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Rapport | Doc. 15309 | 07 juin 2021

Pass ou certificats covid: protection des droits fondamentaux et implications légales

Commission des questions juridiques et des droits de l'homme

Rapporteur : M. Damien COTTIER, Suisse, ADLE

Origine - Renvoi en commission: Doc. 15257, Renvoi 4574 du 19 avril 2021. 2021 - Troisième partie de session

Résumé

Le coût socio-économique des restrictions liées à la covid-19 est considérable et la pression politique qui s’exerce pour les limiter et les lever est bien réelle et compréhensible. Parallèlement, la situation sanitaire demeure extrêmement précaire: les États doivent protéger la vie et la santé de leurs populations et une reprise socio-économique durable sera uniquement possible lorsque la maladie sera maîtrisée dans la durée. La vaccination représente une mesure essentielle pour y parvenir, mais qui ne suffira pas à elle seule. De nombreux États européens ont manifesté de l’intérêt pour un système de «passeports covid», qui permettrait la levée des restrictions pour les personnes qui ont été vaccinées, qui ont déjà été malades ou dont le test est négatif.

La commission estime que l’utilisation de pass covid dépend de certitudes bien établies à l’égard des questions médicales, notamment celle de l’effet relatif de la vaccination, d’une contamination antérieure ou d’un test négatif sur le risque de transmission. Le fait qu’ils fondent l’application d’un traitement différencié peut constituer une discrimination illégale, sauf s’il se justifie de manière objective et raisonnable, ce qui impose d’examiner soigneusement et de mettre en balance les questions médicales, factuelles et de droits de l'homme en jeu. La commission note également qu'un système de pass covid exige un fondement légal clair et des garanties complètes en matière de protection des données. Il convient de veiller à éviter tout usage abusif des systèmes de pass covid par les acteurs de la criminalité et leur réaffectation indue à d’autres fins une fois la crise sanitaire passée.

La commission invite par conséquent l’Assemblée à adopter une série de recommandations aux États membres en vue d’assurer le respect des normes du Conseil de l’Europe dans ces domaines.

A. Projet de résolution 
			(1) 
			Projet
de résolution adopté à l’unanimité par la commission le 17 mai 2021.

(open)
1. Le coût socio-économique des restrictions liées à la covid-19 reste considérable et la pression politique qui s’exerce pour les limiter et les lever est bien réelle et compréhensible. Parallèlement, la situation sanitaire demeure extrêmement précaire: la covid-19 reste une maladie susceptible d’échapper facilement à tout contrôle et de provoquer d’autres contaminations et décès à grande échelle. À ce propos, l’Assemblée parlementaire rappelle sa Résolution 2338 (2020), «Les conséquences de la pandémie de covid-19 sur les droits de l’homme et l’État de droit», dans laquelle elle précisait que «les obligations positives nées de la Convention européenne des droits de l’homme (STE no 5, “la Convention”) imposent aux États de prendre des mesures pour protéger la vie et la santé de leurs populations». En outre, une reprise socio-économique durable sera uniquement possible lorsque la maladie sera maîtrisée dans la durée. La vaccination représentera une mesure de santé publique essentielle pour y parvenir, mais qui ne suffira pas à elle seule.
2. De nombreux États européens ont manifesté le désir de mettre en place un système de pass ou de certificat covid, qui constituerait un document officiel attestant de la vaccination d’une personne contre la covid-19, de sa guérison de la covid-19 et/ou de son test négatif à une contamination par le SRAS-CoV-2. Le certificat attestant du statut vaccinal a une utilisation médicale légitime et appréciable. L’utilisation de pass covid pour permettre le rétablissement de la jouissance de certains droits ou libertés, en levant partiellement les restrictions, est sujette à bien des complications sur le plan du droit et des droits de l’homme et dépend surtout de certitudes bien établies au sujet des risques médicaux encourus.
3. La vaccination et la guérison d’une contamination antérieure peuvent certes atténuer le risque de transmission, mais l’ampleur et la durée de cet effet sont encore inconnues. En outre, l’efficacité des différents vaccins et des programmes de vaccination pour réduire le risque de transmission est variable, tout comme leur efficacité contre les variants du SRAS-CoV-2. Le résultat négatif d’un test n’est qu’une indication de situation antérieure, qui peut évoluer à tout moment après le prélèvement de l’échantillon. Ces différences sont déterminantes pour établir si les cas de recours particulier à des pass covid se justifient du point de vue médical et ne sont pas discriminatoires.
4. Si les pass covid servent à justifier l’application d’un traitement privilégié, ils peuvent avoir un impact sur les droits et libertés garantis. Ce traitement privilégié peut constituer une discrimination illégale au sens de l’article 14 de la Convention s’il est dépourvu de justification objective et raisonnable. Cette justification suppose que la mesure concernée poursuive un but légitime et soit proportionnée. La proportionnalité exige un juste équilibre entre la protection des intérêts de la collectivité (le but légitime) et le respect des droits et libertés de toute personne.
5. La discrimination peut être due soit au traitement différent des personnes sur la base d’une distinction dépourvue de pertinence, soit au traitement identique de personnes qui présentent des différences pertinentes. Pour déterminer si un pass covid reflète ou non une distinction pertinente, il convient de savoir dans quelle mesure l’état de santé précis de son titulaire modifie fortement le risque qu’il transmette le virus du SRAS-CoV-2 à d’autres personnes. L’existence d’un risque de transmission nettement plus faible peut également signifier que les restrictions imposées aux droits et libertés ne se justifient plus pour l’intéressé, indépendamment de la situation d’autrui.
6. Le caractère objectif et raisonnable de la justification d’un traitement différencié dépend de la nature du droit ou de la liberté en question et de la gravité de l’ingérence. Il importe que les autorités nationales distinguent soigneusement les différents cas d’utilisation des pass covid sur la base des droits et libertés auxquels il est porté atteinte et de la durée de la dérogation aux restrictions que permet ce pass. De même, si les acteurs privés ont la possibilité (voire l’obligation légale) d’exiger la présentation d’un pass covid avant de servir des clients, il convient d’établir une distinction minutieuse entre les biens et services essentiels et non essentiels. La durée du traitement différencié fondé sur les pass Covid peut également être pertinente pour déterminer s’il est proportionnée.
7. L’évaluation du risque de transmission devrait tenir compte du contexte particulier dans lequel les titulaires d’un pass covid seraient admis, et notamment du fait qu’ils soient ou non en contact avec des personnes qui ne sont pas immunisées contre la covid-19 et que des variants du virus, surtout les plus facilement transmissibles ou les plus résistants aux vaccins, soient présents ou non localement.
8. Avant que des preuves scientifiques claires et bien établies existent, il peut s’avérer discriminatoire de lever les restrictions au profit de ceux qui ont été vaccinés, tout en les maintenant pour ceux qui ne l’ont pas été. Le seul motif de distinction entre les deux groupes pourrait être le critère retenu pour une vaccination ciblée. Mais ce seul critère – le plus souvent la vulnérabilité à la covid-19 – peut ne pas s’avérer pertinent pour lever les restrictions destinées à enrayer la transmission de la maladie.
9. Même si les preuves scientifiques suffisaient à justifier l’application d’un traitement privilégié aux titulaires de pass covid, il peut exister des raisons d’ordre public valables de ne pas y recourir. Leur utilisation risque de porter atteinte au lien fondamental qui existe entre droits de l’homme, responsabilité et solidarité, qui est essentiel dans la gestion des risques sanitaires. Les dépenses occasionnées par un système de pass covid risquent de priver des rares ressources disponibles d’autres mesures qui permettraient une réouverture plus rapide de la société pour tous. Ce choix serait particulièrement préjudiciable si le créneau favorable était relativement bref entre le moment où les preuves scientifiques suffiraient à justifier l’utilisation des pass covid et celui où le nombre total de personnes vaccinées serait suffisamment élevé pour assouplir les restrictions de manière générale.
10. Si les conséquences du refus de la vaccination, notamment le maintien des restrictions imposées à la jouissance des libertés et la stigmatisation, sont si graves qu’elles suppriment toute possibilité de choix de la décision, la vaccination peut s’apparenter à une obligation. Cette situation risque d’entraîner une violation des droits garantis et/ou d’être discriminatoire. L’Assemblée rappelle sa Résolution 2361 (2020) «Vaccins contre la covid-19: considérations éthiques, juridiques et pratiques», dans laquelle elle appelait les États membres à «s’assurer que les citoyens et citoyennes sont informés que la vaccination n’est pas obligatoire et que personne ne subit de pressions politiques, sociales ou autres pour se faire vacciner, s’il ou elle ne souhaite pas le faire personnellement». Toute pression indirecte indue sur les personnes qui ne peuvent ou ne veulent pas se faire vacciner peut être atténuée si des pass Covid sont disponibles pour des motifs autres que la vaccination.
11. Un pass covid serait établi sur la base d’informations médicales personnelles sensibles, qu’il convient de soumettre à des normes rigoureuses de protection des données. Elles doivent notamment reposer sur un fondement juridique clair, qui présente également une pertinence pour l’acceptabilité de mesures susceptibles de restreindre les droits ou de conduire à un traitement éventuellement discriminatoire.
12. L’Assemblée rappelle le document d’information «Protection des droits de l’homme et ‘pass vaccinal’» publié par la Secrétaire Générale du Conseil de l’Europe, la «Déclaration sur les considérations relatives aux droits de l’homme concernant le ‘pass vaccinal’ et les documents similaires» publiée par le Comité de bioéthique du Conseil de l’Europe (DH-BIO) et la Déclaration «Vaccination, attestations covid-19 et protection des données» publiée par le Comité consultatif de la Convention sur la protection des personnes à l’égard du traitement automatisé des données à caractère personnel (T-PD) du Conseil de l’Europe.
13. L’Assemblée appelle par conséquent les États membres du Conseil de l’Europe:
13.1. à poursuivre la mise en œuvre de l’ensemble des mesures de santé publique nécessaires pour maîtriser durablement la covid-19, conformément à leurs obligations positives nées de la Convention européenne des droits de l’homme;
13.2. à tenir pleinement compte des derniers éléments probants et des avis d’experts, en particulier de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), lors de la mise en œuvre de mesures comme les pass covid, qui entraînent un assouplissement des restrictions destinées à prévenir la propagation du virus SRAS-CoV-2;
13.3. à veiller à ce que les mesures telles que les pass covid, qui exonèrent leurs titulaires de certaines restrictions imposées aux droits et libertés garantis, soient appliquées de manière à maintenir une protection efficace contre la propagation du virus SRAS-CoV-2 et à éviter toute discrimination, en particulier en veillant à ce que:
13.3.1. la vaccination soit mise à la disposition de tous de manière égale et, si tel n’est pas le cas, la priorité donnée à certains groupes sur d’autres se justifie de manière objective et raisonnable, ce qui ne devrait pas comprendre la capacité à payer;
13.3.2. différentes catégories de pass covid soient mises à la disposition de groupes de personnes dont les caractéristiques distinctes atténuent le risque de transmission du virus SRAS-CoV-2 de manière avérée;
13.3.3. la disponibilité des pass covid basés sur des tests négatifs récents n'est pas limitée aux personnes ayant la capacité de payer, en raison du montant excessif des tests;
13.3.4. la portée de l’exonération des restrictions accordée aux titulaires des différentes catégories de pass covid soit conforme au degré d’atténuation du risque de transmission du virus du SRAS-CoV-2 et qu’il soit tenu compte de la situation épidémique actuelle dans le pays concerné;
13.3.5. il soit tenu dûment compte de la différence fondamentale de la situation médicale, d’une part, des personnes qui ont acquis une immunité par la vaccination ou la guérison de la maladie et, d’autre part, des personnes qui ont récemment été testées négatives au virus, ainsi que de la différence de risque de transmission qui en découle entre ces deux groupes;
13.3.6. il soit tenu dûment compte de l’efficacité relative de l’immunité acquise par la vaccination ou la guérison de la maladie et de l’efficacité relative des différents vaccins et programmes de vaccination dans la prévention de la transmission du SRAS-CoV-2, y compris de ses variants;
13.3.7. il soit tenu dûment compte des risques relatifs de transmission présentés par les différentes activités que les titulaires de pass covid pourraient être autorisés à exercer, surtout lorsqu’ils peuvent être en contact avec des personnes qui n’ont pas acquis d’immunité par la vaccination ou une contamination antérieure;
13.3.8. il soit tenu dûment compte de la situation des personnes qui, pour des raisons médicales, ne peuvent pas être vaccinées ou qui, pour des raisons d’opinion ou de croyance personnelle, refusent d’être vaccinées; s’agissant de ce dernier groupe, il convient de veiller à ce que tout système de pass covid ne s’apparente pas à une mesure coercitive et ne rende pas en fait la vaccination obligatoire;
13.3.9. les pass covid soient mis à disposition à la fois sous forme numérique et sur papier;
13.4. à veiller à ce que tout système de pass covid repose sur un fondement légal clair;
13.5. à s’assurer que tout système de pass covid soit pleinement conforme aux normes du Conseil de l’Europe en matière de protection des données et de respect de la vie privée, notamment celles de la Convention européenne des droits de l'homme et des Convention pour la protection des personnes à l'égard du traitement automatisé des données à caractère personnel et son Protocole d’amendement (STE no 108 et STCE no 223, «Conventions 108 et 108+») et privilégier des solutions de sauvegarde décentralisées des données;
13.6. à veiller à prendre des mesures adéquates pour prévenir la contrefaçon ou tout autre usage abusif pénalement répréhensible des pass covid, conformément aux normes établies dans la Convention du Conseil de l’Europe sur la contrefaçon des produits médicaux et les infractions similaires menaçant la santé publique (STCE no 211, «Convention MEDICRIME») et la Convention du Conseil de l’Europe sur la cybercriminalité (STCE no 185, «Convention de Budapest»);
13.7. à s’assurer que tout système de pass covid soit strictement limité dans son application et sa durée aux besoins de l’urgence de santé publique de la covid-19 et que l’infrastructure correspondante ne soit pas réaffectée à d’autres fins sans examen démocratique préalable ni contrôle juridictionnel effectif.

