Liste des amendements
Imprimer

Recueil des amendements écrits (Version finale)

  • Doc. 14228
  • Médias en ligne et journalisme: défis et responsabilités

Index du compendium

Amendement 1Amendement 2Amendement 3Amendement 4Amendement 5Amendement 6Amendement 7

  • Légende :
  • Pour
  • Contre
  • Non voté
  • Retiré

Projet de résolution

1L’Assemblée parlementaire reconnaît les changements radicaux intervenus dans le paysage médiatique à la suite de la convergence entre les médias traditionnels, internet et les télécommunications mobiles et de l’apparition de nouveaux types de médias, tels que les plates-formes de contenus utilisateurs et les outils d’agrégation qui réunissent automatiquement des contenus médiatiques provenant de tiers. Dans ce nouveau contexte, le lecteur, ou le spectateur, contribue activement à la chaîne d’information, non seulement en sélectionnant l’information, mais aussi, souvent, en la produisant. Tandis qu’auparavant, les journalistes et rédacteurs en chef contrôlaient la diffusion publique de l’information, les nouveaux médias en ligne offrent à tous la possibilité de diffuser des informations et des points de vue au grand public. Ces nouveaux outils permettent donc aux particuliers de contourner les médias traditionnels, renforçant ainsi le pluralisme des médias, par le biais de blogs d’investigations, par exemple.

2L’évolution du paysage médiatique concerne aussi le mode de financement des médias. En effet, alors qu’autrefois, les abonnements représentaient pour ces derniers une source stable de revenus, à l’heure de l’accès gratuit aux médias, les internautes sont moins disposés à payer des abonnements. De même, les revenus qui provenaient autrefois d’une publicité diffusée dans la presse et sur les ondes sont aujourd’hui liés à la publicité ciblée sur internet, qui exploite les profils établis à l’aide des données personnelles des internautes. L’Assemblée est extrêmement préoccupée par le fait que, sous l’effet du transfert de ressources depuis les médias vers les fournisseurs de services internet et les réseaux sociaux, le travail journalistique professionnel recule, tandis que les médias en ligne, qui ne respectent pas de normes journalistiques professionnelles, connaissent une croissance exponentielle.

Déposé par la Commission des questions juridiques et des droits de l'homme
Dans le projet de résolution, après le paragraphe 2, insérer le paragraphe suivant:
«L’Assemblée souhaite souligner à ce propos qu’il incombe tout particulièrement aux radiodiffuseurs publics de refléter de manière satisfaisante la diversité complète des points de vue présents dans la société et rappelle la Recommandation CM/Rec(2012)1 du Comité des Ministres sur la gouvernance des médias de service public. Comme les radiodiffuseurs publics participent de plus en plus au marché des médias en ligne, ils pourraient jouer un rôle important dans la réalisation des buts poursuivis par la présente résolution.»

3Les médias en ligne ont permis au grand public de prendre conscience des violations des droits de l’homme et de la souffrance humaine qui existent dans des régions très éloignées, auxquelles les médias accordent peu d’attention. Cependant, internet a permis à de puissants acteurs commerciaux et groupes politiques de lancer des initiatives concertées mobilisant de très nombreux utilisateurs de médias en ligne. Or, ces mobilisations ne reposent pas toujours sur des faits et des informations neutres.

Déposé par la Commission des questions juridiques et des droits de l'homme
Dans le projet de résolution, après le paragraphe 3, insérer le paragraphe suivant:
«Comme l’a constamment souligné la Cour européenne des droits de l’homme dans sa jurisprudence, la presse joue un rôle essentiel dans une société démocratique, en diffusant des informations sur des questions d’intérêt général. Elle tient lieu de défenseur des intérêts publics, en permettant aux citoyens de connaître et juger les attitudes et les actions des personnalités politiques.»

4La limite entre ce qui peut être considéré comme l’expression légitime de points de vue personnels dans l’objectif de tenter de convaincre le lecteur, et la désinformation et la manipulation, est souvent franchie. L’Assemblée note avec préoccupation le nombre de campagnes lancées par des médias en ligne dans le but d’induire certaines catégories du public en erreur en présentant des informations volontairement partiales ou inexactes, ainsi que le nombre de campagnes de haine et d’attaques personnelles lancées à l’encontre de certains individus, souvent dans un contexte politique, dans l’objectif de nuire aux processus politiques démocratiques.

