Recueil des amendements écrits (Version finale)
- Doc. 14083
- Les droits de l’homme dans le Caucase du Nord: quelles suites donner à la Résolution 1738 (2010)?
Index du compendium
Amendement 8Amendement 9Amendement 10Amendement 11Amendement 12Amendement 13Amendement 14Amendement 15Amendement 16Amendement 1Amendement 33Amendement 17Amendement 18Amendement 19Amendement 20Amendement 22Amendement 21Amendement 23Amendement 2Amendement 24Amendement 5Amendement 3Amendement 4Amendement 6Amendement 25Amendement 27Amendement 26Amendement 28Amendement 29Amendement 7Amendement 30Amendement 31Amendement 32
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Projet de résolution
1L’Assemblée parlementaire rappelle sa Résolution 1738 (2010) sur les recours juridiques en cas de violations des droits de l’homme dans la région du Caucase du Nord et sa Résolution 1479 (2006) «Les violations des droits de l’homme en République tchétchène: la responsabilité du Comité des Ministres à l’égard des préoccupations de l’Assemblée», dans lesquelles elle déplorait les violations systématiques des droits de l’homme et le climat d’impunité qui règne dans la région.
2L’Assemblée réitère sa ferme condamnation de tous les actes de terrorisme et fait part de sa compassion et de sa solidarité aux familles de toutes les victimes de la violence dans cette région troublée.
3L’Assemblée observe avec regret que les recommandations particulières adressées aux autorités russes compétentes dans sa Résolution 1738 (2010), adoptée à l’unanimité avec le soutien sans réserve de la délégation russe, n’ont toujours pas, dans l’ensemble, été mises en œuvre. En particulier:
3.1les méthodes de règlement des conflits non violentes fondées sur le dialogue, par exemple l’action menée par les «commissions de réinsertion», ont été très largement abandonnées (comme au Daghestan) ou n’ont jamais fait l’objet de tentatives sérieuses (comme en République tchétchène); les autorités ingouches, en revanche, méritent d’être félicitées pour avoir cherché constamment à réinsérer les militants qui souhaitaient revenir à la vie civile. Le dialogue avec les groupes musulmans, comme la communauté salafiste, a été remplacé par des actes de harcèlement et d’intimidation, en particulier en République tchétchène et au Daghestan;
3.2la coopération avec la société civile et les avocats est restée très limitée. En République tchétchène, mais également au Daghestan, les groupes de défense des droits de l’homme, comme le Comité contre la torture de Nijni-Novgorod, lauréat du Prix des droits de l’homme de l’Assemblée 2011, le Centre des droits de l’homme «Memorial» et «MASHR», ainsi que leurs dirigeants et leur personnel, ont été victimes d’actes de violence commis par la foule, d’incendies criminels, d’agressions physiques et d’actes d’intimidation. Les avocats qui défendent les victimes de violations des droits de l’homme sont eux-mêmes devenus la cible d’agressions, d’actes d’intimidation et de chefs d’accusation fabriqués de toutes pièces en représailles à leur action;
3.3les membres des forces de sécurité et des services répressifs continuent à recourir à des moyens illégaux, comme les enlèvements et les détentions secrètes, les exécutions extrajudiciaires et la torture, et jouissent toujours d’une impunité presque complète. La quasi-totalité des crimes dont ont été victimes les personnes auxquelles l’Assemblée a rendu hommage dans sa Résolution 1738 (2010) restent impunis;
3.4l’exécution des 225 arrêts rendus par la Cour européenne des droits de l’homme («la Cour») dans les affaires du «groupe Khashiyev», qui portent sur de très graves violations des droits de l’homme commises par les membres des forces de sécurité et sur l’absence d’enquêtes menées par les autorités compétentes, demeure extrêmement insatisfaisante, malgré l’application par le Comité des Ministres de la procédure de surveillance soutenue. En particulier:
