1. Introduction
1. Le monde du sport peut donner
à chacun·e la possibilité de s’épanouir et de se réaliser, outre
ses avantages pour la santé. Il peut représenter un moyen de promouvoir
la diversité et l’égalité. En permettant une large participation,
qui ne dépend ni du genre, ni de la classe sociale ou de la situation
économique, le sport, professionnel et non-professionnel, peut contribuer
à faire évoluer les normes de genre, à renforcer la cohésion sociale
et l’intégration dans la société, et revêt donc une dimension universelle,
qui dépasse la quête de la performance.
2. Le sport peut être une source d’inspiration pour le changement,
que ce soit au niveau personnel ou au niveau sociétal. Ces dernières
décennies, le monde du sport s’est progressivement ouvert aux femmes
et aux filles, y compris dans des disciplines traditionnellement
réservées aux hommes. Des progrès considérables ont été accomplis.
Pourtant, l’égalité entre les femmes et les hommes dans le monde
sportif n’est toujours pas réalisée. Les inégalités de salaire,
d’accès et de statut peuvent rendre difficile la poursuite d’une
carrière sportive pour les femmes. Les femmes ne sont pas encore
reconnues dans toute leur diversité dans le monde du sport.
3. Les carrières sportives sont limitées dans le temps pour tous
les athlètes en raison des performances physiques. La question de
la réconciliation entre la vie privée et la vie professionnelle
est une barrière supplémentaire à l’allongement de la carrière des
sportives. Serena Williams, après une brillante carrière dans le
tennis, a annoncé quitter la compétition afin de se consacrer à
sa famille. Elle a dit “Croyez-moi, je n’ai jamais voulu avoir à
choisir entre le tennis et la famille, ce n’est pas juste. Si j’étais
un homme, je n’écrirais pas cela car je serais en train de jouer
et de gagner alors que mon épouse se chargerait du travail physique
lié à l’agrandissement de notre famille»
.
4. Les clubs féminins sont considérés comme ayant moins d’importance
et moins de potentiel pour la publicité et la génération de revenus,
et ont donc moins de moyens financiers. Ce cercle vicieux réduit
les possibilités, pour les sportives, de progresser et d’exprimer
leur talent. Partout en Europe, les femmes sont sous-représentées
dans les organes décisionnaires, y compris dans le monde du sport.
Des mesures ont été prises pour augmenter leur participation et
leur représentation mais l’égalité des genres n’est pas encore effective
à ce niveau.
5. Le Conseil de l’Europe travaille depuis de nombreuses années
sur la lutte contre les discriminations dans le domaine du sport.
En 2015, le Comité des Ministres a adopté sa recommandation CM/Rec(2015)2
sur l’approche intégrée de l’égalité entre les femmes et les hommes
dans le sport
. La Charte européenne du sport
a été révisée fin 2021; elle affirme
clairement les principes de non-discrimination et d’égalité femmes-hommes.
L’égalité dans le sport sera l’un des thèmes discutés lors de la
conférence ministérielle sur le sport qui se tiendra en octobre
2022 à Antalya. Un engagement politique fort est nécessaire notamment
lors de ce type d’occasion afin de mener au changement.
6. La discrimination et les stéréotypes fondés sur le genre restent
répandus dans le monde du sport et influencent la manière dont les
athlètes sont perçues dans l’opinion publique. Les attributs reconnus
comme étant masculins, comme la force physique, sont valorisés.
Les sportives qui ont beaucoup de force sont considérées comme possédant
des qualités «masculines» car force et masculinité restent étroitement
liées dans nos sociétés. Les médias ont tendance à renforcer ces
stéréotypes et à catégoriser les athlètes. L’inégalité des genres
et les stéréotypes sexistes qui s’observent dans le sport ne font
en réalité que refléter les inégalités des genres et la discrimination
présentes dans l’ensemble de la société. Les discours visant à abaisser
les femmes sont particulièrement fréquents dans le domaine du sport.
Le discours de haine ciblant les femmes athlètes est très présent,
y compris en ligne.
7. Le monde du sport n’est pas épargné par le phénomène de la
violence à l’égard des femmes et des filles. Un mouvement «Me Too»
a aussi émergé dans ce domaine; il est inquiétant de constater que
les témoignages des survivantes mettent en cause un grand nombre
d’associations et de fédérations sportives. L’autorité exercée par
un entraîneur sur de jeunes sportives et le rôle particulier de
l’entraîneur auprès de ces jeunes peuvent créer une conspiration
du silence autour des abus
.
Il est indispensable que les fédérations sportives donnent suite
aux révélations d’abus et soutiennent les victimes, et que les auteurs
de violence soient poursuivis.
8. La pandémie de covid-19 a eu des répercussions sur les progrès
réalisés par les femmes dans le domaine du sport
. Elle a contribué à fragiliser
certaines fédérations sportives. De fait, en situation d’urgence sanitaire,
la pratique sportive des femmes est loin d’être considérée comme
une priorité et certaines des ressources qui devaient aller au sport
féminin ont été redéployées
. La pandémie a également remis au premier
plan des stéréotypes de genre sur le rôle traditionnel de chacune
et chacun dans la société.
2. Portée du rapport et méthodes de travail
9. La proposition de résolution
qui est à l’origine de ce rapport mentionne la Recommandation CM/Rec(2015)2
du Comité des Ministres aux États membres sur l’approche intégrée
de l’égalité entre les femmes et les hommes dans le sport, la
Recommandation 1701(2005) de l’Assemblée «Discrimination à l’encontre des femmes
et des jeunes filles dans les activités sportives»
et la
Résolution 2131 (2016) de l’Assemblée «Le sport pour tous: un pont vers l’égalité,
l’intégration et l’inclusion sociale».
