseil de l'Europe. Forte de l’expérience du débat de
cette année, la commission des questions politiques et de la démocratie
pourrait décider d’ajuster certains détails ultérieurement.
2. Les perspectives économiques et les
réponses en termes de politique
2.1. Une
reprise modeste de la croissance et la persistance d’un chômage
élevé
12. Dans ses Perspectives
économiques de mai 2012, l’OCDE laisse entrevoir une
reprise graduelle de l’activité en moyenne dans les pays de l’OCDE,
mais avec de fortes disparités entre les Etats membres.
13. Aux Etats-Unis, les indicateurs récents semblent mieux orientés,
notamment dans le secteur de la consommation des ménages avec une
augmentation des crédits à la consommation. Le marché de l’immobilier continue
de peser sur la reprise, mais le niveau des prix semble se stabiliser
et les ventes comme les mises en chantier se sont raffermies. Avec
une politique monétaire toujours très accommodante et l’amélioration graduelle
de la structure d’endettement du secteur privé, la croissance du
produit intérieur brut (PIB) devrait graduellement se raffermir
pour s’inscrire sur un rythme de l’ordre de 2,75 % à la fin de 2013.
L’OCDE insiste toutefois sur le fait qu’à législation inchangée,
l’expiration des mesures de dégrèvement fiscal et d’extension des
prestations sociales impliquera une forte restriction budgétaire
en 2013 (de l’ordre de 4 % du PIB), qui risquerait de faire retomber
l’économie américaine dans la récession.
14. La zone euro connaît une quasi-récession, avec une stagnation
de l’activité au premier trimestre 2012 après un léger recul à la
fin de 2011; l’OCDE n’attend pas de retournement significatif de
l’activité avant 2013. Outre les risques créés par la crise des
dettes souveraines et les problèmes des secteurs bancaires, l’assainissement
budgétaire et la détérioration du marché du travail risquent de
peser durablement sur la croissance. Cette moyenne reflète toutefois
des situations très contrastées entre les pays. L’Italie, l’Espagne, le
Portugal et plus encore la Grèce ont vu leur activité reculer et
les perspectives restent négatives jusqu’à la fin de 2013. A l’opposé,
on a observé un rebond significatif de l’Allemagne au premier trimestre
2012 après une baisse au quatrième trimestre de 2011, et la croissance
devrait s’affermir pour se situer sur un rythme de 2,25 % à la fin
de 2013. Au Japon, la croissance semble également repartir après
un affaiblissement à la fin de l’année dernière, la politique budgétaire
et les besoins de reconstruction apportant un soutien à l’activité.
15. Au total, sur la base des prévisions de l’OCDE pour 2013,
la croissance moyenne au cours des cinq années depuis le début de
la crise aura été à peine supérieure à 1 % par an aux Etats-Unis,
et approximativement nulle en Europe, avec faible croissance moyenne
en Allemagne (1 %) et en France (0,5 %), nulle au Royaume-Uni, et
franchement négative en Espagne et en Italie, tandis que le recul
cumulé de l’activité aura été de 7 % en Irlande et au Portugal et
de près de 20 % en Grèce.
16. A l’opposé, le risque d’une répercussion significative sur
les économies émergentes de l’atonie de la demande dans la zone
de l’OCDE ne semble pas se matérialiser. Le ralentissement attendu
en Chine reste mesuré et les autorités chinoises ont rapidement
réagi pour soutenir l’activité. La contribution des grandes économies
de marché émergentes (les «BRICS»: Brésil, Russie, Inde, Chine,
Afrique du Sud) à la croissance globale devrait rester élevée. La
«bascule de richesse» vers l’est et le sud devrait donc se poursuivre
en 2012/2013, la part dans la production mondiale des économies
émergentes atteignant désormais près de la moitié du total du PIB
mondial contre à peine plus d’un tiers au début des années 1960.
Avec la différence des taux de croissance potentielle, de l’ordre
de 1,5 % en Europe et d’un peu plus de 2 % aux Etats-Unis, mais
peut être de l’ordre de 7 % à 9 % en Chine et en Inde, le mouvement
ne peut que s’accélérer. Selon les prévisions de l’OCDE, le PIB
de la Chine dépassera ainsi celui des Etats-Unis en 2017, même si
l’écart au niveau des revenus par tête restera considérable.
17. Dans ce contexte de sous-emploi des capacités de production,
le chômage reste élevé, se situant en mars 2012 à 8,5 % pour l’ensemble
de l’OCDE, soit 2,5 points de pourcentage au-dessus de son niveau d’avant
la crise et un accroissement de près de 14 millions du nombre de
chômeurs. Là encore, la situation de l’Europe est la plus préoccupante
avec une nouvelle dégradation du taux de chômage depuis le milieu
de 2011 alors que les Etats-Unis ont enregistré l’amorce d’une décrue
depuis quelques mois. Dans certains pays européens, la détérioration
apparaît particulièrement nette, avec plus du doublement du taux
de chômage en cinq ans au Danemark, en Espagne, en Estonie, en Grèce,
en Islande et en Irlande (avec, il est vrai, des niveaux très différents
entre ces pays). Dans le même temps la durée du chômage s’est considérablement allongée
dans certains pays. La part des chômeurs sans emploi depuis plus
d’un an dépasse désormais 30 % du chômage total aux Etats-Unis,
soit le niveau le plus élevé depuis la seconde guerre mondiale,
atteignant 43 % en Espagne et même plus de 60 % en Irlande. Les
nouveaux entrants sur le marché du travail ont été particulièrement
affectés, avec une baisse de l’emploi des 15-25 ans de près de 9 %.