B. Exposé des motifs par M. Damien Cottier, rapporteur

(open)

1. Introduction

1. Le présent rapport se fonde sur une proposition de résolution que plusieurs membres de l’Assemblée parlementaire et moi-même avons déposée le 7 avril 2021 
			(2) 
			Doc. 15257.. La proposition a été renvoyée en commission par le Bureau le 16 avril. La commission m’a nommé rapporteur le 19 avril 2021.
2. Il est indiqué dans la proposition que l’introduction de «passeports ou certificats covid-19» peut être une étape importante pour permettre un retour progressif au plein exercice des droits et des libertés qui sont actuellement restreints, mais que ces documents posent en eux-mêmes des défis importants en matière de liberté de circulation, de lutte contre la discrimination, de protection des données et de lutte contre la criminalité organisée (notamment la contrefaçon). Les passeports ou certificats covid peuvent avoir divers objectifs, notamment au niveau international, pour permettre aux citoyens de circuler, et au niveau national, pour leur permettre d’exercer certaines libertés ou d’accéder à certaines prestations. Les normes du Conseil de l’Europe doivent être scrupuleusement respectées, notamment celles qui sont énoncées par la Convention européenne des droits de l’homme (STE no 5) et par la Convention pour la protection des personnes à l’égard du traitement automatisé des données à caractère personnel (STE no 108). Les parlements nationaux doivent veiller à la légalité et à la proportionnalité de chacune de ces mesures, tout en examinant leur dimension éthique.
3. Bien qu’il soit inévitable, et même nécessaire, d’aborder dans une certaine mesure les questions d’ordre médical dans le présent rapport, je considère que le mandat qui m’a été donné implique qu’il ne s’agisse pas d’un rapport sur la vaccination, l’immunité post-infection ou le dépistage en tant que tels 
			(3) 
			En effet, l’Assemblée
a déjà pris position sur de nombreux aspects relatifs à cette question
dans sa Résolution 2361 (2021) «Vaccins contre la covid-19: considérations éthiques,
juridiques et pratiques». ni d’un rapport sur les technologies de l’information ou les aspects purement administratifs des pass covid.
4. Le 19 avril 2021, l’Assemblée a tenu un débat d’actualité sous le même intitulé que le présent rapport. J’ai ouvert ce débat et j’ai écouté avec grand intérêt les interven ants. J’ai tenu compte de leurs interventions dans l’élaboration du présent rapport, comme l’a demandé le Bureau dans sa décision du 26 avril sur les suites à donner au débat d’actualité.
5. Bien que ce rapport ait été établi selon un calendrier intense et serré, j’ai pu consulter deux experts éminents: la professeure Siobhan O’Sullivan, responsable des questions de bioéthique au ministère irlandais de la Santé, professeure en éthique et droit des soins de santé au Royal College of Surgeons Ireland, vice-présidente du Groupe européen d’éthique des sciences et des nouvelles technologies de la Commission européenne et vice-présidente du Comité de bioéthique du Conseil de l’Europe (DH-BIO); et le professeur Ross Upshur de l’École de santé publique Dalla Lana de l’université de Toronto (Canada), vice-président du Groupe d’experts de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) sur l’éthique et la covid-19. Je tiens à les remercier tous les deux de leur disponibilité malgré des délais serrés ainsi que de leurs précieux conseils. J’ai aussi bénéficié des aimables conseils de la professeure Samia Hurst, experte en bioéthique, directrice de l’Institut Éthique Histoire Humanités de l’Université de Genève et vice-présidente de la Swiss National COVID-19 Science Task Force. Je me suis également appuyé sur le document d’information intitulé «Protection des droits de l’homme et ‘pass vaccinal’», publié par la Secrétaire Générale du Conseil de l’Europe le 31 mars 2021 
			(4) 
			SG/Inf(2021)11., sur la «Déclaration sur les considérations relatives aux droits de l’homme concernant le ‘pass vaccinal’ et les documents similaires» publiée par le DH-BIO 
			(5) 
			DH-BIO(2021)7final,
4 mai 2021. ainsi que sur la déclaration «Vaccination, attestations covid-19 et protection des données» publiée par le Comité consultatif de la Convention 108 du Conseil de l’Europe (T-PD) 
			(6) 
			T-PD-BUR(2021)6rev2,
3 mai 2021..
6. Les options et appellations sont multiples: «pass» sanitaire ou vert, passeport vaccinal, certificat sanitaire numérique ou encore certificat vert numérique. Aux fins du présent rapport j’ai pris l’option de parler principalement de «certificat» lorsqu’il s’agit d’un document attestant du statut vaccinal ayant un usage médical. Le terme «pass» a lui été privilégié lorsqu’il s’agit d’un document visant à permettre le rétablissement de la jouissance de certains droits ou libertés, en levant partiellement les restrictions au plan interne ou international. Ce terme, préféré au terme de «passeport» est celui utilisé dans le document d’information établi par la Secrétaire générale du Conseil de l’Europe et dans la Déclaration du DH-BIO (voir ci-dessus).
7. L’état des connaissances scientifiques, notamment en ce qui concerne les risques relatifs de transmission du SRAS-CoV-2, est un élément capital, qui est en évolution rapide et constante. Le présent rapport se fonde sur les informations disponibles au 10 mai 2021.

