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Rapport | Doc. 14475 | 23 janvier 2018

Contestation pour des raisons formelles des pouvoirs non encore ratifiés de la délégation parlementaire de l’Andorre

Commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles

Rapporteure : Mme Petra De SUTTER, Belgique, SOC

Origine - Renvoi en commission: Décision de l’Assemblée, Renvoi 4360 du 22 janvier 2018. 2018 - Première partie de session

Résumé

À l’ouverture de la session 2018 de l’Assemblée parlementaire, les pouvoirs non encore ratifiés de la délégation parlementaire de l’Andorre ont été contestés au motif que la délégation ne comprenait aucune femme en qualité de représentante et ce, en méconnaissance de l’article 6.2.a du Règlement.

Compte tenu des assurances fournies par la délégation andorrane de se mettre en conformité dans les meilleurs délais avec la condition posée par le Règlement, la commission du Règlement propose de ratifier les pouvoirs de la délégation, mais de prévoir la suspension automatique du droit de vote de ses membres à l’Assemblée et dans ses organes, conformément à l’article 10.1.c du Règlement, à compter de la partie de session d’avril 2018 si la composition de la délégation n’a pas été mis en conformité avec l’article 6.2.a du Règlement.

A. Projet de résolution 
			(1) 
			Projet
de résolution adopté par la commission le 23 janvier 2018.

(open)
1. Le 22 janvier 2018, à l’ouverture de la session de l’Assemblée parlementaire, les pouvoirs non encore ratifiés de la délégation parlementaire de l’Andorre ont été contestés pour des raisons formelles, conformément à l’article 7.1 du Règlement de l’Assemblée, au motif que la délégation ne comprenait aucune femme en qualité de représentante et ce, en méconnaissance de l’article 6.2.a du Règlement.
2. L’Assemblée parlementaire réitère une nouvelle fois son engagement le plus ferme à promouvoir une participation équilibrée des femmes et des hommes à la prise de décision politique et publique, et à appliquer les principes d’égalité des sexes dans ses structures internes, notamment en favorisant une représentation équilibrée des hommes et des femmes au sein des délégations nationales. L’Assemblée rappelle également sa Résolution 2111 (2016) «Évaluation de l’impact des mesures destinées à améliorer la représentation politique des femmes» et son soutien au principe de la parité des sexes comme but ultime de la représentation politique.
3. L’Assemblée regrette donc qu’il faille rappeler aux parlements nationaux, par le biais de la procédure de contestation des pouvoirs, ce qui ne constitue pourtant qu’une exigence très minimale en matière de représentation des femmes en son sein, à savoir la présence d’au moins une femme en qualité de représentante dans chaque délégation.
4. L’Assemblée constate que la composition de la délégation andorrane ne remplit pas les conditions fixées à l’article 6.2.a de son Règlement et que ses pouvoirs ont été valablement contestés. Elle note que la délégation a indiqué qu’elle s’engageait à se mettre en conformité dans les meilleurs délais avec la condition posée par le Règlement.
5. En conséquence, l’Assemblée décide de ratifier les pouvoirs de la délégation parlementaire andorrane, mais de suspendre le droit de vote de ses membres à l’Assemblée et dans ses organes, conformément à l’article 10.1.c du Règlement, à compter du début de la partie de session d’avril 2018 de l’Assemblée, si la composition de la délégation n’a pas été mise en conformité avec l’article 6.2.a du Règlement à cette date – et comprenne au minimum un membre du sexe sous-représenté en qualité de représentant –, et jusqu’à ce qu’elle le soit.

B. Exposé des motifs, par Mme Petra De Sutter, rapporteure

(open)