5L’Assemblée se félicite du fait que d’importants médias en ligne se soient dotés d’une politique destinée à permettre aux utilisateurs de signaler des erreurs factuelles ou de fausses publications émanant de tiers sur leurs sites internet. C’est notamment le cas de Facebook, sur son «Fil d’actualité», et de Google, qui dispose d’un «outil de demande de suppression de page web». Les médias en ligne se doivent de supprimer ou de corriger les informations erronées; il en va de leur crédibilité et de leur fiabilité.

Déposé par la Commission des questions juridiques et des droits de l'homme
Dans le projet de résolution, après le paragraphe 5, insérer le paragraphe suivant:
«L’Assemblée souligne l’importance de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme et surtout de son arrêt de Grande Chambre rendu dans l’affaire Delfi AS c. Estonie (Requête n° 64569/09). Cet arrêt de référence a précisé les devoirs et responsabilités des portails d’actualités sur internet qui fournissent à des fins commerciales une plateforme destinée à la publication de commentaires émanant d’internautes sur des informations précédemment publiées.»

6Rappelant sa Résolution 1843 (2011) sur la protection de la vie privée et des données à caractère personnel sur l’internet et les médias en ligne, l’Assemblée note avec satisfaction que des tribunaux nationaux en Europe ont ordonné à des moteurs de recherche de supprimer les termes péjoratifs de la fonction de saisie automatique associée à des noms de personnes. Ce «droit à l’oubli», ou le droit d’effacer des données personnelles dans les médias en ligne, devrait être renforcé sur l’ensemble du continent.

7Saluant la loi brésilienne no 12965 du 23 avril 2014 sur les droits civils sur internet («Marco Civil da Internet») et la déclaration des droits sur internet adoptée par le Parlement italien le 28 juillet 2015, l’Assemblée appelle les parlements à se pencher sur la question des médias en ligne et du journalisme et à définir des règles générales sur la protection des libertés et des droits fondamentaux des internautes, des journalistes et des médias en ligne, conformément à la présente résolution.

Déposé par la Commission des questions juridiques et des droits de l'homme
Dans le projet de résolution, après le paragraphe 7, insérer le paragraphe suivant:
«Se référant à la Recommandation CM/Rec(2014)7 du Comité des Ministres sur la protection des donneurs d’alerte et rappelant ses propres Résolutions 1729 (2010) et 2060 (2015) sur le sujet, l’Assemblée rappelle aux Etats membres qu’ils devraient disposer d’un cadre normatif, institutionnel et judiciaire pour protéger les personnes qui, de bonne foi, font des signalements ou révèlent des informations concernant des menaces ou un préjudice pour l’intérêt général. Ce cadre se justifie tout particulièrement pour les médias en ligne et le journalisme, car internet est typiquement l’un des moyens utilisés par les donneurs d’alerte pour rendre les malversations publiques.»

8Par conséquent, l’Assemblée recommande:

8.1aux Etats membres:

8.1.1d’initier, tant au niveau national qu’au sein du Conseil de l’Europe, des discussions sur les normes et mécanismes nécessaires pour prévenir le risque de distorsion de l’information et de manipulation de l’opinion publique, comme déjà suggéré dans la Résolution 1970 (2014) de l’Assemblée «Internet et la politique: les effets des nouvelles technologies de l’information et de la communication sur la démocratie»;

8.1.2de permettre aux radiodiffuseurs de service public de faire pleinement usage des possibilités techniques offertes par les médias en ligne, en s’assurant que leur présence internet respecte des règles éditoriales d’un niveau aussi élevé que celles s’appliquant aux contenus hors ligne. Les médias de service public devraient en particulier faire preuve de la plus grande attention en ce qui concerne les contenus utilisateurs ou les contenus publiés par des tiers sur leur présence internet;

8.1.3d’introduire dans leur législation ou leur pratique interne un droit de réponse ou toute mesure équivalente permettant une correction rapide des informations inexactes diffusées dans les médias en ligne ou hors ligne;

8.1.4de garantir la traçabilité, par les services répressifs, des utilisateurs de médias en ligne lorsqu’ils portent atteinte à la loi. L’anonymat des utilisateurs ne doit pas permettre de faire des médias en ligne des zones de non-droit;

8.1.5d’inclure l’éducation aux médias dans leurs programmes scolaires et de soutenir les projets de sensibilisation et les programmes de formation ciblés visant à promouvoir l’utilisation critique des médias en ligne;