2. Exemples actuels et propositions de pass ou de certificats covid

8. De nombreux pays européens ont exprimé la volonté de mettre en place des systèmes de pass covid ou de lever les restrictions pour les voyageurs ou plus généralement les personnes qui détiennent des documents de ce type. En décembre 2020, Chypre a déclaré qu’elle supprimerait l’obligation de subir un dépistage de la covid-19 pour les personnes arrivant sur son territoire si elles sont vaccinées. La Grèce a levé les obligations de quarantaine pour les voyageurs qui ont été vaccinés ou qui ont fait récemment un test PCR dont le résultat est négatif. Début avril 2021, le Danemark a instauré un «coronapas», qui est obligatoire pour se rendre dans les salons de coiffure, dans les bars et les restaurants ainsi que dans d’autres commerces, au fur et à mesure de leur réouverture dans les semaines suivant cette décision. Ce document sera accessible aux personnes qui ont été vaccinées, qui ont été infectées et qui sont rétablies ou qui ont un test négatif récent à présenter. Fin avril 2021, la France a modifié son application mobile «TousAntiCovid» pour qu’elle prenne en compte le statut vaccinal et les résultats négatifs des tests, tandis que l’Estonie a mis en place un certificat numérique «VaccineGuard», qui atteste que son détenteur a été vacciné; dans les deux cas, l’objectif est d’intégrer le système de «certificat vert numérique» proposé par l’Union européenne (voir ci-dessous). Le Gouvernement suisse prévoit de délivrer, d’ici à cet été, des certificats covid sur smartphone ou sur papier à toutes les personnes qui ont été vaccinées, qui ont été infectées et qui sont rétablies ou qui ont un test négatif récent à présenter; ils seront associés à un système de stockage de données décentralisé compatible avec celui du certificat vert numérique de l’Union européenne.
9. Certaines sociétés et certains organismes de voyage privés ont pris des initiatives dans ce domaine. L’Association internationale du transport aérien (IATA) a conçu une application, «Travel Pass», qui permet aux voyageurs d’indiquer leur statut vaccinal. Ce Travel Pass est actuellement utilisé par plusieurs compagnies aériennes internationales, notamment européennes 
			(7) 
			<a href='https://www.iata.org/en/programs/passenger/travel-pass/'>www.iata.org/en/programs/passenger/travel-pass/</a>.. De nombreuses compagnies de croisière imposent désormais que les passagers soient complètement vaccinés au moins 14 jours avant le voyage; certaines exigent en outre ou à défaut la preuve d’un test PCR négatif ou font aussi passer des tests antigéniques avant l’embarquement 
			(8) 
			«Which Cruise Lines
Require a COVID-19 Vaccine?», Cruise Critic, 28 avril 2021..
10. La Commission européenne a proposé la mise en place d’un «certificat vert numérique» (ci-après CVN) qui devrait être adopté cet été. Le CVN serait délivré à toute personne qui a été vaccinée, qui a été contaminée et qui est rétablie ou qui a un test négatif récent à présenter. Selon la Commission européenne, l’utilisation de ces trois statuts différents éviterait tout risque de discrimination à l’égard des personnes non vaccinées. Le CVN permettrait en outre de lever les restrictions à la liberté de circulation au sein de l’Union européenne pour les citoyens d’États membres de l’Union européenne ou les ressortissants de pays tiers résidant légalement dans l’Union européenne qui sont en possession de ce certificat. Il ne s’agirait pas d’une condition préalable à l’exercice du droit à la liberté de circulation en vertu du droit de l’Union européenne, mais plutôt d’un fondement sur lequel s’appuieraient les exemptions aux restrictions, telles que le dépistage ou le placement en quarantaine à l’arrivée. Une quantité minimale de données médicales essentielles seraient enregistrées dans le certificat lui-même.
11. Israël, qui a l’un des taux de vaccination par habitant les plus élevés au monde, a instauré un système de «passeport vert» en février 2021. Un passeport vert est ainsi délivré à toutes les personnes qui ont été vaccinées, qui ont contracté la covid-19 et qui sont rétablies ou, pour celles qui ont moins de 16 ans, qui ont été testées négatives. Il est émis par le ministère national de la Santé et est nécessaire pour entrer dans les salles de sport, les piscines, les restaurants et les cafés, les hôtels, les enceintes sportives, les lieux de manifestations culturelles et d’autres espaces sociaux 
			(9) 
			<a href='https://corona.health.gov.il/en/directives/green-pass-info/'>https://corona.health.gov.il/en/directives/green-pass-info/</a> pour de plus amples informations (page consultée le 1er mai
2021)..
12. L’OMS travaille également à l’élaboration d’un «certificat de vaccination intelligent». Le but de ces travaux est toutefois médical et consiste essentiellement à établir «des caractéristiques fondamentales, des normes et un environnement de confiance pour la création d’un certificat de vaccination numérique afin de faciliter la mise en œuvre de solutions numériques efficaces et interopérables favorisant l’administration du vaccin contre la covid-19 et son suivi, dans la perspective qu’elles soient applicables à d’autres vaccins» 
			(10) 
			<a href='http://www.who.int/groups/smart-vaccination-certificate-working-group'>www.who.int/groups/smart-vaccination-certificate-working-group</a>..

