1. Introduction
1. Une proposition de recommandation intitulée «Le Conseil
de l'Europe et le Partenariat oriental de l'Union européenne» a
été déposée à l’Assemblée parlementaire en février 2009. Cette proposition
faisait suite à la présentation, par la Commission européenne, d’une
communication sur le «Partenariat oriental», qui visait à renforcer
le degré d’engagement politique de l’Union européenne dans ses relations
avec six Etats ex-soviétiques: l'Arménie, l'Azerbaïdjan, le Bélarus,
la Géorgie, la République de Moldova et l'Ukraine.
2. La communication de la Commission européenne prévoyait de
fonder le Partenariat oriental sur notamment les engagements mutuels
en faveur de l'Etat de droit, de la bonne gouvernance, du respect
des droits de l'homme ainsi que du respect des minorités et de leur
protection.
3. La proposition de recommandation note que cinq des six Etats
concernés sont membres à part entière du Conseil de l'Europe et
ont contracté des engagements et obligations lors de leur adhésion
à notre Organisation. Pour cette raison, il est essentiel que le
Conseil de l'Europe soit pleinement associé à la mise en œuvre de
cette initiative dans ses principaux domaines d'activité. Il est
en outre nécessaire que les projets mis en œuvre dans le cadre du
Partenariat oriental, comme la création d'une nouvelle Assemblée
parlementaire, ne sapent pas les institutions et mécanismes de coopération
existants.
4. Mon prédécesseur, M. Dariusz Lipinski, a été nommé rapporteur
en juin 2009. Toutefois, après les élections législatives qui ont
eu lieu en Pologne en septembre 2011, M. Dariusz Lipinski a perdu
son siège au parlement et n’a pas pu achever le travail sur le rapport.
Lors de la réunion du 14 novembre 2011, la commission des questions
politiques a pris acte de sa demande de démission de sa fonction
de rapporteur. Compte tenu du fait que la proposition n’aurait plus
été valable le 31 décembre 2011, j’ai été chargé de finaliser le
rapport en vue de son adoption par la commission le 14 décembre.
5. Je rappelle qu’en mai 2011, l’Assemblée parlementaire a adopté
la
Résolution 1812 (2011) et la
Recommandation 1971 (2011) sur l’impact du Partenariat oriental de l’Union européenne
sur la gouvernance et le développement économique en Europe orientale,
sur la base d’un rapport élaboré par notre collègue M. Andrea Rigoni
pour la commission des questions économiques et du développement.
Le rapport de M. Rigoni contient des informations générales et une
analyse approfondie du processus du Partenariat oriental
.
6. 6 De ce fait, et également en raison du peu de temps qui m’est
imparti, je me limiterai aux derniers développements du Partenariat
oriental, notamment le 2e Sommet du Partenariat
oriental qui s’est tenu à Varsovie (29-30 septembre 2011), l’inauguration
et la première session de l’Assemblée Euronest (mai et septembre
2011), et la Communication conjointe de la Commission européenne
et de la haute représentante de l’Union européenne pour les affaires
étrangères et la politique de sécurité intitulée «Une stratégie
nouvelle à l’égard d’un voisinage en mutation» (mai 2011), avec
comme élément central les aspects concernant le Conseil de l’Europe.
Pour le reste, je renvoie mes collègues au rapport exhaustif de
M. Rigoni.
2. De la Politique européenne
de voisinage au Partenariat oriental
7. Après l’élargissement de 2004 et l’adhésion de la
plupart des Etats de l’Europe centrale et orientale, l’Union européenne
a mis l’accent sur le développement de ses relations et de sa coopération
avec des pays qui se trouvent dans le voisinage de l’Union européenne,
à l’est et au sud, et qui n’ont pas de perspective immédiate d’adhérer
à l’Union.
8. A cette fin, elle a introduit en 2004 la «Politique européenne
de voisinage» dans le but d'éviter l'émergence de nouvelles lignes
de division entre l'Union européenne élargie et ses voisins et de
renforcer la prospérité, la stabilité et la sécurité de tous.
9. Pour compléter cette politique sur son flanc oriental, et
lui donner un cadre multilatéral, l’Union européenne a présenté
une nouvelle initiative: le Partenariat oriental, qui a été officiellement
inauguré lors d’un sommet tenu à Prague en mai 2009.
10. Cette initiative s’adresse à six Etats ex-soviétiques: l'Arménie,
l'Azerbaïdjan, le Bélarus, la Géorgie, la République de Moldova
et l'Ukraine, et leur propose de construire un partenariat avancé
avec l’Union européenne basé sur les intérêts mutuels et les engagements
communs en faveur des valeurs fondamentales que sont notamment la
démocratie, l’Etat de droit et le respect des droits de l’homme
et des libertés fondamentales, ainsi que des principes de l’économie
de marché, du développement durable et de la bonne gouvernance.