L’emploi des travailleurs plus âgés (55-64 ans) a, au contraire,
progressé, reflétant sans doute l’impact des réformes des systèmes
de retraite. Enfin, le niveau de qualification a eu un fort impact
sur l’emploi, celui des personnels peu qualifiés baissant de plus
de 8 % depuis le retournement du cycle alors que l’emploi des plus
qualifiés a progressé de plus de 9 %. Le niveau du chômage devrait
tout juste se stabiliser en 2012 avec un taux de 8 % en moyenne pour
les pays de l’OCDE, avant de s’infléchir légèrement en 2013. L’amélioration
tiendra pour l’essentiel aux Etats-Unis, alors que le taux de chômage
resterait inchangé à 11 % dans la zone euro.
2.2. La
montée des inégalités
18. La montée des inégalités est
bien antérieure à la crise financière, mais le ralentissement de
la croissance en a renforcé la résonance politique. C’est pourquoi
l’OCDE a conduit récemment des travaux pour analyser les causes
de cette évolution et explorer les réponses qui pourraient y être
apportées. Le premier constat est que la tendance, amorcée d’abord
dans certains pays anglo-saxons, concerne depuis les années 2000
la majorité des pays de l’OCDE, y compris ceux à tradition plus
égalitaire comme l’Allemagne, le Danemark ou la Suède. Seul un petit
nombre de pays enregistre une relative stabilité (Belgique, France, Hongrie)
ou une réduction des inégalités (Grèce, Turquie). Une tendance à
la baisse est également observée au Mexique et au Chili, mais sur
la base de niveaux beaucoup plus élevés que dans la moyenne des
pays de l’OCDE. Par ailleurs, le changement dans la répartition
s’opère au profit d’une petite frange de la population. Ainsi, aux
Etats-Unis, la part du revenu des ménages allant au 1 % supérieur
est passée de 13 % en 1990 à 18,5 % en 2008. La part du 0,1 % de
tête a quadruplé en 30 ans pour représenter en 2008 quelque 8 %
de l’ensemble des revenus avant impôt, à comparer aux 4 % à 5 %
au Canada, au Royaume-Uni et en Suisse, et aux près de 3 % en Australie,
en France et en Nouvelle-Zélande.
19. L’augmentation des inégalités tient tout d’abord à un élargissement
considérable des revenus salariaux. Si l’ouverture des marchés et
le progrès technologique ont permis d’accroître la productivité
et la croissance, les travailleurs les moins qualifiés ont été les
moins à même de saisir les opportunités ainsi créées. C’est pourquoi
l’OCDE met l’accent sur l’amélioration des qualifications de la
main-d’œuvre pour lutter contre les inégalités, celle permettant
à la fois de réduire la dispersion des salaires et d’augmenter le
taux d’emploi. Une «feuille de route» a été ainsi proposée aux pays
membres lors de la réunion ministérielle de mai 2012 pour assurer
un développement des qualifications. Bien que d’un poids moindre
dans le revenu total, les revenus du capital ont également contribué
à accentuer les inégalités, notamment dans les pays nordiques.
20. Parallèlement, les impôts et les transferts réduisent aujourd’hui
les inégalités d’environ 29 %: plus qu’au milieu des années 1980,
mais moins qu’au milieu des années 1990. De fait, les taux légaux
marginaux d’imposition sur les revenus les plus élevés ont été significativement
réduits, passant de 60-70 % au début des années 1980 à environ 40 %
en moyenne à la fin des années 2000. L’augmentation du poids des
dépenses de transferts sociaux dans le PIB reflète pour sa part
une augmentation du nombre de bénéficiaires et non une amélioration
des prestations, tandis que les cotisations sociales généralement
proportionnelles n’ont qu’un effet redistributif limité.
2.3. Les
réponses de politique économique
21. Ce contexte persistant de faible
croissance rend la nécessaire consolidation des finances publiques particulièrement
délicate. La plupart des pays européens mènent néanmoins une stratégie
d’assainissement qui intègre à la fois augmentation des recettes
et réduction des dépenses. Des pays comme la Grèce, la Hongrie,
l’Italie et le Portugal prévoient un effort de réduction du déficit
budgétaire de l’ordre de 5 % du PIB sur la période 2011-2013 et
jusqu’à 7 % en Espagne, après des programmes déjà de grande ampleur
lors des deux années précédentes (plus de 10 % en Grèce). En moyenne
pour la zone euro, l’ajustement serait de 1,5 % du PIB en 2012 et
encore 1 % en 2013, avec un mouvement du même ordre aux Etats-Unis
et une stabilité au Japon en raison notamment des dépenses de reconstruction.
Toutefois, en dépit de cet effort significatif, la dette continuera
de s’accroître aux Etats-Unis jusqu’en 2013, et son montant serait
à peine stabilisé dans la zone euro où elle frôlerait les 100 %
en 2013, atteignant plus de 220 % au Japon; il serait en augmentation
de 30 à 50 % depuis le début de la crise dans la plupart des pays,
avec une détérioration beaucoup plus forte dans des pays comme la
Grèce ou l’Irlande.