3. Importance des pass ou certificats covid sur le plan médical

13. Les «pass ou certificats covid» ont été désignés sous de nombreuses appellations différentes. Cependant, ce que représenterait un tel document est plus important que son intitulé. Un pass ou un certificat covid constituerait un document officiel attestant qu’une personne a été vaccinée contre la covid-19; qu’une personne s’est rétablie après avoir contracté la covid-19 et/ou qu’une personne a obtenu un résultat négatif à un test de dépistage de l’infection.
14. Ces trois éléments – la vaccination, l’infection antérieure et le résultat négatif du test – ne sont pas identiques, que ce soit intrinsèquement ou dans leurs implications médicales. La vaccination et la guérison après une contamination antérieure peuvent garantir une protection durable contre la transmission de la maladie, mais la portée et la durée de cette protection sont incertaines à l’heure actuelle. Par ailleurs, l’efficacité des vaccins en matière de prévention de la transmission peut varier d’un vaccin à l’autre, et les différents vaccins peuvent offrir divers degrés de protection contre les différents variants du virus SRAS-CoV-2. Il est clair que le résultat négatif d’un test n’est qu’une indication concernant une situation antérieure, qui peut évoluer à tout moment après le prélèvement de l’échantillon. En d’autres termes, il serait particulièrement simpliste de considérer ces trois aspects comme identiques, ou même comme fondamentalement similaires.
15. Les vaccins actuellement utilisés ont été mis au point et testés principalement pour leur efficacité à prévenir l’apparition d’une forme grave de la covid-19 chez un individu. Leur efficacité à empêcher une personne d’être contaminée par le virus SRAS-CoV-2 ou de transmettre l’infection à une autre personne n’a pas été testée. Contrairement au vaccin contre la fièvre jaune, ils n’offrent pas une «stérilisation» contre l’infection. Ainsi, une personne qui a été vaccinée contre la covid-19 peut encore être contaminée, même si elle ne présente pas de symptômes, et une fois contaminée, elle peut ensuite transmettre la maladie à d’autres personnes. Il convient aussi de garder à l’esprit que les vaccins contre la covid-19 sont toujours administrés dans le cadre d’une «autorisation d’utilisation d’urgence» accordée par l’OMS, et non d’une véritable «autorisation de mise sur le marché».
16. Des données récentes suggèrent que l’effet de la vaccination sur le risque de transmission peut être significatif. Selon une étude publiée par Public Health England le 28 avril 2021, la «probabilité d’une transmission au sein du foyer est inférieure de 40 à 50 % pour les foyers dans lesquels les cas index sont vaccinés au moins 21 jours avant d’avoir été testés positifs (par rapport à des cas non vaccinés)», des effets similaires étant constatés pour les vaccins Astra-Zeneca et Pfizer; il est intéressant de noter que la plupart des cas vaccinés dans cette étude n’avaient reçu qu’une seule dose 
			(11) 
			«Impact of vaccination
on household transmission of SRAS-COV-2 in England», Harris et al.. Cette étude ne traite toutefois pas de l’ensemble des vaccins et régimes de vaccination et n’examine pas non plus si les effets sont différents en fonction des variants du SRAS-CoV-2. Une analyse publiée en ligne le 6 mai par l’Institut allemand Robert Koch cherche à synthétiser les différentes études connues sur cette question à cette date. Elle conclut: «Les études (analysées) permettent de conclure que, selon les données actuelles, la vaccination contre la Covid-19 entraîne une réduction significative des infections par le SRAS-CoV-2, quel que soit le type de vaccin utilisé. Ce chiffre se situe dans la fourchette de 80 à 90 % après une série complète de vaccinations dans les études disponibles à ce jour et est donc similaire à l'efficacité des vaccins dans la prévention de la covid-19 sévère. D'autres données montrent que même chez les personnes qui deviennent positives à un test PCR ou sont infectées de manière asymptomatique malgré la vaccination, la charge virale est significativement réduite et l'excrétion virale est raccourcie. Globalement, les données suggèrent que la vaccination réduit significativement la probabilité de transmission». L’étude souligne néanmoins que les ressources scientifiques sont encore peu nombreuses, émanent d’un petit nombre de pays (principalement USA, Royaume-Uni et Israël) et portant essentiellement sur le vaccin de BioNTech/Pfizer, que la plupart des études n’ont pas encore été soumises à des analyses de pairs (peer-review), qu’elles n’offrent pour l’heure que peu ou pas d’information sur les variants du virus, à l’exception du variant dit britannique, et qu’elles ne disent encore rien sur la durée de cette protection 
			(12) 
			«Wie gut schützt die
COVID-19-Impfung vor SARS-CoV-2-Infektionen und -Transmission?»,
Harder T, Koch J, et al, Systematischer Review und Evidenzsynthese.. En d’autres termes, au moment de la rédaction du présent rapport, les travaux scientifiques sont encore loin d’être concluants et les effets de la vaccination sur le risque de transmission ne peuvent être établis avec suffisamment de certitude pour que des décisions politiques durables soient prises sur des questions de santé publique. Cependant, la situation évolue rapidement et les dernières études laissent penser que l’on disposera bientôt d’éléments suffisamment probants.
17. Le 19 avril, l’OMS a publié des lignes directrices très claires à l’intention des États: «Ne pas exiger de preuve de vaccination comme condition d’entrée, dans la mesure où l’on dispose d’un nombre limité (bien que croissant) de données sur la capacité des vaccins de réduire la transmission et qu’il persiste des inégalités dans la distribution des vaccins à travers le monde. Les États Parties sont fortement encouragés à reconnaître qu’exiger une preuve de vaccination peut accroître les inégalités et promouvoir une liberté de circulation différenciée» 
			(13) 
			«Déclaration sur la septième réunion
du Comité d’urgence du Règlement sanitaire international (2005)
concernant la pandémie de maladie à coronavirus 2019 (COVID-19)», Organisation mondiale de la
santé, 19 avril 2021..
18. Le 21 avril 2021, le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC) a lui écrit: «Le risque de contracter une forme grave de la covid-19 pour un adulte non vacciné ayant été en contact avec une personne complètement vaccinée exposée à une infection par le SRAS-CoV-2 est entre très faible et faible chez les adultes jeunes et d’âge moyen ne présentant pas de facteurs de risque de forme grave de la covid-19, et modérée chez les adultes plus âgés ou les personnes présentant des facteurs de risque sous-jacents (les données l’attestant sont limitées pour le moment).» L’ECDC a en outre indiqué que les exigences en matière de tests et de quarantaine imposées aux voyageurs, ainsi que la pratique de tests réguliers sur le lieu de travail, pouvaient être supprimées ou modifiées pour les personnes totalement vaccinées dès lors que la circulation de variants capables d’échappement immunitaire était inexistante ou très faible. Il ajoute que «dans le contexte épidémiologique actuel dans l’Union européenne/Espace économique européen, dans l’espace public et à l’occasion de grands rassemblements, notamment pendant les voyages, les INP (interventions non pharmacologiques, telles que le port du masque et la distanciation physique) devraient être maintenues quel que soit le statut vaccinal des individus». Le rapport de l’ECDC s’appuie sur une étude écossaise selon laquelle «la vaccination d’un membre du foyer réduit le risque d’infection chez les membres du foyer d’au moins 30 %» et sur des données montrant que «la vaccination réduit de façon significative la charge virale, la durée de l’excrétion du virus et les contaminations symptomatiques/asymptomatiques chez les personnes vaccinées, ce qui pourrait se traduire par une réduction de la transmission, bien que ces effets puissent varier en fonction du produit vaccinal, du groupe cible et des variants du SRAS-CoV-2» 
			(14) 
			«Interim guidance on
the benefits of full vaccination against COVID-19 for transmission
and implications for non-pharmaceutical interventions», Centre européen
de prévention et de contrôle des maladies, 21 avril 2021..
19. L’état des connaissances scientifiques concernant l’immunité à la covid-19 acquise à la suite d’une infection et la possibilité que cette immunité acquise empêche l’individu concerné d’agir comme un vecteur de transmission est également incertain. Pour ce qui est des résultats négatifs des tests, certains tests sont plus fiables que d’autres. Les tests PCR sont considérés comme la technique de référence, en raison de leur très bonne précision. Ils ont même été critiqués pour leur trop grande sensibilité, notamment au cours de la dernière phase de l’infection, lorsque la personne est moins contagieuse 
			(15) 
			Voir,
par exemple, Mina et al, «Rethinking
Covid-19 Test Sensitivity – A Strategy for Containment», N Engl
J Med 2020; 383:e120.. Les tests antigéniques rapides, en revanche, produiraient entre 30 et 40 % de faux négatifs, selon que le patient est symptomatique ou non 
			(16) 
			«Quelle
est la précision des tests rapides dans le diagnostic de la COVID-19?»,
Dinnes J. et al, Base de données Cochrane des revues systématiques 2021,
numéro 3. article no CD013705..
20. Il semble que la Commission européenne, dans sa proposition relative à un CVN, n’a pas tenu compte de l’importance potentielle des différences entre les personnes qui ont été vaccinées, celles qui se sont remises d’une contamination ou celles qui ont été testées négatives, ni n’a évalué les incidences de ces trois statuts sur le risque de transmission. Le CVN n’aborde donc pas un grand nombre des questions juridiques fondamentales et relatives aux droits humains qui sont en jeu. En effet, il est possible que ce document soit conçu principalement comme un outil d’harmonisation administrative et d’interopérabilité technique. Néanmoins, on peut supposer qu’un document produit sous l’autorité et sous l’égide de l’Union européenne serait perçu comme crédible et fiable par une majeure partie de la population, qui pourrait lui accorder plus d’importance que prévu. Cela pourrait entraîner une augmentation involontaire des comportements à risque chez les personnes qui détiennent un pass covid, les prestataires de services liés au tourisme, par exemple, et les autorités publiques dans les pays de destination de voyages, ce qui pourrait avoir des conséquences dévastatrices pour la campagne visant à mettre fin à la pandémie de covid-19 et à éviter la propagation de nouveaux variants. Alors que les personnes vaccinées ou guéries sont elles-mêmes largement protégées, ce n’est en outre pas le cas des personnes testées négatives. Si celles-ci participent à un événement où se trouvent malgré tout une ou des personnes contagieuses, ce seront ces personnes qui seront les plus à risque d’être infectées. Toute communication sur le pass covid doit être claire sur ce point, car ces personnes doivent savoir qu’elles s’exposent à un risque résiduel malgré le pass. Celui-ci n’a en effet pas pour vocation un risque zéro pour les individus, il a pour vocation la diminution du risque collectif de nouvelles flambées épidémiques. La Commission européenne autant que les autorités nationales devraient prendre des mesures appropriées pour prendre en compte ces éléments.
21. Les amendements récemment apportés par le Parlement européen à la proposition de la Commission européenne concernant un règlement relatif à un «certificat vert numérique» semblent toutefois tirer des conclusions sur les preuves scientifiques disponibles. Il est ainsi indiqué dans une proposition d’amendement que, «selon l’état actuel des connaissances médicales», les personnes qui ont été vaccinées ou qui présentent un test négatif récent ou un test positif à des anticorps spécifiques «présentent un risque considérablement réduit» de contamination d’autres personnes par le SRAS-CoV-2. Pourtant, l’amendement suivant dispose qu’«il est encore difficile de savoir si les vaccins empêchent la transmission de la Covid-19. De même, il n’existe pas suffisamment de preuves sur la durée de la protection effective contre la Covid-19 à la suite de la guérison après une infection antérieure». Ces deux énoncés sont difficilement conciliables, ce qui souligne la nécessité d’être prudent avant de tirer des conclusions juridiques ou politiques d’une situation 
			(17) 
			«Amendements du Parlement
européen, adoptés le 29 avril 2021, à la proposition de règlement
du Parlement européen et du Conseil relatif à un cadre pour la délivrance,
la vérification et l’acceptation de certificats interopérables de vaccination,
de test et de rétablissement afin de faciliter la libre circulation
pendant la pandémie de COVID-19 (certificat vert numérique) (COM(2021)0130
– C9 0104/2021 – 2021/0068(COD))», P9_TA(2021)0145..

4. Utilisations envisageables du document

22. Un «pass/certificat covid» peut essentiellement viser trois finalités. Tout d’abord, il pourrait servir de document établissant officiellement le statut vaccinal d’un individu, en incluant des informations sur la date de la vaccination ainsi que sur le type et le lot du vaccin qui a été administré. Ces informations pourraient être utilisées à des fins médicales, par exemple pour contribuer à l’étude de l’efficacité des différents vaccins et régimes de vaccination ou de leurs éventuels effets secondaires. Cette utilisation correspondrait davantage à la description d’un «certificat de vaccination». La deuxième finalité de ce document pourrait être de certifier qu’une personne est protégée contre la maladie et qu’elle peut donc continuer de se livrer à certaines activités avec un risque sensiblement réduit de tomber malade. Enfin, la troisième option serait de certifier qu’un individu présente un risque sensiblement réduit de transmettre le SRAS-CoV-2 à autrui. Ces deux derniers objectifs pourraient conduire certaines personnes à être exemptées des restrictions aux droits et aux libertés destinées à empêcher la propagation de la maladie, et donc à être autorisées à reprendre certaines activités (pénétrer dans certains lieux, se réunir en groupe avec d’autres personnes, exercer certaines fonctions, voyager, etc.).
23. Si la première utilisation, dans un but médical, d’un «certificat de vaccination» est clairement légitime et présente en effet une utilité à des fins de recherche, les autres emplois des «pass covid» soulèvent des questions complexes et délicates sur les plans juridique, éthique et des droits humains. Je les étudierai plus en détail ci-dessous.