10. J’ai analysé les travaux menés par le Conseil de l’Europe
dans le cadre de son projet intitulé «Tous ensemble: vers une parité
des genres dans le sport»
qui présente une grande collecte
de données sur la place des femmes dans le domaine du sport.
11. J’ai aussi cherché des informations sur la composition des
organes décisionnaires dans le sport, sur la rémunération des femmes
sportives, sur leur statut, sur les mesures mises en place pour
aider les sportifs et les sportives à trouver un équilibre entre
vie privée et vie professionnelle, et sur les dispositions prises
pour prévenir et combattre la discrimination et les stéréotypes
sexistes. J’ai étudié les stratégies d’intégration de la dimension
de genre. Il est nécessaire d’aborder ces questions sous un angle
intersectionnel et de déterminer si des mesures spécifiques ont
été prises pour s’attaquer aux difficultés que les femmes appartenant
à des minorités ou en situation de handicap peuvent rencontrer dans
le monde du sport. J’ai attaché une importance particulière à la
question des discriminations à l’encontre des athlètes LBTI, qui
sont encore trop souvent stigmatisées, critiquées et mises à l’écart.
12. Il ne peut y avoir d’égalité des genres si rien n’est fait
pour lutter contre la violence fondée sur le genre. J’ai par conséquent
aussi analysé le mouvement «Me Too» tel qu’il s’est développé dans
le monde du sport. La violence à l’égard des femmes dans le sport
a fait la une des journaux et des enquêtes ont été lancées dans plusieurs
fédérations sportives. Le 10 novembre 2020, le réseau parlementaire
pour le droit des femmes à vivre sans violence a tenu un webinaire
sur le thème «Prévenir et combattre la violence à l’égard des femmes dans
le sport»
, qui
a offert une occasion précieuse de discuter avec Sarah Abitbol,
patineuse artistique, Dagmar Schumacher, Directrice, Bureau de Bruxelles,
ONU Femmes, Pierre-Emmanuel Luneau-Daurignac, réalisateur du documentaire
«Violences sexuelles dans le sport, l'enquête», ARTE, Nadezda Knorre,
Vice-présidente, WomenSport International, Béatrice Barbusse, Maître
de conférences, Université Paris-Est Créteil, Secrétaire Générale,
Fédération française de handball, et Joyce Cook, chargée auparavant
de la responsabilité sociale et de l’éducation à la FIFA (Fédération
Internationale de Football Association). Le monde du sport n’est
pas à l’abri de la violence ni de la discrimination, et est réputé
pour être un milieu plus favorable aux hommes, ce qui se traduit
dans la discrimination à de multiples niveaux à laquelle sont confrontées
les sportives.
13. J’ai effectué des consultations bilatérales à distance dans
le cadre de mes travaux. J’ai notamment tenu une réunion en ligne
avec Cianán Russell, ILGA-Europe; Francesca Sanders, TGEU (Transgender
Europe); Ilaria Todde, EuroCentralAsian Lesbian* Community (EL*C);
Hugh Torrence, European Gay & Lesbian Sport Federation (EGLSF);
et Sarah Townsend, European Gay & Lesbian Sport Federation (EGLSF)
le 7 juin 2022. J’ai également tenu une réunion en ligne avec des
représentant·e·s de la FIFA comprenant Joyce Cook, à présent conseillère
au sein du bureau du Président (Safe Sport Entity); Annaliza Tsakona,
responsable senior des affaires publiques; Hala Ousta, responsable
senior de la diversité et de l'accessibilité; et Gerd Dembowski, agent
chargé de la diversité et de la lutte contre la discrimination le
7 juin 2022. Enfin, j’ai aussi pu discuter avec Sophie Kwasny, secrétaire
exécutive de l’Accord partiel élargi sur le sport et Francine Hetherington Raveney,
secrétaire exécutive adjointe, le 1 juin 2022.
14. La commission a tenu une audition le 21 juin 2022 avec la
participation de Nagin Ravand, qui a fait part de son expérience
en tant que jeune femme d’origine afghane devenue à présent entraîneuse
au Danemark, de Sarah Townsend, co-présidente de la Fédération européenne
de sport gay et lesbienne et membre du Groupe de haut niveau de
l’Union Européenne sur l’égalité de genre dans le sport (2022),
et d’ Irena Guidikova, Cheffe du service des droits de l’enfant
et des valeurs du sport, Direction générale de la démocratie du
Conseil de l’Europe. J’ai également pu m’entretenir avec Mme Ravand
lors d’une réunion bilatérale.
15. Je remercie Konul Nurullayeva (Azerbaïdjan, CE/AD), membre
de la commission, de sa contribution écrite, portant sur la situation
en Azerbaïdjan et sur l’importance de lutter contre les discriminations
et d’assurer une égalité de salaires aux entraîneurs et entraîneuses.
J’ai également reçu des contributions écrites de la part d’ILGA
Europe, recueillant des informations préparées par ILGA, TGEU, EL*C,
OII et EGLSF) et de la FIFA et je tiens à les remercier de leur
engagement sur cette question et des informations envoyées.
3. Prévenir
et combattre la violence à l’égard des femmes dans le sport
16. Il est primordial d’agir pour
prévenir et combattre la violence à l’égard des femmes dans le sport
en vue de parvenir à l’égalité des genres. De plus en plus de victimes
prennent la parole et font part de ce qu’elles ont vécu, contribuant
ainsi à lever le tabou de la violence. Certains pays ont connu aussi
les mouvements «Me too» dans différents domaines, dont le sport.
