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Rapport | Doc. 13590 | 09 septembre 2014

Elever le statut de l'enseignement et de la formation professionnels

Commission de la culture, de la science, de l'éducation et des médias

Rapporteur : M. Piotr WACH, Pologne, PPE/DC

Origine - Renvoi en commission: Doc. 13005, Renvoi 3905 du 1er octobre 2012. 2014 - Quatrième partie de session

Résumé

Avec l’accélération de l’évolution technologique, l’Europe a besoin de travailleurs qui puissent se former en permanence pour rester à la pointe des connaissances et préserver ainsi la compétitivité de l’Europe sur les marchés internationaux. Pourtant, malgré l’urgence de la situation, la formation professionnelle fait souvent figure de «parent pauvre» par rapport à d’autres formes d’éducation, avec des niveaux de qualité moindres et une moins bonne reconnaissance sociale.

Il est temps d’élaborer une vision stratégique pour remettre la formation professionnelle à sa juste place et de prendre d’urgence des mesures visant à en améliorer la qualité et l’attractivité et à faire en sorte qu’elle corresponde aux besoins des employeurs. Les gouvernements devraient commencer par faire du droit à la formation professionnelle une obligation contraignante en souscrivant aux parties correspondantes de la Charte sociale européenne révisée.

Des stratégies nationales devraient être déployées pour favoriser l’apprentissage de compétences techniques et pratiques, en y incluant notamment de nouveaux domaines d’expertise qui sont souvent absents des programmes de formation professionnelle existants, comme la création d’entreprise, les langues étrangères ou les technologies de l’information. Enfin, les pouvoirs publics devraient fournir les ressources nécessaires, par exemple sous forme de bourses ou d’aides aux élèves et aux employeurs qui participent à ce type de formations, surtout lorsqu’elles sont nouvelles ou innovantes.

A. Projet de résolution 
			(1) 
			Projet
de résolution adopté à l’unanimité par la commission le 23 juin
2014.

(open)
1. L’Assemblée parlementaire regrette que, en dépit des avantages pour les individus, les entreprises et l’économie dans son ensemble, l’enseignement et la formation professionnels soient confrontés à de nombreux défis en termes de qualité insuffisante et de manque de reconnaissance sociale, d’estime et d’attrait comparativement à d’autres parcours éducatifs, notamment le deuxième cycle du secondaire et l’enseignement supérieur.
2. L’enseignement et la formation professionnels peuvent jouer un rôle important en répondant à la pénurie de compétences techniques ainsi qu’en renforçant l’employabilité et, en particulier, l’accès des jeunes à l’emploi. A cette fin, il convient de prendre des mesures urgentes pour améliorer la qualité de l’enseignement et la formation professionnels et créer des programmes d’études en adéquation avec les besoins du marché du travail.
3. L’Assemblée apprécie le travail considérable entrepris en matière d’assurance qualité de l’enseignement et la formation professionnels, associant les gouvernements, les partenaires sociaux et les institutions de l’Union européenne. Elle soutient pleinement la proposition de création d’un espace européen des compétences et des certifications, qui renforcera la visibilité et l’importance de l’enseignement et de la formation professionnels et sera l’occasion d’établir un programme de réforme fondé sur une offre d’enseignement et de formation professionnels de qualité élevée.
4. L’Assemblée considère que les lignes directrices et les stratégies globales mises en œuvre à l’échelon européen conformément à la stratégie Europe 2020 de l’Union européenne, comme le système de crédit d'apprentissages pour l'enseignement et la formation professionnels (ECVET) et le Cadre européen des certifications (EQF) constituent la voie à suivre également par les Etats membres du Conseil de l’Europe ne faisant pas partie de l’Union européenne. Les initiatives et les mesures d'incitation encourageant les échanges transnationaux et la coopération en matière d’enseignement et de formation professionnels devraient être renforcées aux niveaux européen et national.
5. Pour obtenir des résultats durables, il est indispensable que les Etats membres du Conseil de l’Europe prennent des mesures spécifiques afin d’élever le statut de l’enseignement et de la formation professionnels. Une telle démarche s’avérera cependant insuffisante sans une forte mobilisation de toutes les parties prenantes et une collaboration accrue de ces dernières avec les autorités publiques compétentes.
6. Par conséquent, l’Assemblée recommande aux Etats membres:
6.1. de ratifier la Charte sociale européenne (révisée) (STE n° 163) et d’accepter les dispositions de ses articles 9 (droit à l'orientation professionnelle) et 10 (droit à la formation professionnelle) en tant que dispositions contraignantes;
6.2. d’élaborer des stratégies et des politiques nationales et locales d’enseignement et de formation professionnels en fonction des contextes nationaux en matière d’éducation et d’emploi, tout en prenant en considération les bonnes pratiques mises en œuvre dans d’autres pays;
6.3. d’associer les partenaires sociaux, les pouvoirs locaux et régionaux, les fédérations et les associations d’employeurs ainsi que la société civile au sens large à la formulation et à la mise en œuvre des stratégies en matière d’enseignement et de formation professionnels;
6.4. de garantir à tous, y compris aux personnes issues de milieux défavorisés, aux immigrés, aux chômeurs, aux jeunes et aux personnes handicapées, l’égalité d’accès à l'éducation, y compris l’enseignement et la formation professionnels;
6.5. d’améliorer la perméabilité des parcours éducatifs et de faciliter l’accès à d’autres possibilités d’éducation et de formation, notamment l’accès à l’enseignement supérieur fondé sur le mérite pour les diplômés de l’enseignement et de la formation professionnels;
6.6. de mettre en place des incitations financières, par exemple des subventions et des bourses, destinées aux étudiants et aux apprentis de l’enseignement et de la formation professionnels ainsi qu’aux employeurs qui assurent des fonctions de formateurs dans les programmes de la filière professionnelle;
6.7. d’encourager tout particulièrement l’acquisition de compétences entrepreneuriales en plus des compétences spécifiques à chaque profession;
6.8. de lancer des campagnes de sensibilisation visant à mieux faire prendre conscience des avantages et du rôle de l’enseignement et de la formation professionnels en termes d’employabilité;
6.9. de proposer au secteur de l’industrie des mesures d’incitation et de créer avec lui des partenariats afin de soutenir la formation professionnelle continue des formateurs de l’enseignement et de la formation professionnels;
6.10. d’élaborer des cadres nationaux solides et transparents d’assurance qualité dans l’enseignement et la formation professionnels;
6.11. de faciliter la reconnaissance mutuelle de l’enseignement et de la formation professionnels en Europe et de garantir la mise en œuvre correcte du système de crédit d'apprentissages pour l'enseignement et la formation professionnels (ECVET), du Cadre européen des qualifications et de l’espace européen des compétences et des certifications;
6.12. d’établir des réseaux transfrontaliers et d’encourager la coopération et l’échange de bonnes pratiques avec les réseaux européens, tels que le réseau européen pour l’assurance de la qualité dans l’enseignement et la formation professionnels (EQAVET).
7. L’Assemblée invite les établissements publics et privés d’enseignement et de formation professionnels:
7.1. à proposer des programmes axés sur l’apprenant prenant en compte les nouvelles perspectives et tendances dans les matières étudiées, et à encourager un apprentissage propice à l’épanouissement personnel et à la progression professionnelle fondés sur le mérite et le talent;
7.2. à s’efforcer d’améliorer la qualité de l’enseignement et de la formation professionnels en attirant des enseignants et du personnel mieux qualifiés, en appliquant des méthodes pédagogiques interactives et en fournissant du matériel adapté à l’enseignement pratique;
7.3. à améliorer la communication avec les étudiants, en apportant aux jeunes et à leurs familles des informations transparentes, exhaustives et pertinentes sur l’importance de l’enseignement et de la formation professionnels, et les avantages et les possibilités qu’ils offrent.
8. L’Assemblée demande instamment au secteur privé de renforcer la coopération avec les centres d’enseignement et les prestataires d’enseignement et de formation professionnels afin:
8.1. de participer activement à la mise au point de programmes d’enseignement et de formation professionnels en veillant à garantir leur cohérence avec l’évolution des besoins du marché de l’emploi en termes d’aptitudes et de compétences;
8.2. d’offrir aux étudiants de l’enseignement et de la formation professionnels davantage de possibilités d’expérience pratique, afin également d’augmenter les perspectives d’emploi des diplômés de ces filières;
8.3. d’inclure dans le système d’enseignement et de formation professionnels continus des modules spécifiques permettant d’acquérir des compétences en technologies de l'information et de la communication et d’améliorer la maîtrise des langues étrangères afin de favoriser la mobilité.
9. Enfin, l’Assemblée invite le Comité européen des Droits sociaux à suivre et évaluer la mise en œuvre des normes établies en matière d’enseignement et de formation professionnels par l’intermédiaire de la procédure des rapports mise en place en vertu de la Charte sociale européenne (révisées).