5. Principales questions éthiques et relatives aux droits humains

5.1. Traitement différencié et discrimination

24. S’ils sont utilisés à des fins non médicales, les pass covid – qu’ils soient établis sur la base du statut vaccinal, du rétablissement après une contamination ou d’un test négatif récent – engendreront nécessairement des différences de traitement entre ceux qui en sont titulaires et ceux qui ne le sont pas. Ce serait même précisément leur objectif. Ces différences auraient des répercussions sur des droits et des libertés protégés, ce qui signifie qu’elles doivent avoir un fondement juridique clair.
25. En vertu de la Convention européenne des droits de l’homme, une différence de traitement peut constituer une discrimination si elle est dépourvue de justification objective et raisonnable. Cette justification suppose que la mesure à l’origine du traitement différencié (i) ait un but légitime et (ii) soit proportionnée. La proportionnalité exige de ménager un juste équilibre entre la protection des intérêts de la collectivité (le but légitime) et le respect des droits et des libertés de toute personne.
26. La discrimination peut être due, soit au traitement différent des personnes sur la base d’une distinction dépourvue de pertinence, soit au traitement identique de personnes qui présentent des différences pertinentes.
27. Dans le cas des pass covid octroyés aux personnes qui ont été vaccinées, une différence de traitement est déjà à signaler. Dans la plupart des pays européens, du moins jusqu’à maintenant (et il en sera probablement de même dans un avenir proche), les vaccins n’ont pas été mis à la disposition de tout un chacun sans distinction; au contraire, la priorité a été accordée aux groupes les plus vulnérables sur le plan médical. Dans la pratique, il peut y avoir des groupes qui auraient pu ou dû être prioritaires, mais qui, pour une raison ou une autre, n’ont pas été vaccinés. Cette situation peut résulter d’une définition inappropriée des groupes prioritaires, du trop grand éloignement des centres de vaccination ou de leur inaccessibilité pour certaines personnes vulnérables sur le plan médical. La non-vaccination de ces groupes peut être discriminatoire. Il est donc essentiel que la définition des groupes prioritaires soit fondée sur des critères objectifs, en tenant pleinement compte de l’avis des experts scientifiques et des recommandations de l’OMS.
28. Aux fins de la présente analyse, toutefois, je partirai du principe (sans préjudice de la situation réelle dans tout État membre) que la vaccination ciblée a visé un but légitime et a été proportionnée, et qu’elle ne constitue donc pas une discrimination. Cette hypothèse de travail est valide même si un pass covid établi selon le statut vaccinal entraînerait un double avantage: non seulement certaines personnes bénéficieraient d’une plus grande protection de leur santé par rapport à d’autres, mais elles pourraient aussi reprendre certaines activités, ce qui ne serait pas le cas des autres. Je reviendrai sur ce problème du «double avantage» ci-après.
29. Cela ne résout pas complètement la situation des personnes qui n’ont pas pu être vaccinées pour des raisons médicales ni de celles qui refusent de se faire vacciner, ou qui y sont réticentes, notamment pour des motifs liés à leur liberté de pensée, de conscience et de conviction. J’examinerai plus loin la situation de ces personnes.
30. En supposant que la vaccination ciblée n’est pas discriminatoire, la question est de déterminer si le statut vaccinal (ou le fait d’être rétabli après une contamination précédente, ou encore un test négatif récent) est une différence pertinente qui nécessite un traitement différencié s’agissant des restrictions visant à empêcher la propagation de la covid-19. Le statut vaccinal (ou la guérison après une contamination précédente, ou encore un test négatif récent) n’est pertinent que s’il remplit le même objectif que les restrictions, à savoir empêcher la propagation de la maladie. Or, cela ne peut être déterminé que sur la base d’éléments scientifiques clairs et bien établis. Comme indiqué précédemment, on ne dispose pas encore de ces preuves scientifiques.
31. Par ailleurs, il est probable que l’effet de la vaccination sur le risque de transmission dépende du type de vaccin administré et du régime de vaccination, notamment selon que la personne a reçu une seule ou deux injections sur les deux qui sont recommandées. De fait, si les différences d’effet entre les différents vaccins ou régimes de vaccination s’avéraient significatives, il pourrait être nécessaire d’établir une distinction non seulement entre les personnes vaccinées et celles qui ne le sont pas, mais aussi entre les différents vaccins et régimes de vaccination. Il pourrait même être nécessaire de faire une distinction entre les pass covid en subordonnant leur validité à la prévalence des variants du SRAS-CoV-2 dans la région où ils seraient utilisés et de l’efficacité du vaccin spécifique (ou de l’immunité acquise à la suite d’une contamination) sur ces variants.
32. En effet, tant que l’on ne dispose pas de ces éléments, il pourrait bien s’avérer discriminatoire de lever les restrictions au profit de ceux qui ont été vaccinés, tout en les maintenant pour ceux qui ne l’ont pas été. Le seul motif de distinction entre les deux groupes serait alors le critère retenu pour cibler la vaccination. Mais ce seul critère – la vulnérabilité à une forme grave de la covid-19 – ne serait pas pertinent pour lever les restrictions destinées à enrayer la propagation de la maladie. Ainsi, le deuxième volet du «double avantage» n’aurait plus sa propre justification distincte et pourrait donc devenir discriminatoire.
33. Lorsque l’on cherche à déterminer si un traitement différencié est proportionné, il convient aussi d’examiner si le même but pourrait être atteint par d’autres moyens impliquant un traitement moins différencié. Cet aspect est également lié au degré d’efficacité de la mesure qui sous-tend le traitement différencié, dans le cadre de la recherche d’un juste équilibre entre la réalisation de l’objectif de la mesure et l’atteinte aux droits individuels qu’elle engendre. Les autorités nationales devraient par exemple se demander si la vaccination est suffisamment efficace dans la limitation de la transmission pour justifier une différence de traitement significative entre les personnes vaccinées et non vaccinées. À l’inverse, si un test négatif récent est nettement moins efficace pour limiter la transmission, elles devraient se demander s’il ne serait pas insuffisant pour justifier la même différence de traitement. Il peut donc être discriminatoire de traiter les personnes ayant un pass covid établi sur la base d’un test de manière sensiblement différente de celles qui n’ont pas de pass covid.
34. Comme indiqué précédemment, certaines personnes n’ont pas été vaccinées parce qu’elles ne peuvent ou ne veulent pas l’être, et non parce qu’elles ne font pas partie d’un groupe prioritaire. Tout risque de discrimination pourrait être atténué par la mise en place de garanties, notamment en proposant à ces personnes d’autres moyens pour bénéficier elles aussi du rétablissement de certains droits. C’est la principale raison pour laquelle le débat sur les «pass vaccinaux» s’est élargi pour inclure les pass covid établis sur la base de la guérison après contamination et/ou sur les résultats négatifs des tests. Même si la mesure dans laquelle il est prudent de lever les restrictions peut être différente entre ces trois groupes, il est important que les autorités nationales réduisent autant que possible les différences de traitement entre ceux qui ont eu accès à la vaccination et ceux qui n’y ont pas eu accès, afin de limiter le risque de discrimination.
35. Pour que ces trois catégories soient traitées de la même manière, et différemment des autres, elles doivent être suffisamment similaires les unes aux autres sur certains aspects pertinents, et suffisamment différentes des autres. Si les différences relatives en matière de risque de transmission ne sont pas suffisantes pour justifier que ces catégories bénéficient du même traitement sensiblement différencié, il peut en résulter une discrimination injustifiée entre les personnes détenant un pass covid établi sur la base des résultats des tests et celles qui n’en ont pas.
36. On pourrait soutenir que les tests de dépistage de la covid-19 sont si largement disponibles et, dans de nombreux pays, si bon marché que, dans la pratique, une certaine forme de pass covid est déjà accessible à tous, que l’on soit vacciné ou guéri après avoir contracté la maladie, ou que cela ne soit pas le cas. Pour déterminer dans quelle mesure cette affirmation est exacte, il convient de déterminer si les personnes doivent payer pour obtenir un test – et si oui, combien – et s’il est acceptable d’exiger d’elles qu’elles subissent une procédure quelque peu invasive physiquement pour qu’elles puissent jouir pleinement de leurs droits et libertés. Même si le fait d’accepter les résultats de tests négatifs signifie que (presque) tout le monde peut obtenir un pass covid, cela ne signifie pas que chaque type de pass doit apporter les mêmes avantages – comme indiqué précédemment, la vaccination ou la guérison après contamination peuvent offrir une protection durable contre la transmission, qui ne peut être assurée par un test dont le résultat est négatif.
37. Le caractère objectif et raisonnable – et, en particulier, proportionné – de la justification d’un traitement différencié dépend de la nature du droit ou de la liberté en question et de la gravité de l’ingérence. Sur cette base, il conviendrait peut-être de faire une distinction entre les voyages pour raisons familiales et les voyages de loisirs. De même, si des acteurs privés, tels que des salons de coiffure, des magasins, des musées ou des enceintes sportives, devaient être en mesure d’exiger une preuve du statut vaccinal (ou de la guérison après une contamination antérieure, ou encore d’un test négatif récent) avant de fournir des biens ou des services, une distinction devrait être établie entre les biens et services essentiels et non essentiels. (Même si en pratique, cet exercice peut être assez subjectif et controversé, et peut dépendre de circonstances spécifiques – pour une personne qui vit loin de son lieu de travail, par exemple, la cantine de son entreprise peut être la seule solution dont elle dispose pour déjeuner). L’accès à certains services fournis par l’État ou en son nom – tels que les soins de santé, les services sociaux ou les transports publics – ne devrait pas être limité aux détenteurs d’un pass covid; il en va de même pour l’exercice du droit de vote, par exemple. L’obligation, imposée aux employés, d’être vaccinés pour exercer certains emplois a suscité de nombreuses controverses; cette mesure peut être justifiable s’il est possible de proposer d’autres tâches aux personnes qui ne peuvent ou ne veulent pas être vaccinées. L’essentiel est que toute application des pass covid doit tenir compte de l’importance relative des différents cas d’utilisation, ce qui est utile pour évaluer le caractère proportionné de ces mesures.
38. De la même manière, la validité des pass covid délivrés selon des critères différents devrait également tenir compte du contexte dans lequel ils sont utilisés. Un pass covid établi sur la base des résultats des tests pourrait être considéré comme suffisant pour que son titulaire puisse être admis dans un lieu où seuls d’autres titulaires de pass covid sont présents et pour une période relativement courte, par exemple pendant un concert – en d’autres termes, des endroits où le risque de contagion ou de transmission peut être très faible. En revanche, il peut être considéré comme insuffisant dans un contexte où le titulaire côtoierait des personnes qui n’ont pas été vaccinées ou contaminées antérieurement, et qui n’ont pas non plus de tests négatifs récents à fournir, par exemple lors de vacances à l’étranger – les risques de contagion et de transmission étant alors beaucoup plus élevés. Cette situation serait particulièrement vraie en cas de prévalence de nouveaux variants de la covid-19 dans la région concernée.
39. La durée de validité du «passeport vert» israélien varie en fonction du statut sanitaire sur la base duquel il est établi. Un passeport vert est valable pendant six mois pour les personnes complètement vaccinées ou celles qui se sont rétablies après une contamination et qui ont reçu une seule dose de vaccin (pour un vaccin administré en deux doses), jusqu’au 30 juin 2021 pour les personnes guéries dont l’infection a été confirmée par sérologie et pendant 72 heures pour les personnes qui ont un test PCR négatif 
			(18) 
			<a href='https://corona.health.gov.il/en/directives/green-pass-info/'>https://corona.health.gov.il/en/directives/green-pass-info/</a> pour de plus amples informations (page consultée le 1er mai
2021)..
40. Si les pass covid sont introduits, il conviendra de veiller à éviter toute discrimination indirecte. Un pass covid qui ne serait disponible que sur smartphone, par exemple, pourrait entraîner une discrimination indirecte à l’encontre des personnes âgées et des membres de groupes socio-économiquement défavorisés, qui sont peut-être moins à même d’utiliser un smartphone. Les autorités nationales devraient donc veiller à ce que les pass covid soient également disponibles au format papier et dans ce cas que des garanties techniques adaptées soient prévues contre la contrefaçon et le détournement.

