Doc. 11017

18 septembre 2006

L’équilibre institutionnel au Conseil de l'Europe

Rapport

Commission du Règlement et des Immunités

Rapporteur : M. Peter Schieder, Autriche, Groupe socialiste


Résumé

Le terme “équilibre institutionnel” signifie généralement la distribution des pouvoirs au sein d’une organisation supranationale ou internationale et les relations entre ses organes. Le Conseil de l’Europe a deux organes politiques de compétence générale, le Comité des Ministres et l’Assemblée parlementaire. Depuis la signature du Statut du Conseil de l'Europe, le Congrès des Pouvoirs Locaux et Régionaux du Conseil de l’Europe et la Cour européenne des Droits de l’Homme ont été créés au Conseil de l’Europe sans un amendement formel du Statut. En outre, une Conférence des Organisations internationales non gouvernementales (OING) du Conseil de l’Europe a été établie. Tous ces organes et institutions ont effectué des réformes majeures, pris des initiatives importantes pour renforcer leur statut ou ont obtenu des pouvoirs nouveaux.

Toutefois, cela n’est pas ou pas adéquatement reflété dans le Statut du Conseil de l’Europe et les Résolutions statutaires adoptées par le Comité des Ministres. En outre, certains aspects des relations entre le Comité des Ministres et les principales autres instances du Conseil de l’Europe ne sont plus adéquats et ne correspondent pas à la nécessaire démocratisation des organisations internationales ou aux normes internationales actuelles. C’est pourquoi des réformes institutionnelles majeures sont nécessaires au Conseil de l’Europe.

Le rapport soumet une série de propositions pour renforcer l’Assemblée, la Cour, le Congrès, la Conférence des OING et le Comité des Ministres lui-même en vue de réaliser un équilibre institutionnel plus approprié. L’idée principale est de négocier un accord entre le Comité des Ministres et l’Assemblée sur l’amélioration du système institutionnel du Conseil de l’Europe et d’associer la Cour et le Congrès à ces négociations.

A.       Projet de recommandation

1.       Le Statut du Conseil de l’Europe, signé le 5 mai 1949, a institué deux organes politiques statutaires ayant une compétence générale, le Comité des Ministres et l’Assemblée parlementaire. Ils sont assistés par le secrétariat (général) du Conseil de l'Europe. Aux termes de l’article premier du Statut, le but de l’Organisation est poursuivi au moyen de ces deux organes. Ceux-ci portent une responsabilité conjointe à l’égard de l’Organisation et leur interaction est indispensable au bon accomplissement de sa mission.

2.       Depuis la création du Conseil de l'Europe, les institutions suivantes ont vu le jour au sein de l’Organisation, sans que le Statut ait été formellement amendé :

2.1.        Le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l’Europe représente les collectivités territoriales dans l’Organisation. Le Congrès assure leur participation à la réalisation de l'idéal de l'union de l'Europe telle que définie à l'article 1 du Statut du Conseil de l'Europe, ainsi que leur représentation et leur engagement actif dans les travaux du Conseil de l'Europe. Le Comité des Ministres et l'Assemblée parlementaire consultent le Congrès sur les questions qui sont susceptibles d’avoir une incidence sur les compétences et les intérêts des collectivités locales et/ou régionales que le Congrès représente. Le Congrès qui se réunit depuis janvier 1957, sous la forme de la Conférence des pouvoirs locaux et régionaux de l'Europe, a été créé par une Résolution statutaire du Comité des Ministres ;

2.2.       La Cour européenne des Droits de l’homme, instaurée par la Convention européenne des Droits de l’Homme du Conseil de l’Europe de 1950 (CEDH), est opérationnelle depuis 1959. Elle entretient avec le Conseil de l'Europe une relation institutionnelle et juridique étroite, fondée sur des valeurs communes. De plus, la première condition d’adhésion à l’Organisation, établie par l’Assemblée parlementaire, est la signature et la ratification de la CEDH et de ses protocoles additionnels. La Cour constitue donc un rouage essentiel du système juridique du Conseil de l'Europe. Cependant, la CEDH n’est pas très explicite sur le statut de la Cour européenne des Droits de l’Homme en général et le statut des juges en particulier.

3.       Le rapport du Comité des Sages du Conseil de l’Europe, publié en 1998, constatait à juste titre que « le Conseil aujourd'hui possède visiblement une structure tripolaire correspondant à ces trois axes gouvernemental, parlementaire et judiciaire, structure qui devrait être reconnue en tant que telle et davantage développée ». Les Sages ont aussi noté que, dans sa sphère de compétences, le Congrès avait largement contribué au développement démocratique au niveau local et régional. Depuis l’adoption de ce rapport, le Comité des Ministres, après consultation de l’Assemblée, a institué par la Résolution (99) 50 le poste de Commissaire aux droits de l’Homme du Conseil de l'Europe qui exerce ses fonctions de manière indépendante et impartiale.

4.       La Conférence des organisations internationales non gouvernementales (OING) du Conseil de l'Europe a été créée en janvier 2005 par les 400 OING dotées du statut participatif auprès du Conseil de l'Europe. Elle s’appuie sur la longue expérience de concertation et de coopération entre le Conseil de l'Europe et les OING en tant que secteur organisé de la société civile qui a commencé en 1952 avec la création d’un statut consultatif.

5.       Plus récemment, la Recommandation 1693 (2005) de l’Assemblée sur le Troisième Sommet du Conseil de l’Europe soulignait la nécessité de réorganiser le système institutionnel du Conseil de l’Europe et d’en renforcer tous les principaux organes. Dans sa Recommandation 1756 (2006) sur la mise en oeuvre des décisions du 3e Sommet du Conseil de l'Europe, l’Assemblée demande au Secrétaire Général et au Comité des Ministres de poursuivre leurs efforts visant au renforcement du système institutionnel du Conseil de l'Europe. En outre, elle recommande instamment au Comité des Ministres de prendre un train de mesures pour renforcer l’Assemblée parlementaire, notamment dans les domaines normatif et budgétaire et de lui donner le droit d’initiative législative.

6.       Le 11 avril 2006, le Premier ministre du Luxembourg, M. Juncker, a présenté à l’Assemblée parlementaire son rapport, intitulé “Conseil de l’Europe - Union européenne : une même ambition pour le continent européen”. Ce rapport propose une vision politique globale pour le Conseil de l’Europe et ses relations avec l’Union européenne. De l’avis de M. Juncker, la nécessaire complémentarité entre les deux institutions passera, entre autres, par un rôle renforcé du Commissaire aux Droits de l’Homme, des instances parlementaires et du Congrès du Conseil de l’Europe. Cela aura des conséquences pour le système institutionnel du Conseil de l’Europe.

7.       Le principe de l’équilibre institutionnel, au niveau d’une organisation internationale, régit la répartition des compétences et des missions entre les différents organes et instances de cette organisation ainsi que leurs relations.

8.       Depuis 1945, la distinction entre ce que l’on considérait comme les affaires “intérieures” d’une part et les affaires “étrangères” d’autre part, s’est considérablement brouillée surtout en Europe à la suite de l’intégration européenne. Le droit “international” a profondément changé de nature et s’occupe de plus en plus de questions qui étaient auparavant du ressort du droit national. De nombreux traités internationaux, comme les conventions du Conseil de l'Europe, concernent des domaines qui étaient considérés comme relevant des affaires intérieures des Etats. Logiquement, cette évolution a débouché sur une demande croissante de démocratisation de la conduite de la politique et de l’activité législative au niveau européen et international, et de renforcement du contrôle démocratique des institutions européennes. Selon l’Assemblée, cela s’applique aussi mutatis mutandis au Conseil de l’Europe.

9.       En vertu du Statut de 1949, le pouvoir de décision au Conseil de l'Europe est essentiellement concentré entre les mains du Comité des Ministres (par exemple, adoption d’instruments juridiques (article 15 du Statut), compétence du seul Comité des Ministres pour agir au nom du Conseil de l'Europe (article 13)). A quelques exceptions près (assentiment obligatoire de l’Assemblée pour modifier un tiers des dispositions du Statut, fonctions électives, adoption par l'Assemblée de son Règlement), l’Assemblée avait été conçue en 1949 comme un organe principalement consultatif.

10.       Si des améliorations institutionnelles ont été apportées depuis 1949, elles n’ont pas été suffisantes et n’ont pas modifié substantiellement le système institutionnel du Conseil de l'Europe. Elles n’ont pas suivi le rythme des réalités politiques différentes de l’Organisation et de son environnement ni celui du développement de l’intégration européenne, notamment au sein de la CE/UE.

11.       Si l’on veut empêcher le Conseil de l'Europe de prendre du retard sur le plan institutionnel et, dans une certaine mesure, de se « fossiliser », des réformes institutionnelles ambitieuses sont nécessaires. L’équilibre institutionnel du Conseil de l'Europe doit être renforcé, notamment par un accord entre le Comité des Ministres et l’Assemblée et, le cas échéant, par une mise à jour du Statut du Conseil de l'Europe au moyen de résolutions statutaires.

I.        Concernant l’Assemblée parlementaire

12.       La place de l’Assemblée dans le Conseil de l’Europe a considérablement évolué au fil des années. Il est généralement admis que le rôle politique actif de l’Assemblée constitue un atout particulier pour le Conseil de l’Europe. L’Assemblée a pris une part importante dans le processus d’élargissement de l’Organisation, aujourd’hui presque achevé, en définissant les frontières de l’Europe, en actualisant les critères politiques d’adhésion et en négociant dans une large mesure les conditions d’adhésion. Grâce à ses débats, à son action sur le terrain, à ses missions d’observation des élections, à ses programmes de coopération parlementaire, l’Assemblée apporte une contribution majeure à la stabilisation et au renforcement de la démocratie dans les Etats membres.

13.       La mise en place par l’Assemblée, pour la première fois au Conseil de l’Europe, d’une procédure de suivi du respect des obligations et des engagements contractés par les Etats européens lors de leur adhésion, qui comporte une forte dimension politique, a été une mesure particulièrement importante pour l’Organisation.

14.       L’Assemblée exerce une influence politique considérable par le biais du renforcement de ses procédures de vérification des pouvoirs des délégations parlementaires nationales.

15.       L’Assemblée élit les personnalités politiques clés du Conseil de l'Europe, les juges de la Cour européenne des Droits de l'Homme et le Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l'Europe. Elle apporte en outre une précieuse contribution aux travaux de l’Organisation, en particulier dans les domaines des affaires juridiques et des droits de l’homme, et a été à l’origine des principaux instruments juridiques du Conseil de l'Europe. Elle confère ainsi une légitimité démocratique à l'Organisation. En outre, à cause du double mandat de ses membres, national et européen, elle est un partenaire naturel du Comité des Ministres pour les suites à donner aux décisions du Conseil de l'Europe dans les parlements nationaux.

16.       La réaction politique et médiatique à certains de ses rapports montre l’importance et l’impact des travaux de l’Assemblée sur l’image globale du Conseil de l'Europe.

17.       L’Assemblée estime et a répété que ses pouvoirs ne correspondent en aucun cas à son poids réel et à son potentiel de force motrice de l’Organisation. Il y a lieu de renforcer la dimension parlementaire du Conseil de l'Europe et d’accroître la participation de l’Assemblée à son processus de décision, ce qui contribuerait à instaurer plus de transparence, de légitimité démocratique et de responsabilité au sein de l’Organisation.

18.       En conséquence, l’Assemblée invite le Comité des Ministres :

18.1.        à trouver un accord avec elle sur :1

18.2.        à la lumière de cet accord, à mettre à jour et compléter une série de résolutions et de décisions du Comité des Ministres concernant le rôle et les pouvoirs de l’Assemblée sur la base de la liste figurant en annexe à la présente recommandation. 1

19.        En outre, l'Assemblée invite le Comité des Ministres :

19.1.       à examiner avec elle si et de quelle manière l’Assemblée pourrait être en mesure de saisir la Cour européenne des Droits de l'Homme d’un recours alléguant d’une grave violation d’une des parties contractantes des droits garantis par la Convention européenne des Droits de l’Homme (CEDH) et ses protocoles additionnels ;1

19.2.       à codifier par une résolution statutaire sa décision adoptée en février 1994 concernant la dénomination de l’Assemblée ;1

19.3.       à consulter l’Assemblée, notamment à propos de sa participation, avant d’adopter ou de modifier des textes instaurant de nouveaux organes ou institutions du Conseil de l'Europe ;1

19.4.       à donner à l’Assemblée des informations plus pointues sur les grandes options, la programmation des activités et les questions budgétaires;1

19.5.       à assurer un suivi efficace des avis statutaires de l’Assemblée et à l’informer régulièrement des mesures prises à partir de ces avis. I

II.       Concernant le Comité des Ministres

20.       L’Assemblée salue l'action entreprise jusqu’ici par le Comité des Ministres de mettre en œuvre le Chapitre V du Plan d’action du Sommet de Varsovie : un Conseil de l’Europe plus transparent et plus efficace. Elle se félicite de surcroît :

20.1.       du document résumant les réformes du Conseil de l’Europe 1999-2005 ;

20.2.       des efforts du Comité des Ministres pour impliquer de plus en plus les représentants de l’Assemblée dans les travaux des groupes de rapporteurs et autres organes subordonnés.

21.       L’Assemblée invite en particulier le Comité des Ministres :

21.1.       à utiliser plus largement le Conseil de l'Europe comme plateforme politique paneuropéenne de dialogue entre les Etats membres et non membres de l’Union européenne et à veiller à ce que l’expertise du Conseil de l'Europe soit prise en compte dans la Politique européenne de voisinage de l’Union européenne ;2

21.2.       à donner une plus grande responsabilité politique à son président, notamment dans les situations de crise ;2

21.3.       à renforcer le rôle du Conseil de l'Europe comme espace de réflexion pour relever les défis du XXIe siècle et, en particulier, en ce qui concerne la promotion de la démocratie. A cet égard, l’Assemblée rappelle sa proposition, figurant dans la Recommandation 1756 (2006), à savoir de faire du Forum pour l’avenir de la démocratie un véritable instrument de promotion des valeurs du Conseil de l'Europe auquel l’Assemblée serait pleinement associée ;2

21.4.       à accroître la transparence du Conseil de l'Europe tant à l’intérieur qu’à l’extérieur et à donner des informations à l’Assemblée sur les Etats membres qui font obstacle 2

21.5.        à examiner la possibilité d’une contribution d’autres ministères nationaux que ceux des affaires étrangères au budget du Conseil de l'Europe ;2

21.6.       à renforcer le rôle des Conférences ministérielles spécialisées ;2

21.7.       à réagir à la proposition du Premier ministre Juncker, à savoir que les ministres des Affaires étrangères, et particulièrement ceux des Etats membres de l’Union européenne, participent davantage aux travaux du Conseil de l’Europe ;2

21.8.       à examiner avec l’Assemblée les possibilités de renforcer la rôle du Comité mixte afin d’en faire un instrument de dialogue plus efficace entre les deux organes statutaires, notamment en créant des groupes de travail mixtes sur les grandes questions.I

III.       Concernant la Cour européenne des Droits de l'Homme (la Cour)

22.       La Cour a connu une évolution particulièrement spectaculaire. Le succès du mécanisme de recours individuel s’est traduit par une augmentation constante du nombre d’affaires portées devant la Cour. C’est aujourd’hui la juridiction internationale la plus importante de par sa taille et celle dont le rôle est le plus chargé. Sa jurisprudence influence jusqu’aux fondements des systèmes juridiques nationaux. Un nombre croissant d’arrêts de la Cour soulève des questions qui suscitent un grand intérêt juridique, politique et médiatique dans les Etats concernés. Par suite de l’élargissement du Conseil de l'Europe et de l’obligation faite aux nouveaux Etats membres de ratifier la Convention européenne des Droits de l'Homme, l’espace européen de protection des droits de l’homme et la compétence de la Cour se sont progressivement étendus, pour le plus grand bien de la sécurité humaine et de la stabilité démocratique sur le continent.

23.       Le Comité des Ministres a déclaré à maintes reprises que la CEDH devait rester la principale référence pour la protection des droits de l’homme de 800 millions d’Européens. Le Troisième Sommet du Conseil de l’Europe, tenu à Varsovie en mai 2005, a mis en place un Groupe de Sages chargé d’élaborer une stratégie d’ensemble pour assurer durablement l'efficacité du mécanisme de contrôle de la CEDH. Un rapport intérimaire a été présenté au Comité des Ministres le 19 mai 2006. Le Groupe n’a pas encore examiné les questions institutionnelles. Les Ministres ont demandé au groupe de poursuivre ses efforts pour leur présenter un rapport final avant la fin de 2006.

24.       Or, ce rôle capital de la Cour et le fait qu’elle constitue l’un des trois piliers de la structure du Conseil de l'Europe n’apparaissent pas suffisamment dans le système institutionnel et la pratique de l’Organisation. En particulier, l’Assemblée souligne qu’il importe de concilier les besoins opérationnels et institutionnels de la Cour unique permanente et consolidée et son intégration dans le Conseil de l'Europe. Elle estime qu’une clarification du statut de la Cour, de ses relations avec les autorités politiques et exécutives du Conseil de l'Europe et de ses prérogatives est maintenant nécessaire afin de consacrer la nouvelle réalité institutionnelle et de renforcer le rôle primordial joué par la Cour dans le cadre institutionnel du Conseil de l'Europe.

25.       L ’Assemblée invite donc le Comité des Ministres :

25.1.       à demander d’urgence au Groupe de Sages créé par le 3e Sommet d'examiner également les questions suivantes :2

25.2.       à transmettre le rapport final du Groupe de Sages à l’Assemblée et à la consulter avant de prendre des décisions définitives sur la réforme ;2

25.3.       en fonction des conclusions du Groupe de Sages, à inclure une disposition appropriée relative au statut institutionnel de la Cour européenne des Droits de l’homme soit dans un protocole additionnel au Statut du Conseil de l'Europe soit dans une résolution statutaire.

IV.       Concernant le Congrès des Pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l'Europe

26.       Au cours des dix dernières années, l'Europe a vécu un changement radical de l'équilibre national et local qui s'est traduit, dans le Congrès et dans l'intégration européenne en général, par un rôle accru des collectivités locales et régionales dans les Etats membres du Conseil de l'Europe. Le Congrès est désormais l'organe le plus représentatif des 200.000 collectivités locales et régionales du continent. En outre, il est devenu un interlocuteur de premier plan dans le dialogue avec les Etats membres sur les questions de démocratie locale et régionale.

27.       Depuis 2000, date à laquelle une nouvelle résolution statutaire sur le Congrès a été adoptée par le Comité des Ministres, le rôle politique du Congrès ne cesse de se développer. La cause en est surtout le processus de suivi de l'état de développement de la démocratie locale et régionale dans les Etats membres du Conseil de l'Europe.

28.       Le suivi et le dialogue politique permanent instaurés par le Congrès avec les autorités des Etats membres sur les questions de démocratie locale et régionale ont contribué à faire avancer les principes consacrés dans la Charte européenne de l'autonomie locale et à définir une vision de ce que doivent être des collectivités locales démocratiques et comment elles doivent fonctionner dans la démocratie.

29.       Le Congrès joue un rôle important dans l’observation des élections aux niveaux local et régional. En s'inspirant des conclusions des missions d'observation des élections, le Congrès adresse des recommandations aux autorités des pays concernés puis prend des mesures visant à évaluer l'état de leur mise en œuvre.