B. Exposé des motifs, par M. Wach, rapporteur

(open)

1. Introduction

1. L’enseignement et la formation professionnels (EFP), y compris la formation professionnelle technique, sont une étape clé dans l’accès à l’emploi. Aujourd’hui, cependant, la faible reconnaissance sociale de la formation professionnelle dans de nombreux pays n’incite pas les jeunes à choisir ce type d’enseignement. En outre, la faible qualité de l’enseignement professionnel a de graves répercussions sur la capacité des étudiants à trouver et à conserver un emploi et à prévenir le chômage futur. Etant donné que, souvent, l’enseignement et la formation professionnels ne répondent pas aux besoins du marché du travail, la compétitivité des économies nationales (et européennes) s’en trouve entravée et cela contribue à augmenter le chômage alors que certains secteurs du marché du travail ont des difficultés importantes pour recruter des personnes qualifiées. Cela nécessite une analyse approfondie des politiques nationales actuelles dans ce domaine ainsi qu’une meilleure utilisation des ressources investies dans le domaine de l’enseignement et de la formation professionnels dans le cadre des stratégies nationales visant à renforcer la main-d’œuvre pour le 21e siècle.
2. C’est pour cette raison que, le 6 juillet 2012, j’ai déposé une proposition de recommandation intitulée «Elever le statut de la formation professionnelle technique» avec 20 autres membres de l’Assemblée parlementaire (Doc. 13005). J’ai souligné la nécessité d’envisager des mesures pour améliorer la situation actuelle. Le 24 avril 2013 à Strasbourg, la commission de la culture, de la science, de l'éducation et des médias a décidé de modifier le titre du rapport et de l’intituler «Elever le statut de l’enseignement et de la formation professionnels».
3. Lors de l’élaboration du présent rapport, j’ai tenu compte du rapport de fond établi par M. Reiner Siebert, chef de département, Bfz-Essen GmbH (Allemagne). Je tiens également à remercier les experts qui ont contribué aux travaux de notre commission en prenant part à l’échange de vues tenu le 24 avril 2013 
			(2) 
			Le 24 avril 2013 à
Strasbourg, la commission a tenu un échange de vues avec M. Antonio
Ranieri, expert principal, Centre européen pour le développement
de la formation professionnelle (CEDEFOP), Thessalonique (Grèce),
et Mme Monika Schlachter-Voll, vice-présidente du Comité européen
des Droits sociaux (CEDS).. J’ai assisté, les 26 et 27 mars 2014 à Athènes, à la Conférence «Remédier à l’inadéquation des compétences par l’apprentissage en entreprise et l’enseignement et la formation professionnels», organisée sous la présidence grecque du Conseil de l’Union européenne 
			(3) 
			Lors de cette réunion,
j’ai eu la possibilité de discuter des mesures destinées à élever
le statut de l’enseignement et de la formation professionnels (EFP)
avec M. Joachim James Calleia, directeur du CEDEFOP, M. João Santos,
chef adjoint de l’unité «formation professionnelle et éducation
des adultes» (Commission européenne), M. Reinhold Weiss, président
adjoint et directeur de recherche de l’Institut fédéral pour l’EFP
(BIBB) (Allemagne), M. Shyam Sunder Pariar, coordonnateur de projet,
«Sector Skills Alliance» (Grŵp Llandrillo Menai, Royaume-Uni), M.
Michel Van Smoorenburg, conseiller principal à UWV (service public
de l’emploi aux Pays-Bas), et M. Max Hogeforster, président du Parlement
de la Hanse en Allemagne.. J’ai également participé au 5e Forum annuel sur l’assurance de la qualité dans l’enseignement et la formation professionnels (EQAVET), où j’ai eu la possibilité de discuter des points soulevés dans le présent rapport avec un grand nombre d’experts 
			(4) 
			J’ai eu la possibilité
de m’adresser au réseau de prestataires de services de l’enseignement
et de la formation professionnels et de discuter de l’assurance
de la qualité dans l’EFP avec M. Sean Feerick, directeur du secrétariat d’EQAVET,
ainsi qu’avec des membres du réseau EQAVET, y compris des partenaires
des organisations internationales compétentes: Mme Tina Bertzeletou,
expert principal, et M. George Kostakis, expert (CEDEFOP), et Mme
Elizabeth Watters, spécialiste principale du développement des politiques
et systèmes d’EFP (Fondation européenne pour la formation)..
4. Les bénéfices marchands et non marchands qu’offre l’EFP, en tant qu’instrument de politique publique, sont reconnus. L’EFP est considéré comme un moyen d’intégrer les jeunes et les personnes défavorisées sur le marché du travail et de promouvoir l’inclusion sociale d’une manière générale en améliorant les perspectives d’emploi des individus. Dans le contexte de la mondialisation, «l’avantage compétitif de l’Europe dépend tout autant des compétences de sa main-d’œuvre que de l’utilisation de celles-ci dans la pratique». L’EFP a un rôle crucial à jouer dans les deux cas. En conséquence, il devrait être considéré comme un instrument d’excellence et comme un investissement stratégique essentiel dans les individus, les compétences et l’environnement professionnel au service de la production efficiente de biens et de services de qualité 
			(5) 
			Benefits of vocational
education and training in Europe for people, organisations and countries,
CEDEFOP, 2013, p. 42..

2. Qu’entend-on par «formation et enseignement professionnels»?

5. Lorsqu’on parle d’enseignement et de formation professionnels (EFP), il faut garder à l’esprit qu’il n’y a rien de nouveau dans le fait d’apprendre pour travailler. Le processus de préparation à l’accomplissement d’une tâche remonte à l’époque où l’homme a dû développer des compétences pour assurer sa survie et améliorer ses conditions de vie. Depuis lors, les compétences et le savoir-faire n’ont cessé de se perfectionner, au fil de leur transmission de génération en génération. Bien avant l’avènement des sociétés industrielles, il fallait être très spécialisé pour fabriquer des outils et des armes, ou pour exploiter les ressources naturelles au moyen d’activités agricoles ou minières. Tous ces métiers exigeaient énormément de savoir et de savoir-faire pour être capable d’assurer une production et une offre de qualité.

2.1. Définition

6. L’EFP se définit comme le processus de préparation à une «activité» professionnelle, une tâche ou un rôle particuliers dans la production ou l’offre de biens ou la fourniture de services à des fins économiques. Lorsque ce processus est entrepris pour la première fois (dans le domaine concerné), on parle d’enseignement et de formation professionnels initiaux (EFPI), correspondant généralement à l’enseignement et/ou à la formation dispensés aux élèves à l’issue de la scolarité obligatoire, dans la plupart des pays à la fin du secondaire, c’est-à-dire à l’âge de 15-16 ans.
7. Cela étant, les mesures en lien avec l’évolution du marché du travail jouent un rôle toujours plus important dans le système éducatif, en particulier pour lutter contre le chômage structurel. L’enseignement et la formation professionnels, qu’ils soient initiaux ou continus, ne se limitent donc pas aux moins de 25 ans et ne cessent de gagner du terrain dans la formation des adultes.
8. Contrairement à l’EFPI, la formation professionnelle continue (ou perfectionnement professionnel) désigne le processus d’apprentissage à un stade ultérieur de la carrière professionnelle, visant l’acquisition ou le renforcement de compétences ou de connaissances liées à un travail spécifique ou s’inscrivant dans le développement des compétences – c’est-à-dire qu’elle capitalise sur la formation initiale et consiste (souvent) en l’obtention de crédits ou de diplômes supplémentaires.