22. En contrepartie du resserrement budgétaire – et en l’absence
de pressions inflationnistes – les autorités monétaires ont poursuivi
une politique très accommodante, avec des taux d’intérêt publics
voisins de zéro et des programmes d’achat de titres menés ou annoncés
par les banques centrales. Tout en soulignant la nécessité de maintenir
des politiques monétaires accommodantes, l’OCDE en identifie également
les risques. La fourniture de liquidités à des taux très faibles
et sur des échéances longues pourrait conduire les acteurs du marché
financier à prendre, comme par le passé, des risques excessifs et
accroît les risques de mauvaise allocation des ressources en maintenant
à flot des institutions non viables, tandis que les programmes d’achat de
titres risquent de fragiliser les bilans des banques centrales.
L’OCDE souligne ainsi l’urgence d’un renforcement de la supervision
pour assurer que les banques nettoient leur bilan de leurs créances
douteuses et procèdent à leur nécessaire recapitalisation, y compris
s’il en est besoin à travers l’injection de capitaux publics. Il
faudra également entreprendre les réformes de structure nécessaires
pour que les grandes institutions financières cessent de bénéficier
de la garantie de facto des
pouvoirs publics pour éviter le risque d’un effondrement systémique
du système financier, soit à travers une séparation des banques
de détail et d’investissement, soit à travers des obligations accrues
en matière de taux de réserve.
23. Au total, le calibrage des politiques macroéconomiques apparaît
particulièrement délicat. Tout en soulignant que l’assainissement
des finances publiques est un objectif incontournable, l’OCDE rappelle
que les stratégies doivent prendre en compte l’incidence sur la
croissance des mesures de réduction du déficit budgétaire. Si nombre
de pays agissent en même temps dans le même sens, l’effet est inévitablement
amplifié. C’est pourquoi l’OCDE affirme que, si l’activité en Europe
se révélait moins soutenue que ne le disent les prévisions budgétaires,
il serait bon, dans bien des cas, de permettre aux stabilisateurs
automatiques d’intervenir. Face à ce risque de cercle vicieux entre
assainissement budgétaire et affaiblissement de la croissance, des
mesures complémentaires de soutien de l’activité sont en débat en
Europe, par exemple en apportant une garantie commune à l’émission
d’emprunts publics pour recapitaliser les banques et faciliter la résorption
des mauvaises dettes. Une autre approche pourrait consister à augmenter
les ressources de la Banque européenne d’investissement.
24. Mais il faudra aussi s’attaquer aux problèmes de compétitivité
qui pèsent sur la croissance de nombreux pays de l’OCDE, qui sont
pour partie à l’origine des tensions entre les pays européens. Un
nouvel effort de réforme structurelle, notamment dans les services
et les secteurs protégés, pourrait à la fois créer de l’emploi et
générer des recettes fiscales. Les travaux récents de l’OCDE, basés
sur l’analyse de trente ans de réformes structurelles, montrent
que si celles-ci demandent généralement du temps pour produire leurs
pleins effets, leur impact à court terme est – contrairement à l’idée
généralement reçue – rarement négatif et peut même dans certains
cas devenir assez vite positif. Il ressort de ces travaux que, dans
une phase de sous-emploi des capacités, il convient de ne pas réduire
les prestations chômage et la protection du travail pour éviter
de peser sur la croissance et de ne pas sacrifier les politiques
actives du marché du travail. Par contre, les réformes fiscales
visant à réduire les prélèvements sur le travail et à les déplacer
vers la consommation ou les activités nuisibles à l’environnement
peuvent avoir des effets relativement rapides sur l’emploi et contribuer
à soutenir l’investissement. Leur incidence négative sur le plan
de l’équité doit, néanmoins, être compensée par des mesures en faveur
des faibles revenus. L’OCDE a entrepris un travail considérable
sur la fiscalité liée à l’environnement et la réforme fiscale verte,
ainsi que sur les moyens de réformer les subventions dommageables
pour l’environnement, autant d’efforts qui peuvent à la fois être
bénéfiques pour l’environnement et contribuer à un assainissement
fiscal. De même, la réduction des barrières à l’entrée dans le commerce
de détail et les services professionnels permettent d’accroître
le contenu en emploi de la croissance. A cet égard, l’OCDE relève
que l’ajustement est de la responsabilité des pays ayant un compte courant
largement excédentaire aussi bien que de celle des pays déficitaires.
Si ces derniers doivent restaurer leur compétitivité et accroître
leur productivité par une plus grande flexibilité des marchés des
produits et du travail, les pays excédentaires doivent aller dans
le sens d’une augmentation des salaires et de la consommation. Or,
souligne l’organisation, si le rééquilibrage semble être amorcé
dans les pays déficitaires, peu a été encore fait dans les pays
excédentaires.
3. La
crise des dettes souveraines
25. Le sujet de préoccupation majeur
en Europe reste cependant la crise des dettes souveraines.