8.1.6de soutenir la formation professionnelle au journalisme, que ce soit dans le cadre de l’enseignement supérieur, de l’apprentissage tout au long de la vie ou des stages proposés par les médias en ligne, ainsi que l’éducation au «journalisme citoyen» pour le public en général;

Déposé par la Commission des questions juridiques et des droits de l'homme
Dans le projet de résolution, après le paragraphe 8.1.6, insérer le paragraphe suivant:
«qui ne l’ont pas encore fait de signer et ratifier la Convention du Conseil de l’Europe sur la cybercriminalité (STE n° 185), ainsi que son Protocole additionnel relatif à l'incrimination d'actes de nature raciste et xénophobe commis par le biais de systèmes informatiques (STE n° 189);»
Déposé par la Commission des questions juridiques et des droits de l'homme
Dans le projet de résolution, après le paragraphe 8.1.6, insérer le paragraphe suivant:
«de coopérer avec les médias en ligne et les fournisseurs de services internet pour mettre en place des codes de conduite inspirés du code de conduite relatif aux discours haineux illégaux en ligne adopté par la Commission européenne et les grandes entreprises d’internet le 31 mai 2016.»
Déposé par la Commission des questions juridiques et des droits de l'homme
Dans le projet de résolution, après le paragraphe 8.1.6, insérer le paragraphe suivant:
«d’élaborer des dispositions plus précises sur la responsabilité des propriétaires de sites internet à l’égard des contenus postés par des tiers, en tenant compte en particulier de l’arrêt de référence rendu par la Cour européenne des droits de l’homme dans l’affaire Delfi AS c. Estonie.»

8.2à la Fédération européenne des journalistes et à l’Association des journalistes européens d’appeler leurs membres à veiller à ce que:

8.2.1les médias journalistiques professionnels appliquent leurs principes éditoriaux à leur présence internet, y compris à leurs propres contenus, à la publicité et aux contenus provenant de tiers tels que les retours ou les commentaires d’utilisateurs. Tous les médias professionnels ont la responsabilité éditoriale des contenus de tiers publiés sur leur présence internet;

8.2.2les utilisateurs de médias en ligne soient informés de la possibilité de déposer un recours à l’encontre de journalistes en ligne, de leur entreprise de médias ou de leur organisation professionnelle;

8.3à l’Association européenne des fournisseurs de services internet (European Internet Services Providers Association) d’appeler ceux de ses membres qui entretiennent des réseaux sociaux, des moteurs de recherche et des agrégateurs d’actualité:

8.3.1à se doter de codes de déontologie concernant leur propre transparence et leurs obligations à l’égard des services qu’ils proposent. Lorsque la neutralité de ces services est potentiellement compromise par des intérêts commerciaux, politiques ou autres, les fournisseurs devraient faire preuve de transparence à propos de ces intérêts; tous les fournisseurs devraient établir des mécanismes d’autorégulation pour contrôler le respect des normes et informer le public de leur adhésion à ces dernières;

8.3.2à donner à leurs utilisateurs la possibilité de signaler aux fournisseurs de services des informations erronées et à indiquer publiquement ces erreurs;

8.3.3à rectifier volontairement les contenus inexacts ou à publier une réponse conformément au droit de réponse, ou encore à supprimer les contenus inexacts concernés. Les fournisseurs de services internet ont l’obligation légale de coopérer à la lutte contre les contenus illégaux;

8.3.4à mettre en place des mécanismes d’alerte contre les personnes qui publient régulièrement des propos insultants ou provocateurs (les «trolls»), permettant ainsi aux utilisateurs de signaler la présence de tels fauteurs de troubles afin que les fournisseurs de services internet puissent les exclure de leurs plateformes;

8.4à l’Alliance européenne pour l’éthique en publicité de concevoir des normes d’autorégulation pour garantir:

8.4.1que les agences publicitaires et les entreprises de relations publiques rendent leur présence internet et leurs contributions à la présence internet d’autres acteurs identifiables en tant que telles; elles devraient en particulier permettre au public de savoir pour quelles personnes, organisations ou entreprises elles travaillent;

8.4.2que les médias professionnels sur internet et les fournisseurs de réseaux sociaux interdisent, dans leurs conditions d’utilisation, la publicité et le lobbying.