2.2. Importance de l’enseignement et de la formation professionnels

9. Les sociétés industrielles et, à plus forte raison, les sociétés post-industrielles, dont l’économie s’intègre dans un réseau d’interdépendances mondialisées, se fient à leur capacité à promouvoir et à utiliser le progrès technologique et sont toujours plus dépendantes de procédures et de systèmes complexes d’information et de communication déployés à l’échelle planétaire. Pour comprendre et utiliser ces systèmes au niveau professionnel, il faut un niveau élevé de compétences et de connaissances adaptables à différentes tâches et différents cadres de travail. Les exigences d’économies mondialisées et fondées sur les TIC ont donc amené à revoir à la hausse les connaissances et les compétences nécessaires pour mener à bien des activités professionnelles de tout type ou presque, même dans un contexte local ou dans des emplois encore largement manuels.
10. L’enseignement général n’a pas pour objet d’inculquer des connaissances spécifiques, ni n’est conçu pour cela. Pour ne citer qu’un exemple d’activité professionnelle encore largement épargnée par la concurrence internationale, un futur coiffeur ne sera pas formé à encaisser des paiements par carte de crédit, à passer des commandes en ligne ou à utiliser des simulateurs de coiffure (sans parler de l’utilisation d’une paire de ciseaux). Pour ce qui est des employés de banque, des mécaniciens automobile (aussi appelés «mécatroniciens» de nos jours) ou des administrateurs de réseau, par exemple, il ne fait pas de doute que la compréhension et l’utilisation d’informations sur les taux de change et les indices boursiers, les performances des piles à combustible ou les normes d’encodage nécessitent beaucoup plus que de simplement appliquer des compétences particulières ou des connaissances générales.
11. Toutefois, cela ne suffit à expliquer la nécessité d’inclure une structure globale d’EFP dans le système éducatif. La promotion de la compétitivité par la gestion des ressources humaines pourrait être considérée, en effet, comme relevant exclusivement du secteur privé, plutôt que de l’Etat.
12. Or, le fait de laisser l’EFP au secteur privé pourrait conduire à affaiblir un peu plus les petites et moyennes entreprises dont les possibilités et capacités de développement des ressources humaines sont déjà limitées. En revanche, les grandes sociétés et les multinationales disposent généralement de dispositifs et d’infrastructures internes au service de stratégies de développement des ressources humaines taillées sur mesure, qui articulent l’EFP autour des besoins qui leur sont propres.
13. Au même titre que l’énergie, les transports et la communication, les systèmes d’EFP font partie de l’infrastructure indispensable au bon développement et à la prospérité de la société dans un environnement mondial en rapide mutation, fondé sur le savoir et l’information. L’EFP fournit la main-d’œuvre qualifiée nécessaire. Cela devient particulièrement important lorsque des changements rapides ou profonds, notamment démographiques ou technologiques, entraînent des pénuries de main-d’œuvre et de compétences appelant des solutions stratégiques pour préserver l’assise économique. Pourtant, l’argument décisif en faveur de l’intégration de l’EFP dans les systèmes éducatifs des sociétés démocratiques est sa capacité à offrir des chances égales à tous les individus en phase de transition vers un travail nouveau ou différent.
14. Dès lors, l’accès à l’EFP et ses référentiels concernent les élèves qui quittent le système scolaire, les demandeurs d’emploi (au chômage) et les migrants d’une manière similaire mais à des degrés susceptibles de varier considérablement. Alors qu’un accès bien établi à l’EFPI (comme alternative intéressante à l’enseignement supérieur) permet de prévenir ou de réduire considérablement le chômage des jeunes, la mise en place d’un système de crédits approfondi et reconnu pour l’EFP favorisera l’accès des migrants et des demandeurs d’emploi au marché du travail.
15. Enfin, et c’est peut-être le plus important, les systèmes d’EFP doivent assurer la mobilité à tous les égards. En effet, la mise en place de niveaux de compétence analogues à ceux de l’enseignement supérieur facilite l’ascension sociale par l’éducation. L’instauration de programmes d’études et de référentiels de qualifications professionnelles indépendantes de besoins propres à telle ou telle entreprise permet une mobilité géographique, interentreprises et intersectorielle.
16. Pour résumer, l’EFP peut contribuer largement à relever une partie des plus grands défis qui se posent pour les sociétés européennes, à savoir:
  • assurer le développement économique et le bien-être par l’offre d’une main d’œuvre qualifiée et par la prévention des pénuries de compétences;
  • lutter contre le chômage chez les jeunes et les adultes;
  • garantir l’inclusion et l’intégration des groupes minoritaires défavorisés;
  • favoriser l’égalité des chances et la mobilité sur le marché du travail;
  • améliorer la confiance et l’estime de soi chez les jeunes qui ont quitté prématurément le système scolaire;
  • permettre une participation égale pour tous à la vie de la société.

2.3. Acteurs

17. L’EFP étant une passerelle entre le monde de l’enseignement général et celui du travail, il associe un plus grand nombre d’acteurs que le système éducatif, d’une part, et le milieu professionnel, d’autre part. Les obligations et les responsabilités de chacun varient selon que l’EFP met l’accent sur le front éducatif, le front professionnel, ou les deux. A l’échelon national/étatique, l’EFP fait généralement intervenir les ministères et organes subsidiaires (ou niveaux dans les systèmes fédéraux) chargés de l’éducation, de l’emploi et de l’économie. De plus, les partenaires sociaux (syndicats, fédérations d’employeurs, etc.) se voient généralement confier, au minimum, un rôle consultatif dans le processus administratif d’EFP.
18. Dans certains pays, des institutions semi-publiques telles que les chambres de commerce et d’industrie jouent un rôle crucial dans la mise en œuvre de l’EFP. A l’échelon local, les acteurs clés de l’EFP sont généralement les écoles et les collèges techniques, les employeurs, les syndicats, les chambres de commerce et d’industrie, les agences pour l’emploi, les pouvoirs locaux et les représentants d’élèves et de parents.
19. La création de conseils locaux d’enseignement et de formation professionnels, dotés de pouvoirs opérationnels dans un cadre national ou fédéral d’EFP et chargés de définir des programmes d’études et des référentiels comparables à ceux de l’enseignement général ou supérieur, pourrait s’avérer utile à la mise en œuvre d’un enseignement et d’une formation professionnels adaptés aux besoins à l’échelon local. Ces conseils devraient faire intervenir, à tout le moins, des représentants des établissements d’enseignement (général et technique/professionnel), les partenaires sociaux, les chambres de commerce et d’industrie, les agences pour l’emploi et les pouvoirs locaux.