26. Les causes de la crise sont multiples et se sont mutuellement
renforcées. Dans nombre de pays, la faiblesse des taux d’intérêt
et des conditions d’accès au crédit sans rapport avec leurs capacités
réelles de remboursement ont conduit les ménages et les gouvernements
à s’endetter excessivement. La faiblesse de la réglementation des
marchés financiers a conduit les banques à ne pas maîtriser leurs
risques et à gonfler excessivement leurs engagements au cours des
vingt dernières années. Les pouvoirs publics n’ont pas saisi l’opportunité
offerte par l’accélération de la croissance jusqu’à la crise des
marchés financiers pour assainir les finances publiques. Bien au
contraire, certains gouvernements ont réduit la pression fiscale
et relâché le contrôle des dépenses. Le retournement de l’activité
et la nécessité de soutenir le système bancaire sont venus détériorer
encore la situation des finances publiques. La situation d’endettement
des Etats et du secteur bancaire est devenue intenable, créant une
crise de confiance et dans certains pays une crise de liquidités. Les
liens étroits entre secteur bancaire et finances publiques ont créé
des effets multiplicateurs entre stabilité budgétaire et stabilité
des banques. Cette spirale a été particulièrement puissante en Grèce,
en Irlande, au Portugal et en Espagne, qui ont dû recourir au financement
de l’Union européenne, des autres pays de la zone euro et du FMI
pour faire face à leurs engagements et dégager les marges de manœuvre
pour procéder à l’ajustement de leurs finances publiques. Pour faire
face à cette situation, de nouveaux mécanismes de soutien financier
(le Mécanisme européen de stabilisation financière et la Facilité
européenne de stabilité financière) ont été créés en mai 2010 avec
une capacité globale d’intervention de 500 milliards d’euros.
27. A l’été 2011, les marchés ont commencé à douter de la capacité
de certains pays européens à assurer leurs besoins de financement.
La perte de confiance concernant la dette souveraine s’est répercutée
sur le financement et la solvabilité des banques ayant un large
stock de dettes souveraines et dépendant implicitement ou explicitement
du soutien public, et en retour sur la crédibilité des Etats qui
pourraient avoir à renflouer leurs banques. On a perdu confiance
dans les coûts de financement des Etats tandis que les conditions
du marché interbancaire se sont tendues et que le cours de bourse
des banques a reculé, conduisant celles-ci à accélérer leur désendettement
et à réduire leurs financements à l’économie. Pour enrayer cette
spirale, une série de mesures ont été prises au Sommet européen
d’octobre 2011. Un plan de restructuration de la dette grecque a
été initié avec pour objectif de réduire de moitié la valeur de
cette dette et de la ramener à 120 % du PIB. Cette conversion volontaire
permettait de créer les conditions d’un nouvel apport de financement
public à la Grèce de 100 milliards d’euros jusqu’en 2014. Par ailleurs,
les capacités de la Facilité européenne de stabilité financière
et du Mécanisme européen de stabilité ont été renforcées et portées
à 700 milliards d’euros. Un ensemble de mesures a porté sur les
banques, avec l’obligation d’amener leur ratio de capital à 9 %,
après ajustement de leurs avoirs en dette souveraine à la valeur
de marché, à compter de juin 2012.
28. Selon l’Autorité bancaire européenne, il serait nécessaire
que les banques renforcent leur capital de quelque 106 milliards
d’euros, à financer de façon prioritaire par le recours au secteur
privé et éventuellement par un prêt de la Facilité européenne. A
défaut, les banques seraient dans l’obligation d’avoir recours à
une réduction des versements de dividendes et des bonus. Le troisième
volet a porté sur le renforcement de la coordination et de la surveillance
des politiques au sein de la zone euro dans le cadre du Traité sur
la stabilité, la coordination et la gouvernance dans l’Union économique
et monétaire. Celui-ci devrait entrer en vigueur en janvier 2013
après ratification des Etats membres. Selon ce nouveau traité, les
pays membres devront introduire des mécanismes contraignants pour
assurer l’équilibre budgétaire. La procédure de déficit excessif est
en train d’être renforcée, pour donner à la Commission européenne
et au Conseil le droit d’examiner les projets de budget nationaux
et, le cas échéant, de préconiser des modifications.
29. Ces mesures ont été saluées comme une étape cruciale pour
restaurer la confiance dans les Etats et les systèmes bancaires
et amorcer le changement de gouvernance nécessaire pour assurer
la cohérence des politiques au sein de la zone euro. La restructuration
de la dette grecque a été acceptée par les créanciers, la Banque
centrale européenne (BCE) a apporté les liquidités nécessaires au
secteur bancaire et des pays comme l’Italie, le Portugal et le Royaume-Uni
ont décidé de nouveaux programmes d’assainissement budgétaires et
de réformes structurelles. Toutefois, le répit n’a été que de courte
durée et les tensions se sont ravivées en juin 2012. De plus, aux
difficultés économiques s’ajoutent désormais les doutes sur l’acceptabilité par
les opinions publiques du processus d’ajustement. En tout état de
cause, des mesures additionnelles pourraient être nécessaires pour
renforcer la confiance, assurer la poursuite d’un désendettement
ordonné par les différents acteurs et renforcer la stabilité de
la zone euro. Dans son rapport économique sur la zone euro qu’elle
vient de publier, l’OCDE recommande un ensemble de mesures en phase
avec les orientations récentes prises au niveau européen et permettant
de faire face à la crise des dettes souveraines, incluant:
- pour la Grèce, la restructuration
volontaire de la dette, la recapitalisation des banques et un programme crédible
de soutien public;
- une augmentation, si nécessaire, de la capacité d’intervention
des «coupe-feu» européens;
- la mise en œuvre du programme récemment décidé de recapitalisation
des banques, si nécessaire avec l’appui de financements publics
et en évitant qu’un désendettement excessif n’assèche le financement de
l’économie;
- la création en juillet 2012 d’un Mécanisme européen de
stabilité permanent doté d’un capital solide et de structures de
gouvernance, lui permettant de constituer un instrument permanent
de gestion de la crise.