17. Au cours de notre webinaire, Sarah Abitbol, patineuse artistique
française, a raconté ce qu’elle avait ressenti pendant des années
après avoir été victime de violences sexuelles de la part de son
entraîneur lorsqu’elle était adolescente. Elle a décrit l’emprise
qu’il avait sur elle et a expliqué pourquoi elle n’avait pas été capable
d’en parler pendant des années. Elle a estimé que la publication
de témoignages de personnes ayant subi des abus pourrait aider les
filles qui risquent d’être victimes de violences, ou qui en sont
victimes. Elle a également insisté sur les sentiments de honte et
de culpabilité qu’elle avait ressentis et sur le besoin qu’elle
a éprouvé de mettre en garde les jeunes femmes et les filles des
risques qu’elles courent.
18. La violence à l’égard des femmes et des filles dans le monde
du sport peut prendre de nombreuses formes: qu’il s’agisse de violence
psychologique, physique ou sexuelle, de nombreux cas ont été signalés.
Lors du webinaire, Mme Béatrice Barbusse,
Secrétaire générale de la Fédération française de handball, a insisté
sur le fait que la domination et le sexisme sont institutionnalisés
dans le sport. Selon elle, il existe une triple domination dans
le sport: les hommes sur les femmes, les adultes sur les jeunes
et les personnes ayant une position d’autorité sur les personnes
soumises à cette autorité. Elle a expliqué que le climat de confiance
qui se créait avec les entraîneurs constituait un terrain propice
à la violence.
19. C’est pourquoi il est essentiel de dispenser une formation
à toutes les parties prenantes du domaine du sport pour prévenir
et combattre la violence à l’égard des femmes. Des plans de prévention
devraient être élaborés par toutes les fédérations sportives. En
outre, il devrait y avoir davantage de femmes dans les instances
dirigeantes du sport et dans l’encadrement technique. La sécurité
de toutes et de tous devrait être assurée lors d’événements sportifs.
20. Joyce Cook (CBE, OBE), auparavant chargée de la responsabilité
sociale et de l’éducation à la FIFA, a présenté les activités menées
par l’organisation pour prévenir la violence à l’égard des femmes
et a annoncé son intention de se mobiliser davantage sur ce sujet
important. La FIFA a créé le programme Guardian, qui est un programme
éducatif afin de prévenir les violences, auquel près de 5 000 personnes
se sont inscrites. Afin d’apporter une réponse au niveau international,
la FIFA a demandé la création d’une nouvelle agence internationale
multisports dont la mission serait de prévenir et combattre la violence
à l’égard des femmes dans le sport. Les cas de mauvais traitements
seraient signalés à cette entité indépendante, qui offrirait un
soutien centré sur les victimes/survivantes et assurerait la protection
des lanceurs d'alerte. Cette instance devrait se concentrer dans
un premier temps sur la lutte contre les violences faites aux enfants
dans le sport, Elle mobilisera l'expertise et le soutien nécessaires
pour garantir un signalement sûr, des enquêtes fondées sur les traumatismes,
l'accès à des services de soutien aux soins et un recours efficace.
Elle est encore en phase de développement et devrait prendre la
forme d'une fondation.
4. Discriminations
faites aux femmes LBTI
21. Les femmes LBTI souffrent de
discriminations invisibles et multiples dans le monde du sport.
Leurs familles peuvent s’opposer à la pratique du sport, ou ne pas
les soutenir. Elles peuvent être rejetées à leur arrivée dans une
équipe. Leurs performances sont constamment questionnées. Les médias
véhiculent des stéréotypes négatifs sur les athlètes LBTI, qui peuvent
être la cible de discours haineux, de harcèlement et de violence.
Des athlètes féminines performantes voient aussi leur orientation
sexuelle présentée, discutée et supposée par les médias. Cela sous-entend
des stéréotypes négatifs à l’encontre des personnes LBTI.
22. De manière générale, toutes les femmes sont soumises à des
standards dans le domaine du sport, en ce qui concerne leur corps,
leur comportement et leurs performances. J’estime que nous pouvons
parler d’une hyper sexualisation des sportives. Selon Ilaria Todde,
une femme non hétérosexuelle voit ses bons résultats sportifs considérés
comme non féminins. D’après elle, «certains sports sont perçus comme
n’étant pas féminins, ou bien pour les lesbiennes, et sont critiqués
ou dénigrés». Des commentaires sont faits par des responsables politiques,
qui regrettent que des fonds soient alloués à des clubs soit-disant
de lesbiennes. Les sports pratiqués par les femmes, dans toute leur
diversité, sont considérés comme étant de moindre intérêt et valeur
que les autres. Les discriminations faites aux femmes dans toute
leur diversité sont profondément ancrées dans le domaine du sport
et plus d’efforts doivent être faits afin d’y remédier.
23. L’appartenance à une équipe peut également être difficile
pour les athlètes LBTI, qui peuvent être rejetées, ou alors à qui
on demande de se renier. Des athlètes LBTI sont considérées par
certain·e·s comme étant des dangers pour leurs coéquipières. Elles
sont victimes de discrimination en raison de leur identité de genre
et orientation sexuelle, dans un environnement moins bienveillant
envers les athlètes féminines que les sportifs. Une athlète islandaise
a témoigné auprès d’ILGA Europe: «Être une femme dans le sport signifie
être moins qu’un homme, avoir des entraîneurs/entraîneuses moins
expérimenté·e·s, moins d’argent, de respect et d’intérêt de la part
des clubs. Être une femme queer était quelque chose dont on ne parlait
pas».
