1. Introduction
1. Le 12 novembre 2010, la Commission permanente, agissant
au nom de l’Assemblée parlementaire, adoptait la
Résolution 1781 (2010) intitulée
«30 % au moins de représentants du sexe sous-représenté au sein des
délégations nationales de l’Assemblée». Cette résolution a modifié
les articles 6.2.
a et 7.1.
b du Règlement et a fixé de nouvelles
conditions relatives à la représentation des sexes, en renforçant
les dispositions existantes visant à promouvoir une participation
plus équilibrée des femmes et des hommes. Ces nouvelles dispositions
sont entrées en vigueur à leur adoption. Le Secrétaire général de
l’Assemblée parlementaire a informé les présidents des parlements
des Etats membres des modifications intervenues, dans un courrier
du 6 décembre 2010, afin qu’ils en tiennent compte dans la désignation
de leurs délégations.
2. Lors de la séance de l’Assemblée du 24 janvier 2011, M. José
Mendes Bota, président de la commission sur l’égalité des chances
pour les femmes et les hommes, et plusieurs membres de l’Assemblée
ont contesté les pouvoirs non encore ratifiés des délégations monténégrine,
saint-marinaise et serbe auprès de l’Assemblée parlementaire pour
des raisons formelles, conformément à l’article 7.1.b du Règlement, au motif que lesdites
délégations ne comportaient aucune femme en qualité de représentante,
en méconnaissance de l’article 6.2.a.
3. L’article 6.2.
a, deuxième
phrase, dispose que:
«Les délégations
nationales doivent comprendre un pourcentage de membres du sexe
sous-représenté au moins égal à celui que compte actuellement leur
parlement et, au minimum, un membre du sexe sous-représenté désigné
en qualité de représentant.»
4. L’absence de l’inclusion d’au moins un membre du sexe sous-représenté
en qualité de représentant dans une délégation nationale est expressément
reconnue par l’article 7.1.
b du
Règlement comme un motif qui justifie la contestation des pouvoirs
de cette délégation:
«Les pouvoirs
peuvent être contestés par au moins dix membres de l’Assemblée présents
dans la salle des séances, appartenant à cinq délégations nationales
au moins, se fondant sur des raisons formelles basées sur (...)
les principes énoncés dans l’article 6.2 selon lesquels les délégations
parlementaires nationales doivent être composées de façon à assurer
une représentation équitable des partis ou groupes politiques existants
dans leurs parlements et comprendre, en tout état de cause, un membre du
sexe sous-représenté désigné en qualité de représentant».
5. La commission du Règlement, des immunités et des affaires
institutionnelles doit donc examiner si la composition des délégations
monténégrine, saint-marinaise et serbe a méconnu les principes établis
par l’article 6.2.a du Règlement
de l’Assemblée.
6. Aux termes de l’article 7.2, tel que modifié par la
Résolution 1698 (2009) «Modifications
de diverses dispositions du Règlement de l’Assemblée parlementaire»,
«[s]i la commission conclut à la ratification des pouvoirs, elle
peut transmettre au Président de l’Assemblée un simple avis dont
il donnera lecture en Assemblée plénière ou en Commission permanente,
sans que celles-ci en débattent. Si la commission conclut à la non-ratification
des pouvoirs ou à leur ratification assortie de la privation ou
de la suspension de certains des droits de participation ou de représentation,
le rapport de la commission est inscrit à l’ordre du jour pour débat
dans les délais prescrits».
2. Conformité de la composition des délégations
parlementaires du Monténégro, de Saint-Marin et de la Serbie avec
l’article 6.2 du Règlement de l’Assemblée
7. Le rapport du Président de l’Assemblée sur la vérification
des pouvoirs des représentants et des suppléants pour la session
ordinaire de 2011 de l’Assemblée (
Doc. 12474) montre que les délégations nationales
du Monténégro, de Saint-Marin et de la Serbie ne comportent aucune
femme en qualité de représentante.
2.1. Pouvoirs transmis par les délégations concernées
2.1.1. Les pouvoirs des membres de la délégation monténégrine
transmis le 6 décembre 2010
8. La délégation parlementaire monténégrine a droit,
en application des articles 25 et 26 du Statut du Conseil de l’Europe,
à 3 représentants et 3 suppléants. Le rapport du Président de l’Assemblée
sur la vérification des pouvoirs des représentants et des suppléants
pour la session ordinaire de 2011 de l’Assemblée mentionne que la
composition de la délégation parlementaire du Monténégro s’établit
de la manière suivante:
Représentants:
M. Neven Gosovic (Socialists People’s Party)
M. Džavid Šabovic (Social Democratic Party) N.
N.