30.       Pour associer les régions au processus d'intégration européenne, le Congrès a favorisé la création d'eurorégions d'un type nouveau, incluant les niveaux national, régional et local de gouvernement des Etats membres de l'Union européenne et non membres de l'Union.

31.       Le Congrès, avec les autorités russes, est à l'origine de l'idée de créer à Saint-Petersbourg un centre du Conseil de l’Europe pour la coopération interrégionale et transfrontalière. La création de ce centre favoriserait le développement de l'autonomie locale et régionale et constituerait une possibilité supplémentaire de promouvoir et de renforcer la coopération entre les régions d'Europe. Le Congrès a également décidé de relancer l’étude d’un nouveau projet d’instrument juridique sur la régionalisation en Europe.

32.       Tout ceci nous amène à la conclusion que la place du Congrès dans le système institutionnel du Conseil de l'Europe n'est plus la même qu'il y a douze ans lorsqu'il a été créé par la Résolution statutaire (1994) 3 du Comité des Ministres, mise à jour en 2000 (Résolution statutaire (2000) 1). Le Congrès a dépassé progressivement la nature consultative qui avait été originellement conçue pour lui dans les textes statutaires. Il joue maintenant un rôle véritablement représentatif au sein de l'Organisation. C'est pourquoi il a proposé que la Résolution statutaire (2000) 1 et la charte du Congrès soient révisées pour les rendre plus conformes au rôle actuel du Congrès au sein du Conseil de l'Europe.

33.       L'Assemblée invite le Comité des Ministres :

33.1.       à mettre en œuvre la Recommandation 162 (2005) sur la révision de la Résolution statutaire (2000) 1 sur le Congrès et de sa charte et de faire du Congrès une institution entièrement composée de membres élus ;3

33.2.       à tirer le meilleur parti possible de la capacité du Congrès à promouvoir la décentralisation des pouvoirs et le renforcement de l'autonomie locale en Europe ;3

33.3.       à demander plus régulièrement l'avis du Congrès avant de prendre des décisions relevant de sa compétence.V

V.       Concernant la conférence des OING du Conseil de l'Europe

34.       Les organisations internationales non gouvernementales (OING) sont étroitement associées au Conseil de l'Europe depuis 1952, époque à laquelle a été créé un statut consultatif auprès de l’Organisation. En vue de promouvoir l'interaction avec le Conseil de l'Europe, les OING ont mis en place leurs propres structures, à savoir un comité de liaison et des groupes thématiques.

35.       Conformément à la Résolution (2003) 8 du Comité des Ministres, le statut des OING au sein du Conseil de l'Europe a été renforcé, leur statut étant passé de consultatif à participatif.

36.       Les 400 OING dotées d'un statut participatif ont formé la conférence des OING du Conseil de l'Europe en janvier 2005. Cette conférence est le porte-parole de la société civile européenne au Conseil de l'Europe. Elle coopère avec les autres organes de l'Organisation et ses membres, diffuse des informations sur les buts et activités du Conseil auprès de ses mandants et soutient la promotion et l'application des instruments juridiques de l'Organisation.

37.       L'Assemblée invite ses commissions à resserrer le dialogue et la coopération avec la conférence des OING du Conseil de l'Europe et ses groupes compétents.

38.       L'Assemblée invite le Comité des Ministres à demander plus régulièrement l'avis de la conférence des OING avant de prendre des décisions sur les sujets relevant de sa compétence.

VI.       Concernant les actions de suivi

39.       Enfin, l'Assemblée invite le Comité des Ministres à examiner avec elle les propositions précitées au sein du Comité mixte et dans un groupe de travail mixte. La Cour européenne des Droits de l'Homme et le Congrès devraient être étroitement associés à ce travail.

40.       Elle recommande aussi de créer un groupe de sages ayant pour mandat de prodiguer des conseils sur les questions institutionnelles et de servir de médiateur entre les organes et les institutions du Conseil de l'Europe.

40.1.       Ce groupe devrait être composé de sept membres:

40.2.       les membres devraient être d’imminentes personnalités, mais qui ne seraient cependant plus des membres en exercice du Comité des Ministres, de l’Assemblée, de la Cour ou du Congrès des Pouvoirs Locaux et Régionaux et ne feraient pas partie du personnel du Conseil de l’Europe.

ANNEXE

PROPOSITIONS POUR METTRE A JOUR OU COMPLETER LES RESOLUTIONS ET LES DECISIONS DU COMITE DES MINISTRES CONCERNANT LE ROLE ET LES COMPETENCES DE L’ASSEMBLEE

1.       La Résolution statutaire (51) 30 A sur l’admission de nouveaux membres, en disposant que :

1.1.       l’Assemblée est également consultée avant la suspension d’un membre de son droit de représentation en application des articles 8 et 9 du Statut ;

1.2.       l’Assemblée est consultée sur le nombre de sièges à attribuer à un nouveau membre et sa contribution au budget du Conseil de l'Europe ;

1.3.       conformément à la pratique en vigueur, le Comité des Ministres attend l’avis conforme de l’Assemblée avant de se prononcer sur l’admission d’un nouvel Etat membre ou de prendre des mesures en application des articles 8 et 9 du Statut ;

2.       la Résolution (93) 26 relative au statut d’observateur, en prévoyant que l’Assemblée est également consultée avant toute suspension de ce statut ;

3.       la Résolution (52) 26 sur la consultation de l’Assemblée, en précisant en outre que:

3.1.       l’Assemblée est consultée sur tous les projets de traités du Conseil de l'Europe, étant entendu qu’un nombre réduit de traités, de nature purement technique, pourraient ne pas nécessiter une telle consultation (décision du Comité des Ministres de 1999, Doc. CM (99) 64 et 8388 de l’Assemblée) ;

3.2.       l’Assemblée, à moins qu’il n’en soit convenu autrement avec le Comité des Ministres, dispose d’au moins trois mois pour préparer et adopter son avis statutaire sur un projet de traité ;

3.3.       le Comité des Ministres commencera à consulter l’Assemblée avant la dernière réunion du comité d’experts intergouvernemental pendant laquelle il se mettra d’accord sur le projet de traité;

3.4.       les modalités de la consultation sont fixées par accord entre le Comité des Ministres et l’Assemblée, compte tenu des indications données dans le document 8388 de l’Assemblée ;

4.       la Résolution (53) 38 sur le régime budgétaire de l’Assemblée, compte tenu de la Recommandation 1728 (2005) sur les pouvoirs de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe en matière budgétaire1, en précisant en outre :

4.1.       concernant les dépenses de fonctionnement de l’Assemblée, celle-ci fixe le montant de ses dépenses, dont l’augmentation annuelle est déterminée par accord entre le Comité des Ministres et l’Assemblée ;

4.2.       s’agissant des budgets du Conseil de l'Europe, le Comité des Ministres consulte l’Assemblée avant de fixer le montant du budget global du Conseil de l'Europe pour l’exercice suivant. Cette consultation a lieu le plus tôt possible pour permettre à l’Assemblée d’en tenir compte dans son avis sur le budget ;

4.3.       concernant les contributions des Etats membres, l’Assemblée est consultée par une procédure d’urgence ad hoc si et quand un Etat membre n’a pas versé sa contribution au budget pendant une période supérieure à six mois.

5.       la Résolution (53) 38 doit aussi préciser que l’Assemblée reçoit les comptes du dernier exercice clos et apuré, tout rapport établi par l’Auditeur externe du Conseil de l'Europe et les rapports du Comité intergouvernemental du budget du Conseil de l'Europe, ce qui lui permet, le cas échéant, d’exprimer ses vues sur les dépenses du Conseil de l'Europe ;

6.       la Résolution statutaire (51) 30 F sur les rapports avec les organisations internationales (OIG), intergouvernementales et non gouvernementales (OING), en prévoyant:

6.1.       une consultation appropriée de l’Assemblée concernant les OIGs, l’Assemblée étant déjà consultée sur l’attribution et le retrait du statut participatif des OINGs ;

6.2.       une représentation de l’Assemblée à toutes les réunions de coordination à haut niveau entre le Conseil de l'Europe et l’Union européenne, l’OSCE et l’ONU.

7.       la Résolution (93) 27 sur les majorités requises pour des décisions du Comité des Ministres, en y intégrant la décision prise par le Comité des Ministres en novembre 1994 d’adopter les réponses aux recommandations de l’Assemblée à la majorité des deux tiers des voix exprimées et à la majorité des représentants ayant le droit de siéger au Comité, étant entendu que tout est mis en œuvre pour parvenir à un consensus dans un délai raisonnable.

B.       Exposé des motifs par M. Peter Schieder, rapporteur

TABLE DES MATIERES

I.       INTRODUCTION

II.       LA NOTION DE L’EQUILIBRE INSTITUTIONNEL

i.       Généralités

ii.        Le principe de l’équilibre institutionnel développé par la Cour de justice de la CE/UE

iii.        Le caractère dynamique de l’équilibre institutionnel et ses liens avec les débats sur la démocratisation des organisations internationales

III.       LE CONSEIL DE L’EUROPE ET LE PRINCIPE DE L’EQUILIBRE INSTITUTIONNEL

i.       Généralités

ii.       Les principaux organes et institutions du Conseil de l’Europe et la répartition actuelle des pouvoirs

iii.       L’évolution de la structure du Conseil de l’Europe depuis 1949, y compris les amendements au Statut de 1951, 1953, 1970 et 1978

iv.       L’adoption de résolutions statutaires par le Comité des Ministres depuis 1993

v.       Les travaux du Comité des Sages du Conseil de l’Europe

vi.       Développements depuis 1999 et conséquences

IV.       LE STATUT ACTUEL DE L’ASSEMBLEE PARLEMENTAIRE AU SEIN DU CONSEIL DE L’EUROPE

i.       Remarques générales

ii.       L’évolution du rôle de l’Assemblée et de ses possibilités d’action

V.       L’ASSEMBLEE ET LA LÉGITIMITÉ DEMOCRATIQUE

VI.       LA NÉCESSITÉ DE POURSUIVRE SUR NOTRE LANCEE – QUE PEUT-ON FAIRE POUR AMELIORER LA REPARTITION DU « POUVOIR » ENTRE LE COMITE DES MINISTRES ET L’ASSEMBLEE

i.       Les questions politiques du Conseil de l’Europe et la prise de décision

ii.       Le budget du Conseil de l’Europe et les crédits budgétaires de l’Assemblée

iii.       Le Secrétariat de l’Assemblée

VII.       LE COMITE DES MINISTRES

i.       La composition, le fonctionnement et lesecrétariat du Comité des Ministres

ii.       Le rôle du Comité des Ministres

iii.       Observations du rapporteur

iv.       Propositions

VIII.       LES RELATIONS INSTITUTIONNELLES ENTRE LA COUR EUROPÉENNE DES DROITS DE L'HOMME ET LE CONSEIL DE L’EUROPE

i.       Généralités

ii.       Le statut de la Cour

iii.       Les ressources budgétaires de la Cour

iv.       Le personnel de la Cour

v.       Le statut des juges et propositions

vi.       L’exécution des jugements de la Cour

IX       LE CONGRES DE POUVOIRS LOCAUX ET REGIONAUX DU CONSEIL DE L’EUROPE

i.       Evolution

ii.       Propositions

X.       LA CONFERENCE DES OING DU CONSEIL DE L’EUROPE

i.       Evolution

ii.       Propositions

XI.       CONCLUSIONS

I.        INTRODUCTION

1. Le présent rapport a pour but d’analyser si le principe d'équilibre institutionnel est reconnu comme il convient au sein du système institutionnel du Conseil de l’Europe, en particulier concernant l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, la Cour européenne des Droits de l’Homme et le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l’Europe.

2.       La Commission du règlement et des immunités a également convenu d’examiner dans ce contexte le rôle du Comité des Ministres dans le cadre institutionnel de l’Organisation. Sur cette base, le Rapporteur présentera des propositions quant à la façon d’adapter le système institutionnel du Conseil de l’Europe. A des fins de comparaison, il sera fait référence aux situations propres respectivement à l’OSCE, à l’Union européenne et à d'autres organisations européennes si nécessaire.

3.        La Commission du règlement et des immunités a convenu de prendre les conseils d’un expert-consultant, le Professeur Gramlich de l’université de Chemnitz (Allemagne) qui a présenté son étude (AS/Pro (2005) 7) lors d’une réunion de la Commission en mars 2005. Il a largement été tenu compte de cette étude dans le présent rapport. Le 25 novembre 2005, la Commission Permanente a renvoyé pour rapport à la commission du Réglement et des immunités le rapport de M. Cekuolis sur la transparence des activités du Comité des Ministres. (Doc.10736) afin qu’il puisse étre pris en compte dans les travaux sur l’équilibre instututionnel. Par ailleurs, la commission a organisé des auditions avec des représentantrs des organres et principales instances du Conseil de l‘Europe.

4.        Le rapporteur remercie son prédécesseur, Serhiy Holovaty, qui est devenu ministre de la Justice de l’Ukraine, de ses efforts visant à améliorer l’équilibre institutionnel au Conseil de l’Europe2.

5.       Récemment, la question de l’équilibre institutionnel au Conseil de l’Europe a reçu de nouvelles impulsions politiques. D’abord, le 11 avril 2006, le Premier Ministre du Luxembourg, M. Juncker, a présenté à l’Assemblée Parlementaire son rapport sur le thème : « Conseil de l’Europe – Union Européenne : Une même ambition pour le continent européen ». Ce rapport présente une vision politique globale pour le Conseil de l’Europe et pour ses relations avec l’Union Européenne. M. Juncker a dit entre autres que pour réaliser la complémentarité nécessaire entre les deux institutions, les rôles du Commissaire aux Droits de l’Homme, des instances parlementaires et du Congrès des Pouvoirs Locaux et Régionaux du Conseil de l’Europe, devraient être renforcés. Ceci impliquera en principe des modifications du système institutionnel actuel de l’Organisation. De surcroît, l’actuel processus de réformes au Conseil de l’Europe à la suite du Sommet de Varsovie, et qui vise à permettre à l’Organisation de remplir sa mission de manière efficace et transparente, est également susceptible de se traduire par quelques modifications de l’interaction institutionnelle.

II.       LA NOTION DE L’EQUILIBRE INSTITUTIONNEL

i.       Généralités

6.       Au niveau international ou supranational, la question de l’équilibre institutionnel a dans un premier temps été soulevée concernant l’Union européenne.3 Il vise en premier lieu à distribuer des pouvoirs (et de manière générale du « travail ») entre les organes/institution de la CE/UE et les relations entre ces instances. Dans la doctrine de l’Union européenne, on considère qu’il s’agit de la version « codée » pour parler du principe de séparation des pouvoirs, des doutes ayant été exprimés au sujet de la pertinence de ce principe pour le système de l’Union.

ii.       Le principe de l’équilibre institutionnel tel que développé par la Cour de Justice

7.       Quand en 1951/52 la première Communauté Européenne, celle du Charbon et de l’Acier (CECA), a vu le jour, la Haute Autorité (Commission) disposait de l’essentiel du pouvoir de décision. Néanmoins c’est déjà dans le cadre du Traité instituant la CECA que le principe de l’équilibre institutionnel a été développé dans la doctrine et notamment par la Cour de Justice (cf. les arrêts des 12 juillet 1957 (Rec. p.81), et 13 juin 1958 (Rec. p.11)).

8.       C’est notamment entre 1986 et 1997 que la Cour de Justice des Communautés Européennes (CJCE) a dans cinq arrêts et une ordonnance complété sa jurisprudence sur la portée du principe de l'équilibre institutionnel en droit communautaire. Une description détaillée de cette jurisprudence figure dans l’étude du Professeur Gramlich (AS/Pro (2005)7 ; AS/Pro (2006)11 rev).

9.       Dans son jugement de 1990 dans l’Affaire Tchernobyl (Rec. 1990, pages 2041 et suivantes), la CJCE a rappelé que le concept d’équilibre institutionnel se fonde sur « l’ordre fonctionnel » ou la répartition des fonctions entre les organes de l’Union européenne établis par les traités de l’Union et constitue un système de contre-pouvoir. La CJCE a conclu que :

-       en établissant un système pour répartir les pouvoirs entre les différentes institutions de la Communauté qui assigne à chacune d’entre elles son propre rôle dans la structure institutionnelle de la Communauté et pour la réalisation des missions confiées à cette dernière, les Traités ont créé un équilibre institutionnel ;

-       les prérogatives du Parlement européen sont un des éléments de l'équilibre institutionnel ;

-       le respect de cet équilibre signifie que chacune des institutions doit exercer ses pouvoirs en tenant dûment compte des pouvoirs des autres institutions.

-       il s’ensuit aussi qu’il devrait être possible de sanctionner toute violation éventuelle de cette règle.

iii.       Le caractère dynamique de l’équilibre institutionnel et ses liens avec les débats sur la

démocratisation des Organisations Internationales

10.       Le principe de l’équilibre institutionnel, non inscrit dans les traités de l’UE/CE, a été dégagé par la CJCE de l’ensemble des dispositions institutionnelles des traités. Il ne s’agit pas là seulement de règles à respecter au niveau de l‘Union européenne, mais d’un principe susceptible d’évoluer sous l’emprise de divers facteurs. Par ailleurs il est toujours possible de modifier l´équilibre institutionnel par :

-       une décision unilatérale d’une institution (par exemple renonciation à l’exercice d’une prérogative au bénéfice d’une autre institution),

-       l'entente institutionnelle (notamment la conclusion d’un accord interinstitutionnel),

-       la modification des Traités.

11.       Le principe de l’équilibre institutionel a ainsi éte utilisé notamment vis-à-vis d’une CE/UE qui se développait rapidement afin de justifier le renforcement de sa dimension parlementaire, à savoir du Parlement Européen et de réaliser une démocratisation plus pousée.

12.       Si l’équilibre institutionnel est initialement un principe qui s’applique surtout au niveau de la CE/UE, il s’est graduellement imposé aussi aux Organisations intergouvernementales, notamment en Europe. Des informations détaillées sur cette question se trouvent dans l'étude susmentionnée (voir le document AS/Pro (2005) 7) du Professeur Gramlich. Un résumé des conclusions de l’étude est annexé au document AS/Pro (2006)11 rev. Cette étude contient également un chapitre consacré aux moyens d'améliorer l'équilibre institutionnel au sein des organisations intergouvernementales. Le chapitre en question traite en particulier :

-       des aspects juridiques de la légitimité,

-       des assemblées parlementaires et de la légitimité démocratique,

-       des imperfections de la légitimité parlementaire «transnationale»,

-       du droit et de la politique de refonte de l'équilibre institutionnel.

13.       Les Organisations Internationales sont, sous l’influence des travaux et recommandations des Nations Unies mais aussi de la globalisation, notamment appelées à s’ouvrir et à se démocratiser davantage. Une forte pression est exercée à cet égard par les adversaires de la mondialisation et la « société civile internationale » sur les Organisations internationales économiques, commerciales et bancaires.

14.       Il convient également de noter qu’un groupe international d’experts de haut niveau (Groupe de réflexion de Varsovie) a élaboré en 2005 un rapport sur la complémentarité des institutions de sécurité européennes (OTAN, UE, OSCE et Conseil de l’Europe). Ce rapport a souligné qu’il était nécessaire pour ces Organisations de retrouver une crédibilité aux yeux des États et du public par l’instauration de mécanismes plus solides de responsabilité et de transparence.