3.4.1les «unités d’investigation spéciales» créées tout spécialement pour examiner les affaires dans lesquelles la Cour a constaté une absence d’enquête ont produit de maigres résultats;
3.4.2un «organe unique et de haut niveau» chargé de rechercher les personnes disparues et d’assurer la mise à disposition des ressources nécessaires pour des travaux médico-légaux et scientifiques à grande échelle au sein d’un mécanisme centralisé et indépendant, recommandé par la Cour elle-même, le Comité international de la Croix-Rouge (CICR), l’Assemblée parlementaire et le Comité des Ministres, n’a toujours pas été mis en place; la République tchétchène ne s’est pas davantage dotée d’un laboratoire médico-légal capable d’effectuer des tests ADN;
3.4.3les autorités comptent de plus en plus sur l’extinction des délais de prescription et les amnisties pour garantir l’impunité y compris au petit nombre d’auteurs de violations des droits de l’homme qui ont été identifiés, malgré les exhortations en sens contraire de l’Assemblée et du Comité des Ministres;
3.5en République tchétchène, les autorités continuent à entretenir un climat de peur sous-jacente, dans une atmosphère de personnalisation du pouvoir. Le dirigeant de la République a publiquement proféré des menaces à l’encontre des opposants politiques, des militants de la défense des droits de l’homme et de leurs familles, y compris d’autres régions de la Fédération de Russie et au-delà;
3.6la dégradation de la situation des femmes et jeunes filles en République tchétchène se poursuit en raison de l’application rigoureuse de normes religieuses. Le dirigeant de la République tchétchène fait une promotion active de l’application de dispositions fondées sur le droit coutumier tchétchène, les adats, et d’une interprétation de la charia qui établit une discrimination à l’égard des femmes et jeunes filles en matière de droit de la famille, en infraction avec le droit russe. La violence domestique et les pratiques prétendument «traditionnelles» préjudiciables aux femmes et aux jeunes filles, comme les mariages arrangés et précoces, voire les crimes dits d’honneur, sont largement répandues et tolérées par les autorités régionales.
4L’Assemblée observe par conséquent que la situation de la protection des droits de l’homme et du respect de l’Etat de droit au Caucase du Nord demeure l’une des plus graves de l’ensemble de l’espace géographique du Conseil de l’Europe.
5L’Assemblée considère que les violations systématiques des droits de l’homme et l’impunité de leurs auteurs ne peuvent que favoriser un accroissement supplémentaire des mouvements extrémistes. La brutalité endémique des forces de sécurité et l’absence de justice créent des conditions propices à la radicalisation, ainsi qu’à l’affaiblissement du soutien accordé aux autorités par la population dans son ensemble et de la volonté de coopération des militants avec le système judiciaire en vue de démanteler les réseaux terroristes.
6L’Assemblée se félicite de la création, par un consortium d’organisations de défense des droits de l’homme très respectées dirigé par le Comité Helsinki de Norvège, du Centre de documentation Natalya Estemirova à Oslo; il s’agit d’une suite positive donnée par la société civile à l’appel lancé par l’Assemblée dans sa Recommandation 1922 (2010) sur les recours juridiques en cas de violations des droits de l’homme dans la région du Caucase du Nord, en faveur de la création d’un système de conservation des dépositions de témoins, documents et éléments de preuve à l’appui des violations des droits de l’homme commises dans la région.