2.4. Structures et systèmes

20. Lorsqu’on parle de structures et de systèmes d’EFP au niveau supranational, il faut tenir compte du fait que les pays européens ont conçu des systèmes très diversifiés d’enseignement général et professionnel en fonction de leurs systèmes politiques respectifs, mais aussi de leur histoire, de leurs traditions et de leurs institutions. Pour comprendre les différences, il est utile d’avoir conscience de ce que les pays européens ont en commun. La mondialisation, le progrès technologique et l’évolution démographique comptent parmi les défis les plus répandus dans toute l’Europe. Un solide consensus se dégage sur le fait que l’EFP doit être renforcé. Même si, jusqu’à présent, «la mise en œuvre de référentiels et de définitions européennes a été variable (…), tous les pays avancent dans la même direction» 
			(6) 
			Initial
vocational education and training (IVET) in Europe – Review, CEDEFOP,
2008..
21. L’EFPI est mis en œuvre à divers niveaux d’enseignement, du début du secondaire (12 ans et plus) au début de l’enseignement supérieur (18 ans et plus), mais principalement au niveau supérieur du secondaire (15-16 ans et plus). La filière professionnelle est l’une des deux filières d’enseignement, avec la filière générale 
			(7) 
			Initial vocational
education and training (IVET) in Europe – Comparative analysis,
CEDEFOP, 2008.. Sur tout le continent, l’enseignement théorique en établissement scolaire domine plus ou moins dans ces deux filières, associé à beaucoup, peu ou pas d’éléments pratiques. Il ressort d’études récentes que l’importance accordée à l’apprentissage axé sur le travail, tourné vers la pratique et motivé par la demande dans les cadres nationaux d’EFPI est souvent cruciale pour répondre à des problèmes fondamentaux, liés notamment aux taux de scolarisation post-obligatoire, au chômage des jeunes ou à l’égalité des chances.
22. «Les jeunes de pays dotés de solides systèmes d’EFP, associant étroitement la formation scolaire et la formation en milieu professionnel, ont beaucoup plus de chances que leurs pairs des filières générales de trouver un emploi et d’intégrer rapidement le marché du travail. A l’inverse, les jeunes adultes de pays où la composante de l’EFP en milieu professionnel est moins développée retirent un avantage moindre (mais néanmoins présent en règle générale) de l’EFP en termes de perspectives d’emploi et ont plus de mal à intégrer le marché du travail 
			(8) 
			Labour
market outcomes of vocational education in Europe, Evidence from
the European labour force survey, CEDEFOP, 2013..» Cependant, il peut être contreproductif de se contenter de copier les bonnes pratiques sans les adapter au système concerné. Autrement dit, ce qui convient à tel système ne convient pas forcément à tel autre.
23. «Dans les pays où il est possible de faire ce type de distinction [à noter que l’Estonie, l’Italie, les Pays-Bas, la Norvège, la Pologne, le Portugal et la République slovaque n’ont pas fait état de distinction entre les différents types d’EFP], l’EFP se répartit comme suit:
  • EFP dispensé principalement en milieu scolaire: au moins 75 % des heures de formation sont passées en établissement d’enseignement secondaire, institut technique/professionnel ou centre de formation, et le reste du temps est passé en milieu professionnel (entreprise ou autre);
  • EFP dispensé principalement en milieu professionnel: au moins 75 % des heures de formation sont passées en entreprise ou autre, et le reste du temps est passé en milieu scolaire (établissement d’enseignement secondaire, institut technique/professionnel ou centre de formation);
  • combinaison d’EFP dispensé en milieu scolaire et en milieu professionnel (double système, programmes d’alternance, etc.): moins de 75 % des heures de formation sont passées en établissement d’enseignement secondaire, institut technique/professionnel ou centre de formation, et le reste du temps est passé en entreprise ou autre» 
			(9) 
			Ibid. .

3. Principaux enjeux des politiques publiques

24. L’enseignement et la formation professionnels associent trois grands domaines d’action des pouvoirs publics – l’éducation, l’économie et l’emploi – ayant des incidences directes ou indirectes sur d’autres éléments majeurs, tels que les politiques sociales et les finances. Ces relations d’interdépendance nécessitent des approches interdisciplinaires, ce qui, dans bien des cas, représente à la fois une chance et un défi. En même temps, des questions stratégiques se posent au niveau local, régional, national et international. Du fait de ces relations à la fois horizontales et verticales entre les différents cadres et politiques et leur mise en œuvre, il est souvent bien difficile de trouver les bonnes réponses aux problèmes recensés et de traduire ces réponses en mesures concrètes.
25. Cela étant, la perspective continentale et mondiale requiert une stratégie globale, qui a déjà été définie par l’Union européenne. Cette stratégie est sans cesse perfectionnée et adaptée au niveau européen et poursuivie (à des cadences et intensités différentes cependant) par tous les pays européens. La stratégie européenne demeure donc essentielle pour toutes les initiatives et stratégies nationales et locales.

3.1. Répondre à la demande du marché du travail

26. L’inadéquation entre l’offre et la demande est l’un des problèmes majeurs auxquels se heurtent les marchés et les sociétés dynamiques lorsque la demande et l’offre divergent dans le temps et dans l’espace. Les entités de formation, c’est-à-dire les établissements d’enseignement secondaire et technique ou professionnel, et les employeurs, doivent en fait prévoir les besoins futurs du marché de l’emploi. Plus la durée de l’enseignement et de la formation est longue, plus il est difficile de prévoir si l’offre et la demande seront en adéquation à la fois dans le temps et dans l’espace.
27. De même, l’EFP étant de plus en plus fréquemment dispensé en établissement scolaire, les entités de formation doivent jouer un rôle plus important dans la prévision des besoins futurs des entreprises. Dans la plupart des systèmes d’EFP, les établissements n’en sont pas capables ou n’y sont pas préparés, alors que la formation sur le lieu de travail est plus étroitement liée au développement professionnel, ce qui permet de mieux anticiper la demande.
28. Enfin, les exigences de mobilité et de flexibilité pour les individus et les entreprises donnent lieu à des disparités régionales toujours plus marquées. Des pénuries de compétences surviennent dans certaines régions alors qu’il existe une offre de compétences dans d’autres régions, tant à l’intérieur des frontières qu’au niveau transnational. Même dans un pays comme l’Allemagne, où l’économie se porte bien, le système d’EFP, aussi bien établi soit-il, ne permet pas de combler l’écart significatif entre les Länder du nord et les Länder du sud.
29. Les taux de chômage élevés qui frappent actuellement les jeunes hautement qualifiés en Europe du Sud montrent que même les prévisions du marché du travail à l’échelle nationale ou européenne ne sont pas suffisamment précises pour prendre les mesures préventives qui s’imposent au sein des systèmes éducatifs. Il ne suffit pas d’analyser les indicateurs reçus du marché post factum: de nouveaux outils sont nécessaires pour anticiper les besoins du marché.

3.2. Faire correspondre les référentiels d’emploi et les référentiels de formation

30. Lorsqu’on évoque la question de l’adéquation entre les compétences acquises et les besoins des entreprises, ces dernières se plaignent souvent du fait que les jeunes qui sortent de l’école ou de l’université sont mal préparés. La vérité se situe quelque part entre les exigences propres à un lieu de travail donné et un référentiel éducatif relativement généraliste, même dans le cadre de la formation professionnelle.
31. Les systèmes d’EFP ne peuvent ni ne doivent fournir des compétences sur mesure pour tel ou tel poste; ils doivent plutôt permettre une certaine mobilité dans et à travers un contexte professionnel et sectoriel plus vaste. En outre, ils doivent être suffisamment attrayants pour les apprenants et pour les entreprises en quête d’expérience professionnelle, mais aussi créer des référentiels reconnus, et garantir impérativement la stabilité tout en laissant une marge d’adaptabilité. Cela n’est possible que dans les systèmes fondés sur l’évaluation continue et sur la négociation permanente entre les acteurs clés, les partenaires sociaux et l’Etat.

3.3. Assurer l’égalité des chances d’accès au système d’enseignement et de formation professionnels

32. Tandis que les systèmes d’EFP axés sur le milieu professionnel, tels que l’apprentissage, promettent de mieux faire correspondre l’offre à la demande, les systèmes (plus ou moins) régis par le marché nuisent potentiellement à l’égalité des chances. De leur côté, les systèmes axés sur l’enseignement en établissement, assortis de référentiels clairs en matière de formation et de perméabilité, sont plus facilement gérables lorsqu’il s’agit, par exemple, d’accroître la représentation féminine dans des professions essentiellement masculines ou l’accès des minorités ethniques à des professions à statut plus élevé. L’adoption de quotas de représentation féminine et masculine, par exemple, contredit le principe de liberté d’action des employeurs, selon lequel ces derniers ne peuvent être guère contraints de choisir des apprentis hommes ou femmes, migrants ou nationaux.
33. Cependant, il ressort des enquêtes PISA de l’OCDE sur la performance scolaire que même les systèmes éducatifs fondés sur l’enseignement et la formation en établissement scolaire public peuvent être très sélectifs. Les systèmes éducatifs, professionnels et généraux, doivent donc en permanence faire l’objet d’un suivi, d’une évaluation et de comparaisons, au regard de leur perméabilité et de l’égalité des chances qu’ils offrent; le cas échéant, il y aura lieu de prévoir la mise en place de mesures d’incitation.

3.4. Combler le fossé entre l’enseignement et la formation professionnels et l’enseignement supérieur

34. L’attrait de l’EFP dépend fortement des possibilités offertes aux élèves à tout moment. L’EFP doit proposer des référentiels et des crédits utilisables dans d’autres filières.
35. Depuis l’apparition du chômage de masse, les jeunes générations, dans toutes les sociétés postindustrielles, s’attendent de moins en moins à suivre un parcours éducatif qui les prépare à un métier pour la vie. Ce point est particulièrement important pour les pays ayant une forte tradition d’EFP qui s’articule autour de ce principe de constance professionnelle tout au long de la vie active. Pour être fiables et pour tenir leurs promesses, les systèmes d’EFP doivent donc absolument proposer des options attrayantes visibles dès le début du parcours professionnel. Cela vaut pour les niveaux de compétence, les crédits et les qualifications, comme pour l’expérience professionnelle.