11. Le Partenariat oriental vise à créer les conditions nécessaires
pour accélérer l’établissement d’une association politique et un
approfondissement de l’intégration économique entre l’Union européenne
et les pays partenaires concernés. Il devrait apporter le soutien
de l’Union européenne aux réformes politiques et socio-économiques
dans les pays partenaires, et renforcer ainsi la stabilité, la sécurité
et la prospérité de l’Union européenne, des pays partenaires et
de l’ensemble de l’Europe.
12. Il est prévu d’intensifier le dialogue politique entre l’Union
européenne et les pays partenaires. A cette fin, des réunions des
chefs d’Etat ou de gouvernement du Partenariat oriental devraient
être organisées tous les deux ans. Le 2e Sommet
du Partenariat oriental s’est tenu à Varsovie en septembre 2011,
sous la présidence polonaise de l’Union européenne. Les ministres
des Affaires étrangères se réuniront quant à eux tous les ans.
13. Le processus du Partenariat oriental se développe en deux
volets de coopération censés être complémentaires: les volets bilatéral
et multilatéral.
14. Le volet bilatéral prévoit le renforcement de la coopération
entre, d’une part, l’Union européenne, et d’autre part, chacun des
pays impliqués. Il est au cœur de tout le projet. Les principaux
objectifs du Partenariat oriental, à savoir l’association politique
et l’intégration économique des pays participants avec l’Union européenne,
doivent être réalisés à l’aide d'instruments bilatéraux tels que
les accords d’association, les accords de libre-échange, l’assistance
au développement des institutions et la libéralisation des visas. Cependant,
le degré de rapprochement de chaque pays est conditionné par le
progrès qu’il fait en matière de réformes.
15. Le volet multilatéral est destiné à compléter la coopération
entre l’Union européenne et les pays participants par des projets
et initiatives communs à l’ensemble de partenaires, c'est-à-dire
27 + 6, et à promouvoir ainsi la coopération régionale entre les
partenaires. Il n’est d’ailleurs pas exclu que des pays tiers soient
invités à participer à de tels projets si cela est utile et accepté
par l’ensemble des partenaires.
16. Le travail pratique sur le volet multilatéral est organisé
au sein des quatre plates-formes thématiques qui se réunissent au
moins deux fois par an et sont destinées à couvrir les principaux
domaines de coopération, à savoir:
- la démocratie, la bonne gouvernance et la stabilité;
- l’intégration économique et la convergence avec les politiques
sectorielles de l’Union européenne;
- la sécurité énergétique;
- les contacts entre personnes.
17. Hormis l’objectif de coopération intergouvernementale, le
partenariat vise à établir des liens plus larges entre les sociétés
et les populations, notamment aux niveaux parlementaire, local et
de la société civile. Une «Assemblée parlementaire Union européenne
– Voisins de l’Est» («Euronest») a été créée en mai 2011 et a tenu
sa première réunion ordinaire en septembre. Outre le forum de la
société civile qui œuvre activement depuis novembre 2009, il est
également prévu de mettre en place une assemblée des autorités locales
et régionales.
18. Pour l’Union européenne, le lancement du Partenariat oriental
était destiné à mieux reconnaître et mettre en valeur le fait que
les six pays concernés sont bien plus que des voisins: ils font
partie de l’Europe. Cependant, l’Union européenne a fait comprendre
dès le début que le Partenariat oriental ne doit pas être considéré
par les pays concernés comme un pas vers l’adhésion, même s’il n’exclut
pas cette option.
19. La perception du Partenariat oriental par les partenaires
varie considérablement d’un pays à l’autre en fonction de leurs
attitudes et attentes vis-à-vis de l’Union européenne. Pour les
pays qui ont clairement indiqué la volonté de se rapprocher de l’Union
européenne, voire d’y adhérer (comme l’Ukraine), le Partenariat
oriental devait apporter des résultats tangibles dans les domaines
tels que le libre-échange ou la libéralisation de visas. Dans la
mesure où les résultats attendus et promis tardent à se réaliser,
l’intérêt initial laisse la place à la déception. L’Azerbaïdjan,
qui n’a pas l’intention de se rapprocher de l’Union européenne,
utilise le Partenariat oriental comme un cadre supplémentaire permettant
de développer la coopération avec elle dans les domaines qui l’intéressent.
Le Bélarus, qui n’a que très peu de contacts avec l’Union européenne,
utilise cette formule pour les établir dans un cadre multilatéral
(ce pays ne participe pas au volet bilatéral du Partenariat oriental).