15.       Déjà la déclaration universelle sur la démocratie adoptée par l’UIP (Union Interparlementaire) en 19974 soulignait déjà que la démocratie doit aussi être reconnue comme un principe international applicable aux organisations internationales et aux Etats dans leurs relations internationales (« internationalisation de la démocratie », « réparation d’un déséquilibre des pouvoirs »). L’agenda pour la démocratisation, présentée en 1996 par M. Boutros-Ghali, alors Secrétaire Général des Nations Unies, inclut les passages suivants5:

-       les modalités de la démocratisation diffèrent évidemment de façon sensible, selon que l'optique est nationale ou internationale. Sur le plan international oeuvrent des organisations et institutions, se prennent des décisions et s'élabore progressivement un droit sui generis, mais ne se trouvent pas de structures équivalentes à celles d'un gouvernement national. La société internationale se compose à la fois d'États et de particuliers. Il reste que la notion de démocratisation, entendue comme processus propre à créer une société plus ouverte, plus participative et moins autoritaire, vaut sur le plan national comme sur le plan international.

-       il fut un temps où les décisions touchant des questions d'intérêt mondial ne pouvaient avoir d'effet que limité sur les affaires intérieures des États et sur la vie quotidienne du citoyen. Les très lourdes conséquences qu'elles ont de nos jours sur le plan national estompent les distinctions entre politique internationale et politique interne. Ainsi, des décisions prises sans égards pour la représentativité sur des sujets d'intérêt mondial peuvent compromettre la démocratisation à l'intérieur d'un État et l'attachement de sa population à la démocratie. La démocratisation risque donc de ne pas s'implanter à l'intérieur des États si elle ne s'établit pas aussi sur le plan international. 

16.       Le rapport sur le développement humain (2002) du programme de développement des Nations Unies traite aussi de la démocratisation des Organisations internationales économiques. Il propose entre autres une responsabilité accrue des ces Organisations vis-à-vis des citoyens, par exemple en créant des tribunaux, des ombudsman ou des organes de supervision.

17.       Dans ses Résolutions 1289 (2002) sur le contrôle parlementaire des institutions internationales et 1353 (2003) sur l’avenir de la démocratie : renforcer des institutions démocratiques, l’Assemblée a souligné que, dans une coopération multilatérale entre Etats, la dimension interparlementaire est un préalable essentiel pour rapprocher la prise de décision internationale du citoyen et pour assurer à la démocratie une large assise, gage de sa légitimité. L’Assemblée a aussi toujours appuyé la création d’une enceinte parlementaire pour les Nations Unies. Dans un rapport de 2002 (Doc. 9478, par. 93 à 104), l’Assemblée propose de renforcer la légitimité et la responsabilité (« accountability ») de la Banque Mondiale et du Fonds Monétaire International (FMI).

III.       LE CONSEIL DE L’EUROPE ET LE PRINCIPE DE L’EQUILIBRE INSTITUTIONNEL

i.       Généralités

18.       La création du Conseil de l’Europe avait été demandée par une large Assemblée des élites (ouest-)européennes, réunie à La Haye en mai 1948. Par ailleurs, le préambule du Statut du Conseil de l’Europe se réfère à deux endroits aux peuples européens : d’une part au patrimoine commun des peuples des dix Etats fondateurs de l’Organisaion et d’autre part aux aspirations européennes de leurs peuples. Par la création de l’Assemblée parlementaire comme organe statutaire de l’Organisation, les parlements nationaux et donc les représentants des peuples européens ont été associés au projet européen. La volonté des Pères fondateurs du Conseil de l’Europe de faire de lui une Organisation proche des citoyens européens était donc évidente.

19.       En revanche, ni l’équilibre institutionnel, ni la légitimité démocratique ne sont inscrits dans le Statut ou dans les autres textes fondamentaux sur lesquels repose le système juridique du Conseil de l‘Europe. Cela n’est pas étonnnant car dans les années 50, l’on s’accordait en général à estimer que la légitimité gouvernementale/diplomatique et le contròle plutôt sommaire exercé par les parlements nationaux sur la politique étrangère de leurs gouvernements était suffisante pour l’action des Etats membres au sein des Organisations internationales. Dans le cas d’organisations integouvernementales telles que le Conseil de l’Europe, l’existence d’un organe parlementaire composé de parlementaires nationaux élus, ne faisait que renforcer la légitimité.

20.       Le Comité des Ministres du Conseil de l’Europe ou leurs organes subordonnés a à l’occasion recouru au principe de l’équilibre institutionnel quand il avait à examiner des réponses aux recommandations de l’Assemblée qui, de leur point de vue, contenaient des propositions de grande portée6. Il convient aussi de noter qu’un rapport rédigé par un groupe de travail mixte du Comité des Ministres et de l’Assemblée (Doc.AS/CM-Mix/Groupe de travail (2001)1), approuvé par le Comité des Ministres en janvier 2002, développe le concept de la responsabilité partagée du Comité des Ministres et de l’Assemblé envers le Conseil de lEurope.

ii.        Les principaux organes et institutions du Conseil de l’Europe et la répartition actuelle des pouvoirs au Conseil de l’Europe

a       Principaux organes et institutions

21.       En vertu de l’Article 10 du Statut du Conseil de l’Europe, le Comité des Ministres et l’Assemblée (appelée alors « consultative ») sont les organes statutaires et politiques du Conseil de l’Europe, ayant une compétence générale. Ils sont assistés par le secrétariat général du Conseil de l’Europe. Le Conseil de l'Europe a été la première Organisation internationale à intégrer une Assemblée en tant qu’organe statutaire, ce qui a conféré au Conseil un caractère quelque peu expérimental.

22.       Depuis la création du Conseil de l’Europe, les institutions suivantes ont été créées en son sein, sans amendement officiel du Statut, sur la base d’une convention ou d’une résolution (statutaire):

i.       le Congrès des Pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l’Europe qui représente ces pouvoirs au sein du Conseil de l’Europe ; il existe sur une base ad hoc depuis 1957 et dispose d’une institution permanente (Conférence permanente) depuis 1961 ; il a été créé par la Résolution statutaire (94)3 du Comité des Ministres, modifiée en 2000 par la Résolution statutaire (2000) 1 du Comité des Ministres ;

ii.       la Cour européenne des droits de l’homme, instituée par la Convention européenne des droits de l’homme et opérationnelle depuis 1959. Elle garantit sur une base permanente le respect des engagements souscrits par les hautes Parties contractantes de la Convention et de ses Protocoles. La Cour constitue l’un des trois piliers de la structure tripolaire correspondant aux trois axes gouvernemental, parlementaire et judiciaire du Conseil de l’Europe (voir rapport du Comité des Sages du Conseil de l’Europe de 1998).

23.       En 1999, le Comité des Ministres a créé le poste de Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe, qui exerce ses fonctions de manière indépendante et impartiale. La Conférence des Organisations internationales non gouvernementales (OING) du Conseil de l’Europe a été créée en janvier 2005 par près de 400 OING dotées du statut participatif auprès du Conseil de l’Europe. La consultation et la coopération entre le Conseil de l’Europe et les OING en tant que composante structurée de la société civile a débuté en 1952 avec la création du statut consultatif. Plusieurs Résolutions du Comité des Ministres traitent des OING et du statut consultatif/participatif (par exemple les Résolutions (51)30 F, (72)35, (93)38, (2003)8, (2003)9). A cet égard, il est intéressant de noter que la Résolution (51) 30 F, premier texte institutionnel du Conseil de l’Europe sur les relations avec les OING, n’a jamais été actualisée.

24.       Sur la base de la Convention No.126 du Conseil de l’Europe a été créé le Comité européen pour la prévention de la torture et, à la suite du premier Sommet du Conseil de l’Europe à Vienne, la Commisssion européenne contre le racisme et l’intolérance (ECRI) a été instituée. En outre, des organes spéciaux du Conseil de l’Europe (tels que la Commission de Venise, la Banque de développement, le Centre Nord-Sud) ont éte créés dans le cadre d’accords partiels. L’Assemblée entretient des relations de travail étroites avec la Commission de Venise et le Centre Nord-Sud et a conclu des accords de coopération avec ces organes. Elle apprécie les excellents conseils prodigués par la Commission de Venise en matière juridique et de droit constitutionnel.

b.       Observations générales sur la répartition des pouvoirs au Conseil de l’Europe

25.       Les caractéristiques principales de la répartition des pouvoirs au sein du Conseil de l’Europe conformément à son Statut sont les suivantes :

-        le Comité des Ministres est l'organe compétent pour agir au nom du Conseil de l'Europe conformément aux Articles 15 et 16 (Article 13 du Statut du Conseil de l’Europe) ;

-        il adopte notamment les instruments juridiques de l’organisation, conventions, accords (Article 15a du Statut) et les recommandations aux États membres (Article 15b du Statut). Néanmoins, même prises à l’unanimité, les décisions du Comité des Ministres ne sont pas contraignantes en tant que telles pour les États membres ;

-        l’Assemblée et le Congrès (qui n’est pas mentionné dans le Statut) ont le droit, dans des proportions variables, de s’auto-administrer, d’adopter leur règlement, de procéder à des élections, et d’établir des relations extérieures ;

-        le Statut, les résolutions statutaires et d’autres décisions du Comité des Ministres confèrent à l’Assemblée des pouvoirs additionnels de co-décision et, notamment, le droit d’être consultée sur les questions importantes.

26.       La Cour européenne des Droits de l’Homme n’est pas mentionnée dans le Statut qui n’a jamais été actualisé en ce qui concerne les organes et les institutions du Conseil de l’Europe. En vertu de la Convention européenne des droits de l’homme, la Cour dispose notamment du droit d’établir ses procédures d’élection (Article 26 de la Convention), de s’auto-administrer (jouissant d’une certaine « indépendance opérationnelle ») et d’adopter son propre règlement. L’Article 25 de la CEDH stipule que la Cour dispose d'un Greffe dont les tâches et l'organisation sont fixées par le règlement de la Cour.

27.       Alors que le Comité des Ministres a des possibilités de saisir la Cour europénne des droits de l’homme de certaines questions (cf. les articles 47 à 49 de la CEDH et l’article 46 tel qu’amendé par le Protocole n° 14 à la CEDH après son entrée en vigueur), la Cour n’a selon la CEDH pas de prérogatives vis-à-vis du Comité des Ministres. Depuis quelques années il existe un comité de liaison entre le Comité des Ministres et la Cour. Il est intéressant de relever que selon l’article 54 de la CEDH « Aucune disposition de la présente Convention ne porte atteinte aux pouvoirs conférés au Comité des Ministres par le Statut du Conseil de l’Europe ».

28.       Depuis les débuts du Conseil de l’Europe, l’Assemblée et le Comité des Ministres ont recherché des procédures et d’autres moyens permettant d’améliorer les relations et de faciliter la communication entre eux. Si des progrès considérables ont été réalisés au fil des ans, il est généralement convenu que les outils procéduraux ne suffiront jamais pour surmonter les inévitables difficultés de fonctionnement entre un organe parlementaire et un organe intergouvernemental, par exemple en ce qui concerne le dialogue politique au sein du Conseil de l’Europe ou le droit d’initiative (Art.15 (a) du Statut) partagé par le Comité des Ministres et l’Assemblée (pour de plus amples détails, voir Guy de Vel, le Comité des Ministres du Conseil de l'Europe, 1995, p.99).

29.       Le Comité des Ministres a affirmé à maintes occasions que l’Assemblée était son principal partenaire institutionnel, que l’Assemblée et le Comité des Ministres portaient une responsabilité partagée envers le Conseil de l’Europe, que le Comité des Ministres comptait sur l’action de promotion et d’initiative de l’Assemblée et sur une coopération étroite et fructueuse avec elle quant au programme de travail du Conseil de l’Europe. Plus récemment, le Comité des Ministres a déclaré qu’il comptait sur l’Assemblée pour favoriser l’exécution de (certains) arrêts de la Cour européenne des Droits de l’Homme. (voir pour plus de détails, doc.AS/Jur (2006)18).

iii.       L’évolution de la structure du Conseil de l’Europe depuis 1949, y compris les amendements au Statut de 1951, 1953, 1970 et 1978

30.       Aux débuts du Conseil de l’Europe, l’action gouvernementale menée au sein de l’Organisation n’avait que des conséquences directes limitées pour les Etats membres. Il n’y avait pas de suivi des engagements et obligations des Etats, aucune sanction n’était prise à l’encontre d’Etats membres défaillants à cet égard. En outre, les demandes d’adhésion au Conseil de l’Europe ne faisaient pas l’objet de débats publics de l’Assemblée plénière. Il a fallu attendre 1965 pour cela. La jurisprudence de la Cour européenne des Droits de l'Homme remonte à 1961 seulement.

31.       Depuis lors, cependant, l’Organisation a changé et d'importants développements institutionnels ont eu lieu à tous les niveaux. Un nombre non négligeable d’instances du Conseil de l’Europe préparent des rapports sur la situation dans chaque Etat membre concernant des sujets particuliers. Le Comité des Ministres de l’Organisation et d’autres institutions du Conseil de l’Europe exercent désormais des pouvoirs qui ont une incidence directe sur les Etats membres et affectent indirectement les populations de ces derniers :

-        les résolutions et décisions que le Comité des Ministres adopte dans le cadre de ses fonctions de surveillance des arrêts de la Cour par les Etats membres7 ;

-        les décisions prises par le Comité des Ministres dans le cadre des procédures de suivi (Monitoring) en cours vis-à-vis des pays pris individuellement, y compris des programmes de coopération spéciale avec certains Etats membres.

32.       Plusieurs fonctions de l’Assemblée ont été renforcées, par exemple sa consultation par le Comité des Ministres sur les instruments juridiques du Conseil de l'Europe sur le budget, sur l’admission de nouveaux Etats membres et la prise de sanctions par le Comité des Ministres ainsi que sur certaines questions relatives aux relations extérieures du Conseil de l’Europe. Elle a aussi été habilitée à élire son Secrétaire Général, les juges à la Cour européenne des Droits de l‘Homme et le Commissaire aux droits de homme du Conseil de l'Europe.

33.       L’Assemblée a obtenu du Comité des Ministres le droit d'adopter son ordre du jour et sa représentativité a été améliorée (élection de ses membres par les parlements nationaux). Dans les années 1950 des groupes politiques ont été constitués au sein de l’Assemblée et leur rôle s’est progressivement renforcé. En outre, l’Assemblée a dans le cadre de son droit à l’auto-organisation pris une série de décisions importantes qui ont modifié son fonctionnement, y compris l’observation des élections. Ces changements ont été effectués par plusieurs techniques notamment par la modification des dispositions statutaires relatives à l’Assemblée et l’article 38 du Statut en 1951, 1953, 1970 et 19788 et l'adoption de résolutions par l’Assemblée, ou de décisions du Bureau approuvées par l’Assemblée. Alors que l’Assemblée a dans plusieurs textes (voir les Recommandations 1027 (1986), 1212 (1993), 1728 (2005)) demandé la révision du Statut ou de dispositions spécifiques du Statut, celui-ci est resté inchangé depuis 1978, sauf l’adaptation de l’article 26 du Statut (nombre des sièges à l’Assemblée) à la suite de l’adhésion d’un nouvel Etat membre.

34.        De nouvelles institutions et instances ont été créées au sein du Conseil de l’Europe (voir ci-dessus par. 22 à 24).

35.       De tous les organes et institutions du Conseil de l’Europe, c’est sans conteste la Cour européenne des Droits de l’Homme qui, après des débuts relativement modestes a connu l’évolution la plus impressionnante. Depuis novembre 1998, elle est devenue une Cour permanente qui peut être saisie directement par tout citoyen. En moyenne, la Cour prononce maintenant plus de 1100 arrêts par an.

iv.       L’adoption de résolutions statutaires par le Comité des Ministres depuis 1993

36.       Afin de tenir compte de ces modifications institutionnelles, mais aussi dans le souci d’adapter le mandat politique du Conseil de l’Europe aux évolutions, l’Assemblée a pris plusieurs initiatives visant à convaincre le Comité des Ministres de modifier l'ensemble du Statut du Conseil de l'Europe ou de l'adapter à la pratique de l'Organisation (cf. la Recommandation 1212 (1993) relative à l'adoption d'un Statut révisé du Conseil de l'Europe). En 1993, le premier Sommet des Chefs d’Etat et de Gouvernement des Etats membres du Conseil de l'Europe a chargé le Comité des Ministres d'adapter le Statut de l'Organisation pour assurer le bon fonctionnement de celle-ci en tenant compte des propositions émises par l'Assemblée, notamment dans sa Recommandation 1212 (1993). À la suite de ce Sommet, le Comité des Ministres a adopté plusieurs résolutions statutaires et pris diverses décisions à caractère institutionnel9. Toutefois, le Statut proprement dit est resté inchangé.

v.       Les travaux du Comité des Sages du Conseil de l’Europe

37.       Les modifications importantes du système juridico-institutionnel du Conseil de l’Europe ont été prises en compte pour les travaux du Comité des Sages du Conseil de l'Europe, institué à la suite de son Deuxième Sommet. Dans son rapport présenté au Comité des Ministres en novembre 1998, le Comité des Sages analysait les structures internes et le fonctionnement du Conseil de l’Europe. Le rapport notait en particulier les rôles et fonctions changés de l’Assemblée, du Congrès et de la Cour.

38.       Le rapport du Comité des Sages concluait 

39.       Pour le rapporteur il ne fait pas de doute que les mots « freins et contrepoids » (checks and balances) utilisés dans l’extrait ci-dessus sont représentatifs pour le principe d’équilibre institutionnel.

vi.       Développements depuis 1999 et conséquences

40.       Depuis le rapport du Comité des Sages d'autres changements sont intervenus au sein du Conseil de l'Europe tels qu'une activité accrue de la Cour européenne des Droits de l'Homme, l'adoption du Protocole n° 14 à la Convention européenne des Droits de l'Homme, une représentativité améliorée de l'Assemblée (prise en compte de l'égalité des sexes pour la composition des délégations nationales). Les activités de suivi du Comité des Ministres, de l’Assemblée et du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l‘Europe ont été intensifiées. Le poste de commissaire aux droits de l’homme a été instauré en 1999.

41.       Il est généralement reconnu que si les activités des organes et institutions d’une Organisation internationale ont davantage d’effets sur les Etats membres et indirectement sur les populations, ces instances ont une plus grande responsabilité et un besoin de légitimité démocratique appropriée. Cette légitimité peut être conférée par les parlements nationaux des Etats membres mais aussi là où elle existe, par une enceinte parlementaire internationale.

42.       Force est de relever que des avancées institutionnelles majeures ont eu lieu au niveau de l'Union européenne et récemment une réforme a été lancée au niveau de l'OSCE (cf. rapport du Groupe d'éminentes personnalités sur le renforcement de l'efficacité de l'OSCE et de l'Institut suisse pour les affaires mondiales sur la réforme de l'OSCE). Par ailleurs, des réformes sont en cours au niveau d'organisations régionales européennes (Conseil Nordique, Bénélux).