5.2. L’absence de levée des restrictions en tant qu’atteinte à des droits protégés

41. L’Institut européen du droit (en anglais European Law Institute (ELI)) a analysé cette situation juridique sous l’angle des limitations imposées aux droits individuels plutôt que sous l’angle de la discrimination, ce qui est, pour certains, l’aspect le plus important: la levée des restrictions et la réouverture de la société et de l’économie dès que possible. L’ELI fait d’abord valoir que des restrictions générales ne devraient pas être imposées aux personnes «au-delà de ce qui est nécessaire et proportionné», et qu’il pourrait être nécessaire de les lever si «le risque épidémiologique posé par la personne est faible». Il existe un «risque épidémiologique faible» lorsqu’il y a, «au vu du cas particulier et des preuves scientifiques, des raisons suffisantes de croire que la personne ne propagera aucun variant du virus actuellement en circulation». Si l’analyse juridique peut être légèrement différente, la conclusion essentielle est la même: la levée des restrictions, qu’elle soit envisagée pour une personne en particulier ou comme traitement différencié entre plusieurs groupes, dépend des éléments scientifiques relatifs au risque de transmission.
42. L’ELI soutient en outre que les limitations des droits devraient être levées s’il n’existe pas de «raisons impérieuses d’intérêt public d’appliquer les restrictions à tous les individus de manière égale, indépendamment du risque réel». Ces raisons impérieuses «peuvent notamment concerner des difficultés pratiques pour vérifier tout certificat pertinent dans les circonstances, un éventuel effet démoralisant ou perturbateur sur d’autres personnes ou un besoin de sécurité particulièrement important» 
			(19) 
			«Les
Principes ELI pour la crise du COVID-19», Supplément 2021, Institut
européen du droit.. Je développerai ce point dans la partie suivante.

5.3. Considérations d’ordre public pouvant faire obstacle à l’instauration des pass covid

43. Il existe également un certain nombre de raisons d’ordre public potentiellement valables qui peuvent s’opposer à la mise en place des pass covid, même si les données scientifiques suffisaient à justifier leur caractère non discriminatoire. En d’autres termes, il y a d’autres facteurs qui pourraient faire pencher la balance dans l’autre sens.
44. Jusqu’à présent, la pandémie a frappé de façon largement indifférenciée et les restrictions ont été générales, ce qui donne l’impression que «tout le monde est dans le même bateau» – malgré le fait qu’en raison des inégalités sociales préexistantes, tout le monde n’a pas connu la même souffrance. Même la vaccination ciblée n’a pas fondamentalement remis en cause ce pacte social, puisque l’on considère en général qu’il est justifié que les personnes les plus à risque soient vaccinées en premier – d’autant plus qu’elles sont aussi celles qui ont été obligées de prendre les précautions les plus importantes et les plus contraignantes.
45. Le Comité de bioéthique du Conseil de l’Europe (DH-BIO) explique l’importance de la solidarité pour les politiques de santé publique visant à lutter contre la covid-19 de la façon suivante: «La vaccination peut être une illustration du lien indissociable entre droits de l’Homme – dans ce cas le droit à la protection de la santé – responsabilité – à savoir celle de protéger ceux qui ne peuvent bénéficier d’une vaccination – et solidarité – en tant qu’intervention réalisée pour un bénéfice de santé publique. L’utilisation de «pass» à des fins non-médicales serait susceptible de porter atteinte à ce lien fondamental entre droits de l’Homme, responsabilité et solidarité, si essentiel dans la gestion des risques sanitaires auxquels toutes nos sociétés sont confrontées. La santé publique et l’approche collective de la compréhension et de la gestion des risques sanitaires pourraient être supplantée par une approche individualisée du risque susceptible d’accroître les inégalités déjà exacerbées par la pandémie» 
			(20) 
			«Déclaration sur les
considérations relatives aux droits de l’homme concernant le ‘pass
vaccinal’ et les documents similaires», DH-BIO, 4 mai 2021..
46. Une fois que les restrictions sont levées sur la base d’un certain statut individuel qui n’est pas également accessible à tous, alors la solidarité commence à céder la place à l’individualisme. La capacité d’acceptation des restrictions peut diminuer si d’autres personnes ne sont plus liées par celles-ci. Les gens peuvent percevoir une conception binaire qui s’impose comme une certitude: les personnes vaccinées sont saines et les personnes non vaccinées présentent un risque. Cette situation pourrait créer une fausse impression de sécurité chez les personnes vaccinées et les personnes non vaccinées qui sont en contact avec elles, ce qui pourrait entraîner des comportements à risque inopportuns. Tant que l’immunité collective n’est pas atteinte et que des interventions non pharmacologiques sont encore nécessaires pour garder le contrôle de la pandémie, cela pourrait sérieusement remettre en cause les bénéfices du programme de vaccination pour la santé publique.
47. La levée des restrictions pour les détenteurs de pass covid, en particulier si elle était fondée sur le statut vaccinal, créerait une différence socialement significative qui pourrait contribuer à la stigmatisation des personnes non vaccinées. L’OMS définit la stigmatisation sociale comme «l’association négative entre une personne ou un groupe de personnes qui partagent certaines caractéristiques et une maladie spécifique. Dans le cadre d’une épidémie, cela peut signifier que des personnes sont cataloguées, victimes de stéréotypes et de discrimination et traitées séparément et/ou qu’elles perdent leur statut social en raison du lien supposé qu’elles auraient avec une maladie». L’OMS relève qu’il est possible que la stigmatisation liée à la covid-19 provienne du fait qu’il s’agit d’une maladie nouvelle présentant beaucoup d’aspects inconnus, puisque les gens ont peur de l’inconnu et qu’ils peuvent facilement associer cette peur à «autrui». Elle indique que «la stigmatisation peut ébranler la cohésion sociale et provoquer l’isolement social de certains groupes, ce qui pourrait donner lieu à une situation dans laquelle les risques que le virus se propage sont plus importants, et non moindres. Ce phénomène peut faire apparaître des problèmes de santé plus graves et engendrer des difficultés pour contrôler la propagation de la maladie» 
			(21) 
			«La stigmatisation
sociale associée à la covid-19», OMS, FICR et UNICEF, 24 février
2020..
48. Il convient aussi de prendre en compte le coût d’un système de pass covid. Les autorités publiques disposent de ressources limitées pour financer les dépenses de santé publique – surtout compte tenu des répercussions de la pandémie sur l’économie, sur les recettes fiscales et sur les dépenses publiques. Les dépenses occasionnées par un système de pass covid risquent de détourner des ressources spécialisées qui auraient dû être consacrées à d’autres mesures de prévention contre la covid-19. Comme l’indique l’Institut Ada Lovelace, les pass covid peuvent «supplanter des politiques plus importantes visant à rouvrir la société plus rapidement pour tout le monde, telles que le déploiement des campagnes de vaccination et de dépistage, les programmes de traçage et d’isolement et d’autres mesures de santé publique» 
			(22) 
			«What
place should COVID-19 vaccine passports have in society?», Institut
Ada Lovelace, 17 février 2021.. Si un système de pass covid devait s’avérer exagérément coûteux, avec des répercussions négatives sur d’autres mesures de santé publique, cet aspect devrait également être pris en compte pour déterminer s’il y a une justification suffisante pour traiter différemment ceux qui ont un pass covid et ceux qui n’en ont pas.
49. La conjoncture favorable dans laquelle les pass covid présentent une utilité pourrait être de relativement courte durée: entre le moment où l’efficacité de la vaccination (ou de l’immunité après une contamination) est établie avec suffisamment de certitude pour justifier des restrictions différenciées et le moment où un nombre suffisant de personnes ont été vaccinées pour que les restrictions puissent être considérablement assouplies de façon générale. Étant donné que la majeure partie du coût engendré par le système de pass covid est un coût fixe initial (infrastructure, formation, etc.), il peut s’avérer disproportionné compte tenu de la durée de l’utilisation du document.
50. Comme le relève l’ELI, les considérations précédentes peuvent constituer des «raisons impérieuses» de maintenir des restrictions générales, même si certaines personnes ne représentent plus le risque de transmission que les restrictions visent à limiter. Les autorités devraient en tenir compte dans leur décision d’instaurer ou non un système de pass covid.