30. Ces mesures devraient s’accompagner d’une politique macroéconomique
prudente, de la mise en œuvre d’un programme ambitieux de réformes
structurelles, de la mise en œuvre de procédures budgétaires rigoureuses
et d’un renforcement de la supervision des institutions financières.
4. L'OCDE
et la coopération avec les pays du Proche et du Moyen-Orient et
d'Afrique du Nord (MENA)
31. Dès 2005, l’organisation a
développé avec les pays arabes une «Initiative MENA-OCDE pour la gouvernance
et l’investissement à l’appui du développement». Ce programme, mené
en coopération avec les organisations internationales engagées dans
la région, vise à apporter aux réformateurs arabes l’appui de l’OCDE
dans l’effort de modernisation de leurs systèmes de gouvernance
publique et d’amélioration du climat des entreprises, l’objectif
étant de créer une structure de dialogue et d’échange d’expériences
entre les responsables arabes et les experts de l’OCDE, mais aussi
de créer un nouvel espace de coopération régionale entre les pays
arabes.
32. Les thèmes de coopération ont été définis par les pays arabes,
qui ont donné leur priorité aux domaines de politique jugés les
plus à même de créer les conditions d’une croissance économique
et d’une création d’emplois plus soutenues pour faire face à la
montée du chômage, et renforcer la confiance. Dans le domaine de
la gouvernance publique et de la réforme de l’Etat, les thèmes retenus
ont été ceux de la réforme budgétaire et la gestion des finances
publiques; la gestion des ressources humaines et l’intégrité dans
l’administration; l’administration électronique et la simplification
administrative; la qualité réglementaire, la fourniture de services
publics et les partenariats publics-privés. Dans un deuxième temps,
les thèmes de coopération ont été élargis à des domaines «transversaux»
comme les questions de l’égalité hommes-femmes et la gestion de l’eau.
Dans le domaine de l’investissement et du climat des affaires, la
priorité a été donnée aux thèmes des politiques et de la promotion
des investissements; les PME, l’entreprenariat et le développement
du capital humain; la compétitivité; la lutte contre la corruption,
le gouvernement d’entreprise et le comportement socialement responsable
des entreprises.
33. L’OCDE s’est appuyée pour ce faire sur les méthodes de travail
utilisées par ses Etats membres, basées sur l’échange entre pairs,
un dialogue ouvert prenant en compte les spécificités de chaque
pays participant et s’appuyant sur des analyses rigoureuses. Cette
approche, qui constitue la spécificité de l’organisation, avait déjà
été utilisée avec succès dans les années 1990 dans le cadre de la
coopération avec les pays d’Europe centrale et orientale sur le
chemin de l’ouverture à la démocratie et l’économie de marché. Dans
chaque domaine, les travaux ont été conduits au sein de groupes
de travail réunissant les praticiens des pays de l’OCDE et des pays
arabes, sous une coprésidence d’un pays arabe et d’un pays membre
de l’OCDE. De plus le programme SIGMA (Programme de soutien à l’amélioration
des institutions publiques et des systèmes de gestion), initiative
conjointe de l’Union européenne et de l’OCDE qui fournit une assistance
technique aux pays qui souhaitent réformer leur administration publique
selon les normes et les bonnes pratiques de l’Union européenne,
s’est également engagé dans la région.
34. Les travaux au sein de ces groupes de travail ont permis de
faire bénéficier les Etats arabes de l’expérience de l’OCDE dans
la conduite de la réforme et de mobiliser l’expertise des Etats
membres. Ils ont également facilité une prise de conscience des
différences mais aussi des similitudes entre les pays arabes et de
créer les bases pour une coopération régionale, les pays les plus
avancés dans leurs domaines respectifs montrant la voie dans le
processus de réforme. Les pays arabes ont également développé la
coopération au plan national, dans des domaines intéressant plus
particulièrement chacun d’entre eux, à travers des échanges d’expérience
approfondie et des apports d’expertise Nord-Sud et Sud-Sud, et la
mise en œuvre d’une évaluation par les pairs. A la suite de ces
travaux, un certain nombre de pays arabes ont choisi d’adhérer à
des instruments de l’OCDE, ou de définir des normes communes, notamment
dans le domaine de la lutte contre la corruption. Certains ont aussi
mis en place des centres régionaux afin de former les fonctionnaires
et de diffuser les bonnes pratiques. Le secrétariat de l’OCDE a
rassemblé cette somme d’expérience dans un rapport intérimaire sur
les progrès dans la réforme de la gestion publique dans la région
MENA (2010), qui permet d’établir une base originale d’informations
communes en fonction de laquelle chaque pays sera en mesure d’apprécier
les progrès réalisés et d’assurer le suivi de ses réformes.
35. Parmi les activités de coopération par pays, le programme
d’appui à l’Autorité nationale palestinienne mérite d’être plus
particulièrement mentionné. Le Plan national palestinien vise à
jeter les fondations d’un Etat basé sur les principes internationalement
reconnus de bonne gouvernance et de l’Etat de droit, sur lesquels appuyer
les infrastructures et l’économie. L’un des thèmes prioritaires
retenus par l’Autorité nationale palestinienne dans le cadre de
la coopération porte sur le développement des capacités en matière
de politique réglementaire, de façon à renforcer l’Etat de droit
et la sécurité juridique des citoyens et des entreprises. L’objectif
est d’accroître la capacité des agents dans le processus législatif
et réglementaire, et de renforcer les institutions de régulation.