1. Introduction et dispositions réglementaires pertinentes

1. Lors de la séance de l’Assemblée du 22 janvier 2018, Mme Maryvonne Blondin (France, SOC) et plusieurs membres de l’Assemblée ont contesté les pouvoirs non encore ratifiés de la délégation nationale de l’Andorre auprès de l’Assemblée parlementaire pour des raisons formelles, conformément à l’article 7.1.b du Règlement, au motif que ladite délégation ne comportait aucune femme en qualité de représentante, en méconnaissance de l’article 6.2.a. Elle a souligné que, si la délégation andorrane présentait bien une parité parfaite – deux hommes, deux femmes –, en revanche les deux membres féminins ne sont que suppléantes.
2. La Résolution 1781 (2010) «30% au moins de représentants de chaque sexe au sein des délégations nationales de l’Assemblée» a modifié les articles 6.2.a et 7.1.b du Règlement, et a fixé de nouvelles conditions relatives à la représentation des sexes, en renforçant les dispositions existantes visant à promouvoir une participation plus équilibrée des femmes et des hommes.
3. L’article 6.2.a, deuxième phrase, dispose que:
«Les délégations nationales doivent comprendre un pourcentage de membres du sexe sous-représenté au moins égal à celui que compte actuellement leur parlement et, au minimum, un membre du sexe sous-représenté désigné en qualité de représentant
4. L'absence de l'inclusion d'au moins un membre du sexe sous-représenté en qualité de représentant dans une délégation nationale est expressément reconnue par l'article 7.1.b du Règlement comme un motif qui justifie la contestation des pouvoirs de cette délégation:
«Les pouvoirs peuvent être contestés par au moins dix membres de l’Assemblée présents dans la salle des séances, appartenant à cinq délégations nationales au moins, se fondant sur des raisons formelles basées sur (...) les principes énoncés dans l’article 6.2 selon lesquels les délégations parlementaires nationales doivent être composées de façon à assurer une représentation équitable des partis ou groupes politiques existants dans leurs parlements et comprendre, en tout état de cause, un membre du sexe sous-représenté désigné en qualité de représentant
5. La commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles doit donc examiner si la composition de la délégation andorrane a méconnu les principes établis par l’article 6.2.a du Règlement de l’Assemblée.
6. Enfin, aux termes de l’article 7.2, «[s]i la commission conclut à la ratification des pouvoirs, elle peut transmettre au Président de l’Assemblée un simple avis dont il donnera lecture en Assemblée plénière ou en Commission permanente, sans que celles-ci en débattent. Si la commission conclut à la non-ratification des pouvoirs ou à leur ratification assortie de la privation ou de la suspension de certains des droits de participation ou de représentation, le rapport de la commission est inscrit à l’ordre du jour pour débat dans les délais prescrits».

2. Conformité de la composition de la délégation parlementaire andorrane avec l’article 6.2 du Règlement de l’Assemblée

7. Le Parlement de l’Andorre – le Consell General – a présenté les pouvoirs de sa délégation pour la session 2018 de l’Assemblée. Il ressort de ces pouvoirs que la délégation andorrane ne comporte aucune femme en qualité de représentante.

2.1. Pouvoirs des membres de la délégation andorrane transmis le 18 janvier 2018

8. La délégation parlementaire andorrane se compose, en application des articles 25 et 26 du Statut du Conseil de l'Europe (STE no 1), de deux représentants et deux suppléants. Le rapport du Président de l’Assemblée sur la vérification des pouvoirs des représentants et des suppléants pour la première partie de la session ordinaire de 2018 de l'Assemblée (Doc. 14472) mentionne que la composition de la délégation parlementaire andorrane s’établit de la manière suivante:

Représentants

  • M. Carles JORDANA (Groupe Démocrate)
  • M. Víctor NAUDI ZAMORA (Groupe Mixte)

Suppléantes

  • Ms Judith PALLARÉS (Groupe Libéral)
  • Mme Patrícia RIBERAYGUA (Groupe Démocrate)

9. Les pouvoirs de la délégation andorrane ont été transmis par courrier adressé au Président de l’Assemblée, daté du 18 janvier 2018 
			(2) 
			Lors
de la session 2017, la composition de la délégation étant la suivante: 
			(2) 
			– Représentants:
M. Carles JORDANA (Groupe Démocrate), Ms Judith PALLARÉS (Groupe
Libéral) 
			(2) 
			– Suppléants: Ms Sílvia Eloïsa BONET (Groupe
parlementaire mixte), Mme Patrícia RIBERAYGUA
(Groupe Démocrate).. Après réception de ces pouvoirs, le Service de la Séance de l’Assemblée s’est mis en relation avec le secrétariat de la délégation. Le 19 janvier, un courrier de M. Vicenç Mateu Zamora, Síndic General (Président du Parlement andorran), adressé au Secrétaire général de l’Assemblée parlementaire, indiquait que la composition actuelle de la délégation andorrane approuvée «suite à une élection extraordinaire [le 18 janvier]», résulte d’«une restructuration interne de deux groupes parlementaires» et donnait l’assurance que le Consell General prendrait «au plus tôt, les mesures nécessaires, afin de procéder à une rectification de la composition de la délégation nationale».
10. Rappelons que la mention des dispositions réglementaires de l’article 6 figure expressément dans le courrier adressé chaque année par le Secrétaire Général de l’Assemblée parlementaire aux présidents des parlements des États membres, au début du mois précédant l’ouverture de la nouvelle session, afin que ceux-ci en tiennent compte dans la désignation de leurs délégations.