24. Je tiens à souligner que les discriminations à l’encontre
des femmes LBTI ont un impact négatif sur toutes les femmes, et
que la lutte contre les discriminations envers les personnes LGBTI
de manière générale est l’affaire de toutes et de tous.
25. Selon l’ancien Rapporteur spécial des Nations Unies sur le
droit à la santé, les personnes perçues comme ne relevant pas du
cadre de genre dominant, à savoir les personnes transgenres ou intersexes, continuent
de faire l’objet de traitements et de restrictions profondément
discriminatoires dans le sport, en plus du harcèlement, des violences
physiques et verbales, de la marginalisation et du manque d’espaces accueillants
et sûrs pour y participer.
26. La situation des athlètes transgenres doit aussi être étudiée.
Lors de notre entretien, Francesca Sanders, représentante de l’organisation
Transgender Europe, a souligné que 75% des personnes transgenres
ont déjà été victimes de discriminations dans le sport. Un quart
avait été victime de violence physique. Selon les résultats du projet
Outsport, présenté par Sarah Townsend, 45% des personnes transgenres
avaient arrêté le sport en raison d’une gêne ressentie, 53% des
femmes transgenres se sentaient exclues de certains sports en raison
de leur orientation sexuelle et identité de genre. Il y a de nombreux obstacles
à la participation de femmes transgenres aux compétitions sportives.
Les Jeux Olympiques sont ouverts aux personnes transgenres depuis
2004 dans des conditions strictes, et avec l’obligation d’une opération.
Les athlètes devaient avoir subi un changement de sexe chirurgical
après deux ans d’hormonothérapie pour être admissibles à la compétition.
Mais dans la pratique, aucun pays n’avait auparavant envoyé des
athlètes transgenres participer aux Jeux olympiques. Depuis janvier
2016, il n’est plus nécessaire d’avoir subi une intervention chirurgicale
ou une hormonothérapie pendant deux ans. Cependant, les athlètes
femmes transgenres doivent prouver que leur taux de testostérone
est inférieur à 10 nanomoles / litre un an avant la compétition.
Si les athlètes féminines transgenres ne répondent pas à ces exigences,
elles peuvent concourir dans une catégorie masculine.
27. Le CIO a publié le 16 novembre 2021 son cadre sur l'équité,
l'inclusion et la non-discrimination sur la base de l'identité sexuelle
et de l'intersexuation, afin de «promouvoir un environnement sûr
et accueillant pour toutes les personnes associées aux compétitions
de haut niveau, conformément aux principes inscrits dans la Charte
olympique»
.Ce cadre doit être transformé en
règlement par les comités nationaux. Le cadre affirme que les droits
humains doivent être respectés et «reconnaît l’intérêt à concourir
dans des compétitions équitables où aucun participant n'a un avantage
injuste et disproportionné sur les autres».
28. Au nom de l’équité, une femme avec des caractéristiques dites
«masculines» pourrait être «trop forte» pour rivaliser avec des
athlètes féminines, tandis qu’un homme avec des caractéristiques
dites «féminines», s’il a moins de succès que d’autres athlètes
masculins, ne soulèvera aucun problème ou question d’équité parce
que les athlètes masculins seront sûrs de gagner contre cette personne.
Les athlètes féminines transgenres ont fait l’objet de nombreuses
attaques dans les médias et leur place dans le sport a été remise en
question.
29. Des tests de féminité sont effectués régulièrement pour prévenir
le risque de tricherie de genre. Les tests de féminité violent de
nombreux droits humains protégés au niveau international, tels que
le droit à la vie privée, à la dignité, à la santé, à la non-discrimination
et à l’absence d’abus, ainsi que les droits du travail. Ces tests
ne devraient plus être autorisés
.
30. La dimension intersectionnelle ne devrait pas être oubliée.
Selon Ilaria Todde (EuroCentralAsian Lesbian* Community), les athlètes
LBTI de couleur, d’origine africaine par exemple, sont particulièrement stigmatisées.
La capitaine de l’équipe nationale italienne de volley-ball est
une femme noire, immigrée et lesbienne. Son coming
out a fait l’objet de commentaires médisants, notamment
dans les médias.
31. La situation des personnes intersexes est également source
d’inquiétude. Selon Cianán Russel, il y a une interphobie structurelle.
Les personnes intersexes évitent d’aller faire du sport par peur
de question gênantes sur leur corps. Elles ne se sentent pas en
sécurité dans le domaine du sport.
32. Le chemin sera long pour mettre fin aux discriminations à
l’encontre des athlètes LBTI et leur assurer l’égalité d’accès et
de pratique. Lors de notre audition, Sarah Townsend a dénoncé les
discriminations fondées sur le sexe, l’identité de genre, les caractéristiques
sexuelles, l’origine et la couleur de peau, ainsi que le sexisme
dans le sport.
33. Nous avons aussi pu constater que les mouvements anti-genre
en Europe et aux États Unis se sont saisis du sujet du sport, appelant
à l’exclusion et à la non-reconnaissance des athlètes LBTI. Leur
influence est en phase croissante et nous devons réagir. Les associations
sportives devraient également apporter leur soutien aux athlètes
LBTI et les inclure. Les discriminations faites aux athlètes transgenres
devraient faire l’objet d’un rapport spécifique de l’Assemblée.