La coopération porte également sur le renforcement de l’intégrité
avec une évaluation des systèmes existants et notamment du code
de conduite pour les fonctionnaires. Le troisième domaine est celui
de l’administration en ligne, particulièrement importante compte
tenu de la mobilité limitée de la population palestinienne, pour
rendre les services publics plus accessibles, faciliter la simplification
des procédures administratives et accroître la transparence de la
réglementation et donc lutter contre la corruption.
36. Depuis 2011, le Printemps arabe a conduit l’OCDE à renforcer
son programme de coopération avec les pays arabes, mais aussi à
le réévaluer pour mieux répondre aux conditions nouvelles. Lors
de la réunion ministérielle de mai 2011, les ministres de l’OCDE
ont renouvelé leur engagement dans cette coopération, indiquant
être «convaincus que la réforme de la gouvernance joue un rôle clé
dans le soutien de la croissance économique et du développement»,
et ont demandé à l’OCDE de proposer de nouvelles activités dans
ce domaine. Dans le même temps, les pays du G8 ont lancé le Partenariat
de Deauville, et également demandé à l’OCDE d’«approfondir la collaboration
destinée à améliorer les cadres d’investissement et de gouvernance et
à faire progresser le programme de réforme structurelle».
37. Ils ont également indiqué qu’il était opportun de promouvoir
«l’adhésion et la mise en œuvre des différents instruments internationaux
de lutte contre la corruption tels que la Convention des Nations
Unies contre la corruption (CNUCC) et la Convention de l’OCDE sur
la lutte contre la corruption dans les transactions commerciales
internationales, ainsi que d’autres instruments connexes concernant
la transparence et l’intégrité de l’Etat». En raison de sa connaissance
des bonnes pratiques et de son expérience des échanges entre pairs,
l’OCDE a été invitée à participer au plan de coordination des institutions
financières internationales. L’OCDE participe également au réseau
pour la coordination mis en place avec les Nations Unies, la Ligue arabe
et l’Union pour la Méditerranée.
38. Pour mieux répondre à la demande des pays arabes dans le nouveau
contexte politique et assurer la pertinence des projets, l’OCDE
a conduit des consultations approfondies avec les pouvoirs publics
des pays participants mais aussi avec les acteurs du secteur privé
et de la société civile, ainsi qu’avec les organisations internationales
engagées dans la région (notamment la Banque mondiale, le Programme
des Nations Unies pour le développement (PNUD) et l’Organisation
arabe pour le développement administratif (ARADO). Ces consultations
ont montré que les pays MENA étaient tous désireux de poursuivre
la coopération avec l’OCDE, estimant que la «méthode OCDE» constituait
une aide précieuse pour les pays s’engageant dans la réforme. En
s’appuyant sur l’expérience et les standards des pays de l’OCDE,
chaque pays pouvait avancer à son rythme pour se doter de structures
de qualité. Les pays arabes ont également souligné que les réseaux
de coopération sur des thèmes spécifiques – qui n’ont pas d’équivalent
dans la région – facilitent une intégration régionale croissante,
qui constitue à terme une des clés de la croissance et du développement.
39. Les pays de l’OCDE et les pays MENA ont ainsi décidé conjointement
de renforcer et d’approfondir la coopération dans les réseaux régionaux
existants, en recentrant quelque peu leurs priorités. Les thèmes retenus
portent principalement:
- sur
la promotion d’une administration saine et efficace, en s’attaquant
notamment aux risques de corruption dans le cadre des activités
à la charnière du secteur public et du secteur privé dans des domaines
essentiels comme les marchés publics, en mettant en place des organismes
anticorruption ainsi que des mécanismes institutionnels comme les
codes de conduite, et en accroissant l’efficacité et la transparence
dans la gestion des fonds publics;
- sur le renforcement de la gouvernance démocratique et
l’administration ouverte, en étudiant la mise en place de processus
plus participatifs pour la formulation des politiques publiques,
en organisant des procédures de consultation et en recourant aux
technologies de l’information pour faciliter la participation;
- sur la promotion du développement régional de façon à
favoriser une croissance durable et atténuer les disparités entre
territoires et entre catégories de population;
- sur l’amélioration du climat des affaires pour l’emploi,
en mettant notamment l’accent sur les PME, l’accès aux financements
et des politiques de concurrence favorables à la fois aux entreprises
et aux consommateurs;
- sur la promotion de l’intégrité des entreprises, le gouvernement
d’entreprise et les comportements socialement responsables, en référence
avec les instruments de l’OCDE;
- sur la promotion de l’égalité hommes-femmes, avec notamment
la création d’un groupe de réflexion sur la parité visant à lutter
contre les discriminations juridiques et à promouvoir les femmes
dans l’économie, en s’appuyant entre autres sur le Forum MENA-OCDE
des femmes entrepreneurs.