3.5. Assurer la reconnaissance sociale pour les enseignants comme pour les apprenants dans le système d’enseignement et de formation professionnels

36. La reconnaissance sociale repose sur la perception au sein de la société. Les élèves de l’EFP jouissent de la reconnaissance sociale tant que leur formation promet mais fournit également des résultats reconnaissables tels qu’un certificat ou un diplôme de fins d’études et offre des possibilités d’occuper un emploi salarié ou indépendant répondant à des attentes, tant pour ce qui est des conditions de travail que des revenus. C’est pour cette raison que la qualité de l’enseignement est essentielle.
37. Les enseignants et formateurs de l’EFP devraient jouir de la même reconnaissance sociale que les enseignants généralistes. Cela impliquerait un statut, des conditions de travail et une rémunération similaires à ceux des autres enseignants.

3.6. Assurer un financement adéquat et encourager les initiatives privées

38. Dans beaucoup de pays, le financement de l’EFP suit le modèle du financement de l’enseignement général. Dans tous les pays européens, des conceptions politiques postulent que le financement des établissements d’enseignement général, technique et professionnel ne diffère pas foncièrement de la construction et de l’entretien d’autres infrastructures, par exemple routières ou énergétiques. Ces principes ont donné lieu à une grande diversité de structures et cadres de financement dans l’éducation, allant d’un budget entièrement public à une structure de financement faisant la part belle aux fonds privés et parfois tributaire de ces fonds.
39. Cela étant, il n’existe pas de système dans lequel l’éducation est entièrement privatisée. Le degré d’initiative privée, tant financièrement que structurellement, s’élève à mesure que l’on gravit les échelons du système éducatif. L’EFP ne fait pas exception, sachant que la proximité avec le monde du travail suggère une forte participation du secteur privé. Les systèmes d’EFP qui accordent une place importante au monde du travail et une place moindre à l’enseignement (public) se fondent généralement sur des initiatives et sur un investissement du secteur privé beaucoup plus conséquents pour ce qui est des coûts d’enseignement et de formation mais aussi des moyens de subsistance des apprenants. Par exemple, la formation en apprentissage, qui repose généralement sur des contrats entre l’employeur et l’apprenti, et où la formation en situation de travail occupe une place centrale, fait souvent l’objet de conventions collectives.
40. L’initiative privée et l’esprit d’entreprise sont souvent nécessaires, voire fondamentaux, pour faire progresser et encourager l’innovation, elle-même nécessaire au processus d’adaptation de l’EFP aux défis du monde moderne. Dès lors, il convient de favoriser l’initiative et l’investissement privés au sein du système existant d’EFP, sous réserve que ce dernier garantisse dans l’ensemble:
  • un équilibre constant entre les intérêts des parties prenantes du secteur privé et celles du secteur public;
  • l’égalité des chances dans l’accès à l’enseignement et la formation et la promotion au sein de ce cadre;
  • la conformité avec les référentiels éducatifs fixés au niveau national ou supranational.

3.7. Reconnaissance mutuelle de l’EFP en Europe

41. «Le système européen de crédit d'apprentissages pour l'enseignement et la formation professionnels (ECVET) est l’un des instruments européens conçus pour rendre les systèmes d’enseignement et de formation professionnels (EFP) plus transparents. ECVET vise à permettre aux étudiants d’EFP de passer plus facilement d’un établissement de formation à un autre, dans le même pays ou à l’étranger. Le système ECVET, qui concerne les certifications à tous les niveaux du cadre européen des certifications (CEC) permet le transfert d’unités d’acquis d’apprentissage; il s’appuie sur des partenariats entre les établissements et supprime la nécessité d’évaluer une seconde fois les étudiants passant d’un établissement à un autre 
			(10) 
			<a href='http://www.cedefop.europa.eu/EN/Files/9080_fr.pdf'>Perspectives
et défis d’ECVET, Note d’information du CEDEFOP, juillet 2013.</a>
42. Comme nous l’avons vu dans les chapitres précédents, les marchés mondiaux et la communication transfrontalière requièrent des mesures supranationales pour assurer l’égalité des chances et la mobilité des individus mais aussi pour prévenir les pénuries de compétences et les taux élevés d’exclusion pour les sociétés. L’Union européenne a pris des mesures fermes pour la préparation et la mise en place de référentiels et de cadres transnationaux en vue d’atteindre les buts fixés. Le Conseil de l’Europe a tout intérêt à recommander à ses membres ne faisant pas partie de l’Union européenne de prendre part à ce processus.

4. Solutions stratégiques aux problèmes qui se posent

4.1. Initiatives destinées à soutenir l’EFP au niveau européen

4.1.1. Conseil de l’Europe

43. Le Conseil de l’Europe a un rôle crucial à jouer pour faire en sorte que les politiques d’enseignement professionnel et la pratique en la matière soient conformes aux engagements souscrits par les Etats membres au titre de la Charte sociale européenne, en particulier au titre des articles 9 et 10 de la Charte sociale européenne (révisée) (STE n° 163) 
			(11) 
			<a href='http://conventions.coe.int/Treaty/Commun/QueVoulezVous.asp?NT=163&CL=FRE'>http://conventions.coe.int/Treaty/Commun/QueVoulezVous.asp?NT=163&CL=FRE</a>..
44. L’article 9 dispose que les Parties s’engagent «à procurer ou promouvoir, en tant que de besoin, un service qui aidera toutes les personnes (…) à résoudre les problèmes relatifs aux choix d’une profession ou à l’avancement professionnel» et insiste sur le fait que «cette aide devra être fournie, gratuitement, tant aux jeunes, y compris les enfants d’âge scolaire, qu’aux adultes».
45. Le droit à l’orientation professionnelle constitue un instrument clé des politiques nationales pour lutter contre le chômage et accroître la compétitivité et la performance économique. Ce droit doit être garanti dans le système scolaire (informations sur la formation et accès à la formation) et sur le marché du travail (informations sur la formation et la rééducation professionnelles, planification de carrière). L’orientation professionnelle doit notamment s’adresser aux élèves qui quittent le système scolaire, aux demandeurs d’emploi et aux chômeurs. Les intéressés doivent pouvoir faire des choix avisés et les pouvoirs publics devraient donc s’assurer que des services sont en place pour les orienter et les aider à faire ces choix.
46. L’article 10.1. dispose que les Parties s’engagent «à assurer ou à favoriser, en tant que de besoin, la formation technique et professionnelle de toutes les personnes (…) et à accorder des moyens permettant l’accès à l’enseignement technique supérieur et à l’enseignement universitaire»; dans les paragraphes qui suivent, les Parties s’engagent plus spécifiquement à assurer ou à favoriser «un système d’apprentissage (…); des mesures appropriées et facilement accessibles en vue de la formation des travailleurs adultes; des mesures spéciales en vue de la rééducation professionnelle des travailleurs adultes, rendue nécessaire par l’évolution technique ou par une orientation nouvelle du marché du travail; et (…) des mesures particulières de recyclage et de réinsertion des chômeurs de longue durée».
47. Par conséquent, l’article 10 vise la formation initiale (enseignement secondaire professionnel et général), l’enseignement supérieur universitaire et non universitaire et la formation professionnelle organisée par d’autres acteurs publics ou privés, y compris la formation «continue». La formation professionnelle est considérée ici comme étant essentielle, non seulement pour intégrer les jeunes dans la vie active, mais également pour renforcer le développement personnel et l’intégration sociale. Le droit à la formation professionnelle doit être garanti pour tous, sans discrimination, selon les aptitudes de chacun. L’égalité de traitement en ce qui concerne l’accès à la formation professionnelle doit être garantie aux non‑ressortissants. Pour ce qui est de la reconversion et de la réinsertion des chômeurs de longue durée, il convient d’accorder de l’attention aux mesures de formation et de réinsertion destinées aux groupes les plus gravement touchés par une dégradation de leur situation au regard de l’emploi (jeunes, chômeurs de longue durée, personnes handicapées).
48. L’Assemblée devrait donc inviter les Etats membres à ratifier la Charte, acceptant ainsi les dispositions des articles 9 et 10 comme des dispositions contraignantes et permettant aux pays de rendre compte de la mise en œuvre de ces articles, et également à ratifier le Protocole additionnel prévoyant un système de réclamations collectives (STE n° 158) 
			(12) 
			<a href='http://conventions.coe.int/Treaty/Commun/QueVoulezVous.asp?NT=158&CM=8&DF=08/04/2013&CL=FRE'>http://conventions.coe.int/Treaty/Commun/QueVoulezVous.asp?NT=158&CM=8&DF=08/04/2013&CL=FRE</a>..