2.2. Évaluation

11. La contestation des pouvoirs de la délégation andorrane se fonde sur une méconnaissance de la disposition concernant la désignation, en qualité de représentant, au sein d’une délégation d’au minimum un membre du sexe sous-représenté (article 6.2.a du Règlement). Au vu de la composition de la délégation figurant ci-dessus, ainsi que du tableau de la représentation des hommes et des femmes au sein du Parlement andorran 
			(3) 
			Le
Parlement andorran comporte neuf femmes (32,14%) et 19 hommes (67,86%)., il apparaît clairement que les femmes constituent la catégorie du sexe sous-représenté.
12. La délégation visée par la contestation des pouvoirs ne remplit pas, à l’évidence, la condition fixée à l’article 6.2.a d’avoir au sein d’une délégation nationale au moins un membre du sexe sous-représenté en qualité de représentant.
13. Il convient de rappeler la position de principe de l’Assemblée réaffirmée dans sa Résolution 1585 (2007) relative au principe d’égalité des sexes à l’Assemblée parlementaire suivant lequel les parlements nationaux doivent s’assurer que les délégations nationales à l’Assemblée comprennent un pourcentage de femmes au moins égal à celui que compte leurs parlements nationaux «en se fixant comme objectif une proportion de 30 % au minimum, tout en gardant à l’esprit que le seuil devrait être de 40 %».

2.3. Précédents

14. C’est en 2004 que, pour la première fois, l’Assemblée examinait une contestation des pouvoirs portant sur l’absence de représentation équilibrée des sexes: les délégations de l’Irlande et de Malte ne comportaient aucune femme parmi leurs membres (comprendre au moins un membre du sexe sous-représenté constituait une obligation réglementaire à l’époque des faits). L’Assemblée avait alors décidé de ratifier les pouvoirs des délégations irlandaise et maltaise en assortissant, toutefois, la ratification d’une suspension du droit de vote des membres des délégations concernées à l’Assemblée et dans ses organes jusqu’à ce que les compositions de ces délégations soient conformes au Règlement 
			(4) 
			Voir Doc. 10051, rapport de la commission du Règlement et des immunités
du 27 janvier 2004, et Résolution
1360 (2004)..
15. Dans l’exposé des motifs figurant dans le rapport, la commission du Règlement avait considéré qu’il était «excessif de déclarer que l’ensemble de la délégation nationale n’est pas en conformité avec le Règlement et de refuser l’accréditation des pouvoirs de tous les membres», et que «l’Assemblée ne peut sélectionner elle-même lequel des sièges alloués à une délégation parlementaire nationale n’est pas correctement pourvu et ne peut arbitrairement déclarer que les pouvoirs de tel ou tel membre de la délégation concernée ne sont pas ratifiés».
16. Un second précédent est intervenu en janvier 2011, lorsque l’Assemblée avait examiné une contestation, pour des raisons formelles, des pouvoirs non encore ratifiés des délégations parlementaires du Monténégro, de Saint-Marin et de la Serbie, reposant sur le même motif, à savoir qu’elles ne comprenaient aucune femme en qualité de représentante. L’Assemblée avait alors décidé de ratifier les pouvoirs des délégations parlementaires concernées mais de suspendre leurs membres de leur droit de vote à l’Assemblée et dans ses organes à compter du début de la partie de session suivante et jusqu’à ce que la composition de ces délégations soit conforme au Règlement 
			(5) 
			Résolution 1789 (2011) et rapport de la commission du Règlement, des immunités
et des affaires institutionnelles du 24 janvier 2011 (Doc. 12488)..
17. La commission du Règlement avait alors relevé, dans son rapport 
			(6) 
			Op.
cit., paragraphe 23., que, «pour des parlements de petite taille, il peut être difficile de composer des délégations parlementaires qui respectent tous les critères fixés par la Règlement – représentation équitable des partis ou groupes politiques, et représentation des sexes. (…) La commission admet également que les procédures dans certains parlements ne leur permettent pas de modifier la composition de leurs délégations parlementaires aisément, dès lors que ces procédures prévoient la désignation des délégations pour la durée d’une législature, la consultation ou la décision des groupes politiques, ou la nécessaire ratification de la composition en séance plénière».
18. En juin 2013, l’Assemblée a examiné la contestation des pouvoirs de la délégation parlementaire islandaise, qui ne comprenait aucune femme en qualité de représentante. L’Assemblée décidait de maintenir la même position que celle qui avait prévalu en 2011, en ratifiant les pouvoirs de la délégation islandaise sous la réserve d’une suspension du droit de vote de ses membres à compter du début de la partie de session suivante si la composition de la délégation n’était pas mise en conformité avec le Règlement 
			(7) 
			Résolution 1944 (2013) et rapport de la commission du Règlement, des immunités
et des affaires institutionnelles du 25 juin 2013 (Doc. 13246)..
19. Enfin, en janvier 2017, l’Assemblée appliquait la même «jurisprudence» à propos de la contestation des pouvoirs de la délégation parlementaire slovaque, pour le même motif – l’absence de femme en qualité de représentante – et décidait de ratifier les pouvoirs de la délégation, mais de suspendre le droit de vote de ses membres à l’Assemblée et dans ses organes à compter du début de la partie de session suivante, si la composition de la délégation n’avait pas été mise en conformité avec le Règlement entretemps 
			(8) 
			Résolution 2148 (2017) et rapport de la commission du Règlement, des immunités
et des affaires institutionnelles du 26 janvier 2017 (Doc. 14247)..