Suppléants:
M. Obrad Gojkovic (Socialist People’s Party)
Mme Valentina Radulovic-Šcepanovic (Democratic Party of Socialists)
M. Ervin Spahic (Social Democratic Party)
9. Après réception des pouvoirs de la délégation monténégrine,
le Secrétaire général de l’Assemblée parlementaire s’est mis en
relation avec elle. Aucun courrier n’a été formellement adressé
au Président de l’Assemblée pour fournir des éléments d’explication.
Toutefois, il a été verbalement indiqué au Secrétaire général de
l’Assemblée qu’une modification de la délégation n’avait pu intervenir
dans les délais en raison des difficultés causées par la nécessité
de respecter également l’équilibre politique au sein de la délégation.
10. Lors de sa réunion du 24 janvier 2011, la commission du Règlement,
des immunités et des affaires institutionnelles a tenu un échange
de vues avec Mme Radulovic-Šcepanovic, membre de la délégation monténégrine.
Celle-ci a indiqué que la délégation, dont un siège de représentant
est vacant à la suite de la nomination de son ancien titulaire au
gouvernement nouvellement constitué, serait modifiée dans les délais pour
la partie de session d’avril de l’Assemblée.
2.1.2. Les pouvoirs des membres de la délégation saint-marinaise
transmis le 7 janvier 2011
11. La délégation parlementaire saint-marinaise a droit,
en application des articles 25 et 26 du Statut du Conseil de l’Europe,
à 2 représentants et 2 suppléants. Le rapport du Président de l’Assemblée
sur la vérification des pouvoirs des représentants et des suppléants
pour la session ordinaire de 2011 de l’Assemblée mentionne que la
composition de la délégation parlementaire de Saint-Marin s’établit
de la manière suivante:
Représentants:
M. Marco Gatti (P.D.C.S.)
M. Fiorenzo Stolfi (PSD)
Suppléants:
Mme Assunta Meloni (Alleanza Popolare)
M. Pier Marino Mularoni (DdC)
12. Après réception des pouvoirs de la délégation saint-marinaise,
le Secrétaire général de l’Assemblée s’est mis en relation avec
cette dernière. Dans un courrier du 21 janvier 2011 adressé au Président
de l’Assemblée, M. Marco Gatti, président de la délégation, tout
en soulignant l’engagement de la délégation nationale de Saint-Marin
de respecter le principe d’égalité des sexes et de se mettre le
plus rapidement possible en conformité avec le Règlement, regrette
que la formulation actuelle ne tient pas compte «des problèmes objectifs
des micro-Etats», tenus également de respecter une répartition entre
les groupes politiques au sein de la délégation qui reflète la composition
actuelle du parlement. M. Gatti souligne également que «le délai
d’entrée en vigueur de l’amendement au Règlement n’a pas permis
à ce jour de traiter à fond cette importante modification au sein
des partis politiques pour arriver à une solution en vue de cette
première partie de la session de 2011». Une concertation entre les
groupes politiques n’a pas été possible en temps voulu, afin de
changer la composition de la délégation saint-marinaise pour la
première partie de la session de 2011. Enfin, M. Gatti considère
que les micro-Etats sont confrontés à un problème spécifique dans
la composition des délégations s’il leur faut tenir compte de l’ensemble
des conditions réglementaires: la délégation de Saint-Marin ne «compte
que deux membres titulaires – un de la majorité et un de la minorité
– et une femme (appartenant à la majorité) y figure en tant que
suppléante».
13. Lors de sa réunion du 24 janvier 2011, la commission du Règlement,
des immunités et des affaires institutionnelles a tenu un échange
de vues avec M. Stolfi, membre de la délégation saint-marinaise.
Celui-ci a confirmé les éléments d’information susmentionnés et
a insisté sur le fait que la composition de la délégation résulte
d’un accord entre les partis politiques présents au parlement et
que la modifier nécessite du temps.