5.4. Traitement différencié et vaccination obligatoire

51. Si certaines justifications de refuser d’être vacciné peuvent être plus raisonnables que d’autres, il n’en reste pas moins que la vaccination contre la covid-19 n’est pas obligatoire. L’Assemblée a déjà exprimé son opposition à la vaccination obligatoire contre la covid-19 dans sa Résolution 2361 (2021) «Vaccins contre la covid-19: considérations éthiques, juridiques et pratiques». Sur le plan des droits humains, l’argument contre la vaccination obligatoire est qu’elle porte atteinte au droit au respect de la vie privée (garanti par l’article 8 de la Convention) et à la liberté de pensée, de conscience et de religion (garanti par l’article 9). Aucun de ces droits n’est toutefois absolu, et des limitations peuvent leur être appliquées dans l’intérêt de la protection de la santé publique. En effet, dans l’affaire Vavřička c. République tchèque, la Cour européenne des droits de l’homme a estimé que l’obligation que les enfants soient vaccinés contre une série de maladies pour pouvoir fréquenter l’école maternelle ne portait pas atteinte à la Convention, car elle ne constituait pas une ingérence disproportionnée dans l’exercice des droits en question – il n’était simplement pas permis aux enfants de fréquenter l’école maternelle, et les sanctions imposées aux parents n’étaient pas excessives 
			(23) 
			Requête no 47621/13,
arrêt de Grande Chambre du 8 avril 2021..
52. L’analyse de la Cour dans l’affaire Vavřička évoque également la possibilité d’une «méthode indirecte» d’obligation. Les conséquences du refus de la vaccination, notamment le maintien des restrictions imposées à la jouissance des libertés, et la stigmatisation peuvent être si graves qu’elles suppriment l’élément de liberté de choix dans cette décision. La vaccination peut alors devenir quasiment une obligation, ou être perçue comme telle (ce qui revient au même lorsqu’il s’agit de contrainte). Cette situation peut constituer une ingérence dans l’exercice d’un droit protégé. Si cette ingérence est disproportionnée, elle peut être considérée comme une violation du droit en question ou comme une discrimination dans l’exercice de ce droit, ou encore les deux à la fois. En outre, comme l’indique l’Institut Ada Lovelace, les pass covid établis sur la base de la vaccination «pourraient réduire la confiance et accroître l’hésitation à se faire vacciner si le système est perçu comme instaurant une vaccination obligatoire par des moyens détournés. Ce problème pourrait être particulièrement sensible au sein des groupes marginalisés qui sont susceptibles de faire preuve d’un niveau de méfiance plus élevé» 
			(24) 
			«What place should
COVID-19 vaccine passports have in society?», Institut Ada Lovelace,
17 février 2021..
53. Si les pass covid établis sur la base des tests étaient exclus au motif que les tests n’offrent pas une protection relative suffisante contre la transmission pour justifier un traitement différencié, les deux éléments restants permettant l’obtention d’un pass covid seraient la vaccination et la guérison après une infection. Tant que la vaccination ne sera pas accessible à l’ensemble de la population, les personnes non vaccinées ne pourront obtenir un pass covid que si elles ont contracté la maladie et sont guéries. Si les avantages offerts par le pass covid étaient suffisamment importants, on peut s’interroger sur la possibilité que certaines personnes y voient une incitation à se faire contaminer. Bien que cette éventualité soit assez improbable, et qu’il s’agirait sans doute tout au plus d’un phénomène très marginal et certainement dangereux, elle ne peut être totalement exclue – il suffit d’observer le nombre de personnes qui refusent de porter un masque ou de respecter une distanciation physique suffisante pour se représenter à quel point l’appréciation du risque peut être différente d’une personne à l’autre 
			(25) 
			Les fêtes désignées
sous le terme de «covid parties», au cours desquelles des personnes
(surtout des jeunes) se seraient réunies dans l’intention d’attraper
le SRAS-CoV-2, se sont révélées être une légende urbaine, mais le
fait que ces annonces aient été prises au sérieux est une indication
de ce que beaucoup de gens considèrent comme possible..
54. À la mi-février 2021, selon un sondage réalisé en Israël, 31 % des personnes qui n’avaient pas l’intention de se faire vacciner auparavant déclaraient que l’instauration imminente du système de «passeport vert» les persuaderait peut-être ou certainement de le faire 
			(26) 
			Wilf-Miron
et al, «Incentivizing Vaccination Uptake: The ‘Green Pass’ Proposal
in Israel». JAMA. 2021;325(15):1503–1504..

5.5. Jurisprudence nationale

55. Le 1er avril 2021, le Conseil d’État français a jugé que, même s’il était vraisemblable que la vaccination assurait une protection efficace, les personnes vaccinées pouvaient cependant demeurer porteuses du virus et ainsi contribuer à sa propagation dans une mesure à ce stade difficile à quantifier, ce qui ne permettait donc pas d’affirmer que seules les interventions non pharmacologiques limiteraient suffisamment ce risque. En conséquence, l’atteinte à la liberté individuelle résultant des mesures de couvre-feu et de confinement en vigueur ne pouvait pas, en l’état, au regard des objectifs poursuivis, être regardée comme disproportionnée, en tant qu’elles s’appliquent aux personnes vaccinées 
			(27) 
			Requête no 450956,
1er avril 2021.. Le raisonnement qui sous-tend cette décision serait clairement applicable aux pass covid établis sur la base de la vaccination; il est naturellement fondé sur les éléments disponibles à l’époque, et une conclusion différente pourrait être dégagée à mesure que les connaissances scientifiques évoluent.

6. Questions relatives à la protection des données et au respect de la vie privée

56. Qu’il s’agisse d’informations sur le statut vaccinal, sur une contamination antérieure, sur le statut concernant les anticorps ou sur les résultats des tests, un pass ou un certificat covid contiendrait des données personnelles sensibles. Le traitement de ces données est soumis à des normes internationales strictes et bien établies, notamment à celles de la Convention 108 et de la Convention 108+ du Conseil de l’Europe.
57. Le Comité consultatif de la Convention 108 (T-PD) a publié des orientations utiles qui font autorité sur cette question et que je résumerai de la façon suivante:
  • Le traitement des données, en particulier le traitement de données aussi sensibles que les informations médicales personnelles, doit être encadré par la loi.
  • Le but légitime dans lequel les données sont traitées, en l’occurrence le rétablissement de la liberté de circulation, doit être clairement défini.
  • La loi doit préciser les circonstances dans lesquelles la présentation du pass covid peut être exigée.
  • Le spectre des personnes, des autorités et des organismes publics et privés qui peuvent être autorisés à accéder aux données doit être clairement défini, ainsi que l’étendue de l’accès accordé à chacun d’entre eux.
  • Une analyse d’impact doit être réalisée préalablement au traitement.
  • Le respect de la vie privée doit être garanti dès la conception et des mesures appropriées doivent être adoptées pour assurer la sécurité des données.
  • Le traitement doit être nécessaire et proportionné au but recherché, et seul le minimum de données strictement nécessaire doit être traité.
  • Les personnes concernées – les titulaires du pass covid – doivent être informées du traitement des données à caractère personnel qui les concernent.
  • Les données à caractère personnel ne doivent pas être conservées plus longtemps que la période pendant laquelle l’utilisation des attestations visant à faciliter l’exercice de la liberté de circulation est autorisée.
  • Les personnes concernées doivent être en mesure d’exercer leurs droits de manière effective.
  • Les autorités chargées de la protection des données doivent contrôler le respect des exigences en matière de protection des données.
  • L’augmentation constante des connaissances relatives à la covid-19, les effets de la vaccination et la durée de l’immunité après la contamination exigent que l’on veille à ce que toutes les données recueillies soient exactes et régulièrement mises à jour.
58. La protection des données vise à protéger la vie privée de la personne concernée, tel que le garantit l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme. Comme l’a relevé la Cour européenne des droits de l’homme, «[l]e simple fait de mémoriser des données relatives à la vie privée d’un individu constitue une ingérence au sens de l’article 8. (…) Peu importe que les informations mémorisées soient ou non utilisées par la suite» 
			(28) 
			S et Marper c. Royaume-Uni,
Requêtes nos 30562/04 et 30566/04, arrêt
de Grande Chambre du 4 décembre 2008.. La Cour a également observé que «[l]e respect du caractère confidentiel des informations sur la santé constitue un principe essentiel du système juridique de toutes les Parties contractantes à la Convention. Il est capital non seulement pour protéger la vie privée des malades mais également pour préserver leur confiance dans le corps médical et les services de santé en général.»