43.       Il est évident que le Conseil de l'Europe ne saurait ignorer ces évolutions, d'autant plus qu'au sein de l'OSCE le statut de son Secrétaire Général a été renforcé en 2004 et que les rapports susmentionnés proposent - entre autres - des améliorations pour l'Assemblée de l'OSCE sur le plan institutionnel.

44.       La question qui se pose est de savoir si l'instrument constitutif (de 1949/51) du Conseil de l'Europe tel que complété par les résolutions statutaires et les différents arrangements institutionnels qui ont été pris offrent un fondement satisfaisant pour le fonctionnement du système juridico-institutionnel du Conseil de l'Europe en 2006. Ceci eu égard aux conceptions modernes de la gouvernance démocratique et en particulier aux exigences du principe de l'équilibre institutionnel tel qu'on l'entend aujourd'hui.

IV.       LE STATUT ACTUEL DE L’ASSEMBLEE PARLEMENTAIRE AU SEIN DU CONSEIL DE L'EUROPE

i.       Remarques générales

45.       Certains articles du Statut prévoient l’égalité pleine et entière entre le Comité des Ministres et l’Assemblée (tel est le cas du préambule, Articles 1.d, 8, 10, 12,15a première phrase)10. Toutefois, pris comme un tout, le Statut montre une nette prépondérance de l’organe ministériel sur l’Assemblée. Conformément à l’esprit prévalant en 1949, le Comité des Ministres est doté du pouvoir de décision et d’action dans l’Organisation et peut approcher directement les Gouvernements (voir en particulier l’Article 13). Le Statut dispose que l’Assemblée est l’organe délibérant du Conseil de l’Europe (Article 22). L’existence de cet article qui fait partie du noyau dur du Statut constitue d’un point de vue purement juridique un problème pour l’Assemblée. S’agissant de l’Assemblée de l’UEO qui est également intégrée dans une Organisation intergouvernementale, une solution beaucoup plus élégante a été trouvée dans les textes à caractère institutionnel « L’Assemblée exerce la fonction parlementaire découlant de l’application du Traité de Bruxelles ». L’Assemblée Parlementaire du Conseil de l’Europe est représentative au premier chef des progrès de l’esprit démocratique dans les relations internationales. Elle exprime la volonté d’associer plus étroitement les peuples aux efforts pour préserver la paix et parvenir à une union plus étroite en Europe.

46.       Outre le Statut, d’importantes prérogatives de l’Assemblée sont contenues dans les Résolutions statutaires (49)20, (51)30, (55)29 et dans les Résolutions (52) 26, (53) 38. D’autres matières concernant l’Assemblée ont éte réglées dans de «simples» décisions du Comité des Ministres. A plusiers reprises l’Assemblée a invité le Comité des Ministres à regrouper ces textes éparpillés (voir Recommandation 871 (1979), rapport dui Comité des Sages et Doc. CM (2000) 57).

47.       L’Assemblée est particulière en ce qu’elle est composée de parlementaires nationaux qui suivent un double processus de nomination. Ils sont d’abord élus par les parlements nationaux. Puis l’Assemblée examine leurs pouvoirs et peut refuser de les ratifier si les critères requis ne sont pas remplis (Arrticles 6 à 9 du Règlement de l‘Assemblée). Leur mandat au sein de l’Assemblée ne prend effet qu’après ratification de leurs pouvoirs. Cela signifie que les représentants et suppléants à l’Assemblée ont :

-       une légitimité en tant que membre d’un parlement national;

-       et une légitimité au niveau du Conseil de l’Europe, leur permettant de jouir d’immunités spécifiques prévues dans l’Accord général sur les privilèges et immunités du Conseil de l’Europe.

C’est pourquoi, comme l’a souligné son Secrétaire Général de l’époque lors d’une réunion des Délégués des Ministres le 14 décembre 2005, l’Assemblée est dotée d’une double nature, à la fois inter-étatique et représentative des parlements nationaux. Ceci lui confère un statut unique lui permettant de jouer son rôle européen11.

48.       L’Assemblée dispose d’un droit d’auto-organisation interne et d’adoption de son Règlement. Ses organes (système des commissions, etc.), méthodes de travail et procédures sont identiques à celles des parlements nationaux. Par son intermédiaire, les parlements nationaux ont, dès le départ, été liés indirectement à la construction de l’Europe. Il est surprenant de constater que le Statut original contenait déjà les dispositions permettant tout type de coopération entre un organe gouvernemental (Comité des Ministres) et un organe parlementaire. Cette coopération va de la consultation (Articles 23, 27) à la nécessité de prendre des décisions convergentes ou à la codécision (Articles 32, 33, 41(d)) avec le Comité des Ministres. Il est particulièrement important que 15 des 42 articles du Statut du Conseil de l’Europe ne puissent être modifiés qu’avec l’assentiment de l’Assemblée. En ce qui concerne, de plus, les membres associés du Conseil de l'Europe, l’Assemblée possède un statut privilégié par rapport au Comité des Ministres, puisque aux termes de l’Article 5 du Statut de l’Organisation, les membres associés ne sont représentés qu’au sein de l’Assemblée. Toutefois depuis le 1er janvier 1957 ce statut n’a plus été accordé.

49.       De surcroît, plusieurs articles du Statut original donnent à l’Assemblée des droits spécifiques (des « pouvoirs », voir l’Article 16 du Statut) concernant sa propre organisation et lui confient l’élection du Secrétaire Général et du Secrétaire Général adjoint du Conseil de l’Europe. L’Assemblée a certaines possibilités de contrôle et de supervision pour ses membres qui peuvent :

-       poser des questions écrites et orales au Comité des Ministres et à son Président (ceci est actuellement particulièrement important en relation avec la contribution de l’Assemblée pour assurer l’exécution de certains jugements de la Cour (voir AS/Jur (2006) 18) ;

-        faire des démarches dans les parlements nationaux ;

-        soulever une question quand ils sont invités à participer à des réunions de groupes de rapporteurs et d’autres groupes du Comité des Ministres ;

-        participer à des réunions de comités d’experts intergouvernementaux du Conseil de l’Europe.

50.        Le Comité des Ministres et l’Assemblée ont créé une instance de coopération et de coordination, le Comité mixte, qui est aussi censé examiner d’éventuels problèmes entre les deux organes. Il est présidé par le Président de l’Assemblée.

51.       Il est intéressant de noter que le Statut de 1949 contient en germe des possibilités d’élargissement des pouvoirs de l’Assemblée. Selon l’article 41d du Statut, les articles suivants du Statut peuvent être modifiés, complétés ou mis à jour par des décisions concordantes du Comité des Ministres et de l’Assemblée sans qu’il soit besoin d’une ratification par les Etats membres :

-       les articles relatifs aux fonctions (mais toute modification de la nature de l’Assemblée devrait tenir compte de l’Article 22 du Statut) à la composition et a l’organisation de l’Assemblée (Articles 23 à 35) ; ces dispositions pourraient être mises à jour, à moins que de nouvelles dispositions ne soient insérées dans cette section du Statut;

-       les articles relatifs au budget du Conseil de l’Europe (articles 38 et 39) y compris les « pouvoirs » budgétaires certes très limités de l’Assemblée (article 38d) pourraient aussi être mis à jour, remaniés ou, vis-à-vis de l’Assemblée, complétés.

Selon le Professeur Poidevin des possibilités de modification simplifiée du Statut y ont été prévues sur proposition de la France afin de permettre à l’Assemblée de concevoir et de construire l’unité européenne. La France a cherché à préserver des chances d’aménager à l’avenir l’institution qui se met en place (cf. Histoire des débuts de la construction européenne (mars 1948 - mai 1950), 1986, p.193).

52.       Le rapporteur souhaite rappeler dans ce contexte que dans les années 50 il avait été envisagé à un moment par le Cabinet du Président de l’Assemblée d’intégrer dans les articles 23 à 35 du Statut, sur la base d’une décision concordante du Comité des Ministres et de l’Assemblée, une nouvelle disposition relative à l’élection du Secrétaire Général de l’Assemblée.

53.       Dès le départ l’Assemblée a été habilitée à participer sur une base consultative à l’élaboration du droit du Conseil de l’Europe (instruments juridiques). Ce processus a commencé avec la Convention européenne des droits de l’homme et s’est poursuivi avec la Convention culturelle européenne, la Charte sociale européenne, etc.

ii.       L’évolution du rôle de l’Assemblée et de ses possibilités d’action

54.       L’histoire de l’Assemblée démontre son rôle politique et ses travaux innovants. Elle a toujours défendu l’Organisation, bien davantage que certains autres organes, et s’est montrée plus courageuse et novatrice. Ceci a aussi été reconnu par le Premier Ministre du Luxembourg, M.Juncker, dans le cadre de l’élaboration de son rapport sur les relations entre le Conseil de l’Europe et l’Union Européenne. Il a dit que le Conseil de l’Europe est une Organisation intergouvernementale avec une Assemblée Parlementaire qui cependant se dégage souvent de la seule coopération intergouvernementale afin de réaliser en commun des progrès en Europe (cf l’interview in : Neue Zürcher Zeitung du 12 avril 2006). Depuis sa création, le caractère parlementaire de l’Assemblée, mais aussi ses possibilités d’agir concrètement, n’ont fait que prendre de l’ampleur. Dès le départ, il était important pour l’Assemblée que ses fonctions consultatives soient mieux définies et, en particulier, étendues par le Comité des Ministres, et elle ambitionnait de trouver des moyens de jouer un rôle actif et visionnaire. Quelques exemples de l’évolution institutionnelle de l’Assemblée ont été données ci-dessus.

55.       Plus important encore sans doute, l’Assemblée a pris diverses initiatives pour développer son action concrète d’une part, et son poids dans l‘Organisation. Cela allait également dans le sens d’une tendance croissante à la parlementarisation et à la démocratisation dans les relations et Organisations internationales. L’Assemblée n’a pas hésité à prendre des actions unilatérales afin de renforcer son statut (par exemple sa décision de 1974 de changer son nom en «Assemblée Parlementaire») ou à étendre ses possibilités d’action (par exemple l’observation d’élections).

56.        Certains des résultats obtenus par l’Assemblée sont :

-       instaurer des possibilités autonomes (autrement dit, indépendantes des Gouvernements) de réaction en cas de violation des valeurs du Conseil de l’Europe (contestation de pouvoirs non ratifiés pour des délégations ou leurs membres, réexamen de pouvoirs ratifiés…) ;

-       contribuer à développer le concept de la politique d’élargissement du Conseil de l’Europe, adapter les conditions politiques pour l’adhésion au Conseil de l’Europe, négocier les conditions spécifiques pour chaque nouvel Etat membre et définir les frontières du Conseil de l’Europe ;

-       mettre en place des procédures de suivi concernant le respect des engagements et obligations des Etats membres (nouveaux et anciens) ;

-       suivre la mise en œuvre des arrêts de la Cour par les Etats membres ;

-       actions sur le terrain relatives à des enquêtes en général, ou pour l’examen de demandes d’adhésion au Conseil de l’Europe, pour le suivi des obligations et engagements, l’observation d’élections; des contributions concernant des situations spécifiques dans des Etats européens et en cas de crises ; mise en œuvre des programmes de coopération parlementaire ;

-       développer ses relations extérieures (cf. Recommandation 1753 (2006) et Résolution 1506 (2006)) et créer les mécanismes nécessaires pour des buts spécifiques, par exemple introduction du statut d’observateur auprès de l’Assemblée (longtemps avant que les gouvernements aient mis au point un tel statut), création de troïkas parlementaires avec le Parlement européen et l’Assemblée de l’OSCE, conclusion d’accords de coopération avec les parlements nationaux d’Etats non-membres, d’autres organes du Conseil de l’Europe et d’autres organisations intergouvernementales.

57.       Parfois, le « droit souple » de l’Assemblée (résolutions, recommandations) a eu des effets directs dans les États membres. C’est le cas par exemple de la Résolution 803 (1983) sur la Turquie, qui a été citée directement dans un jugement de la Cour constitutionnelle fédérale de l’Allemagne et utilisée comme argument clé dans une affaire d’extradition. La Recommandation 1201 (1993) de l’Assemblée sur la protection des minorités nationales en Europe a été citée directement en tant que norme dans le traité entre la Hongrie et la Slovaquie et dans l’Annexe au traité entre la Hongrie et la Roumanie.

58.       Son dynamisme, son engagement et sa fonction de « laboratoire d’idées » ont fait dire récemment à un ministre des Affaires étrangères que l’Assemblée est le « véritable moteur du Conseil de l’Europe ». Dans un rapport du Groupe de réflexion de Varsovie de 2005 (sur la complémentarité entre l’OTAN, l’UE, l’OSCE et le Conseil de l'Europe) le rôle actif de son Assemblée parlementaire est qualifié d’avantage comparatif du Conseil de l’Europe.

59.       Le Comité des Ministres reconnaît que l’Assemblée est son partenaire privilégié au sein du Conseil de l’Europe (voir document CM/AS (2006)4). Par ailleurs, il apparaît dans les études comparatives publiées au cours des dernières années sur les institutions internationales interparlementaires en Europe que l’Assemblée est, à l’exception du Parlement européen, l’institution la plus efficace.(voir notamment : Beat Habegger, Parlamentarismus in der internationalen Politik (Europarat, OSZE und IPU), Baden-Baden, 2005; Rudolf Geiger, Neuere Probleme der parlamentarischen Legitimation im Bereich der auswärtigen Gewalt, Baden-Baden; 2003; Stefan Marschall, Transnationale Repräsentation in parlamentarischen Versammlungen, Baden-Baden, 2005). Il est à noter que des questions relatives aux institutions interparlementaires en Europe sont régulièrement discutées par les Conférences des Présidents des parlements de l’UE (par exemple en 2005, 2006). Les 8 et 9 mai 2006, le Parlement polonais et le Centre européen de recherche et de documentation parlementaires ont organisé à Varsovie un séminaire sur «Les Assemblées parlementaires supranationales et interparlementaires dans l’Europe du 21e siècle ».

V.       L’ASSEMBLÉE ET LA LÉGITIMITÉ DÉMOCRATIQUE

60.       L’Assemblée constitue le socle démocratique du Conseil de l’Europe12. Par ses avis statutaires au Comité des Ministres, par l’accompagnement actif des travaux du Conseil de l’Europe, par l’élection du Secrétaire Général et du Secrétaire Général adjoint de l’Organisation, des juges de la Cour et du Commissaire aux Droits de l’Homme, l’Assemblée, composée de membres élus de parlements nationaux, donne sa légitimité démocratique à l’Organisation. Par sa contribution, elle confère aussi une légitimité démocratique au droit international créé par l’élaboration de Conventions du Conseil de l’Europe.

61.       En diverses occasions, l’Assemblée a déclaré (par exemple dans sa Résolution 1289 (2002) sur le contrôle parlementaire des institutions internationales) que le déséquilibre entre le pouvoir croissant des institutions internationales et l’absence de supervision parlementaire de leurs activités constitue un défi majeur pour la démocratie. L’Assemblée a estimé qu’il est nécessaire de combler le déficit démocratique que présentent actuellement les institutions internationales, qui nuit gravement à leur efficience, et de les rendre davantage comptables à l’égard de la société. Le public, par le biais de ses représentants démocratiquement élus, a besoin de participer efficacement au processus de prise de décision.

62.       Dans son Avis n° 208 (1999) au Comité des Ministres sur le rapport du Comité des Sages, l’Assemblée a insisté sur son rôle politique de plus en plus important13, notamment depuis le début de son processus d’élargissement. Selon cet Avis, cette reconnaissance devrait se refléter dans un accroissement des compétences budgétaires et administratives de l’Assemblée. L’Assemblée a aussi soutenu régulièrement des initiatives pour donner une dimension parlementaire à des grandes Organisations internationales qui en sont encore dépourvues (ONU, OMC, …). Elle sert également à l’OCDE comme une sorte d’enceinte parlementaire (cf. les débats élargis sur les activités de l’OCDE).

63.       Il est également fait valoir que si l’organe gouvernemental (le Comité des Ministres) d’une Organisation internationale est renforcé, alors le rôle de l’organe parlementaire dont cette dernière est dotée devrait aussi être étoffé. A l’évidence, les activités du Conseil de l’Europe touchent de plus en plus à des questions nationales chez les Etats membres et ont plus fréquemment une incidence directe sur ces Etats et leurs peuples. Dans les milieux universitaires, le Conseil de l'Europe n’est plus considéré comme une Organisation intergouvernementale classique, mais bien plus comme une Organisation sui generis (voir notamment, Michaela Wittinger, Der Europarat: Die Entwicklung seines Rechts und der europäischen Verfassungswerte, Baden-Baden, 2005, S.546). C’est pourquoi le Rapporteur est d’avis que la légitimité démocratique du Conseil de l’Europe ne pourrait qu’y gagner si le rôle de l’Assemblée était renforcé. Ceci est d’autant plus important qu’actuellement des efforts significatifs sont déployés pour adapter la démocratie parlementaire en Europe au nouveau contexte d’une coopération européenne aux multiples formes.

64.       L’expert consultant de la Commission du Règlement et des Immunités a considéré à juste titre que lorsqu’une organisation internationale est particulièrement engagée dans la sauvegarde et le développement de la démocratie, ainsi que dans le respect de la primauté du droit, cela doit avoir une incidence sur son organisation interne. En d’autres termes, une telle organisation internationale doit être démocratisée autant que possible, et il faut adapter son équilibre institutionnel aux besoins nouveaux, de même qu’aux tendances générales du droit comme de la pratique des organisations internationales, et plus particulièrement européennes.

65       Parfois il est avancé que même pour les Organisations internationales intergouvernementales (OIG) dotées d’une assemblée parlementaire ce sont en dernier lieu les parlements nationaux qui confèrent la légitimité démocratique au fonctionnement et aux décisions prises par ces organisations. Ceci est vrai sur le plan formel, car s’agissant des OIG les parlements nationaux sont le lieu de passage obligatoire pour :

-       l’adoption de leurs budgets (les parlements nationaux adoptent le budget des affaires étrangères qui contient les contributions que versent leurs Gouvernements aux OIG dont ils sont membres) ;

-        donner l’approbation à la ratification de traités (conventions) élaborées par ces OIG ;

-       superviser, dans le cadre de débats sur les affaires étrangères, ou sur des OIG spécifiques ainsi que par des discussions dans leurs commissions des affaires étrangères ou européennes la politique suivi par leurs gouvernements dans les OIG respectives ;

-        approuver la modification des noyaux durs des traités constitutifs des OIG.

66.       Toutefois, il convient de prendre en considération également la vie quotidienne et la pratique des OIG :

-       sauf exception les parlements nationaux ne ventilent pas dans leurs discussions sur les contributions nationales aux OIG le budget du Conseil de l’Europe et prennent rarement des initiatives à son égard ; le rapporteur n’a pas eu connaissance de cas où les responsables budgétaires du Conseil de l’Europe aient été entendus par des commissions des parlements nationaux ;

-       généralement, les parlements nationaux des Etats membres des OIG n’ont pas d’attitude concertée pour lancer l’élaboration d’une convention au sein d’une OIG ou suivre de près le processus de son élaboration par le comité d’experts compétent; le rapporteur ne connaît pas de cas où les Présidents ou secrétaires de tels comités du Conseil de l’Europe aient été entendus par des commissions des parlements nationaux ;

67.       Sans vouloir réduire le rôle important des parlements nationaux, le rapporteur tient à souligner la compétence et l’expérience des commissions spécialisées de l’Assemblée parlementaire pour traiter des affaires du Conseil de l’Europe et leur plus grande proximité vis-à-vis de l’Organisation.