2.1.3. Les pouvoirs des membres de la délégation serbe
transmis le 17 décembre 2010
14. La délégation parlementaire serbe a droit, en application
des articles 25 et 26 du Statut du Conseil de l’Europe, à sept représentants
et sept suppléants. Le rapport du Président de l’Assemblée sur la
vérification des pouvoirs des représentants et des suppléants pour
la session ordinaire de 2011 de l’Assemblée mentionne que la composition
de la délégation parlementaire serbe s’établit de la manière suivante:
Représentants:
M. Miloš Aligrudic (Democratic Party of Serbia)
M. Željko Ivanji (G17 Plus)
M. Cedomir Jovanovic (Liberal-democratic Party)
M. Dragoljub Micunovic (Democratic Party)
M. Tomislav Nikolic (Parliamentary group «Forward Serbia»)
M. Branko Ružic (Socialist Party of Serbia)
M. Dragan Todorovic (Serbian Radical Party)
Suppléants:
M. Mladen Grujic (New Serbia)
M. Miloš Jevtic (Democratic Party)
Mme Nataša Jovanovic (Serbian Radical Party)
M. Bojan Kostreš (League of Social Democrats of Vojvodina)
Mme Elvira Kovács (Alliance of Vojvodina Hungarians)
Mme Vjerica Radeta (Serbian Radical Party)
Mme Nataša Vuckovic (Democratic Party)
15. Après réception des pouvoirs de la délégation serbe,
le Secrétaire général de l’Assemblée s’est mis en relation avec
elle. Dans un courrier du 19 janvier 2011 adressé au Président de
l’Assemblée, la présidente de l’Assemblée nationale de la République
de Serbie, Mme Slavica Djukić-Dejanović, souligne le fort engagement des
membres de l’Assemblée nationale envers la promotion de l’égalité
entre les sexes, mais indique que l’Assemblée nationale n’étant
pas en session jusqu’en mars 2011, il n’existe aucun moyen procédural
de procéder au changement de la composition de la délégation. Mme
Dejanović précise, en outre, que la délégation nationale serbe,
élue le 2 février 2009, est composée de 7 représentants et 7 suppléants
dont 4 femmes qui sont, chacune, impliquées d’une manière très active
dans le travail de l’Assemblée et de leurs commissions. Mme Nataša
Vuckovic est la vice-présidente du Groupe socialiste et membre de
la commission des questions juridiques et des droits de l’homme,
et Mme Elvira Kovács, qui a été le rapporteur de l’Assemblée à de
nombreuses occasions, est la vice-présidente du Groupe du Parti
populaire européen et membre de la commission de la culture, de
la science et de l’éducation.
16. Lors de sa réunion du 24 janvier 2011, la commission du Règlement,
des immunités et des affaires institutionnelles a tenu un échange
de vues avec Mme Vuckovic, membre de la délégation serbe, qui a confirmé
les informations reçues de la présidente de l’Assemblée nationale,
indiquant que la délégation serait modifiée dès la reprise de la
session parlementaire et dans les délais pour la partie de session
d’avril de l’Assemblée.
2.2. Evaluation
17. La contestation des pouvoirs des délégations monténégrine,
saint-marinaise et serbe se fonde sur une méconnaissance de la disposition
concernant la désignation, en qualité de représentant, au sein d’une délégation
d’au minimum un membre du sexe sous-représenté (l’article 6.2.a du Règlement). Au vu de la composition
des délégations figurant ci-dessus, ainsi que des tableaux de la
représentation des hommes et des femmes au sein des parlements respectifs
et au sein de leurs délégations parlementaires, transmis par les délégations,
il apparaît clairement que les femmes font partie de la catégorie
du sexe sous-représenté.
18. Conformément à l’article 25 du Statut du Conseil de l’Europe,
les membres (représentants et suppléants) d’un Etat membre du Conseil
de l’Europe auprès de l’Assemblée sont «élus par [leur] parlement en
son sein ou désignés parmi les membres du parlement selon une procédure
fixée par celui-ci». Le Règlement établit, par ailleurs, les conditions
à satisfaire en matière de composition des délégations ayant trait, notamment,
à la représentation équitable des partis ou groupes politiques ou
à la désignation des membres du sexe sous-représenté.
19. Les trois délégations visées par la contestation des pouvoirs
ne remplissent pas, à l’évidence, la condition fixée à l’article
6.2.a de comprendre au sein
d’une délégation nationale au moins un membre du sexe sous-représenté
désigné en qualité de représentant.