5. Écarts
de rémunération entre les femmes et les hommes
34. Il existe un écart important
entre la rémunération des sportifs et celle des sportives dans la
plupart des sports, si ce n’est dans la totalité d’entre eux. Les
revenus des sportifs et des sportives professionnel·le·s provient
du cumul d’un salaire, de primes de participation aux compétitions,
de prix en argent et d’accords de sponsoring commercial. Il y a
des différences de rémunération pour chacune de ces catégories dans
presque tous les sports. En 2017, Sporting Intelligence a dressé
une comparaison entre les 12 championnats féminins les mieux rémunérés
et les 12 championnats masculins les mieux rémunérés
. L’étude a révélé
que dans les sports collectifs de haut niveau, les hommes gagnent
en moyenne 101 fois le revenu perçu par les femmes
.
35. Cet écart de rémunération s’explique par le fait que les sportives
attireraient moins l’attention des médias et du public, et donc
que leur présence semblerait moins profitable sur le plan financier
que celle de leurs homologues masculins. Ces derniers font également
l’objet d’un plus grand nombre de campagnes de publicité, qui constituent
donc pour eux une source de rémunération plus importante. L’attention
des médias et une large base de supporters peuvent conduire à la
signature de contrats de sponsoring commercial
.
36. Le Projet d’analyse du Comité international olympique (CIO)
sur la question de l’égalité des sexes recommande que les comités
nationaux olympiques et les fédérations sportives internationales
«mett[ent] en place des mécanismes visant à combattre les inégalités
en termes de rémunérations entre hommes et femmes, qu’il s’agisse
de prix en espèces ou autres paiements»
.
Le rapport final du Comité consultatif du Conseil des droits de
l’homme sur le sport et les droits de l’homme établi en 2015 recommande
aux États d’«[œ]uvrer à la répartition juste et équitable des parrainages
sportifs entre les sexes»
. Des travaux de recherche publiés
en 2019 montrent qu’une proportion écrasante de 93 % du volume total
du marché mondial du parrainage sportif financier directement proposé
par les entreprises était consacrée au secteur du sport masculin,
laissant une part de 7 % au sport féminin
.
5.1. Le
tennis: un sport égalitaire?
37. J’ai lu avec intérêt le classement
annuel Forbes des athlètes les mieux payés au monde. Il ne comptait aucune
femme en 2018, une seule en 2019 (Serena Williams) et deux femmes
en 2022 (les joueuses de tennis Serena Williams et Naomi Osaka)
. Le tennis semble donc être l’un des sports
les plus égalitaires, puisque les joueurs et les joueuses qui participent
aux quatre tournois du Grand Chelem remportent les mêmes prix en argent
et jouent dans des formats de compétition identiques et sur les
mêmes courts
. Les tournois
de tennis féminins sont diffusés à la télévision et les joueuses
de tennis sont également régulièrement contactées pour participer
à des campagnes publicitaires.
5.2. De
fortes disparités de revenus dans le football
38. Ces dernières années, plusieurs
équipes de football ont fait campagne pour l’égalité des rémunérations
. En 2017, la Norvège a été le premier pays
à accorder des conditions salariales égales à ses équipes nationales
de football masculine et féminine
. 14 autres associations nationales membres
de la FIFA ont suivi: l’Islande (2018), la Nouvelle -Zélande (2018),
la Finlande (2019), l’Australie (2019), le Brésil (2020), le Népal
(2020), le Sierra Léone (2020), l’Angleterre (2020), la Suède (2020),
la République d’Irlande (2021), la Suisse (2022), l’Espagne (2022),
les Pays-Bas (2022) et les États Unis (2022). Des changements sont également
attendus en Allemagne, où le Chancelier Olaf Scholz a plaidé pour
«l'égalité des primes entre les hommes et les femmes dans les sélections
allemandes engagées dans les tournois de football»
. En 2019, le club de football néerlandais
AFC Ajax a garanti l’égalité du salaire minimum et des avantages
sociaux offerts aux membres des équipes masculine et féminine.
39. Un rapport établi en 2020 par la FIFPRO (fédération internationale
représentant les footballeurs et footballeuses professionnel·le·s)
montre que si les salaires annuels versés par les clubs féminins
augmentent, il existe encore de grandes différences entre les salaires
des hommes et ceux des femmes
. La rémunération des
footballeuses provient de sources diverses et est irrégulière. Le
manque de possibilités de jouer et les répercussions que cela peut
avoir sur les revenus poussent de nombreuses joueuses de football professionnelles
à signer dans plusieurs équipes
. Elles sont également souvent contraintes
de chercher un travail à temps partiel afin de compléter leurs revenus
issus du football.
40. Selon une enquête réalisée en 2019 auprès de 3 000 footballeuses
dans 33 pays différents, 89 % des personnes interrogées envisageaient
de prendre leur retraite prématurément. Parmi les raisons invoquées,
on peut citer les faibles salaires, l’absence de services de garde
d’enfants ou la précarité des conditions de travail et des contrats.
Les joueuses qui ont déclaré avoir reçu un paiement estimaient à
42 % qu’il était insuffisant pour couvrir leurs dépenses
. Les clubs sportifs devraient
offrir des conditions de travail et des avantages sociaux adaptés
aux athlètes féminines pour s’assurer qu’elles puissent continuer
à jouer et à développer leurs capacités en tant que sportives professionnelles.
41. L’UEFA et la FIFA ont toutes deux reconnu que l’inégalité
des genres est un problème majeur dans le monde du football
. En juillet 2019,
le président de la FIFA a annoncé le lancement de plusieurs initiatives visant
à stimuler le football professionnel féminin, dont la création d’une
Coupe du monde féminine des clubs de la FIFA et d’une Ligue mondiale
féminine de la FIFA, l’extension du format de la Coupe du monde
féminine de la FIFA de 24 à 32 équipes et la multiplication par
deux des investissements dans le football féminin au cours du prochain
cycle de quatre ans. La dernière coupe du monde féminine a rencontré
un grand succès lors de sa retransmission à la télévision
.