7. Criminalité organisée: contrefaçon et corruption

59. Depuis maintenant plusieurs mois, différentes sources spécialisées mettent en garde contre les risques liés à la criminalité organisée en ce qui concerne les vaccins, les certificats de vaccination et les pass covid. Début février 2021, Europol a ainsi lancé l’avertissement suivant: «La découverte de faux certificats de test négatif à la covid-19 confirme que les délinquants – qu’il s’agisse de groupes criminels organisés ou d’escrocs opportunistes individuels – saisissent les occasions de faire des profits dès qu’elles se présentent. Tant que les restrictions de circulation resteront en vigueur en raison de la situation liée à la pandémie de covid-19, il est fort probable que la production et la vente de faux certificats de test perdureront. Grâce à des moyens technologiques largement répandus, tels que des imprimantes de haute qualité et différents logiciels, les fraudeurs sont en mesure de produire des documents contrefaits, falsifiés ou faux de haute qualité.» 
			(29) 
			«Early Warning Notification:
The illicit sales of false negative COVID-19 test certificates»,
Europol, 1er février 2021.
60. De faux certificats de vaccination seraient vendus par des commerçants anonymes sur les sites du «dark web» pour seulement 125 € 
			(30) 
			«Covid-19:
Vaccines and vaccine passports being sold on darknet», BBC News, 23 mars 2021. et des arrestations ont déjà eu lieu en France, en Espagne et au Royaume-Uni 
			(31) 
			«Europol warns fake
negative Covid certificates being sold across Europe», The Guardian, 1er février
2021.. Selon l’entreprise de cybersécurité Check Point, ce n’est qu’une question de temps avant que des pirates ne trouvent le moyen de produire de faux pass covid. Il a également été suggéré que si l’instauration des pass de vaccination donne aux gens l’impression qu’ils sont obligés de se faire vacciner, ceux qui y sont réticents pourraient être davantage incités à falsifier des informations, ce qui alimenterait le marché des documents contrefaits. Cette tendance se traduit d’ailleurs dans le contenu de la publicité en ligne 
			(32) 
			«Increased
use of vaccine passports could lead to scams», ABC News, 30 mars 2021..
61. Comme indiqué dans le document établi par la Secrétaire Générale du Conseil de l’Europe, «[l]es mesures prévues par la Convention du Conseil de l’Europe sur la contrefaçon des produits médicaux et les infractions similaires menaçant la santé publique (Convention MEDICRIME), ainsi que par la Convention sur la cybercriminalité (Convention de Budapest), visent notamment à prévenir et combattre de telles activités» 
			(33) 
			«Protection
des droits de l’homme et ‘pass vaccinal’», Secrétaire Générale du
Conseil de l’Europe, 31 mars 2021..

8. Risques pour l’avenir

62. Le rapport de l’Institut Ada Lovelace s’intéresse également aux risques qui pourraient découler à l’avenir de l’instauration des pass covid. Il s’attarde en particulier sur le risque d’une normalisation de la surveillance de l’état de santé par la création d’une infrastructure dotée d’une mission à long terme en réaction à une crise limitée dans le temps, exprimant un «pessimisme quant à la probabilité que les technologies des passeports vaccinaux soient ‘désactivées’ une fois la crise passée». Observant qu’«une fois qu’une route est construite, il n’y a pas de raison qu’elle ne soit pas empruntée», l’Institut poursuit en suggérant que «le fait de construire ces routes pourrait entraîner une dépendance à l’itinéraire ainsi tracé: une fois qu’une infrastructure est construite, elle rendra à l’avenir certaines options plus favorables et empêchera le développement de certaines autres... Cela pourrait être particulièrement problématique si le statut relatif à d’autres problèmes de santé devait être ajouté» 
			(34) 
			«What
place should COVID-19 vaccine passports have in society?», Institut
Ada Lovelace, 17 février 2021..
63. Il existe un autre risque envisageable relatif à la protection des données et à la manière dont les informations recueillies et mises à la disposition d’une grande variété de parties prenantes, tant publiques que privées, pourraient être «réutilisées». Ce point souligne l’importance, mentionnée plus haut, de veiller à ce que l’étendue de l’accès de chaque utilisateur des données soit strictement défini et contrôlé, et à ce que les données à caractère personnel ne soient pas conservées plus longtemps que la durée d’exploitation de tout système de pass covid (c’est-à-dire qu’elles soient supprimées lorsque le système n’est plus en vigueur).

9. Conclusions et recommandations

64. Le coût socio-économique des restrictions liées à la covid-19 est indéniable et la pression politique qui s’exerce pour les réduire et les lever est compréhensible. Pour autant, la covid-19 est un problème qui est toujours pleinement d’actualité. En Europe, la situation s’améliore peut-être aujourd’hui dans de nombreuses régions, mais cela s’est déjà produit par le passé et elle reste très précaire – la covid-19 est toujours une maladie qui peut facilement échapper à tout contrôle et provoquer bon nombre de formes graves ou de décès. À long terme, les vaccinations semblent pour l’instant être la meilleure solution pour espérer maîtriser durablement la maladie, mais trop peu de personnes ont été vaccinées jusqu’à présent, la durée de l’immunité après la vaccination reste incertaine et il existe toujours un risque que de nouveaux variants soient résistants aux vaccins.
65. En outre, il apparaît clairement que la vaccination ne suffit pas à elle seule à protéger la collectivité contre la covid-19, du moins pas tant qu’une immunité collective forte et globale n’est pas atteinte. Le Chili a enregistré un nombre record de cas à la mi-avril 2021, bien qu’il ait l’un des taux de vaccination par habitant les plus élevés au monde, 40 % de la population ayant reçu au moins une dose. Un spécialiste des maladies infectieuses de l’université du Chili a fait la déclaration suivante: «Au début de la campagne de vaccination, le gouvernement a fait circuler un message indiquant que les vaccins étaient en route et que la pandémie allait donc bientôt prendre fin. Tout le monde a cessé de faire attention et de porter des masques, et de grandes foules se sont réunies pendant les vacances.» 
			(35) 
			Taylor
L., «Covid-19: Spike in cases in Chile is blamed on people mixing
after first vaccine shot», BMJ 2021;373:n1023. Le fait que la plupart
des personnes vaccinées au Chili n’aient reçu qu’une seule dose
du vaccin Sinovac, un régime dont l’efficacité est jugée très limitée,
ne contredit pas cette observation mais souligne plutôt la nécessité
d’adopter des mesures politiques fondées sur des éléments scientifiques
clairs et précis.
66. Les questions juridiques et relatives aux droits humains qui sont soulevées par l’instauration des pass covid sont d’une complexité trompeuse, notamment celles qui concernent le traitement différentiel et le risque de discrimination illégale. Ni moi, en qualité de rapporteur, ni l’Assemblée dans son ensemble ne sommes en mesure de dire aux États membres comment procéder dans ce domaine, car chacun d’entre eux est dans une situation différente sur les plans épidémiologique, social, économique et politique, que les autorités locales sont les mieux à même d’appréhender.
67. Le présent rapport tend plutôt à identifier les divers facteurs que les États doivent prendre en compte pour que leur politique relative aux pass covid soit compatible avec les normes fondamentales du Conseil de l’Europe en matière de droits humains. Ces normes exigent en effet que des mesures de ce type, ayant des incidences sur les droits humains, reposent sur un fondement juridique clair, complet et spécifique et soient assorties de garanties juridiques et institutionnelles contre les abus ou les conséquences inattendues qu’elles pourraient avoir. Il est également nécessaire de procéder à une évaluation et à une mise en balance attentives des enjeux pour s’assurer que le résultat final représente un juste équilibre entre des intérêts concurrents, tout en protégeant – et c’est peut-être le plus important – la santé publique contre ce qui reste un défi sans précédent de mémoire d’homme.
68. Cela signifie qu’aucune initiative qui pourrait avoir une incidence sur des mesures de santé publique ne devrait être menée sans qu’elle s’appuie avec suffisamment de certitude sur des preuves scientifiques. Cette certitude commence seulement à émerger en ce qui concerne les effets, sur le risque de transmission, de la vaccination ou de la guérison après une contamination antérieure. Ce n’est que lorsque l’on aura la certitude des effets de la vaccination, de la guérison après une infection et des résultats négatifs des tests sur le risque de transmission (incluant notamment des informations sur l’efficacité des différents vaccins, la durée de protection et la situation face aux différents variants) qu’il sera possible d’évaluer la pertinence de l’instauration de pass covid à des fins non médicales et de définir les limites de leur utilisation. Même dans ce cas, les effets potentiellement négatifs des pass covid devraient être pris en compte au moment de décider si les avantages de ces documents l’emportent sur les inconvénients qu’ils présentent pour la réponse de santé publique dans son ensemble et si tel est le cas quelles limites doivent être posées à leur utilisation. Si les pass covid sont mis en place, il devra être possible de modifier rapidement leur durée d’application et les cas dans lesquels leur utilisation est valide à la lumière de l’évolution des connaissances scientifiques et il sera important de prévoir d’emblée une utilisation limitée dans le temps d’un tel système.