20. Il convient de rappeler la position de principe de l’Assemblée
réaffirmée dans sa
Résolution
1585 (2007) relative au principe d’égalité des sexes
à l’Assemblée parlementaire suivant lequel les parlements nationaux doivent
s’assurer que les délégations nationales à l’Assemblée comprennent
un pourcentage de femmes au moins égal à celui que comptent leurs
parlements nationaux «en se fixant comme objectif une proportion
de 30 % au minimum, tout en gardant à l’esprit que le seuil devrait
être de 40 %».
21. L’Assemblée a déjà eu à connaître d’une contestation des pouvoirs
des délégations de l’Irlande et de Malte, en 2004, au motif que
celles-ci ne comportaient pas au moins une femme parmi leurs membres,
ce qui constituait une obligation réglementaire à l’époque des faits.
L’Assemblée avait alors décidé
de ratifier les pouvoirs
des délégations irlandaise et maltaise en assortissant, toutefois,
la ratification d’une suspension de droit de vote des membres des
délégations concernées à l’Assemblée et dans ses organes jusqu’à
ce que les compositions de ces délégations soient conformes à l’article
6.2.
a du Règlement.
22. Dans l’exposé des motifs figurant dans le rapport, la commission
a considéré qu’il était «excessif de déclarer que l’ensemble de
la délégation nationale n’est pas en conformité avec le Règlement
et de refuser l’accréditation des pouvoirs de tous les membres»,
et que «l’Assemblée ne peut sélectionner elle-même lequel des sièges
alloués à une délégation parlementaire nationale n’est pas correctement
pourvu et ne peut arbitrairement déclarer que les pouvoirs de tel
ou tel membre de la délégation concernée ne sont pas ratifiés».
23. La commission relève que, pour des parlements de petite taille,
il peut être difficile de composer des délégations parlementaires
qui respectent tous les critères fixés par le Règlement – représentation
équitable des partis ou groupes politiques et représentation des
sexes. Elle constate, toutefois, que les délégations nationales
d’Andorre, de Chypre, d’Islande, de Lettonie, du Luxembourg, de
la Slovénie, de «l’ex-République yougoslave de Macédoine», du Liechtenstein,
de Malte et de Monaco satisfont à ces critères et que celles qui ont
rencontré effectivement des difficultés sont parvenues à les résoudre.
La commission admet également que les procédures dans certains parlements
ne leur permettent pas de modifier la composition de leurs délégations
parlementaires aisément, dès lors que ces procédures prévoient la
désignation des délégations pour la durée d’une législature, la
consultation ou la décision des groupes politiques, ou la nécessaire ratification
de la composition en séance plénière.
3. Conclusions
24. La commission du Règlement, des immunités et des
affaires institutionnelles considère que les pouvoirs des délégations
parlementaires monténégrine, saint-marinaise et serbe ont été valablement
contestés au motif que les délégations concernées ne comportaient
pas au moins une femme en qualité de représentante, et ce en méconnaissance
de l’article 6.2.a du Règlement.
25. La commission du Règlement, des immunités et des affaires
institutionnelles pourrait donc considérer que, dans le cas dont
elle est saisie, il convient d’adopter à l’égard des délégations
concernées la même position que celle qui a prévalu en 2004, en
se référant à la
Résolution
1360 (2004).
26. Conformément à l’article 7.3 du Règlement, la commission peut
proposer, dans son rapport:
- la
non-ratification des pouvoirs des délégations concernées;
- la ratification des pouvoirs des délégations concernées,
assortie de la privation ou de la suspension de l’exercice par les
membres concernés de certains droits de participation ou de représentation
en ce qui concerne les activités de l’Assemblée et de ses organes.
27. Après examen des explications données et compte tenu des assurances
fournies par les parlements concernés, la commission propose à l’Assemblée
de ratifier les pouvoirs des délégations parlementaires monténégrine,
saint-marinaise et serbe mais de suspendre leurs membres de leur
droit de vote à l’Assemblée et dans ses organes, conformément à
l’article 7.3.c du Règlement,
à compter de la partie de session d’avril 2011 et jusqu’à ce que
les compositions de ces délégations soient conformes à l’article
6.2.a du Règlement pour autant
qu’il porte sur la désignation, au sein d’une délégation nationale,
d’au moins un membre du sexe sous-représenté en qualité de représentant.
28. La commission propose également que la suspension soit levée
automatiquement une fois que les délégations concernées auront modifié
leur composition de façon conforme à l’article 6.2.a et que ces modifications auront
été ratifiées par l’Assemblée ou par la Commission permanente.