4.1.2. Union européenne

49. La Déclaration de Copenhague de 2002 
			(13) 
			Déclaration des ministres
européens de l’enseignement et de la formation professionnels et
de la Commission européenne, réunis à Copenhague les 29 et 30 novembre 2002,
sur la coopération européenne renforcée pour l’enseignement et la
formation professionnels, <a href='http://ec.europa.eu/education/pdf/doc125_en.pdf'>http://ec.europa.eu/education/pdf/doc125_en.pdf</a>. a engagé un processus de coopération dans le domaine de l’enseignement et de la formation professionnels (EFP) en Europe entre les pouvoirs publics, les partenaires sociaux et les institutions de l’Union européenne. Des Etats membres de l’Union européenne, la Norvège et des pays candidats y participent. Depuis 2004, le Centre européen pour le développement de la formation professionnelle (CEDEFOP) rend compte des progrès réalisés par les pays pour atteindre les objectifs politiques convenus d’un commun accord pour l’EFP. Alors que les communiqués précédents étaient axés sur les objectifs généraux à court terme de l’EFP (communiqués de Maastricht 
			(14) 
			Le Communiqué de Maastricht
sur les priorités futures de la coopération renforcée dans l'enseignement
et la formation professionnels, 14 décembre 2004., d’Helsinki 
			(15) 
			Le
Communiqué d'Helsinki sur amélioré la coopération européenne dans
l'enseignement et la formation professionnels, 5 décembre 2006., et de Bordeaux 
			(16) 
			<a href='http://ec.europa.eu/education/lifelong-learning-policy/doc/bordeaux_en.pdf'>Le
Communiqué de Bordeaux sur le renforcement de la coopération dans
l'enseignement et la formation professionnels, 26 novembre 2008</a>.), en 2010 une vision à long terme pour l’EFP en 2020 a été convenue, avec l’engagement de mettre en œuvre une série de mesures d’ici à 2014 
			(17) 
			Communiqué de Bruges
sur la coopération européenne renforcée en matière d’enseignement
et de formation professionnels pour la période 2011-2020, <a href='http://www.cedefop.europa.eu/EN/Files/bruges_en.pdf'>http://www.cedefop.europa.eu/EN/Files/bruges_en.pdf</a>..

4.2. Initiatives destinées à soutenir l’EFP au niveau national

50. Le processus politique dans la promotion de l’EFP aux différents niveaux (local, régional, national et européen) devrait être considéré comme un moyen de s’adapter aux stratégies et aux défis globaux. Les réponses stratégiques locales, ni même nationales, ne font pas le poids face aux défis de la mondialisation; elles doivent s’inscrire dans une stratégie globale qui, en retour, constitue la clé du problème au niveau supranational.
51. Au niveau national et infranational, les solutions qu’apportent les politiques publiques devraient conduire à une interprétation et à une adaptation des traditions, des cadres et des systèmes à la stratégie européenne au lieu de retenir l’une ou l’autre bonne pratique et de l’appliquer dans un cadre juridique et opérationnel auquel elle ne correspond pas nécessairement.
52. Dans beaucoup de pays, en Europe comme ailleurs, les systèmes bien établis et opérationnels, à l’image du double système allemand de formation professionnelle (ou seulement de composantes de ce système), font figure de modèles pour la mise en place ou la réforme de l’EFP 
			(18) 
			Le double système de
formation professionnelle existant en Allemagne a été cité à plusieurs
reprises en exemple de bonne pratique. Alors que beaucoup d’autres
pays ont des approches similaires, l’Allemagne dispose vraisemblablement du
système le plus abouti et le plus complet sous l’angle des qualifications
nationales, des programmes d’études, du financement, de l’orientation
sur le lieu de travail et de la participation de nombreux acteurs
concernés. Pour plus d’informations et de détails, consulter le
site de <a href='http://www.bibb.de/en/index.htm'>l’Institut
fédéral de l’enseignement professionnel (Bundesinstitut für berufliche
Bildung, BIBB).</a>. Il est toutefois nécessaire de modifier les bonnes pratiques ou, à tout le moins, de les adapter aux systèmes locaux, régionaux ou nationaux.
53. Par exemple, la formation en apprentissage ne fonctionnera pas dans un processus descendant ou d’intervention des politiques publiques si les employeurs ne sont pas traditionnellement impliquées (financière ou structurelle) dans le parcours éducatif. Dès lors, les exemples de bonnes pratiques cités ci-après dans ce document doivent être pris comme des suggestions plutôt que comme des propositions de politiques publiques.
54. Les systèmes et cadres d’EFP doivent comprendre ou prévoir (au minimum):
  • un dispositif d’information sur les besoins en compétences 
			(19) 
			Par exemple, <a href='http://www.arbeitsagentur.de/nn_426332/EN/Navigation/Startseite/Englisch-Nav.html'>l’Agence
fédérale allemande pour l’emploi (Bundesagentur für Arbeit)</a> dispose de son propre <a href='http://www.iab.de/en/iab-aktuell.aspx'>institut de recherche
(IAB)</a>, qui se charge, en coopération avec l’Institut fédéral
pour l’enseignement et la formation professionnels (BIBB) d’établir
des prévisions concernant les demandes de compétences régionales
et nationales, en se fondant sur des analyses statistiques d’offres
d’emplois enregistrées, sur les évolutions commerciales et démographiques,
tenant compte de la «classification des métiers» (catalogue de tous
les métiers et professions).;
  • un cadre de référentiels d’emploi, de cursus et de formation, précisant notamment les conditions d’accès et les modalités examen, ainsi qu’un cadre de programmes d’études et de qualifications, et des listes de spécialisations;
  • des stratégies d’orientation et des politiques de communication sur les possibilités d’EFP 
			(20) 
			Le
service britannique d’orientation (<a href='https://nationalcareersservice.direct.gov.uk/'>UK National
Careers Service) </a>est un bon exemple en matière d’orientation et de communication.;
  • la formation des enseignants 
			(21) 
			Voir le document intitulé <a href='http://www.cedefop.europa.eu/etv/Upload/Information_resources/Bookshop/560/111332_Competence_framework_for_VET_professions.pdf'>Competence
Framework for VET Professions</a>, manuel transnational du Conseil finlandais de l’éducation,
publié en 2009.;
  • des éléments et un dosage d’apprentissage en établissement et en milieu professionnel (apprentissage entre pairs; formation d’apprentis);
  • un cadre d’obligations, de responsabilités et de droits pour les apprenants, les entreprises et les autres parties prenantes à l’EFP au niveau national, régional et local;
  • un système de financement, qui détermine les modalités de financement de la formation (personnel et équipement), des entités concernées (établissements d’enseignement, jurys d’examen, etc.) ainsi que les moyens de subsistance des apprenants 
			(22) 
			Les <a href='http://ilera-europe2013.eu/uploads/paper/attachment/358/ilera_paper_training_funds_mvdm_am_22_june_2013.pdf'>fonds
de formation sectoriels</a> (par exemple, ceux des Pays-Bas et de la France) offrent
un exemple intéressant de financement et d’initiative privée relevant
de la bonne pratique.;
  • la définition et la mise en œuvre des admissions consécutives, du transfert vers et depuis l’EFP pour les adultes (personnes au chômage, migrantes, non qualifiées, etc.);
  • un système de suivi et d’évaluation sur les référentiels de formation et l’égalité des chances.
55. Chacun de ces éléments d’EFP exige des «réponses stratégiques» lorsqu’il fait défaut ou n’obtient pas les résultats escomptés aux différents niveaux.
56. A titre facultatif, la formation à l’entrepreneuriat, les partenariats public-public et public-privé, les mesures d’incitation à l’apprentissage continu et tout au long de la vie, les programmes de mentorat,les méthodes d’apprentissage à distance/mixtes, etc. se sont révélés utiles et innovants dans divers pays, projets et initiatives pour les systèmes d’EFP existants. Toutefois, les solutions que proposent les politiques publiques devraient plutôt donner la priorité aux mesures d’incitation et favoriser l’échange et la coopération entre les parties prenantes au niveau transrégional et transnational en vue d’un processus de développement et d’innovation viable dans l’EFP.
57. Comme nous l’avons vu, les initiatives, buts et objectifs d’un cadre commun d’EFP élaborés et entrepris par l’Union européenne et par ses membres méritent d’être étendus au cadre plus vaste du Conseil de l’Europe en vue du partage et de la consolidation des référentiels établis.
58. Plusieurs initiatives et projets lancés dans l’Union européenne et au-delà ont déjà débouché sur une coopération transfrontalière et transnationale qui a fortement contribué à promouvoir l’enseignement et la formation professionnels, mais aussi encouragé et amélioré la coopération et la compréhension aux niveaux opérationnels 
			(23) 
			Le projet «<a href='http://www.cedefop.europa.eu/EN/Files/5129_fr.pdf'>JobRotation»</a> de l’Union européenne consistait en un réseau transnational
de plus d’une cinquantaine d’organisations partenaires qui, de 1995
à 2006, ont élaboré, appliqué, testé et évalué la méthode de rotation
emploi-formation (dite «job rotation»). Bien que le financement
de l’Union européenne ait cessé en 2006, plusieurs Etats membres
continuent d’appliquer la méthode, et un certain nombre de partenaires
du réseau poursuivent la coopération transnationale.. Les initiatives et projets en réseau devraient être continuellement financés et étendus, même si le fait de permettre à un nombre restreint d’initiatives non gouvernementales d’approfondir leur coopération et leurs liens contribueraient à l’obtention de résultats et à l’établissement de liens durables.