VI.       LA NÉCESSITÉ DE POURSUIVRE SUR NOTRE LANCEE – QUE PEUT-ON FAIRE POUR AMELIORER LA REPARTITION DU « POUVOIR » ENTRE LE COMITE DES MINISTRES ET L’ASSEMBLEE ?

68.       Il découle des observations précédentes que les problèmes suivants devraient notamment être abordés :

-        les dispositions institutionnelles actuelles au sein du Conseil de l’Europe ne reconnaissent pas le rôle politique accru de l’Assemblée;

-        le système consistant à impliquer l’Assemblée dans l’élaboration, l’adoption et la mise en œuvre des conventions du Conseil de l’Europe n’est pas satisfaisant;

-        les réponses du Comité des Ministres aux recommandations et avis de l’Assemblée ne sont pas adéquates;

-        les pouvoirs budgétaires de l’Assemblée sont insuffisants;

-        les positions de l’Assemblée et du Comité des Ministres ne font l’objet d’aucune coordination au cours des réunions du Comité mixte;

-        le problème des organes spéciaux du Conseil de l’Europe et la participation de l’Assemblée.

69.        Ceci démontre que l’Assemblée ne doit pas seulement être dotée de davantage de pouvoirs budgétaires et administratifs. Il importe surtout qu’elle obtienne un plus grand poids politique dans l’Organisation et dans son processus de prise des décisions.

70.       Toute une série de propositions visant à renforcer la position de l’Assemblée figurent dans la Recommandation 1212 (1993) relative à l’adoption d’un Statut révisé du Conseil de l'Europe. De nouvelles propositions ont été présentées par le représentant de l’Assemblée au Comité des sages, ainsi qu’elles figurent dans l’Avis 208 (1999) de l’Assemblée et la Résolution 1177 (1999) relatifs au rapport du Comité des sages. En outre, plusieurs propositions concernant le rôle de l’Assemblée vis-à-vis de ses propres dépenses opérationnelles, ainsi que le programme d’activités intergouvernementales et le budget de l’Organisation sont contenues dans les Avis de l’Assemblée N° 256 et 257 de mai 2005 et dans la Recommandation 1728 (2005).

i.       Questions politiques du Conseil de l’Europe et prise de décision

71.       Le nom « Assemblée Parlementaire », qui dans la pratique n’a pas encore été adopté par tous, pourrait être reconnu par le Comité des Ministres dans un texte juridique officiel, comme une résolution statutaire. Actuellement il est basé sur de «simples» décisons du Comité des Ministres (1994) et de l’Assemblée (1974).

72.       Bien que l’élargissement du Conseil de l’Europe soit pratiquement mené à terme, il pourrait être politiquement important que :

-       le Comité des Ministres convienne de donner une valeur plus grande aux avis statutaires de l’Assemblée parlementaire concernant les candidatures d’Etats à l’adhésion au Conseil de l’Europe et confirme officiellement la pratique actuelle selon laquelle il « n’imposera pas » un nouvel Etat membre contre la volonté de l’Assemblée et, également, ne prendra pas de sanctions (y compris celles prévues à l’Article 9 du Statut) à l’encontre d’un Etat membre sans l’assentiment préalable de l’Assemblée ;

-       le Comité des Ministres confirme officiellement qu’en ce qui concerne la décision portant sur le nombre de sièges d’un nouvel Etat membre à l’Assemblée, il se basera toujours sur les propositions de cette dernière (voir p.ex. Doc.1287) ;

-       le Comité des Ministres mentionne dûment l’assentiment nécessaire de l’Assemblée (voir l’Article 41d du Statut) dans ses résolutions modifiant la répartition des sièges à l’Assemblée figurant dans l’article 26 du Statut (voir p.ex Résolution (78) 1) et lorsque, suite à l’adhésion d’un nouvel membre (ou du changement de nom d’un Etat membre) il convient de modifier l’Article 26.

73.       Lors de la réunion de la Commission du Règlement et des Immunités du 1er juin 2006, il a été proposé de renforcer le rôle du Comité mixte en créant des groupes de travail mixtes pour l’examen de questions particulières (voir Article 55.1 du Règlement de l’Assemblée). Dans le passé, cette possibilité a été envisagée à plusieurs reprises sans qu’il y soit donné suite, sauf en 2000 lors de la survenance d’un problème spécial entre les deux organes statutaires. Il y a fort longtemps déjà (voir Doc.1286, p.4), il a été suggéré d’organiser des réunions du Comité mixte avant que le Comité des Ministres ne prenne de décision finale sur les questions importantes pour lesquelles les avis du Comité des Ministres et de l’Assemblée divergeaient.

74.       Malgré d’importants progrès déjà réalisés14, il reste encore plusieurs domaines où la coopération entre l’Assemblée et le Comité des Ministres pourrait être améliorée. Ainsi, l’Assemblée pourrait être :

-       consultée avant la conclusion d’accords de coopération majeurs entre le Conseil de l’Europe et d’autres Organisations internationales et avant qu’une importante Convention soit ouverte à l’adhésion par un Etat non-membre ;

-       étroitement associée à tous les contacts de haut niveau, en particulier aux réunions quadripartites entre le Conseil de l'Europe et l’Union européenne ;-

-       consultée sur les priorités du programme de travail intergouvernemental pour l’année suivante (il est vrai que les recommandations de l’Assemblée constituent déjà une contribution d’importance majeure pour la fixation de ces priorités), cf l’Avis No.256 de l’Assemblée au Comité des Ministres.

75.       L’Assemblée n’est consultée non plus avant l’adoption par le Comité des Ministres des déclarations politiques importantes sur l’Organisation en général (par ex. celles adoptées à l’occasion des 40e et 50e anniversaire du Conseil de l’Europe et les déclarations sur le renforcements du système de protection de la CEDH).

76.       Si de nouveaux accords partiels sont conclus, ou de nouveaux organes créés au sein du Conseil de l’Europe, et que les membres doivent être élus, il serait utile de prendre pleinement en compte le potentiel de l’Assemblée en tant qu’organe de coopération, dans le premier cas, ou organe électif dans le second. L’absence de dispositions plus détaillées dans les actes fondateurs de certains accords partiels concernant l’interaction avec l’Assemblée a incité cette dernière à mettre en place des dispositions relative à la coopération bilatérale avec eux (Commission de Venise, Centre Nord-Sud).

77.       À cet égard, le Rapporteur souhaite mentionner aussi les questions soulevées au cours des premiers mois de 2005 en ce qui concerne le Commissaire aux Droits de l’Homme du Conseil de l'Europe institué par la Résolution (99) 50 du Comité des Ministres. À un certain moment, il avait été envisagé que la Résolution (99) 50 soit amendée unilatéralement par les Délégués des Ministres, ou bien après consultation de l’Assemblée, afin de permettre la prolongation du mandat du premier Commissaire. Il est rappelé que l’Assemblée a été consultée par le Comité des Ministres avant l’adoption de la Résolution (99)50 (voir aussi la Recommandation 1640 (2004) de l’Assemblée et la réponse du Comité des Ministres de septembre 2006).U

Une autre question dont l’Assemblée s’est occupée depuis fort longtemps est de savoir si et de quelle manière elle doit avoir la possibilité de saisir la Cour européenne des Droits de l’Homme en cas de violations graves de la CEDH par des Etats membres. Certains aspects de cette question ont été évoqués dans la réponse du Comité des Ministres à la Recommandation 1640 (2004).

78.       Selon le Rapporteur, il y a une sorte de zone grise juridique autour du rôle de l’Assemblée dans l’établissement et l’amendement des résolutions du Comité des Ministres portant création de nouveaux organes du Conseil de l'Europe. Cela a également été le cas quant à la participation de l’Assemblée aux initiatives suivantes lancées par le Troisième Sommet:

-       Forum sur l’avenir de la démocratie (dans son rapport sur le suivi du Troisième Sommet, l’Assemblée a proposé qu’il soit créé un groupe de travail chargé de déterminer les modalités du fonctionnement du Forum et d’associer des représentants de l’Assemblée à ses travaux) ;

-       création d’un groupe d’action de haut niveau chargé de réviser la stratégie de cohésion sociale du Conseil de l'Europe ;

-       création d’un groupe de sages chargé d’examiner l’efficacité à long terme du mécanisme de contrôle de la Cour européenne des Droits de l'Homme.

79.       Il est vrai que, dans l’intervalle, des arrangements généralement satisfaisants ont été trouvés quant à la participation de l’Assemblée. Néanmoins, l’Assemblée souhaiterait jouer un rôle plus important en ce qui concerne le Forum sur l’avenir de la démocratie. Ce souhait est d’autant plus justifié que rares sont les personnes mieux qualifiées pour débattre de la démocratie parlementaire que les membres des parlements eux-mêmes. Dans le passé, la participation de l’Assemblée aux travaux d’organes analogues a été décidée par le Comité des Ministres principalement de façon ad hoc ou sur la base de précédents. Une avancée positive est l’invitation faite par le Comité des Ministres à l’Assemblée d’être représentée au sein du Groupe de rapporteurs du Comité des Ministres chargé de négocier le projet de Mémorandum d’accord avec l’Union européenne. L’Assemblée a également demandé à être officiellement consultée avant la conclusion du Mémorandum d’accord [voir Rec. 1743 (2006)].

80.       Pour ce qui est du processus de prise de décision du Conseil de l’Europe, le Rapporteur estime que :

-       les avis statutaires de l’Assemblée pourraient avoir davantage de poids si le Comité des Ministres acceptait d’informer l’Assemblée de la suite donnée à ces documents et expliquait pourquoi des propositions de l’Assemblée n’ont pas éte adoptées;

-       en cas de divergence de vues entre le Comité des Ministres et l’Assemblée sur les propositions de cette dernière concernant des amendements à un projet de convention (ou sur d’autres questions importantes pour lesquelles l’Assemblée a été consultée), une procédure officielle de conciliation pourrait être mise en place entre ces deux organes. Elle pourrait prendre la forme d’un groupe de travail du Comité mixte, comme cela a déjà été proposé (paragraphe 48) dans le rapport susmentionné du Comité des Sages.

81.       Lors d’un échange de vues entre la commission du Règlement et des Immunités et un membre du Comité des Ministres le 1er juin 2006, le problème de la finalisation des projets de convention à temps pour leur ouverture officielle à la signature, fixée parfois plusieurs mois à l’avance, a été soulevé. La proposition d’associer davantage l’Assemblée et ses commissions aux travaux des Comités d'experts intergouvernementaux qui élaborent les projets de convention a été discutée. Dans le passé, il est arrivé parfois que les commissions de l’Assemblée soient consultées par avance sur des projets de convention (par exemple sur l’avant-projet de Protocole n° 14 à la Convention européenne des Droits de l’Homme). Néanmoins, s’agissant du projet du Protocole n° 14, il a ensuite été jugé indispensable de procéder à une consultation complémentaire de l’Assemblée dans son ensemble (voir Avis No. 251 (2004) par.16). Cette question et la meilleure façon de la régler méritent un examen complémentaire par les Commissions concernées de l’Assemblée.

82.       A cet égard, le Rapporteur souhaiterait mentionner la critique exprimée par l’Assemblée dans sa Recommandation 1695 (2005) concernant le rejet de deux tiers des amendements proposés par l’Assemblée au projet de Convention sur l’action contre la traite des êtres humains. Des tableaux analysant dans quelle mesure les propositions d’amendement de l’Assemblée concernant des projets de convention du Conseil de l'Europe ont été acceptées par le Comité des Ministres figurent dans le rapport de M. Cekuolis sur la transparence des travaux du Comité des Ministres (Doc.10736). Ils montrent que les mécanismes actuels de consultation de l’Assemblée sur les projets de convention ne sont pas satisfaisants. Par ailleurs, les rapports explicatifs des conventions du Conseil de l’Europe devraient livrer davantage d’informations sur la contribution de l’Assemblée à ces instruments. Il se pose un autre problème, à savoir l’absence de règle ou de ligne directrice fixant le minimum de temps dont doit disposer l’Assemblée pour préparer un avis ou un projet d’instrument juridique du Conseil de l’Europe.

83.       Ces problèmes et d’autres questions pourraient être réglés sous la forme d’un accord entre le Comité des Ministres et l’Assemblée.

84.       L’on pourrait également rechercher comment mieux prendre en compte, de manière générale, le potentiel de l’Assemblée dans des conventions qui sont liées au fonctionnement du Conseil de l’Europe15 (par exemple, le Protocole n° 14 à la Convention européenne des Droits de l’Homme, la Convention pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants). Si l’on examine les quelque 200 Conventions, Accords et Protocoles, seuls quelques-uns d’entre eux prévoient un rôle spécifique pour l’Assemblée, comme l’élection de personnes (par ex. les juges), ou la proposition de candidats (au Comité pour la prévention de la torture). Si les informations du Rapporteur sont exactes, il n’existe qu’un seul instrument (la Charte sociale européenne de 1961), qui mentionne l’Assemblée dans le mécanisme de contrôle pour le suivi d’une convention. Cela est insuffisant et n’est pas compatible avec le rôle de l’Assemblée dans l’Organisation.

85.       Même si le processus de prise de décision de l’Union européenne ne peut pas être comparé avec celui du Conseil de l’Europe, il est utile de rappeler que la coopération entre le Parlement européen et la Commission européenne pour la préparation de textes législatifs fait l’objet d’un « accord interinstitutionnel » très substantiel de décembre 2003 révisé en 2005. Cet accord mentionne entre autres la légitimité démocratique comme l’un des principes généraux à garder à l’esprit pour la législation de l’Union. Il pourrait être extrêmement utile si, en début d’année, l’Assemblée pouvait être informée au moyen d’une brève communication du nombre et des sujets des conventions et des recommandations aux Etats membres devant être élaborées durant l’année. Il résulte d’un document d’information du 31 août 2006 que 8 projets de convention ou de protocole et environ 32 projets de recommandation aux Etats membres sont en cours d’élaboration au sein du Conseil de l’Europe.

86.       Récemment, un autre point important a été soulevé concernant la préparation des instruments juridiques. La réunion du Comité mixte, le 28 avril 2005, a discuté trois projets de conventions du Conseil de l’Europe respectivement sur la traite des êtres humains, le blanchiment, le dépistage, la saisie et la confiscation des produits du crime et le financement du terrorisme ainsi que la prévention du terrorisme, qui ont été adoptés par les délégués des ministres quelques jours après seulement. Durant cette réunion, aucun texte de ces projets de conventions n’avait été mis à la disposition des membres de l’Assemblée. En dépit des efforts entrepris, les projets de document pour le Troisième Sommet du Conseil de l'Europe n’ont pas été accessibles aux membres de l’Assemblée lorsque ce point a été discuté au sein du Comité mixte. Cette situation a pour conséquence pratique que les membres de l’Assemblée participant au Comité mixte sont moins bien informés que ceux du Comité des Ministres. Le Président de l’Assemblée a proposé alors de trouver les moyens, à certaines conditions, de tenir des informations confidentielles à la disposition des membres de l’Assemblée. Il existe dans d’autres Organisations des procédures à cette fin. Le rapport susmentionné de M. Cekuolis (Doc.10736) suggérait que les informations sur des sujets sensibles puissent être abordées lors de réunions régulières entre le Bureau du Comité des Ministres et la Commission ad hoc des Président(e)s des groupes politiques de l’Assemblée.

87.       A la différence des autres assemblées européennes (par ex. le Conseil Nordique), l’Assemblée parlementaire ne reçoit pas de rapport du Comité des Ministres au sujet de la progression de la coopération européenne et de la coopération entre les Etats membres du Conseil de l’Europe sur des questions internationales. L’Assemblée ne soumet que rarement au Comité des Ministres des propositions pour l’ordre du jour des sessions ministérielles. Par ailleurs, une disposition de la Résolution statutaire (51) 30 selon laquelle le Comité mixte peut émettre des propositions pour le projet d’ordre du jour des sessions du Comité des Ministres et de l’Assemblée parlementaire n’est pas appliquée. Le Rapporteur souhaite finalement observer que les débats de l’Assemblée sur des questions qui lui sont renvoyées pour avis par le Comité des Ministres aboutissent à moins de 10% des textes adoptés par l’Assemblée. Un plus grand usage pourrait aussi étre fait des Articles 50.1 et 51.1 du Règlement de l’Assemblée qui permettent au Comité des Ministres de demander que l’Assemblée ou la Commission Permanente tiennent des débats en procedure d’urgence.

88.       D’autre part, l’Assemblée pourrait autoriser un certain nombre d’États membres à soumettre des propositions de questions à débattre par l’Assemblée.

89.       Il a été proposé que l’Assemblée soit en mesure d’adopter des conventions du Conseil de l’Europe ; à l’instar des parlements nationaux qui adoptent la législation nationale. Actuellement, le Comité des Ministres a le droit exclusif, au titre des Articles 13 et 15 du Statut du Conseil de l’Europe et de textes complémentaires, d’adopter des conventions et d’en décider l’ouverture à la signature. L’Article 22 du Statut, disposition fondamentale concernant l’Assemblée, ferait également obstacle à l’octroi du droit d’adopter des conventions à l’Assemblée. Les Articles 15 et 22 du Statut ne peuvent être modifiés que par décision unanime du Comité des Ministres et ratification des États membres. De plus, selon les deux Conventions de Vienne sur le droit des traités, les gouvernements ont le pouvoir de conclure (et d’adopter) des conventions.

90.        En principe, il pourrait être envisagé que le Comité des Ministres délègue à l’Assemblée, sur une base ad hoc, le droit d’adopter des conventions.

91.       La délégation par le Comité des Ministres à une Conférence des Ministres spécialisés de l’adoption d’un instrument juridique constitue un précédent. Dans la Résolution (89) 40 les Ministres des Affaires étrangères ont chargé les Délégués des Ministres d'examiner de manière pragmatique et souple la possibilité de déléguer des pouvoirs du Comité des Ministres, sur une base ad hoc, à l'une ou l'autre Conférence, notamment en ce qui concerne le choix des priorités pour les actions intergouvernementales du Conseil de l'Europe. En 1990, le Comité des Ministres a délégué à la 6ème Conférence ministérielle européenne sur l’environnement l’adoption d’un projet de recommandation aux États membres sur la Stratégie européenne de conservation. Il convient de noter qu’une telle délégation n’a été prévue que sur une base ad hoc. En 17 ans, elle n’a été appliquée qu’à une seule occasion pour un projet de recommandation aux États membres. Cette solution ne répondrait pas à l’intention des auteurs de la proposition d’accorder à l’Assemblée le droit d’adopter des conventions.

92.       A cet égard, il est rappelé que l’Assemblée a fait usage dans le passé de la possibilité de joindre un projet de convention à une recommandation adressée au Comité des Ministres. Par ailleurs, elle a préparé des projets de lois-modèles, les a joints à des recommandations ou des résolutions et les a adressés aux parlements nationaux des États membres.