Le football est de plus en plus populaire chez les filles en Europe
et est depuis un certain temps l’un des sports collectifs préférés
des filles aux États-Unis.
42. En 2016, les statuts de la FIFA ont été modifiés pour y inclure
des dispositions sur l’égalité entre les femmes et les hommes et
les droits humains. Dans sa Politique en matière de droits de l’homme
adoptée en 2017, la FIFA réaffirme son engagement en faveur de la
non-discrimination et déclare qu’elle accorde une importance particulière
à l’identification et à la prise en compte des effets différenciés
en fonction du sexe ainsi qu’à la promotion de l’égalité entre les
femmes et les hommes et à la prévention de toutes les formes de harcèlement,
notamment du harcèlement sexuel
.
43. Avec la pandémie de covid-19, l’année 2020 a été très difficile
pour les fédérations et les clubs sportifs, car il y a eu moins
d’occasions d’organiser des rencontres et de les retransmettre dans
les médias. Cette situation s’est répercutée sur le niveau de rémunération
des joueuses. Plusieurs clubs féminins ont vu baisser le niveau
des contributions qui leur étaient versées, car ils étaient considérés
comme moins importants que les clubs masculins ou pas encore classés
comme «professionnels». La FIFA a pris des mesures spécifiques afin de
soutenir les clubs féminins à la suite de la pandémie.
44. Lors de sa première partie de session de 2022, l’Assemblée
a adopté la
Résolution
2420 (2022) «La gouvernance du football: affaires et valeurs». Elle
«considère que tant la protection des joueurs et des joueuses mineurs
que la promotion de l’égalité des genres, ainsi que la lutte contre
la discrimination quel qu’en soit le motif, devraient être des priorités
pour le mouvement sportif en général et les organisations du football en
particulier, et ce à tous les niveaux. Une proportion plus significative
des ressources disponibles devrait être allouée aux actions visant
ces résultats». Elle énonce clairement que «le sport est un domaine
clé pour la promotion de l’égalité des genres, étant donné la puissance
des symboles et des messages qu’il véhicule».
6. Traitement
par les médias et représentation des femmes au sein des instances
dirigeantes du sport
45. En ce qui concerne le journalisme
et la couverture médiatique, une étude réalisée en 2011 sur 22 pays montre
que 90 % des articles relatifs au sport sont écrits par des hommes,
que les sports traditionnellement les plus populaires sont essentiellement
couverts par des hommes et que les athlètes masculins font l’objet
de 85 % du traitement accordé au sport par la presse écrite
.
46. En outre, la campagne de collecte de données «Tous ensemble!
Vers une parité des genres dans le sport» menée par le Conseil de
l’Europe en 2019 sur la parité des genres dans le sport dans 18 pays européens
a révélé que 19 % seulement des fédérations sportives ayant fait
l’objet de l’étude disposaient de lignes directrices en faveur de
la parité des genres dans le contenu de leur communication
. L’accroissement de
l’attention des médias pour les sportives pourrait non seulement
entraîner une augmentation de leurs revenus, mais aussi une progression
de la participation des femmes et des filles dans le sport. Selon
le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies, la faible représentation
des femmes aux postes décisionnels est un obstacle à la réalisation
de l’égalité entre les femmes et les hommes dans le monde du sport
.
47. La campagne «Tous ensemble: vers une parité des genres dans
le sport» a permis de recueillir une quantité de données impressionnante.
Ses résultats montrent que les femmes sont toujours sous-représentées
dans les organes décisionnels des fédérations sportives olympiques
et des comités nationaux olympiques
. Parmi les pays
étudiés, la France compte le plus grand nombre de femmes au sein
des conseils d’administration de ses fédérations sportives (37 %)
et est parvenue à une représentation
paritaire dans la composition des conseils d’administration de ses
fédérations de gymnastique et de patinage (52 % et 51 % respectivement)
. Par ailleurs, l’enquête «Tous ensemble:
vers une parité des genres dans le sport» montre que 22 % seulement
des entraîneurs de haut niveau employés par les fédérations sont
des femmes
. Plusieurs
fédérations sportives ont mis en œuvre des mesures visant à augmenter
le nombre de femmes occupant des fonctions décisionnelles (53 %)
ainsi que celui des entraîneuses (38 %)
. Pour y parvenir, elles ont principalement
mis en place des procédures d’élection et de nomination favorisant
l’égalité entre les femmes et les hommes
. En ce qui concerne la participation des
femmes, les sports les plus égalitaires sont la natation et l’athlétisme.
48. Le rapport «Tous ensemble: vers une parité des genres dans
le sport en Europe»
relève aussi que c’est dans
les sports qui sont traditionnellement perçus comme «féminins» et
qui comptent principalement des pratiquantes féminines, tels que
la gymnastique et le patinage, que l’on recense le plus grand nombre d’entraîneuses
et de femmes occupant des fonctions de direction. Néanmoins, la
présidence est presque toujours exercée par un homme
. Selon EIGE (European
Institute for Gender Equality), 14% des personnes aux postes de
décision dans les fédérations sportives dans les États membres de
l’Union européenne sont des femmes (de 3% en Pologne à 43% en Suède)
.