5. Mesures pour élever le statut et l’attractivité de l’EFP

59. Le concept d’attractivité est complexe et difficile à définir. Selon certains spécialistes, l’attractivité de l’EFP suppose que cette filière suscite l’intérêt des individus: ils en ont connaissance, considèrent qu’elle fait partie du paysage éducatif et ont une bonne opinion d’elle et des diplômes auxquels elle mène. Plus généralement, les personnes ont tendance à considérer la voie professionnelle comme un moyen d’atteindre leurs objectifs personnels, et les employeurs la considèrent comme un vivier de recrues potentielles 
			(24) 
			Tchibozo (2009), «Improving
attractiveness of initial vocational education and training: some
observations on the EU experience», document présenté lors de la
conférence «Lifelong learning revisited: what next?», Université
de Stirling, 23-26 juin 2009..
60. Pour d’autres, l’attractivité dépend de l’opinion des parties prenantes. Le concept d’attractivité suppose d’avoir pris en compte les avis et priorités des diverses parties prenantes et de les avoir intégrés dans la politique de l’EFP et dans la conception des programmes. L’amélioration de la qualité, de la transparence et de l’accessibilité de l’offre en matière d’éducation et de formation permettra de renforcer l’attractivité, à condition que ces mesures répondent aux besoins des acteurs concernés. Cette définition associe le caractère subjectif de l’attractivité et les facteurs ou mesures permettant de la rehausser 
			(25) 
			Leney et al. (2004), «Achieving the Lisbon
goal: the contribution of VET: final report to the European Commission». London:
QCA – Qualifications and Curriculum Authority..
61. Dans sa récente étude sur l’attractivité de l’EFP 
			(26) 
			«Attractiveness of
initial vocational education and training: identifying what matters»,
Document de recherche n° 39, CEDEFOP, 2014, <a href='http://www.cedefop.europa.eu/EN/Files/5539_en.pdf'>http://www.cedefop.europa.eu/EN/Files/5539_en.pdf</a>. Le CEDEFOP a analysé la situation dans six pays pour
lesquels existent des données pertinentes et des études de cas:
l’Allemagne, la Finlande, l’Irlande, la République tchèque, le Danemark
et l’Espagne. Sur un plan général, ils ont tous une image plutôt
positive de l’EFP et sont, hormis l’Espagne, au niveau ou au-dessus
de la moyenne de 71 % de répondants estimant que l’EFP a une bonne
image dans l’étude Eurobaromètre de l’Union européenne., axée plus particulièrement sur l’enseignement et la formation professionnels initiaux (EFPI), le CEDEFOP met en lumière l’influence probable des points de vue et perceptions concernant l’EFP sur cette attractivité. L’avis des jeunes n’est pas le seul à entrer en ligne de compte: les familles, les enseignants, les acteurs du monde du travail et internet/les médias sociaux exercent tous une influence considérable sur les décisions des étudiants, d’où l’importance de leurs perceptions.
62. L’analyse démontre l’importance de situer l’EFPI dans l’éventail des autres filières éducatives disponibles, notamment l’enseignement secondaire supérieur général, lorsqu’il s’agit d’en examiner la perception. Dans un contexte non comparatif, la qualité et la pertinence au regard du marché du travail sont bien notées dans l’étude Eurobaromètre. Cependant, certains laissent entrevoir que la qualité de l’EFPI ne tient pas la comparaison avec l’enseignement secondaire supérieur général, même si par rapport à ce dernier, son adéquation au marché de l’emploi semble forte.
63. Toujours selon l’étude du CEDEFOP, les perceptions concernant les probabilités de trouver un emploi après l’EFPI sont corrélées à l’estime de soi. Tant l’étude du projet que celle d’Eurobaromètre sur l’enseignement professionnel (2011) parviennent à la conclusion, étayée par des preuves, qu’outre l’intérêt personnel, les perspectives d’emploi futur constituent un critère déterminant pour les étudiants lorsqu’ils analysent les diverses voies éducatives proposées.
64. L’étude du CEDEFOP souligne une série d’initiatives politiques susceptibles de rehausser le statut et l’attrait de l’EFP, notamment les actions suivantes.

– Améliorer la perméabilité des filières éducatives et faciliter l’accès à d’autres possibilités d’éducation et de formation

65. Les mesures facilitant la perméabilité contribuent à répondre aux besoins des individus; elles peuvent servir à attirer les plus qualifiés grâce à la mise en place de passerelles entre l’EFP et l’enseignement supérieur, ou à mieux prendre en compte les candidats défavorisés ou moins qualifiés, en établissant par exemple de plus petites unités cumulables d’apprentissage par modularisation.
66. Parmi les mesures concrètes visant à renforcer la perméabilité, citons: les filières assurant une double qualification; les systèmes d’examens ouverts à tous les élèves du secondaire; les cours préparatoires complémentaires ou les examens pour les étudiants de l’EFP (programmes passerelles); la reconnaissance de qualifications professionnelles équivalentes pour des cours universitaires (accords de transfert de crédit); l’introduction de cours spécialisés à vocation professionnelle au niveau tertiaire. Il est fondamental d’offrir aux meilleurs étudiants de l’EFP la possibilité concrète d’intégrer des établissements d’enseignement supérieur (par exemple les Fachhochschulen en Allemagne) après avoir satisfait aux conditions d’entrée.

– Accroître les possibilités et lever les barrières

67. Les actions visant à accroître les possibilités et à lever les obstacles renforcent l’attractivité de l’EFP mais aussi son rôle dans la promotion de l’inclusion sociale et la pleine participation à la société. Les autorités nationales devraient promouvoir l’apprentissage en milieu professionnel pour attirer les étudiants qui privilégient les formations plus pratiques ou la possibilité d’apprendre un métier tout en travaillant. Elles devraient également améliorer l’accès de groupes spéciaux, y compris les personnes peu qualifiées, les handicapés et les jeunes socialement ou économiquement moins favorisés, les étudiants non traditionnels plus âgés, les minorités ethniques et les migrants, afin de faciliter leur employabilité. Les programmes destinés aux groupes spéciaux pourraient être moins exigeants (fixés par exemple au niveau CITE 2).
68. Dans la même veine, la reconnaissance et la validation de l’apprentissage non-formel et informel, en évaluant les connaissances, les aptitudes et les compétences acquises, peuvent contribuer à l’accessibilité à de nouvelles qualifications ou à des qualifications de niveau plus élevé et ouvrir de nouvelles opportunités d’apprentissage formel pour des personnes qui ne seraient autrement pas admises à certains programmes particuliers.