3. Conclusions

20. La commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles considère que les pouvoirs de la délégation parlementaire andorrane ont été valablement contestés au motif que la délégation ne comportait pas au moins une femme en qualité de représentante et ce, en méconnaissance de l’article 6.2.a du Règlement.
21. Lors de sa réunion du 23 janvier 2018, la commission du Règlement a entendu les observations de M. Jordana, président de la délégation andorrane. Celui-ci a souligné l’attachement du Parlement andorran à promouvoir la représentation équilibrée des sexes, comme l’illustre la composition paritaire de la délégation. Il a également rappelé la difficulté pour les petites délégations de satisfaire dans leur composition aux critères de représentation équitable des partis ou groupes politiques et de représentation équilibrée des sexes.
22. La commission du Règlement a considéré que, dans le cas dont elle est saisie, il convenait d’adopter à l’égard de la délégation andorrane la même position que celle qui a prévalu dans des cas identiques en 2011, 2013 et 2017.
23. En conséquence, conformément à l’article 10.1 du Règlement 
			(9) 
			«Les rapports soumis
à l’Assemblée (…) conformément aux articles 7.2 (…) doivent contenir
un projet de résolution proposant dans son dispositif l’une des
trois alternatives suivantes: 
			(9) 
			10.1.a. la ratification des pouvoirs,
ou la confirmation de la ratification des pouvoirs, 
			(9) 
			10.1.b. la non-ratification des pouvoirs,
ou l’annulation de la ratification des pouvoirs, 
			(9) 
			10.1.c. la ratification des pouvoirs,
ou la confirmation de la ratification des pouvoirs, assortie de
la privation ou de la suspension, applicable aux membres de la délégation
concernée, de l’exercice de certains des droits de participation
ou de représentation aux activités de l’Assemblée et de ses organes.», et compte tenu des assurances fournies par le Parlement andorran, la commission a décidé de proposer à l’Assemblée de ratifier les pouvoirs de la délégation parlementaire, mais de prévoir la suspension automatique du droit de vote de ses membres à l’Assemblée et dans ses organes, conformément à l’article 10.1.c du Règlement, à compter de la partie de session d’avril 2018 si la composition de la délégation n’a pas été mise en conformité avec l’article 6.2.a du Règlement à cette date, et jusqu’à ce qu’elle le soit.