49. Un milliard $US a été investi par la FIFA pour le développement
et le rayonnement du football féminin. La FIFA et l’UEFA mènent
un programme de femmes leaders. Le Président de la FIFA fait activement
la promotion de compétitions pour les femmes et de l’égalité en
général. Les femmes ont fait leur entrée au sein des instances dirigeantes
de l’organisation. La Secrétaire générale actuelle de la FIFA est
une femme et un réseau du personnel féminin a été mis en place depuis
2014, offrant plusieurs mesures d'action positive pour améliorer
les opportunités d'égalité des genres tout en considérant les sujets
d'égalité intersectionnelle. Trois arbitres féminines et trois assistantes
arbitres ont été nommées pour la coupe du monde masculine de football qui
se tiendra au Qatar. Actuellement, plus de 20 associations membres
de la FIFA (fédérations de football) comptent des femmes parmi leurs
cadres supérieurs.
50. En 2016, le CIO s’était fixé pour objectif d’atteindre une
proportion de 30 % de femmes dans ses instances avant 2020. Le Projet
d’analyse sur la question de l’égalité des sexes publié par l’organisation en 2018
a établi un ensemble de recommandations pour promouvoir la nomination
des femmes dans les fonctions d’encadrement dans l’ensemble de l’organisation.
Parmi les actions proposées figurent la mise en place d’un «programme
de co-mentorat pour les femmes»
;
l’adoption de mesures pour «veiller à ce que les sièges à la commission
exécutive du CIO, y compris ceux des vice-présidents, soient occupés
par un nombre égal d’hommes et de femmes»; l’adoption de l’obligation,
pour les comités nationaux olympiques et les fédérations internationales
«de présenter une candidate pour chaque candidat proposé» pour l’un
des sièges à pourvoir
;
et la révision des procédures électorales
. Des progrès considérables
ont été faits, il y a à présent plus de 33% de femmes dans les instances
de direction du CIO. Les Jeux Olympiques de Tokyo ont été les plus
inclusifs jusqu’à présent, et les prochains Jeux Olympiques se veulent
une plateforme globale de promotion de l’égalité des genres, de
la diversité et de l’inclusion. Les femmes ont représenté 48% des
athlètes ayant participé à ces jeux
.
7. Promouvoir
l’égalité des genres dans le sport
51. Dans le domaine du sport, la
prévention et la lutte contre les violences faites aux femmes, dans
toute leur diversité, doit devenir une priorité. Un soutien aux
survivantes doit être apporté, ainsi qu’à celles souhaitant témoigner.
Le personnel sportif doit impérativement être formé sur ces questions.
De nombreux faits de violences et d’abus ont été rapportés dans
le cadre du mouvement «me too» dans le domaine du sport. Les auteurs
de violences doivent être poursuivis, il ne peut y avoir d’impunité
ou de silence. Des décisions fermes doivent être prises, les sportives,
les jeunes sportives et leurs familles ne doivent pas craindre des
violences en se lançant dans une discipline sportive.
52. Investir dans l’éducation à l’égalité des genres est une recommandation
fondamentale afin de parvenir à un changement des mentalités. Cela
s’accompagne de la formation du corps enseignant sur ces questions et
d’un investissement sur une longue période. Des formations devraient
également être données aux entraîneurs sportifs afin de prévenir
et de lutter contre le sexisme et les stéréotypes de genre, qui
peuvent être destructeurs, et de prévenir toute forme de violence.
53. Des sportives et des sportifs inspirant·e·s peuvent servir
d’exemples aux jeunes générations. Je soutiens par conséquent également
la nomination d’ambassadrices et d’ambassadeurs de l’égalité des
genres dans le sport, qui mèneraient des activités de sensibilisation
dans les médias et auprès de jeunes athlètes. Lors de notre audition,
Irena Guidikova a souligné que des athlètes charismatiques pouvaient
aider à changer les attitudes et perceptions dans nos sociétés.
Nagin Ravand, par son expérience, inspire de nombreuses jeunes femmes
et les encourage à pratiquer un sport. Elle a commencé à jouer au
football par hasard et n’a ensuite jamais arrêté. Elle estime que
tout le monde devrait se sentir à l’aise de s’engager dans différentes activités
sportives et qu’avoir plus de diversité dans le domaine du sport
était grandement bénéfique. «Aucune équipe ne gagnerait avec 11
gardiens de but».
54. La lutte contre les discriminations dans le domaine sportif
doit être une priorité des fédérations, qui devraient s’engager
à jouer un rôle actif afin de les prévenir. Les stéréotypes, les
remarques sexistes, les attaques sur l’orientation sexuelle, l’identité
de genre, l’aspect physique, ne devraient plus être acceptés. Des sanctions
doivent être prises si nécessaire. La collecte de données sur tous
les aspects liés aux discriminations faites aux femmes athlètes
et à la violence doit être assurée.
55. Les événements sportifs de grande ampleur peuvent être des
moments clés de la lutte contre les discriminations et les violences
à l’encontre des femmes, notamment dans le domaine du sport. Les organisateurs
et organisatrices de grands tournois sportifs devraient être encouragés
à utiliser ces moments pour lancer des campagnes de sensibilisation,
visant à lutter contre la violence, la discrimination et les stéréotypes,
et des messages forts d’inclusion.
56. Faire de l'adoption et de la mise en œuvre de stratégies en
matière d'égalité des genres, comprenant un engagement à prévenir
et à lutter contre la violence à l'égard des femmes et à garantir
l'égalité de rémunération, une condition du financement pour les
fédérations et les clubs pourrait également être une mesure efficace.
57. Le sport peut être un moyen de mettre en avant les femmes
dans toute leur diversité. Les pratiques discriminatoires, notamment
en matière de réglementation des tenues, lorsqu’elles ne sont pas
justifiées par la pratique sportive, ne devraient plus être tolérées.