– Améliorer la qualité de l’EFP

69. A cet égard, les autorités nationales devraient développer et mettre en œuvre au plan national des cadres et procédures d’assurance qualité à des fins d’évaluation de cette dernière, en y impliquant toutes les parties prenantes.
70. Les enseignants et formateurs de l’EFP sont confrontés à une difficulté particulière, en l’occurrence combiner des aptitudes et connaissances pédagogiques à des connaissances techniques et une expérience pratique (savoir-faire). Pour inculquer ce savoir-faire, des représentants de l’industrie sont souvent invités à dispenser la formation, mais ils manquent parfois de méthodes pédagogiques et d’évaluation. Pour cela, il convient de les former de manière adéquate afin d’améliorer la transmission des connaissances. Par ailleurs, il est conseillé aux enseignants de l’EFP n’ayant pas ou plus de contact avec le milieu industriel, de s’immerger dans des entreprises modernes et d’effectuer des visites dans des usines employant des technologies de pointe afin d’actualiser leurs connaissances.
71. Le renforcement de la transparence des qualifications et des programmes, par l’intermédiaire de mesures telles que le développement de cadres nationaux de qualifications (CNQ) et l’adoption de cadres européens tels que le Système européen de crédits d’apprentissage pour l’enseignement et la formation professionnels (ECVET) contribuera grandement à améliorer la qualité de l’EFP.

– Offrir des incitations financières

72. Les incitations financières sont de plus en plus nécessaires pour promouvoir l’engagement dans l’EFP en temps de crise. Ces incitations financières peuvent cibler un programme complet, les employeurs ou les étudiants. L’Angleterre a augmenté le budget général consacré au programme d’apprentissage – renforçant ainsi la participation – et a octroyé entre février 2012 et mars 2013 une aide aux petites entreprises qui recrutaient des apprentis. Parmi les autres exemples d’incitations financières, citons:
  • la délivrance de bourses dans des domaines de formation généralement peu demandés (une stratégie mise en œuvre en République tchèque par certaines autorités régionales et qui s’est avérée fructueuse);
  • l’allocation de subventions aux entreprises, sous réserve qu’elles embauchent uniquement des étudiants issus de l’EFP, arrivés au terme de l’enseignement secondaire supérieur (une stratégie mise en œuvre en Islande, destinée à encourager les étudiants à mener à terme leurs études secondaires supérieures).
73. Parmi les autres initiatives visant à renforcer la visibilité et l’image de marque de l’EFP, les autorités nationales pourraient:
  • sensibiliser à l’EFP grâce à des campagnes d’information sur les programmes d’EFP et les perspectives du marché de l’emploi, par l’intermédiaire d’internet, de la télévision ou d’autres médias;
  • améliorer le système d’orientation et de conseil afin que les étudiants disposent des informations adéquates, fiables et à jour avant de faire leurs choix entre l’enseignement général et l’EFP et concernant les programmes d’EFP;
  • insister sur le développement des compétences au sein de l’EFP par des moyens tels que l’organisation de concours de compétences et de cérémonies de remise de prix; les concours nationaux ou internationaux de compétences contribuent également à promouvoir l’internationalité de l’EFPI ainsi que la mobilité.

6. Conclusions

74. L’EFP pourrait aider à améliorer la croissance économique et l’inclusion sociale. Son potentiel reste cependant insuffisamment exploité 
			(27) 
			Dans
l’Union européenne, l’apprentissage tout au long de la vie (dont
fait partie l’EFP) est inférieur à 10 %, alors que l’objectif est
de 15 % de la participation globale à l’éducation..
75. Ce rapport souligne que le fait de fournir une main-d’œuvre qualifiée, de prévenir les pénuries de compétences, de lutter contre le chômage des jeunes et des adultes, d’œuvrer pour l’inclusion et l’intégration des groupes minoritaires défavorisés, de promouvoir l’égalité des chances et la mobilité sur le marché du travail, d’améliorer la confiance et l’estime de soi parmi ceux qui ont quitté prématurément l’école constitue un objectif central face aux grands enjeux stratégiques de l’EFP.
76. Pour mettre à disposition une main-d’œuvre qualifiée et pour prévenir les pénuries de compétences, des prévisions fiables des demandes futures sont nécessaires, tout comme un engagement plus fort de la part des parties prenantes, en particulier des employeurs et des syndicats, pour prendre des mesures préventives dans l’investissement du développement des ressources humaines. De la même manière, l’investissement dans une action continue d’enseignement et de formation, mais aussi la garantie de l’expérience et de l’expertise des seniors de la population active (les plus de 50 ans) doivent être considérés comme des éléments importants pour des besoins opérationnels futurs qui nécessitent, en retour, des stratégies sur le moyen et long terme, au lieu de donner la priorité aux valeurs actionnariales trimestrielles.
77. La lutte contre le chômage des jeunes et des adultes, l’inclusion et l’intégration des groupes minoritaires défavorisés, la promotion de l’égalité des chances et de la mobilité sur le marché du travail posent, en outre, de nouveaux problèmes et de nouveaux défis pour l’EFP. Il apparaît nécessaire de se concentrer davantage sur l’EFP dans la formation destinée aux adultes et d’accroître l’investissement dans ce domaine pour empêcher l’exclusion à vie du marché du travail et pour favoriser une participation égale à la vie publique. En effet, les demandeurs d’emploi adultes ayant subi des échecs dans leur formation générale ou professionnelle ou ayant dû interrompre leur formation en raison de difficultés d’apprentissage, de problèmes sociaux ou de santé, de changements structurels ou liés à la migration, doivent avoir la possibilité de revenir sur la voie du travail qualifié. La perméabilité, l’accès à la formation supérieure et/ou professionnelle et les crédits d’expérience professionnelle comptent autant pour les adultes que pour les jeunes si l’on veut éviter toute dépendance durable aux systèmes d’aide financés par l’Etat. Les populations de pays touchés par un taux élevé de chômage systémique, qui subissent de rapides changements structurels ou affichent des taux élevés d’immigration sont particulièrement exposés à cela, leur main-d’œuvre étant particulièrement sous-qualifiée et mal équipée pour répondre aux demandes de compétences actuelles et futures.
78. L’avantage compétitif de l’Europe dépend tout autant des compétences de sa main-d’œuvre que de l’utilisation de celles-ci dans la pratique, ce qui, dans les sociétés mondialisées fondées sur le savoir et les technologies de l’information et de la communication, nécessite une formation et un apprentissage approfondis tout au long de la vie pour une partie toujours plus importante de la population. La main-d’œuvre doit être adaptable et mobile, ce qui, en Europe, suppose des solutions et des stratégies supranationales.
79. Au niveau européen, les pays du Conseil de l’Europe non membres de l’Union européenne ont tout intérêt à suivre également les lignes directrices et stratégies globales, à l’instar du système de crédits d’EFP (ECVET) et du cadre européen des certifications (CEC), qui s’inscrivent dans le droit fil de la stratégie Europe 2020 
			(28) 
			<a href='http://ec.europa.eu/europe2020/index_fr.htm'>http://ec.europa.eu/europe2020/index_fr.htm</a>. de l’Union européenne. Il convient de renforcer au niveau européen et national les initiatives et les mesures d’incitation qui accompagnent la stratégie globale et encouragent les échanges transnationaux et la coopération dans l’EFP. La ratification de la Charte sociale européenne renforcera la protection des droits inscrits dans la Charte s’agissant de l’EFP.
80. Au niveau national, les politiques publiques devraient viser à adapter progressivement au cadre européen les systèmes d’EFP fondés sur la culture, les traditions et l’histoire des différents pays. L’EFP devrait reposer sur un dosage équilibré de formation en milieu scolaire et en milieu professionnel, et être soutenu par des politiques et des mesures nationales cohérentes visant à en améliorer l’attractivité et à traiter les problèmes structurels à l’origine de sa sous-utilisation, par exemple la fragmentation du marché et les obstacles à la mobilité au sein de l’éducation et sur les marchés du travail.
81. Dans la conception et la mise en œuvre des politiques d’EFP, il est essentiel d’impliquer les employeurs et les partenaires sociaux, afin de mieux évaluer, et si possible d’anticiper, les besoins du marché, et de proposer en partenariat avec ces derniers des possibilités d’apprentissage pertinentes en milieu professionnel, y compris la formation d’apprentis.