40. Par ailleurs, dans le cadre du Partenariat de Deauville, l’Egypte,
la Jordanie, le Maroc et la Tunisie ont présenté des plans de développement,
qui seront mis en œuvre en fonction du soutien et de l’aide financière attendus
de la part du G7 et des institutions financières internationales,
et auxquels l’OCDE se propose d’apporter son concours dans ses domaines
d’expertise. Outre les projets concernant la gouvernance publique et
celle des entreprises, l’OCDE envisage de conduire des analyses
mettant en lumière les liens dans ces pays entre performance économique
et politiques structurelles, de façon à jeter les bases de stratégies
et de programmes à la fois prudents et réformistes.
41. En matière d’assistance au développement, un Dialogue spécial
à haut niveau entre les Institutions des groupes de coordination
arabes (ACGI) et le Comité d’aide au développement de l’OCDE (CAD)
a eu lieu à Londres les 4 et 5 juillet 2011. C’était la première
fois en plus de vingt ans que les deux communautés donatrices se
rencontraient à ce niveau. L’événement – auquel participaient aussi
d’importantes institutions multilatérales et des experts internationaux
de renom – s’est déroulé dans le contexte du changement politique historique
survenu dans la région du Proche et Moyen-Orient et de l’Afrique
du Nord. Les discussions ont essentiellement porté sur la façon
dont la communauté internationale d’aide au développement pouvait favoriser
l’ancrage et la diffusion du message de dignité, de liberté, d’autodétermination
et de justice sociale dans la région. Elles ont également abordé
des questions d’ordonnancement et des questions plus générales de
cohérence politique. La rencontre s’est conclue sur une déclaration
réaffirmant l’engagement à l’égard d’un partenariat renouvelé entre
les deux communautés donatrices et reconnaissant l’importance cruciale
d’une coopération plus étroite dans la région et au-delà.
42. En 2011, afin d’améliorer la coordination et d’éviter les
doubles emplois, le CAD a mené une enquête sur les programmes de
soutien, en cours et prévus, des donateurs en matière de gouvernance
dans les pays du Proche et Moyen-Orient et d’Afrique du Nord, à
la suite du Printemps arabe. L’enquête a mis en évidence trois grands
secteurs de financement prioritaires: (i) aide humanitaire à court
terme; (ii) facilitation de la transition démocratique, notamment
en termes d’égalité des sexes et de droits de l'homme à moyen terme;
et (iii) soutien d’une évolution vers le développement économique
et la démocratie à plus long terme pour faire face aux problèmes
du chômage et de la pauvreté. L’enquête indiquait aussi que les
agences de développement, de même que leurs ministères des Affaires
étrangères, réfléchissaient collectivement à des réponses intergouvernementales
stratégiques et travaillaient à renforcer les accords de partenariat
et de participation afin, entre autres, de faciliter le dialogue
politique. Les premiers résultats de l’enquête ont été communiqués
au Dialogue spécial à haut niveau ACGI-CAD précité. Une mise à jour
concernant les actions engagées, les défis restant à relever et
les récentes demandes un an après le Printemps arabe est en cours depuis
août 2012.
5. Une
taxe sur les transactions financières?
43. Pendant le débat de l’année
dernière, l’Assemblée élargie a adopté un amendement à la résolution
qui encourageait l’OCDE à explorer les pistes d’introduction d’une
taxe sur les transactions financières (TTF) globale. En réponse
à cet encouragement, l’OCDE m’a fait part de son analyse (voir annexe
1). Je note que l’organisation, bien que ne soutenant pas une TTF
générale, a suggéré aux gouvernements d’envisager d’introduire une
taxe sur les transactions financières limitée aux opérations concernant
des produits dérivés de gré à gré, même si, à son avis, la meilleure
option «serait probablement une solution de type réglementaire qui forcerait
ce type de transactions (OTC) à venir sur les bourses réglementées».
Je note également que la délégation canadienne n’est pas favorable
à l’idée d’une taxe sur les transactions financières. Notre collègue Hermine
Naghdalyan a préparé un rapport sur «Un retour à la justice sociale
grâce à une taxe sur les transactions financières» pour la commission
des questions sociales, de la santé et du développement durable (
Doc. 13017).
6. Le
rôle des agences de notation
44. Le rôle des agences de notation
a été beaucoup critiqué en Europe dans le cadre de la crise des
dettes souveraines et nous avons demandé l’avis de l’OCDE à ce sujet.
L’OCDE a reconnu (voir annexe 2) que le rôle des agences de notation
était devenu de plus en plus procyclique. L’organisation indique
aussi que des principes sont élaborés par le Conseil de stabilité
financière (Financial Stability Board ou FSB), qui partent de l'idée
de base que les banques, les intervenants dans les marchés et les
investisseurs institutionnels sont tenus de faire leurs propres
évaluations de crédit et ne doivent pas compter seulement ou automatiquement sur
des notations externes. Elle relève aussi qu’en dépit d’une intensification
de l’activité réglementaire, il reste encore des questions de fond
à traiter, mais que les réponses ne sont pas souvent du ressort
du législateur.
7. Conclusions
45. La revue The
Economist écrivait, il y a quelque temps, qu’il y a «quelque
chose de très déréglé dans l'économie mondiale. Ce quelque chose
est une combinaison de troubles de la croissance et une augmentation
du risque d'une catastrophe financière. Les économies s'affaiblissent
à travers le monde. Les récessions dans la périphérie de la zone
euro se creusent».