L’interdiction du port du voile dans certaines fédérations peut
représenter un frein à la participation. Nagin Ravand a parlé de
son expérience personnelle; elle peut jouer au football au Danemark
en portant le voile, et participer aux travaux de la fédération
danoise de football. Porter le voile a été son choix, et ne l’a
aucunement empêchée d’être une sportive accomplie.
58. L’imposition pour les sportives de porter des tenues blanches,
qui peuvent s’avérer gênantes pendant leurs règles, pourrait être
reconsidérée. Ce sujet a été discuté par certaines fédérations sportives
lors de l’Euro féminin de l’UEFA et pose la question de la prise
en compte des caractéristiques corporelles des femmes dans le choix
des tenues.
59. Selon Lydia Nsekera, Présidente de la Commission sur les femmes
dans le sport du Comité Olympique international: «Les femmes, dans
toute leur diversité, ont tant à apporter au monde du sport, à sa
pertinence et son succès durable. Un nombre plus important de femmes
et des voix plus diverses doivent être impliquées dans la gestion
et la prise de décision concernant les allocations de ressources
et autres thèmes clés dans le sport. C’est l’avenir»
.
Les nominations de femmes dans les instances dirigeantes des fédérations
sont donc très importantes.
60. Des actions sont aussi à mener auprès des médias afin de prévenir
les stéréotypes de genre encore trop souvent partagés dans leurs
commentaires d’événements sportifs. La lutte contre les discriminations faites
aux femmes dans le domaine du sport se mène en luttant aussi contre
l’hypersexualisation des sportives.
61. Il y a encore trop peu de femmes entraîneuses, des programmes
de formation et de soutien devraient être financés et mis en œuvre.
62. La réconciliation entre vie familiale et vie professionnelle
peut être particulièrement compliquée pour des sportives de haut
niveau. Des aménagements devraient être effectués par les fédérations
afin de soutenir les athlètes.
63. L’intersectionnalité devrait être prise en compte dans l’élaboration
de politiques d’égalité des genres dans le sport. Les athlètes d’origines
diverses, LBTI, en situation de handicap, ou bien de confessions religieuses
diverses, sont souvent victimes de discriminations multiples. Le
Comité Olympique a fait de la promotion de l’inclusion, de l’égalité
des genres et de la diversité une de ses priorités. Cela devrait s’accompagner
d’actes forts, comme assurer l’accessibilité pour toutes et tous,
une systématisation de l’égalité, notamment avec des politiques
d’intégration de la dimension de genre et des actions concrètes
de lutte contre toute forme de racisme.
64. Enfin, je suis également persuadée que les hommes ont un rôle
important à jouer afin de lutter contre les discriminations à l’encontre
des femmes, dans toute leur diversité, dans le sport. Ils peuvent
agir lorsqu’ils voient des violences, soutenir les victimes, dénoncer
les discriminations, promouvoir la diversité et soutenir leurs collègues.
Ils peuvent contribuer à faire du sport un domaine sûr pour toutes
et pour tous. Nagin Ravand a souligné qu’ils pouvaient aussi appeler
à l’égalité dans le sport, promouvoir la participation des femmes
et demander l’égalité salariale.
8. Conclusions
65. L’été 2022 a été celui de l’Euro
de football féminin. Des matches ont été diffusés sur des chaînes
de télévision aux heures de grande écoute et une attention particulière
a été portée aux joueuses par les médias. En Allemagne, le nombre
de téléspectateurs et téléspectatrices pour cette compétition a
doublé et est passé à plus de 17 millions pour la finale. Le nombre
de personnes présentes en personne à Wembley pour cette finale a
dépassé tous les records (87192 personnes
). Le Tour de France féminin a aussi
connu un franc succès. Ces événements nous rendent optimistes quant
à l’avenir du sport féminin. Celui-ci doit faire l’objet d’une plus
grande valorisation et d’investissements.
66. Le Conseil de l’Europe a un rôle important à jouer afin de
promouvoir l’accès de toutes et de tous au sport mais aussi de lutter
contre toute forme de discrimination dans le sport. La Charte européenne
du sport a été révisée en 2021 et je suis convaincue que sa mise
en œuvre dans les États membres mènera à plus d’égalité dans les
faits.
67. Le sport engage, motive et fait avancer. Il peut être un facteur
dans l’émancipation et l’évolution des mentalités. Il peut aussi
faire réfléchir et être un reflet de nos sociétés. Le traitement
des sportives reflète des stéréotypes de genre profondément ancrés
dans nos sociétés. Elles doivent faire face à des commentaires sur leur
vie privée, leurs tenues vestimentaires, leurs comportements alors
que les sportifs bénéficient d’une couverture médiatique beaucoup
plus axée sur leurs performances. On constate le même phénomène
vis-à-vis des femmes engagées dans la vie politique.
68. Une coopération entre le monde sportif et les représentant·e·s
politiques est essentielle afin de garantir que le sport soit véritablement
vecteur de changements. Je tiens à cet effet à saluer le rôle de
la commission de la culture, de la science, de l'éducation et des
médias de l’Assemblée qui s’est engagée depuis de nombreuses années
à coopérer avec les instances dirigeantes du football et qui accompagne
les avancées dans ce domaine.
69. Le monde du sport s’est progressivement ouvert aux femmes,
et j’espère que les efforts entrepris se poursuivront dans les années
à venir et mèneront à l’égalité des genres dans le sport, une véritable
valorisation du sport féminin et une fin de l’invisibilisation des
femmes dans ce domaine.