93.       L’Assemblée a déjà proposé au Comité des Ministres à deux reprises (voir principalement Recommandation 1361 (1998)) de reconnaître le principe de co-décision pour l’adoption des conventions. Cette proposition a été rejetée par le Comité des Ministres. Le rapporteur souhaiterait plutôt proposer l’introduction d’une véritable procédure de coopération. Il rappelle à cet égard que de nombreuses années avant l’introduction de la co-décision avec le Parlement européen au niveau de l’Union européenne, une procédure de coopération (y compris un système de conciliation) avec le Parlement européen était appliquée.

94. Une autre proposition consiste à déterminer dans quelle mesure le principe de l’action du Comité des Ministres au nom du Conseil de l’Europe (Art.13 du Statut) peut être élargi au bénéfice de l’Assemblée. Cette disposition confère au Comité des Ministres une position forte en stipulant qu’il agit au nom du Conseil de l'Europe. La modification de cette disposition serait difficile car elle nécessiterait sa ratification par les États membres. Par ailleurs, les travaux préparatoires du Statut du Conseil de l’Europe et l’histoire de l’Organisation montrent qu’aucun gouvernement ne souhaitait une Assemblée dotée de pouvoirs exécutifs/législatifs. Il est à noter toutefois que l’Article 13 du Statut n’a pas empêché l’Assemblée de créer un statut d’invité spécial, de fixer les conditions politiques de l’adhésion au Conseil de l’Europe et d’introduire le suivi des obligations et engagements des États membres. De plus, malgré l’Article 13, l’Assemblée est parvenue à imposer un changement de sa dénomination. Lorsque cette proposition a été faite à l’Assemblée, à l’occasion du 25ème anniversaire du Conseil de l’Europe en mai 1974, bien d’autres suggestions ont été émises pour renforcer le rôle de l’Assemblée, un membre ayant même réclamé qu’elle soit dotée de pouvoirs législatifs. D’autres propositions intéressantes concernant le rôle et les fonctions de l’Assemblée ont été présentées dans le rapport de M. Hofer sur les élections directes au Parlement européen et le rôle de l’Assemblée du Conseil de l’Europe [Résolution 693 (1979)] et dans un article de M. Adinolfi sur « Pouvoirs limités mais influence réelle d’un organe consultatif : l’Assemblée Parlementaire du Conseil de l’Europe » ; in : Annuaire européen, volume XXVII pp. 25 à 54.

ii.       Budget du Conseil de l’Europe et crédits budgétaires de l’Assemblée

95.       L’Assemblée adopte des avis statutaires destinés au Comité des Minsuitres tant sur ses propres crédits de fonctionnement que sur le projet de budget ordinaire du Conseil de l’Europe pour l’exercice suivant. Sur la base des propositions du Secrétaire Général pour les priorités concernant l’année suivante et leurs implications budgétaires, y compris le plafond, une réunion de consultation a lieu entre des représentants du Comité des Ministres et l’Assemblée (généralement pendant la partie de session d’avril) avant que le Comité des Ministres prennent une décision sur ces questions.

96.       Le Rapporteur souhaiterait souligner qu’à la différence des Assemblées de l’OSCE et de l’UEO, l’Assemblée Parlementaire n’a pas de budget « propre », mais des « dépenses de fonctionnement » (ou simplement des dépenses). Cette question pourrait être examinée pus en détail.

97.        Dans sa Recommandation 1728 (2005) l’Assemblée a proposé que le Statut du Conseil de l’Europe soit modifié comme suit, en ajoutant après l’article 38 paragraphe c, un nouveau paragraphe ainsi libellé: «  L’Assemblée fixe le mointant de ses dépenses, le taux de croissance faisant l’objet d’un accord entre le Comité des Ministres et l’Assemblée. »

98.       Depuis quelques années l’Assemblée ne recoit plus de réponse détaillée à ses avis stratutaires concernant les dépenses de l’Assemblée pour l’exercice financier suivant.  

99.       Dans ce contexte, le Rapporteur rappelle que, à l’époque où le Parlement européen n’était pas encore directement élu, en 1970, le Conseil de la CE/UE a convenu que sous certaines conditions (par ex. respect du taux de croissance convenu du budget de la CE/UE) il n’amenderait pas les prévisions budgétaires soumises par le PE pour ses propres dépenses opérationnelles.

100.       Pour ce qui est de la consultation de l’Assemblée sur le projet de budget ordinaire de l’Organisation un problème se pose, car celle-ci, selon le calendrier budgétaire actuel, adopte son avis destiné au Comité des Ministres plusieurs mois avant que le projet détaillé ne soit diffusé. La commission des questions économiques et du développement de l’Assemblée a noté que celle-ci :

-        n’examine plus les rapports sur les derniers exercices clos du Conseil de l’Europe ;

-        ne reçoit pas officiellement les rapports des auditeurs du Conseil de l’Europe ;

-        n’est pas associée lorsque le Comité des Ministres se penche sur la révision des barèmes des contributions des Etats membres au budget du Conseil de l’Europe ;

-        ne participe pas à l’évaluation de la validité des résultats des différentes activités du Conseil et ne fait aucune recommandation pour améliorer, corriger, réorienter ou même écarter certaines d’entre elles, pour s’assurer que le programme répond aux besoins et aux attentes des Etats membres et est conforme aux objectifs de l’Organisation.

101.       La commission considère que l’Assemblée devrait aussi évaluer ses propres activités et établir des «questeurs»  parlementaires qui auraient pour mission de contrôler les dépenses de l’Assemblée (voir aussi la Recommandation 1728 (2005).

102.       L’actuel système budgétaire du Conseil de l’Europe n’est pas satisfaisant. Il ne permet pas à l’Assemblée d’influer sur le montant global ou la mise en œuvre du budget du Conseil de l’Europe. Cette situation est incompatible avec le Statut de l’Assemblée en tant qu’organe parlementaire et politique du Conseil de l’Europe. C’est pourquoi l’Assemblée a proposé à juste titre dans sa Recommandation 1728 (2005) d’amender le Statut en insérant un nouveau paragraphe après l’Article 38 c, libellé somme suit :

« L’Assemblée est obligatoirement consultée par le Comité des Ministres avant que celui-ci ne fixe le montant global du budget du Conseil de l’Europe pour l’année à venir. Cette consultation devra avoir lieu le plus tôt possible, pour permettre à l’Assemblée d’en tenir compte dans son avis sur le budget. »

L’Assemblée a également demandé au Comité des Ministres de la consulter dès lors qu’un Etat membre n’a toujours pas, après un laps de temps dépassant six mois, acquitté sa contribution au budget.

103.       Le Rapporteur propose que ces questions soient examinées avec le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe et le Comité des Ministres afin de parvenir à un accord entre eux et l’Assemblée.

iii.       Secrétariat de l’Assemblée

104.       C'est sur la base des Articles 10, 36 et 37 du Statut du Conseil de l’Europe qu'a été élaboré le principe de l'unicité du Secrétariat du Conseil de l’Europe. Conformément à ce principe, le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe est responsable de l’application du Statut du personnel pour tous les agents du Conseil de l’Europe. Des détails sur cette question ont été donnés lors d’un échange de vues entre la Commission du Règlement et des Immunités et des représentants du Comité du personnel du Conseil de l’Europe le 15 mars 2006.

105.       Cependant, il faut aussi tenir compte du fait qu’au fil des ans, des secrétariats spécifiques ont été établis au sein du Conseil de l’Europe : le Secrétariat de l’Assemblée, celui du Comité des Ministres, ceux des Accords partiels, le Bureau du Commissaire aux Droits de l’Homme.

106.       Depuis les premières années de l’Organisation, la question du rôle et des compétences du Secrétaire Général de l’Assemblée au sein du Secrétariat du Conseil de l’Europe a été source de préoccupation tant pour le Comité des Ministres que pour l’Assemblée. Ainsi, entre 1949 et 1955, trois résolutions statutaires ont été adoptées par le Comité des Ministres concernant le Secrétaire Général de l’Assemblée (Résolutions (49) 20, (51) 30D et (55) 29). L’Assemblée est en particulier autorisée depuis 1949 à élire son Secrétaire Général. La Résolution (53) 38 du Comité des Ministres déclarait aussi que « Le Secrétaire Général déléguera au Greffier de l’Assemblée, dans les limites qu’il déterminera, les fonctions d’ordonnateur des dépenses pour les crédits compris dans le titre du budget qui se rapportent au fonctionnement de l’Assemblée et de ses commissions». Cette délégation est maintenant opérationnelle depuis plus de 50 ans.

107.       On trouve une autre disposition spécifique concernant l’Assemblée à l’Article 37 (b), 2e phrase du Statut, qui dispose que le Secrétaire Général fournit à l’Assemblée sous réserve de l’Article 38 (d) les services administratifs et autres dont elle peut avoir besoin.

108.       L’Assemblée a clarifié les fonctions et la responsabilité de son Secrétaire Général dans son Règlement, qui prévoit, à l’Article 64, que :

109.       L’Assemblée a ainsi établi que la responsabilité de ces fonctions incombe au Secrétaire Général élu par elle et responsable devant son Bureau.

110.       C’est du reste la pratique suivie; en effet, depuis de nombreuses années, le Secrétaire Général de l’Assemblée s’acquitte de ses fonctions en toute indépendance, sous la responsabilité directe du Bureau de l’Assemblée. Pour ce qui est du personnel de cette dernière, le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe et le Secrétaire Général de l’Assemblée se consultent en matière de recrutement, de transfert et de promotion des agents de l’Assemblée, conformément aux procédures statutaires. En cas des nominations aux plus hauts postes16 du Secrétariat de l’Assemblée le Reglement sur les nominations prévoit que le Secrétaire Géneral du Conseil de l’Europe informe le Bureau de ses intentions lors d’un échange de vues informel auquel participe le Secrétaire Géneral de l’Assemblée.

VII.       LE COMITÉ DES MINISTRES

i.       Composition, fonctionnement et secrétariat du Comité des Ministres

a.       Généralités

111.       Le Comité des Ministres est l'instance de décision du Conseil de l'Europe. Il est composé des ministres des Affaires étrangères de tous les Etats membres, ou de leurs représentants permanents à Strasbourg. Emanation des gouvernements où s'expriment, sur un pied d'égalité, les approches nationales des problèmes auxquels sont confrontées les sociétés de notre continent, le Comité des Ministres est aussi, collectivement, le lieu où s'élaborent des réponses européennes à ces défis. Gardien, avec l'Assemblée parlementaire, des valeurs qui fondent l'existence du Conseil de l'Europe, il est enfin investi d'une mission de suivi du respect des engagements pris par les Etats membres.

b.       Composition du Comité des Ministres et réunions

112.       Au niveau ministériel de Comité des Ministres est composé des Ministres des Affaires étrangères de chaque Etat membre. En mai 1951, le Comité des Ministres a invité chaque Etat membre à désigner un Représentant permanent chargé d'être en relation constante avec l'Organisation. La plupart des Représentants permanents résident à Strasbourg. Ce sont généralement des diplomates qui ont rang d'ambassadeur (quelquefois, des chargés d'affaires). En 1952, le Comité des Ministres a décidé que chaque ministre pourrait désigner un délégué. Les Délégués ont les mêmes pouvoirs décisionnaires que les Ministres. Habituellement, le Délégué est aussi le Représentant Permanent de l'Etat membre.

113.       Le Comité des Ministres se réunit au niveau ministériel une fois par an, normalement en mai. Les réunions, appelées "sessions", ont lieu généralement à Strasbourg. La majeure partie de chaque session est normalement consacrée au dialogue politique, mais les Ministres peuvent examiner toutes les questions d'intérêt commun à l'exception des problèmes de défense nationale. Alors que les procès-verbaux des sessions sont confidentiels, un communiqué final est publié à l'issue de chaque réunion. Les Ministres peuvent également faire une ou plusieurs déclarations.

c.       Mode de fonctionnement

La Présidence et le Bureau du Comité des Ministres

114.       La Présidence est confiée pour six mois à un Etat membre, à tour de rôle (dans l'ordre alphabétique anglais) changeant en général lors des sessions ministérielles. Un Bureau a été constitué pour la première fois en 1975 pour aider les Délégués. Le Bureau exerce des tâches de gestion et de protocole, y compris la préparation des réunions du Comité des Ministres. Il est aussi utilisé comme cadre de discussion pour la coordination de l'action des présidences successives, notamment pour ce qui concerne l'élaboration et la mise en œuvre de leurs programmes. La responsabilité spécifique de veiller à la continuité entre les programmes des présidences successives du Comité des Ministres est confiée au Vice-Président des Délégués en coopération avec le Secrétariat du Comité des Ministres.

Les Rapporteurs, Groupes de rapporteurs et Groupes de travail

115.       Le système des Groupes de rapporteurs a été mis en place par les Délégués en 1985. Les Groupes contribuent à la préparation des réunions des Délégués. Ils sont composés de Délégués, souvent représentés par leurs suppléants, et sont assistés par des membres du Secrétariat. Les Groupes de rapporteurs ont été réorganisés en 1999 pour refléter le nouvel organigramme du Conseil de l'Europe (un Groupe par Direction), certaines activités se voyant allouer davantage de rapporteurs supplémentaires.

Le Règlement du Comité des Ministres

116.       Les sessions et les réunions des Ministres et des Délégués sont conduits conformément à leurs Règlements qui datent respectivement de 1964 et 1971 (avec un changement mineur de juin 2005).

117.       Le Secrétariat du Comité des Ministres est composé de vingt-huit membres du Secrétariat Général. Il est dirigé par le "Secrétaire du Comité des Ministres", qui a rang de Directeur Général. Le Secrétariat veille au bon déroulement des sessions des Ministres et des réunions des Délégués des Ministres. La nomination du Secrétaire du Comité des Ministres est subordonnée à l’accord du Comité des Ministres. Conformément au Règlement sur les nominations, le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe nommera un agent aux plus hauts postes (A6 et A7) seulement après un échange de vues informel avec le Comité des Ministres au cours duquel il fera part de ses intentions et des raisons de son choix.

118.       Il est à noter que la nomination de l’auditeur interne du Conseil de l’Europe est également subordonnée à l’approbation du Comité des Ministres.

ii.       Rôle du Comité des Ministres

119.       Le travail et les activités du Comité des Ministres couvrent :

-        le dialogue politique;

-        l’interaction avec l’Assemblée;

-       l’interaction avec le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l’Europe ;

-        l’interaction avec la Conférence des OING du Conseil de l’Europe;

-        l’invitation à de nouveaux Etats membres à adhérer à l’Organisation;

-        le suivi des engagements des Etats membres;

-        l’adoption de conventions et d’accords;

-        l’adoption de recommandations aux Etats membres;

-        l’adoption du budget et du programme des activités intergouvernementales;

-        a mise en œuvre des programmes de coopération et d’assistance;

-        la supervision de l’exécution des jugements de la Cour européenne des droits de l’homme.

120.       Les relations entre le Comité des Ministres et l'Assemblée parlementaire prennent diverses formes:

-        le rapport statutaire du Comité des Ministres et sa présentation à l’Assemblée par le Président du Comité des Ministres;

-        les demandes d'avis du Comité à l'Assemblée;

-        les suites données aux recommandations de l'Assemblée;

-        les réponses aux questions orales et écrites;

-        le Comité Mixte.

121.       Le Président du Comité des Ministres présente un exposé sur les activités du Comité des Ministres lors de la session de mai du Congrès. Cet exposé est suivi de questions pour réponse orale. Le Président du Congrès a des échanges de vues réguliers avec le Comité des Ministres. Des Représentants du Congrès sont régulièrement invités aux réunions des groupes de rapporteur et d’autres groupes subsidiaires pertinents du Comité des Ministres. Le Congrès est consulté par le Comité des Ministres dans le cadre de ses compétences.

122.        Les relations entre le Comité des Ministres et la Conférence des OING prennent la forme d’échanges de vues réguliers d’avis entre les Délégués des Ministres et le Président de la Conférence des OING. Occasionellement le Président des Délégués des Ministres participe à des réunions de la Conférence des OING.

d.       Les invitations aux nouveaux membres à adhérer à l’Organisation

123.       Le Comité des Ministres a le pouvoir d'inviter des Etats européens à devenir membres du Conseil de l'Europe (articles 4, 5 et 6 du Statut). Il peut aussi suspendre ou exclure un membre. La procédure d'adhésion commence lorsque le Comité des Ministres, ayant reçu une demande officielle d'adhésion, consulte l'Assemblée parlementaire (conformément à la Résolution statutaire (51) 30). Si le Comité décide d'accepter un Etat, il adopte une résolution invitant cet Etat à adhérer. L'invitation précise le nombre de sièges dont l'Etat disposera à l'Assemblée ainsi que sa contribution au budget (article 6 du Statut). Récemment, les invitations comportaient aussi plusieurs conditions concernant la mise en œuvre des réformes démocratiques dans l'Etat candidat.

124.       L'article 15.c. du Statut stipule que le Comité des Ministres "examine les mesures propres à réaliser le but du Conseil de l'Europe, y compris la conclusion de conventions et d'accords". Près de 200 traités sont maintenant ouverts à la signature.

125.       L'article 20 du Statut stipule que l'adoption d'un traité exige la majorité des deux tiers des voix exprimées et la majorité des représentants ayant le droit de voter. Les conventions ne sont obligatoires que pour les Etats qui les ratifient.

126.       L'article 15.b. du Statut stipule que le Comité des Ministres peut faire des recommandations aux Etats membres sur des questions pour lesquelles le Comité a décidé d'une "politique commune".

En vertu de l'article 20 du Statut, l'adoption d'une recommandation nécessite l'unanimité des voix exprimées et la majorité des représentants ayant le droit de voter. Toutefois, lors de leur 519e bis réunion (novembre 1994) les Délégués des Ministres ont décidé d'assouplir leur procédure de vote et ont adopté un "gentleman's agreement" selon lequel la règle de l'unanimité ne s'appliquerait pas à l'adoption de recommandations. Les recommandations ne sont pas obligatoires pour les Etats membres. Depuis 1993, le Comité a également adopté des recommandations conformément à son rôle concernant le suivi de la mise en œuvre de la Charte sociale européenne (article 29 de la Charte Sociale).

f.       L'adoption du budget et du programme de travail

127.       En vertu de l'article 38.c. du Statut, le Secrétaire Général doit établir chaque année un projet de budget et le soumettre à l'approbation du Comité des Ministres.

128.       Le projet de budget est présenté aux Délégués en novembre de chaque année. Il est adopté, en même temps que le Programme d'activités, sous la forme de résolutions. Le Règlement financier (article 29) prévoit que les Délégués sont assistés par un Comité du budget composé de neuf experts indépendants désignés par le Comité des Ministres parmi des candidats proposés par les gouvernements membres.

129.       Depuis 1966, le Conseil de l'Europe organise et planifie ses activités et en établit le budget dans le cadre d'un programme de travail annuel intitulé "Programme intergouvernemental d'activités". Les Délégués adoptent ce programme à la fin de chaque année et sont chargés de surveiller sa mise en œuvre. L'article 17 du Statut autorise le Comité des Ministres à constituer des "comités consultatifs ou techniques". C'est ainsi qu'ont été créés une trentaine de comités directeurs et un grand nombre (environ 70 au 1er septembre 2006) de comité d'experts ad hoc et de comités conventionnels, qui aident le Comité des Ministres à mettre en œuvre le programme d'activités.

g.       Le contrôle de l'exécution des arrêts de la Cour européenne des Droits de l'Homme

130.       Depuis 1989 une des deux réunions mensuelles du Comité des Ministres au niveau des Délégué qui ont eu lieu alors, était réservée aux fonctions qui incombent au Comité des Ministres selon la CEDH. Conformément à l'article 46 de la Convention telle qu'amendée par le Protocole n° 11, le Comité des Ministres contrôle l'exécution des arrêts de la Cour européenne des Droits de l'Homme. Le Comité des Ministres adopte une résolution finale pour clore chaque affaire. Des résolutions intérimaires peuvent être adoptées dans certains cas. Les deux types de résolutions sont publics.