46. Dans ses toutes dernières Perspectives
économiques, publiées en juin 2012, l’OCDE présente des projections
selon lesquelles, dans l’ensemble, la croissance resterait morose
avec, toutefois, une reprise lente voire instable des économies
de l’OCDE, tandis que les économies émergentes continueraient de
contribuer pour une large part à la demande globale. Les principaux
facteurs de risque comprennent une incapacité des responsables politiques
à faire face aux problèmes clés, en particulier la stabilité financière
et économique de la zone euro, et à son faible potentiel de croissance.
Jusqu’à présent, les risques les plus graves ont été évités mais
on relève de plus en plus de signes du coût économique réel de la
crise de la zone euro en termes de faiblesse de la demande et de
montée du chômage. Les perspectives se sont amoindries depuis juin
aux Etats-Unis, dans la majorité des pays émergents et, surtout,
dans les pays de la zone euro sous la pression du marché.
47. Certes, d’importantes réformes ont été entreprises en Europe
depuis le début de la crise, mais d’après les enquêtes économiques
de l’OCDE sur l’Union européenne et la zone euro, il reste beaucoup
à faire en termes de création d’une union bancaire et de réformes
structurelles pour dynamiser la croissance et la compétitivité –
notamment prendre des mesures pour parachever le marché européen
unique, mais aussi réaliser des réformes du marché du travail axées
sur l’emploi. L’OCDE s’est prononcée en faveur d’un pare-feu efficace
et a soutenu la stratégie de la BCE pour prendre toutes les mesures
nécessaires. Pour restaurer la compétitivité et la croissance, l’OCDE
aide les gouvernements européens à définir un programme de réforme
ambitieux prévoyant de nouvelles sources de croissance telles que
l’innovation et la croissance verte, une dérégulation, des réformes
du marché du travail et des biens, des politiques sociales et le
nécessaire investissement dans les compétences et l’éducation.
48. Il appartient aux responsables politiques européens que nous
sommes de régler une fois pour toutes et fermement la question de
l'euro. Trouver une solution crédible, qui s’inspire des actions
énergiques ébauchées par la BCE, ne garantit pas pour autant la
fin des heurts pour l'économie mondiale. Cependant, l’absence de solution
serait l’assurance d’une catastrophe économique. C’est sur cette
toile de fond que se déroule cette année le débat de l’Assemblée
élargie sur les activités de l’OCDE.
49. Pendant sa partie de session de juin 2012, l’Assemblée a adopté
la
Recommandation 2002
(2012) et la
Résolution
1885 (2012) «La jeune génération sacrifiée: répercussions sociales,
économiques et politiques de la crise financière», la
Résolution 1884 (2012) «Mesures d'austérité – un danger pour la démocratie
et les droits sociaux» et la
Résolution
1886 (2012) sur l'impact de la crise économique sur les collectivités
locales et régionales en Europe. Tous ces textes vont dans le sens
d’une réorientation des programmes pour combattre la crise dans
le but de favoriser la relance économique tout en protégeant les
groupes les plus défavorisés de la population, notamment les jeunes.
50. Les dangers pour la démocratie posés par la crise ont été
soulignés pendant les débats sur ces rapports. Si, d’un côté, il
appartient à chaque pays de trouver les mesures qui lui conviennent,
d’un autre côté, la solidarité européenne est indispensable et un
partage de certaines compétences, notamment budgétaires, entre les
Etats de la zone euro semble inévitable.
51. Les recommandations de l’OCDE – «penser structurel», «penser
social», «penser vert» et «penser institutionnel» – semblent définir
une combinaison efficace et adéquate de politiques pour sortir de
la crise. L'Assemblée souhaitera peut-être examiner des actions
concrètes selon cette perspective.
52. En juin 2012, l’Assemblée a aussi adopté la
Résolution 1888 (2012) sur «La crise de la démocratie et le rôle de l’Etat
dans l’Europe d’aujourd’hui», qui analyse les relations entre la
gouvernance et la crise ainsi que les dangers pour la démocratie
liés à certaines des mesures prises pour faire face à la crise.
Elle a conclu que l’Europe a besoin d’Etats solides fondés sur des
démocraties fortes, thème sur lequel l’OCDE a aussi mis l’accent
dans ses récents travaux. Des institutions saines et une gouvernance
forte, tels sont les éléments considérés comme indispensables pour
retrouver la confiance des entreprises, des travailleurs, des ménages et
des citoyens («penser institutionnel»). L'Assemblée élargie préconise
l’élaboration d’un rapport basé sur la présente résolution et sur
les travaux de l’OCDE dans le domaine de la gouvernance publique.
Un élément important dans ce sens pourrait être la contribution
de l’OCDE au rapport de l'Assemblée parlementaire concernant l’incidence
de la crise économique sur les collectivités locales et régionales
en Europe, document en cours d’élaboration.
53. Toujours pendant sa partie de session de juin 2012, l’Assemblée
a adopté la
Résolution
1892 (2012) sur la crise de la transition démocratique en Egypte
et la
Résolution 1893
(2012) sur la transition politique en Tunisie, qui font suite
à ses travaux sur le Printemps arabe. Elle rappelle une fois de
plus sa
Résolution 1831 (2011) sur la coopération entre le Conseil de l’Europe et les
démocraties émergentes dans le monde arabe, et confirme qu’elle
est prête à partager son expérience en matière de transition démocratique
pour faciliter la transition politique dans ces deux Etats.