7L’Assemblée réitère par conséquent son appel lancé aux autorités russes, afin qu’elles:
7.1luttent contre le terrorisme avec les instruments dont dispose un Etat de droit, en enquêtant sur les crimes commis par les terroristes et en engageant des poursuites à l’encontre de leurs auteurs, tout en identifiant les causes profondes de la radicalisation actuelle et de l’augmentation de l’extrémisme religieux et en y remédiant grâce au dialogue interculturel et interreligieux;
7.2mettent un terme au climat d’impunité, en identifiant tous les auteurs de violations des droits de l’homme, y compris les membres des forces de sécurité, et en les amenant à répondre de leurs actes conformément à la législation;
7.3suivent l’exemple des autres pays qui sont contraints de lutter contre le terrorisme et cherchent à coopérer avec eux, surtout pour la mise en œuvre de stratégies de promotion de la coopération des suspects avec le système judiciaire, en vue de démanteler les organisations terroristes, mais également les réseaux criminels au sein des forces de sécurité;
7.4coopèrent étroitement avec la société civile, et en particulier avec les défenseurs des droits de l’homme, et protègent efficacement le personnel de ces ONG contre les actes de représailles;
7.5intensifient leur coopération avec le Comité des Ministres pour l’exécution des arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme, et notamment pour la mise en œuvre:
7.5.1des mesures individuelles destinées à élucider les affaires d’enlèvement, de meurtre et de torture dans lesquelles la Cour a conclu à une absence d’enquête effective, y compris les mesures qui permettent d’éviter que l’extinction des délais de prescription et l’amnistie ne garantissent l’impunité des auteurs de ces crimes;
7.5.2des mesures générales visant à créer des conditions propices à des enquêtes menées en bonne et due forme, comme la création d’un «organe unique et de haut niveau» chargé de rechercher les personnes disparues et doté des moyens nécessaires à cette fin (paragraphe 3.4.2 ci-dessus);
7.6demandent systématiquement, et dès que faire se peut, la publication des rapports du Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT) consacrés à la région du Caucase du Nord et intensifient leur coopération avec le CPT, en vue de mettre un terme à l’usage de la torture et des traitements inhumains ou dégradants dans cette région.
8L’Assemblée réitère son appel lancé à tous les autres Etats membres et Etats observateurs du Conseil de l’Europe, afin qu’ils:
8.1coopèrent avec les autorités russes dans la lutte contre le terrorisme, tout en insistant sur le respect scrupuleux de la Convention européenne des droits de l’homme (STE no 5), selon l’interprétation retenue par la Cour;
8.2accordent une protection adéquate aux réfugiés de la région du Caucase du Nord et traitent avec une attention et un soin particuliers toute demande d’extradition les concernant.
9L’Assemblée invite sa commission pour le respect des obligations et engagements des Etats membres du Conseil de l'Europe (commission de suivi) à continuer à accorder une attention particulière à la situation des droits de l’homme dans la région du Caucase du Nord, surtout en République tchétchène. Elle rend hommage au CPT pour son action dans la région et invite le CPT et le Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe à maintenir et à intensifier leur engagement.
Projet de recommandation
1L’Assemblée parlementaire se réfère à sa Résolution ... (2016) «Les droits de l’homme dans le Caucase du Nord: quelles suites donner à la Résolution 1738 (2010)?» et souligne qu’elle considère toujours la situation de la protection des droits de l’homme et du respect de l’Etat de droit dans la région du Caucase du Nord comme l’une des plus graves et les plus délicates de l’espace géographique du Conseil de l’Europe.
2En conséquence, elle invite le Comité des Ministres à continuer à accorder la plus grande attention à l’évolution de la situation des droits de l’homme dans la région du Caucase du Nord, en particulier en République tchétchène, notamment en se prévalant de sa faculté de suivi de la situation de la démocratie, des droits de l’homme et de l’Etat de droit dans le Caucase du Nord, conformément à la Déclaration du Comité des Ministres du 10 novembre 1994 sur le respect des engagements pris par les Etats membres du Conseil de l'Europe.
3S’agissant de l’exécution des arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme qui concernent la région du Caucase du Nord, l’Assemblée félicite le Comité des Ministres de placer ces affaires sous surveillance soutenue et l’encourage à continuer de mettre l’accent sur les mesures individuelles et générales destinées à mettre un terme au climat d’impunité, et en particulier à continuer de résister aux tentatives des autorités russes, qui cherchent à profiter de la prescription et des lois d’amnistie pour assurer une impunité complète aux auteurs des violations des droits de l’homme même les plus flagrantes.