131.       Les principes régissant les relations entre le Conseil de l’Europe et les Conférences sont définis dans la Résolution (71) 44 du Comité des Ministres. Le rôle joué par le Comité des Ministres dans les liens entre l’Organisation et les Conférences a trait à l’établissement de relations de travail particulières avec une Conférence, à la préparation des Conférences, la participation d’États non-membres ou d’Organisations internationales, la discussion du projet d’ordre du jour et au suivi des Conférences.

iii.       Observations du rapporteur

132.        Depuis la présentation du rapport par le Comité des Sages (1998) (voir paragraphes 37 à 39 ci-dessus), le Comité des Ministres a pris une série de décisions pour réformer les méthodes de travail, les structures et les procédures du Conseil de l’Europe. Elles ont été reproduites et commentées dans un document intitulé « Bilan des initiatives prises dans le cadre de la réforme au Conseil de l'Europe : 1999-2005 », préparé par la Direction de la planification stratégique. Quelques unes des principales réformes sont répertoriées ci-dessous :

-        en 2003, le Comité des Ministres a convenu d’un nouveau système pour les Sessions (une Session ministérielle annuelle) ; l’un des problèmes en suspens est la participation aux sessions ministérielles, dont beaucoup estiment qu’elle dépend fortement de l’ordre du jour ; depuis 2000, le Président de l’Assemblée est invité à participer aux sessions ministérielles;

-        depuis mai 2001, le Bureau du Comité des Ministres se compose de six membres : le Président, les deux Présidents précédents et les trois Présidents suivants ; aucune décision n’a encore été prise sur les propositions relatives au rôle du Bureau en tant que forum de discussion pour coordonner l'action sous les présidences successives, en particulier concernant les aspects de programmation ; tout renforcement du rôle du Bureau servirait les intérêts de l’Assemblée ; actuellement, au niveau du Comité des Ministres, il n’existe pas d’équivalent au Comité des Présidents de l’Assemblée ; en 1999 un projet de mandat pour un nouveau groupe de travail mixte Comité des Ministres - Assemblée placé sous l’égide du Comité mixte a été élaboré, mais aucune réunion n’a pour l’instant eu lieu;

-        depuis 1999, l’Assemblée est consultée sur tous les projets de convention et de protocole à l’exception de quelques traités de nature exclusivement technique (voir par.32 ci-dessus).

S’agissant de la procédure de prise de décision au sein du Comité des Ministres, le document susmentionné estime qu’un recours plus fréquent aux décisions prises à la majorité au Comité des Ministres pourrait être envisagé.

iv.        Propositions

133.       Au cours des dernières années, l’Assemblée a adopté plusieurs textes proposant un Comité des Ministres plus dynamique et politique ou des relations plus étroites entre le Comité des Ministres et l’Assemblée. A la lumière de ces initiatives et de développements nouveaux les propositions suivantes sont présentées:

-        les gouvernements devraient recourir davantage au Conseil de l’Europe et au Comité des Ministres en tant que lieu de dialogue entre les États membres et non membres de l’Union européenne ;

-        le Comité des Ministres devrait conférer davantage de responsabilité politique à son président, y compris en situation de crise ;

-        les ministres des Affaires étrangères devraient s’impliquer davantage dans les travaux du Comité des Ministres et du Conseil de l’Europe ;

-        le rôle de laboratoire d’idées du Conseil de l’Europe devrait être renforcé pour répondre aux défis du 21e siècle ;

-        le Comité des Ministres devrait accroître la transparence du Conseil de l’Europe, aussi bien au plan interne qu’externe ;

-        le rôle du Comité mixte devrait être élargi, en particulier pour ce qui concerne sa capacité de mieux coordonner les positions du Comité des Ministres et de l’Assemblée.

VIII.       LES RELATIONS INSTITUTIONNELLES ENTRE LA COUR EUROPEENNE DES DROITS DE L’HOMME (« LA COUR ») ET LE CONSEIL DE L’EUROPE

i.       Généralités

134.       La défense et le développement des droits de l’homme et des activités de la Cour constituent la priorité absolue du Conseil de l'Europe, ce qui a été confirmé dans les textes adoptés par le 3e Sommet du Conseil de l’Europe en mai 2005.

135.       La Cour, instituée par la Convention européenne des Droits de l’Homme du 4 novembre 1950, est opérationnelle depuis 1959. Elle n’est pas un organe « statutaire » du Conseil de l'Europe, lequel a été créé le 5 mai 1949, et il n’en est pas fait mention dans le Statut du Conseil17, car ce texte n’a jamais été mis à jour en ce qui concerne les organes et institutions de l’Organisation. Mais si l’on adopte la démarche plus fonctionnelle consistant à étendre la notion d’« organe » d’une organisation internationale à toute institution ou tout groupe de personnes par lesquels agit cette organisation, on constate à l’évidence que la Cour entre facilement dans cette définition. Bien que la Convention européenne des Droits de l’Homme ne laisse aucune ambiguïté quant au caractère judiciaire du statut et de la mission de la Cour, aucun texte n’a pour l’heure été adopté expliquant clairement ce que cela signifie en termes d’organisation administrative et institutionnelle du Conseil de l’Europe.

136.       La Cour est un organe judiciaire international à caractère régional. C’est la Cour internationale la plus grande et la plus active. La Convention européenne des droits de l’homme (CEDH), qui est un traité international, comporte relativement peu de dispositions concernant son organisation. Cette situation illustre la volonté des Etats contractants de laisser une grande souplesse à la Cour dans l’établissement de son statut, souplesse dont cette dernière s’est servie essentiellement dans l’adoption de son Règlement.

137.       Au cours de son échange de vues avec la Commission du Règlement et des immunités le 4 octobre 2005, le Président de la Cour a déclaré que l’adaptation des dispositions institutionnelles du Conseil de l’Europe devrait inclure l’adoption d’un texte écrit clarifiant la position de la Cour au sein de l’Organisation et remédiant à trois anomalies existantes. Il s’agissait de la responsabilité de la Cour quant à son propre personnel et de son pouvoir de supervision sur ce dernier, de la compétence de la Cour en matière budgétaire et des principes à appliquer en matière de protection sociale et de pensions des juges.

138.       A cet égard, une préoccupation essentielle est que la Cour, en dépit de son importance croissante en Europe est administrativement subordonnée aux autorités politiques et exécutives du Conseil de l’Europe. On ne peut exclure que cette situation puisse avoir des conséquences sur l’organisation interne de la Cour, en particulier en ce qui concerne son personnel et son budget.

ii.        Le statut de la Cour européenne des Droits de l’Homme («la Cour»)

139.       La CEDH n’attribue pas à la Cour de personnalité juridique distincte, et il n’existe pas d’accord séparé sur le siège de la Cour. Cette question est couverte par l'accord du 2 septembre 1949 relatif au siège du Conseil de l'Europe. Plusieurs dispositions de la CEDH contiennent une allusion directe au Conseil de l'Europe18. Au surplus, le Conseil de l'Europe abrite la Cour et le personnel de son Greffe, dont les membres sont agents de l’Organisation, c’est pourquoi le Tribunal administratif du Conseil de l'Europe a exercé ses compétences vis-à-vis de membres du Greffe de la Cour19.

140.       Lorsque le Protocole n° 11 à la CEDH portant restructuration du mécanisme de contrôle est entré en vigueur, le Comité des Ministres a adopté la Résolution (97) 9 sur le statut et les conditions de service des juges de la Cour européenne des Droits de l'Homme, en s’appuyant sur l’Article 16 du Statut du Conseil de l'Europe, qui autorise le Comité des Ministres à régler « avec effet obligatoire, toute question relative à l'organisation et aux arrangements intérieurs du Conseil de l'Europe » 20. En décembre 2004 le Comité des Ministres a adopté la Résolution (2004) 50 sur le statut et les conditions de service des juges et la Cour européenne des Droits de l'Homme qui a annulé et remplacé la Résolution (97) 9.

141.       La Cour entretient une relation institutionnelle et juridique étroite avec le Conseil de l'Europe qui est basée sur les mêmes valeurs. Elle constitue un rouage essentiel du système juridique du Conseil ; d’ailleurs, la première condition d’adhésion au Conseil de l'Europe est la signature et la ratification de la CEDH et de ses protocoles additionnels.

142.       Les avis varient sur le statut de la Cour: certains voient en elle une organisation internationale ayant sa personnalité juridique propre21 ; d’autres, un organe commun des Parties Contractantes à la CEDH ; d’autres, enfin, un « élément » ou même un organe22 du Conseil de l'Europe. Ces différences de point de vue et les incertitudes actuelles en la matière illustrent la nécessité soit d’une incorporation explicite de la Cour au Conseil de l'Europe, soit au contraire une définition claire de la Cour comme étant une entité juridique distincte du Conseil, ainsi que cela fut proposé dans les milieux universitaires.

143.       Depuis 1998, en particulier, le Greffe de la Cour a vu croître son autonomie pour des raisons liées aussi bien aux besoins de l’indépendance judiciaire qu’à ceux de l’efficacité opérationnelle.

144.       Mais la Cour n’en demeure pas moins indubitablement partie intégrante du Conseil de l'Europe. Le Comité des Sages, dans son rapport au Comité des Ministres de 1998, déclarait à juste titre qu’en réalité, « le Conseil aujourd'hui possède visiblement une structure tripolaire correspondant à ces trois axes : gouvernemental, parlementaire et judiciaire »23.

145.       D’un point de vue historique, il est intéressant de noter que le projet de Convention européenne des droits de l’homme présenté par le Mouvement européen au Conseil de l'Europe dès juillet 1949 évoquait le Conseil dans son titre : « les États parties à la Convention, membres du Conseil de l'Europe ». L’annexe au projet comprend un projet de statut de la Cour composé de soixante-trois articles24. D’autre part, les rédacteurs de la Convention européenne des Droits de l'Homme sont partis de l’idée que la Cour serait créée dans le cadre institutionnel du Conseil de l'Europe : « S’il est créé une Cour européenne, cette cour sera un organe du Conseil de l'Europe, dont les États membres prendront part à l’élection de ses membres » (Rapport de la Conférence de hauts fonctionnaires du 19 juin 1950, Doc. CM/Working Party 4 (50) 19 rev. ; A 1431, Recueil des travaux préparatoires, vol. IV (La Haye : Nijhoff 1977), p. 266.

146.       Le rapporteur propose que l’Assemblée invite le Comité des Ministres à demander au Comité des Sages, institué lors du Troisième Sommet du Conseil de l’Europe et chargé d’étudier l’efficacité du système de contrôle de la CEDH, d’examiner le statut de la Cour dans le système institutionnel du Conseil de l’Europe.

147.       De ce point de vue, rappelons que le rapport d’un groupe de travail « stratégie de la Suisse au Conseil de l’Europe » (Berne, février 2005) propose d’établir un statut de la Cour européenne des Droits de l’Homme.

iii.        Les ressources budgétaires de la Cour européenne des Droits de l’Homme

148.       Conformément à l’article 50 de la CEDH, les dépenses de la Cour sont prises en charge par le budget général du Conseil de l’Europe. Le budget de la Cour fait l’objet d’un titre particulier du budget ordinaire du Conseil de l’Europe. Concrètement, la Cour établit et approuve le projet de budget pour le prochain exercice financier sur la base des propositions de son Greffe. Ce projet est ensuite transmis au Secrétaire Général du Conseil de l'Europe, pour être inclus dans le projet de budget que le susnommé soumet tous les ans au Comité des Ministres (voir Article 38.c. du Statut)25.

149.       Il a été proposé que la Cour établisse un plan budgétaire et le soumette directement au Comité des Ministres pour approbation sous forme d’un budget séparé26 ou budget spécial. Un budget séparé pour la Cour signifierait, selon cette approche, davantage de souplesse en ce qui concerne des ressources rendues imprévisibles par le caractère incontrôlable du nombre de nouvelles requêtes.

150.        Dans ce contexte on considère de plus en plus que des ressources budgétaires allouées à d’autres activités et services du Conseil de l’Europe sont menacées d’être absorbées par la Cour. Cet argument joue un rôle majeur dans la préparation du budget général du Conseil de l’Europe pour 2007 (voir par ex. le Doc. 10 918 (2006) de l’Assemblée).

151.       Un Groupe d’évaluation du Comité des Ministres sur la Cour a conclu dans son rapport de 2001 qu’il faudrait au moins traiter les augmentations du budget de la Cour de manière distincte et sans tenir compte des critères appliqués pour fixer le budget ordinaire du Conseil de l'Europe27.

152.       Lors de son échange de vues avec la Commission du Règlement et des Immunités le 4 octobre 2005, le Président de la Cour européenne des droits de l’homme a déclaré que le rôle de la Cour en matière budgétaire portait sur des questions de principe et d’efficacité pratique. S’agissant des principes, aucune autre autorité que la Cour n’est en mesure d’évaluer le besoin de dotations budgétaires lié à la conduite de son activité judiciaire. A l’évidence, la Cour était responsable de ses dépenses devant le Comité des Ministres et il lui appartenait de plaider objectivement sa cause auprès des gouvernements quant à ses besoins budgétaires. Concernant les aspects pratiques, il était plus efficace et transparent pour la Cour de présenter son propre budget, au besoin avec l’assistance de l’administration du Conseil de l’Europe. Votre Rapporteur suggère que l’Assemblée invite le Comité des Ministres à demander au Comité des Sages créé par le troisième Sommet du Conseil de l’Europe d’examiner le système budgétaire de la Cour.

iv.       Le personnel de la Cour

153.       L’article 18, paragraphe 3 du Règlement de la Cour stipule dans sa version actuelle que "Les agents du Greffe, y compris les référendaires, mais non le Greffier ni les Greffiers adjoints, sont nommés par le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe avec l'accord du Président de la Cour ou du Greffier agissant sur les instructions du Président". Le Greffier et le Greffier adjoint sont élus par la Cour.

154.       Selon l’Article 25 de la CEDH, « la Cour dispose d’un greffe dont les tâches et l’organisation sont fixés par le Règlement de la Cour ». La Cour soutient que la nomination de son personnel doit être considérée comme faisant partie de l’organisation du Greffe et qu’il lui incombe à elle seule d’interpréter le sens de l’Article 25 de la Convention. La Cour maintient que pour assurer son indépendance et son efficacité opérationnelle, il faut lui donner le dernier mot dans les affaires de personnel, y compris les nominations et promotions. Néanmoins, sur cette question, les avis divergent au niveau du Conseil de l’Europe.

155.       Ceux qui soutiennent le contraire renvoient en général au paragraphe 66 du rapport explicatif du Protocole n° 11 à la CEDH28 qui, selon eux, montre que dans l’intention des rédacteurs du Protocole n° 11, le Secrétaire Général devait avoir la haute main sur le personnel du Greffe. Les avis divergent également sur la portée juridique des dispositions contenues dans les rapports explicatifs.

156.       Aux termes de l’Article 37.b. du Statut du Conseil de l'Europe, « le Secrétaire Général est responsable de l’activité du Secrétariat devant le Comité des Ministres ». Certains estiment que cet article peut servir à justifier l’autorité du Secrétaire Général sur le personnel du Greffe. En revanche, d’autres soutiennent que comme la Cour et le Greffe n’existaient pas en 1949, année où a été élaboré le Statut du Conseil de l'Europe, l’article en question ne peut contribuer à une telle justification et que la CEDH prime en tant que traité postérieur, dont l’Article 25 confère à la Cour un pouvoir réglementaire particulier29.

157.       Le fait que le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe nomme les agents du Greffe peut susciter différentes craintes. Il est considère en particulier qu’en cas de nomination des agents par des personnes n’appartenant pas à la Cour, il peut y avoir à la fois apparence et réalité d’influences extérieures.30

158.       Une analyse des autres juridictions internationales montre que le pouvoir effectif de nomination du personnel revient invariablement à ces juridictions elles-mêmes31. Dans ce contexte on souligne qu’en général des autorités extérieures ont peu d’expérience ou de connaissance des procédures de travail complexes du Greffe d’une Cour.

159.       L’« unité du personnel» entre la Cour et le Conseil évite une répétition des tâches administratives et permet le passage des agents entre les deux institutions. Par ailleurs, ce qui garantit l’indépendance de la Cour, c’est l’élection directe du Greffier et du Greffier adjoint par les juges ; c’est aussi la condition selon laquelle toutes les autres nominations doivent être approuvées par le Président de la Cour32 ; en outre, il incombe aux juges, non au Greffe, de prendre les décisions pour que l’indépendance judiciaire ne soit pas menacée ; enfin, l’indépendance des juges est garantie par leur mode de nomination et le fait que les juristes du Greffe agissent sur instruction de la Cour.

160.       En cas de désaccord entre le Secrétaire Général et le Président de la Cour, les règles actuellement en vigueur peuvent conduire dans l’impasse les nominations au Greffe. Il est donc nécessaire, à tout le moins, d’envisager la mise en œuvre d’un mécanisme destiné à éviter ce genre de blocage.

161.       Les efforts déployés dans le passé en vue de parvenir à un accord sur les relations entre le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe et le Président de la Cour n’ont pas abouti.33Pendant l'été 2004 l'ancien Secrétaire Général du Conseil de l'Europe a suggéré la création d'une commission d'arbitrage pour régler les divergences au sujet des nominations. Il est à noter enfin que dans le cadre du projet de budget pour 2007 le reclassement du poste de Greffier de la Cour (A7) en poste « hors cadre » et le reclassement du Greffier adjoint (A6) en poste A7 ont été proposés.

162.       Au cours de son échange de vues avec des membres de la Commission du Règlement et des Immunités le 4 octobre 2005, le Président de la Cour européenne des droits de l’homme a souligné inter alia que la Cour n’était pas en mesure de nommer, d’assurer la promotion ou la discipline de son personnel, bien qu’il soit un élément indispensable du processus judiciaire. La Cour devrait se voir confier la responsabilité de son propre personnel et disposer d’un pouvoir de supervision sur ce dernier.

163.       Le rapporteur propose que l’Assemblée invite le Comité des Ministres à demander au Comité des Sages créé lors du Troisième Sommet du Conseil de l’Europe d’examiner le fonctionnement administratif de la Cour.

v.       Statut des juges et propositions

164.       Selon l’Article 22 de la CEDH, les juges de la Cour sont élus par l’Assemblée parlementaire pour un mandat de six ans renouvelable, mais l’Article 2 du Protocole n° 14 à la CEDH, adopté à la 114e session du Comité des Ministres (en mai 2004) institue pour eux un mandat non reconductible de neuf ans afin d’assurer une plus grande continuité aux travaux de la Cour et d’offrir à chaque juge un degré supérieur d’indépendance et d’impartialité.

165.       Pour ce qui concerne la protection sociale, l’Article 5 (annexe) de la Résolution (2004) 50 du Comité des Ministres dispose que les juges sont tenus de veiller à souscrire à leurs frais une assurance adéquate. Le 4 octobre 2005, le Président de la Cour européenne des droits de l’homme a informé la Commission du Règlement et des Immunités que les juges n’avaient aucune possibilité d’acquérir des droits à pensions.

166.       Le rapport susmentionné du groupe de travail "Stratégie de la Suisse au Conseil de l’Europe" estime qu’un statut der la Cour devrait contenir des conditions d’emploi qui correspondent à celles de juges d’un niveau international.

167.       Le rapporteur propose que l’Assemblée invite le Comité des Ministres à demander au Comité des Sages créé lors du troisième Sommet du Conseil de l’Europe d’examiner le statut des juges.

vi.       Exécution des jugements de la Cour

168.       Compte tenu du grand engagement de l’Assemblée concernant cette question essentielle (cf le document AS/Jur (2006) 18), la Commission du Règlement et des immunités à jugé nécessaire de proposer que le Groupe de Sages examine le rôle de l’Assemblée et aussi des parlements nationaux pour assister le Comité des Ministres en sa qualité d’instance de supervision et d’exécution des jugements de la Cour.

IX.       LE CONGRES DES POUVOIR LOCAUX ET REGIONAUX DU CONSEIL DE L’EUROPE

i.       Évolution1

169.       Depuis la création du Congrès par la Résolution statutaire (94) 3, le rôle des pouvoirs locaux et régionaux en Europe a considérablement évolué. Parallèlement, une décentralisation des pouvoirs publics est intervenue pratiquement partout. Ceci explique la place différente qu’occupe le Congrès au sein du système institutionnel du Conseil de l’Europe par rapport à 1994. Par ses activités, le Congrès a dépassé le rôle consultatif qui lui a été attribué dans les textes statutaires. Le Comité des Ministres lui a confié de nouvelles tâches importantes telles que l’activité de suivi liée à la démocratie territoriale et qui repose sur la Charte européenne de l’Autonomie locale. Le Congrès soutient la création d’associations nationales et de réseaux de collectivités locales, notamment dans les régions délicates telles que l’Europe du Sud-Est, les Balkans ou le Caucase du Sud. Il met en œuvre une autre convention majeure du Conseil de l’Europe, en l’occurrence la Convention de Madrid sur la coopération transfrontalière des collectivités ou autorités territoriales. A cet égard, le Congrès travaille intensément à la création d’euro-régions d’un nouveau type qui devraient réunir tous les pays membres et non membres de l’Union européenne autour des mers semi-fermées d’Europe, l’Adriatique, la Baltique et la Mer noire. Pour soutenir au plan technique la Convention de Madrid, le Congrès a proposé la création à Saint-Pétersbourg d’un centre européen pour la coopération régionale et transfrontalière.

ii.       Propositions

170.       Le 12 avril 2006, le Président de l’époque du Congrès, M. di Stasi a déclaré devant la Commission du Règlement et des Immunités qu’un Congrès doté de fonctions et de responsabilités si vastes et connaissant une telle évolution positive ne pouvait être un organe purement consultatif. Le nouveau rôle et profil du Congrès devraient être reconnus en tant que tels sans la structure institutionnelle du Conseil de l’Europe. Le Conseil de l’Europe a besoin d’un Congrès puissant. Le nouveau Président du Congrès, M.Skard, a souligné le rôle politique renforcé du Congrès et sa fonction majeure de développer la démocratie territoriale en Europe (cf. par ex. son exposé devant les Délégués des Ministres le 13 septembre 2006).

171.       Le Rapporteur convient de ces déclarations et propose d’inviter le Comité des Ministres:

-       à mettre en œuvre la Recommandation 162 (2005) du Congrès et de faire du Congrès une institution composée exclusivement de membres élus ;-

-       de faire pleinement usage du potentiel du Congrès pour promouvoir la décentralisation des pouvoirs et étendre l’autonomie locale en Europe ;

-       à demander plus régulièrement l’avis du Congrès avant de prendre des décisions sur des sujets relevant de ses compétences.X

X.       CONFERENCE DES OING DU CONSEIL DE L’EUROPE

i.        Evolution

172.       Les Chefs d’Etat et de Gouvernement des Etats Membres du Conseil de l’Europe ont décidé lors du Sommet de Varsovie de renforcer la participation des ONG dans les activités du Conseil de l’Europe en tant qu’élément essentiel de la contribution de la société civile à la transparence et responsabilité du gouvernement démocratique.

173.       Depuis la création du statut consultatif des OING en 1952, les OING ont joué un rôle croissant et structuré dans le Conseil de l’Europe. Leur statut a été relevé d’un statut consultatif à un statut participatif en accord avec la Résolution (2003) 8 du Comité des Ministres. Les OING ont créé leur propre Commission de Liaison, 10 groupes à thèmes, et, depuis janvier 2005, elles sont représentées au Conseil de l’Europe par la Conférences des OING. Depuis des années les OING dotées du statut participatif et ces structures ont participé activement dans les travaux intergouvernementaux et dans les auditions parlementaires.

174.       Ce développement est reflété dans la Résolution (2005) 47 du Comité des Ministres, qui donne la possibilité à la Conférence des OING de participer à des réunions des comités intergouvernementaux et aux instances subsidiaires en tant que « participants», avec le même statut que les représentants de l’Assemblée et du Congrès.

ii.       Propositions

175.       La situation de la représentation des OING au Conseil de l’Europe diffère maintenant de celle qui a prévalu en 1952 quand le statut consultatif a été créé. La Conférence des OING a évolué vers un acteur politique dans le système institutionnel du Conseil de l’Europe. Le dialogue et la coopération entre les commissions de l’Assemblée et la Conférence des OING du Conseil de l’Europe ainsi que de ses groupes pourrait être renforcée. Le Comité des Ministres pourrait demander plus régulièrement l’avis de la Conférence des OING avant de prendre des décisions sur les sujets relevant de sa compétence.

XI.       CONCLUSIONS

176.       Si nous voulons éviter que le Conseil de l’Europe ne prenne un retard au plan institutionnel, des réformes institutionnelles de grande envergure seront indispensables. L’équilibre institutionnel au sein du Conseil de l’Europe devrait être amélioré grâce notamment à la conclusion d’un accord entre le Comité des Ministres et l’Assemblée et, au besoin, l’actualisation du Statut du Conseil de l’Europe par des résolutions statutaires. Le statut de la Cour européenne des droits de l’homme au sein du Conseil de l’Europe devrait être clarifié dans un texte écrit. Par ailleurs, le rôle du Congrès et de la Conférence des OING en liaison avec le Comité des Ministres devrait être renforcé.

177.       Les propositions émises dans la recommandation incluse dans ce rapport devraient être examinées par le Comité mixte et un groupe de travail mixte Comité des Ministres - Assemblée. La Cour européenne des Droits de l’Homme et l’Assemblée devraient être étroitement associées. Par ailleurs il conviendrait de créer un Groupe permanent chargé de livrer des conseils sur des questions institutionnelles et faisant office de médiateur entre les organes et les institutions du Conseil de l’Europe.

178.       Un rapport sur les relations entre le Comité des Ministres et l’Assemblée, qui a été approuvé par le Comité mixte en janvier 2001, développait le concept de la responsabilité conjointe du Comité des Ministres et de l’Assemblée à l’égard du Conseil de l’Europe [voir Doc. AS/CM/Mix/Working Group (2001)1]. Il serait bénéfique pour l’Organisation dans son ensemble que, suite aux propositions de son partenaire institutionnel le plus proche, l’Assemblée, le Comité des Ministres convienne de renforcer les institutions majeures du Conseil de l’Europe.

Commission chargée du rapport : commission du Règlement et des Immunités

Renvoi en commission: Doc. 10106 rév., Renvoi n° 2946 du 26 avril 2004 prolongé le 17 mars 2006

Projet de recommandation adopté à l’unanimité par la commission le 7 septembre 2006

Membres de la commission : M. Andreas Gross (Président), M. Andrea Manzella (1er Vice-Président), Mme Ganka Samoilovska-Cvetanova (2ème Vice-Présidente), M. Mats Einarsson (3ème Vice-Président), M. Sándor Albert, M. Alexander Arabadjiev, M. Birgir Ármansson, Mme Olena Bondarenko, Mme Anne Brasseur, M. Erol Aslan Cebeci, M. Manlio Collavini, Mme Helen d’Amato, M. Miljenko Dorić, M. Adolfo Fernández Aguilar, M. Herbert Frankenhauser, M. Tihomir Gligorić, M. John Greenway, Mme Arlette Grosskost, M. Gerd Höfer, M. Ali Huseynov, M. Tomáš Jirsa, M. Armand Jung, M. Erik Jurgens, M. Attila Gruber, Mme Mojca Kucler-Dolinar (remplaçant: M. Dimitrij Kovačič), M. Markku Laukanen, M. Jan Filip Libicki, M. Alan Meale, Mme Ana Caterina Mendonça, M. Jakob-Axel Nielsen, M. Nikolaos Nikolopoulos, M. Alexey Ostrovsky, Mme Eli Sollied Øveraas, Mme Maria Postoico, M. Christos Pourgourides, M. Armen Rustamyan, M. Peter Schieder, M. Yuri Sharandin, M. Gintaras Šileikis, Mme Rodica Mihaela Stănoiu, M. Karim Van Overmeire, M. G. V. Wright (remplaçant: M. Paschal Mooney)

N.B.: Les noms des membres qui ont participé à la réunion sont indiqués en gras.

Secrétariat de la commission: M. Heinrich, Mme Clamer


1 Rappelons que la Recommandation 1728 demande au Comité des Ministres de reconnaître à l’Assemblée de tels pouvoirs budgétaires en amendant l’article 38 du Statut (en se fondant sur la procédure simplifiée prévue à l’article 41.d du Statut), en ajoutant, après le paragraphe c., deux nouveaux paragraphes.

2 Le rapporteur remercie également M. Andreas Gross, Président de la Commission, pour avoir accepté de consacrer plusieurs réunions à débattre da la question, M. Peter Leuprecht, ancien Secrétaire Général adjoint du Conseil de l’Europe pour ses conseils et le Secrétariat de la Commission (M. Heinrich et Mme Clamer).

3 Pour une récente analyse très complète de cette question, cf la thèse de Eve Sariyiannidou sur „Institutional balance and democratic legitimacy in the decision-making process of the EU“, juillet 2006 (université de Bristol)

4 Voir la publication « La démocratie, ses principes et ses réalisations » par l’UIP, Genève,1998, pp. III à VIII, 14.15.

5 Voir le texte reproduit dans la publication précitée de UIP, pp.17 à 19.

6 Voir les discussions sur la Recommandation 1458 (200) de l’Assemblée: dans son avis sur ce texte – Doc. 9497 – un comité d’experts (CAHDI) indiquait que la mise en œuvre de la recommandation modifierait la manière même dont le Conseil de l’Europe avait fonctionné jusqu’ici.

7 Il est rappelé qu’entre 1955 et 1998 les décisions prises par le Comité des Ministres ayant établi qu’il y a une violation par une Haute Partie Contractante de la CEDH étaient contraignantes pour l’Etat concerné.

8 En 1951, plusieurs articles du Statut relatifs à l’Assemblée (articles 23 à 35) et l’article 38 (budget) ont été amendés. Depuis lors, seul l’article 25 (composition de l’Assemblée) a été modifié, en 1953 et 1970, et l’article 26 (nombre de sièges des États membres de l’Assemblée) a été modifié en 1978, puis régulièrement adapté lors de l’adhésion de nouveaux États membres au Conseil de l'Europe.

9 Depuis 1949, le Comité des Ministres du Conseil de l’Europe a adopté une série de « résolutions statutaires » qui, tout en étant explicitement compatibles avec le Statut, soit ont complété des dispositions statutaires (articles 4, 5 et 8 sur l’adhésion et les sanctions ; article 15 sur les conventions ; article 20 sur les majorités requises pour les décisions du Comité des Ministres ; articles 36, 37 sur l’élection par l’Assemblée de son Secrétaire général également), soit ont instauré de nouveaux organes pour le Conseil de l’Europe (Congrès des pouvoirs locaux et régionaux, Comité mixte, …) ou de nouveaux mécanismes (statut d’observateur, accords partiels et élargis ; relations avec des Organisations Internationales, des ONG et possibilité de créer des autorités spécialisées).

10 D’un point de vue historique, il est intéressant que, dans un article du 6 mai 1949 décrivant la cérémonie de la signature du Statut du Conseil de l’Europe, le « Times » ait parlé de l’Assemblée comme de la « Deuxième Chambre » du Conseil de l’Europe.

11 Voir à cet égard Georges Rencki, « L’Assemblée du Conseil de l’Europe – essai de définition de sa nature juridique » Paris, 1956 et plus récemment, Jerzy Jaskiernia, «  The Parliamentary Assembly of the Council of Europe» Varsovie, 2003

12 Voir la déclaration du Président du Comité des Ministres lors de la réunion de la Commission permanente à Maastricht le 25 novembre 2003. Voir aussi, à titre de comparaison avec le Parlement Européen, la thèse susmentionnée par Eve Sariyiannidou, pp. 81 à 100.

13 Dans sa réponse à la Question écrite n° 418, le Président du Comité des Ministres réaffirmait qu’il est intimement persuadé de la valeur des travaux de l’Assemblée pour le Conseil de l’Europe tout entier, pour ses Etats membres qui en sont les bénéficiaires et pour le processus de l’unification européenne.

14

Un très bon exemple récent de coopération entre le Comité des Ministres et l’Assemblée est l’élaboration d’un projet de résolution pour l’Assemblée générale des Nations Unies sur la coopération entre les NU et le Conseil de l’Europe.

15 Par exemple, la Cour européenne des Droits de l’Homme ne peut pas être saisie par l’Assemblée ; l’Assemblée n’est pas non plus mentionnée à l’Article 46 de la CEDH (tel que modifié par le Protocole n° 14).

16 Pour la procédure de nomination aux postes A6 et A7 à l’Assemblée entre 1963 et 1994, voir AS/Pro (2006) 11 rév.; s’agissant de réformes administratives majeures (personnel) il est rappelé que dans le passé l’Assemblée a occasionnellement regretté un manque de consultation (p.ex réunion du Bureau du 23 mars 1973 au sujet du « Management Survey » du Conseil de l’Europe)

17 Les efforts de l’Irlande et de la France visant à intégrer un catalogue des droits de l'homme dans le Statut du Conseil de l'Europe n’ont pu aboutir.

18 Article 22 (élection des juges), Article 46, paragraphe 2 (exécution des arrêts), Article 50 (frais de fonctionnement de la Cour), Article 51 (privilèges et immunités des juges) et Article 52 (droit du Secrétaire Général de faire des enquêtes). En outre, l’Article 54 de la CEDH prévoit que la Convention ne porte pas atteinte aux pouvoirs conférés au Comité des Ministres par le Statut du Conseil de l'Europe.

19 Arrêt du 25.11.1994 sur le recours 191/1994 et arrêt du 27.03.2000 sur le recours 255/1999.

20 On notera aussi que dans ses déclarations à l’adresse du juge d’instance des Etats-Unis qui jugeait l’affaire Morgan, le Conseil de l'Europe n’a cessé ainsi de d’appeler le principal défendeur « le Conseil de l'Europe, y compris la Cour européenne des Droits de l'Homme » - Affaire 02-CV-891 (CBA) (LB), juge d’instance des Etats-Unis pour le District Est de New York, Rapport et recommandation de M. Lois Bloom (United States Magistrate Judge (juge de première instance) ; décision du 31 décembre 2002 (non publiée).

21 Cf. George Ress, Die Organisationsstruktur internationaler Gerichte, insbesondere des neuen Europäischen Gerichtshofes für Menschenrechte, in : Liber Amicorum, Prof. Seidl-Hohenveldern, 541, 546 f, 553, 573.

22 J. Velu, /R. Ergec, « La Convention européenne des droits de l'homme », Bruxelles, Bruylant ; 1990, p. 702 et 703.

23 « Construire une grande Europe sans lignes de partage », rapport du Comité des Sages au Comité des Ministres, 1998, I.2 N° 22.

24 Le projet établit plusieurs liens avec le Conseil de l'Europe en ce qui concerne l’élection des juges, la fixation du siège de la Cour par le Conseil, la fixation des traitements, allocations et indemnités des juges, le régime de retraite des juges et du Greffier et le remboursement de leurs frais de voyage, par les membres du Comité des Ministres du Conseil qui représentent les Parties Contractantes. Le projet de statut stipule aussi que les frais de la Cour sont à la charge des États parties à la CEDH.

25 On notera qu’en adoptant la Résolution (97) 9 sur le statut et les conditions de service des juges de la Cour européenne des Droits de l'Homme, le Comité des Ministres a décidé « que les crédits affectés au fonctionnement de la Cour (y compris les traitements des juges) font partie intégrante du budget du Conseil de l'Europe sous un titre clairement identifié ».

26 Norbert Paul Engel, EuGRZ 2003, 122, 133.

27 Voir à cet égard l’approche différente de Maud de Boer-Buquicchio, EuGRZ 2003, 561, 562.

28 Rapport explicatif, http://conventions.coe.int/Treaty/en/Reports/Html/155.htm.

29 Ce point de vue est appuyé par le fait que les discussions au sein du Secrétariat du Conseil de l’Europe en 1953, donc avant la création de la Cour, tendaient vers «un Greffe responsable seulement devant la Cour et dont les tâches sont régies par le Règlement de la Cour (article 55)», Doc. CM (53) 135, mémorandum concernant le Secrétariat de la Commission européenne des droits de l’homme, p.2. Toutefois, en 1958 la Direction des droits de l’homme a préparé un document qui a été transmis au Comité des Ministres au nom du Secrétaire Général et qui envisage qu’il « peut néanmoins paraître convenable à la Cour avant de prendre une décision (sur les tâches de son Greffier et l’organisation du Greffe) de consulter le Comité des Ministres et le Secrétaire Général en vue de trouver une solution qui sauvegardera l’indépendance de la Cour et assurera son fonctionnement satisfaisant tout en évitant le gaspillage d’énergies, les doubles emplois et des dépenses non nécessaires», Doc. CM (58) 114, « problèmes de la constitution de la Cour européenne des Droits de l’Homme».

30 Voir « Nomination des agents du Greffe » (du le 8 juillet 2004), document établi par la Commission du Règlement de la Cour, p. 6.

31 Voir Article 25 du Règlement de la Cour pour la Cour internationale de Justice et l’Article 20 § 1 du Règlement de la Cour européenne de Justice. Il est à noter, cependant, que le personnel de l’instance de recours de l’OMC est nommé par le Directeur général de cette organisation.

32 Article 18, paragraphe 3 du Règlement de la Cour.

33 Il existe de tels accords, par exemple, à la Cour interaméricaine des droits de l’homme ou au Tribunal international pour le droit de la mer. Paul Mahoney a suggéré, à titre minimum, la conclusion d’un accord sur les relations entre le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe et la Cour européenne des Droits de l’Homme dans l’article qu’il a donné au Human Rights Law Journal, Vol 24, 2003, P. 152 – 161, sous le titre « Separation of powers in the Council of Europe : The status of the European Court of human rights vis-à-vis the authorities of the Council of Europe »