3. Le Conseil de l’Europe et le
Partenariat oriental: nécessité de coordonner les nouvelles initiatives avec
la coopération existante
3.1. Chevauchement entre les activités
du Partenariat oriental et celles du Conseil de l’Europe
20. L’annonce du lancement du Partenariat oriental par
l’Union européenne a suscité quelques inquiétudes et interrogations
sur l’utilité de cette initiative. En effet, une grande partie d’activités
dans le domaine politique du Partenariat oriental – celles liées
à la promotion de la démocratie, de l’Etat de droit et des droits
de l’homme – semblent faire double emploi avec celles du Conseil
de l’Europe, dont la mission statutaire est exactement de protéger
et promouvoir ces valeurs et principes.
21. Sur ce point, il faut rappeler que cinq des six Etats qui
participent au Partenariat oriental sont membres du Conseil de l’Europe,
et, de ce fait, ont des engagements spécifiques et des obligations
générales concernant certains principes fondamentaux (démocratie,
droits de l’homme et Etat de droit).
3.2. Rivalités ou renforcement mutuel
des initiatives? Nécessité d’inclure pleinement le Conseil de l’Europe
dans le processus
22. Au cours de ses contacts avec des fonctionnaires
de l’Union européenne et du Conseil de l’Europe, mon prédécesseur
a pu constater qu’il existe un degré de compréhension sur les avantages
qu’une participation du Conseil de l’Europe au Partenariat oriental
représente aussi bien pour l’Union européenne que pour les pays partenaires.
23. En effet, s’agissant du volet multilatéral, des représentants
du Secrétariat du Conseil de l’Europe participent déjà et contribuent
activement aux travaux des plates-formes 1 (démocratie, bonne gouvernance et
stabilité) et 4 (contacts entre personnes). A titre d’exemple, il
convient de mentionner la contribution du Conseil de l’Europe aux
travaux de la plate-forme 1 en ce qui concerne la lutte contre la
corruption et l’amélioration du fonctionnement des systèmes judiciaires,
ainsi que sur les politiques en faveur des jeunes (plate-forme 4).
24. Sur le plan bilatéral, les documents qui définissent des priorités
de la coopération entre l’Union européenne et les pays partenaires
(par exemple, la liste de priorités de l’Agenda de l’association
UE-Ukraine pour 2010) se réfèrent également aux instruments et activités
du Conseil de l’Europe.
25. Il semblerait y avoir un consensus aussi bien au sein de l’Union
européenne que parmi les pays partenaires, sur le fait qu’il ne
faut pas chercher à créer, dans le cadre du Partenariat oriental,
de nouveaux critères pour les Etats partenaires en matière de démocratie,
d’Etat de droit et de droits de l’homme par rapport à ceux mis en
place au sein du Conseil de l’Europe, et que la meilleure façon
d’assurer le progrès dans ces domaines est de respecter les engagements
et les obligations pris par les Etats concernés en leur qualité
de membres du Conseil de l'Europe.
26. Cela semble être un bon début d’une coopération entre le Conseil
de l’Europe, l’Union européenne et les Etats concernés dans la mise
en œuvre des priorités du Partenariat oriental. Il faut veiller
à maintenir cette dynamique positive dans le processus et faire
en sorte que les potentialités, l’expérience et l’expertise du Conseil
de l’Europe soient pleinement utilisées pour mener à bien les transformations
nécessaires dans les pays concernés et apportent des résultats pratiques.
Le Conseil de l’Europe y serait également gagnant, puisque la promotion
de la démocratie, de la prééminence du droit et des droits de l’homme
se trouvent au cœur de son action.
27. Dans ce contexte, il est évident que les activités du Conseil
de l’Europe visant à apporter aux pays participant au Partenariat
oriental l’assistance à la mise en œuvre des normes devraient être
renforcées, de même que les mécanismes de suivi des engagements
et des obligations.
28. Il est également important que les pays partenaires puissent
pleinement ressentir la maîtrise du processus, notamment en ce qui
concerne le choix des priorités.
29. Sur ce point, les nouvelles modalités du financement de la
coopération entre l’Union européenne et le Conseil de l’Europe sous
forme d’une «facilité» globale (allocation d’une enveloppe de 4 millions d’euros),
qui est devenue opérationnelle en mars 2011, offre plus de flexibilité
et pourrait mieux répondre aux besoins concrets des pays concernés
– bien entendu, tout en tenant compte des compétences et domaines
d’activité du Conseil de l’Europe.
30. Par ailleurs, il faudrait assurer une meilleure visibilité
et la reconnaissance du rôle et de la contribution du Conseil de
l’Europe à la réalisation du Partenariat oriental. A cette fin,
le rôle du Conseil de l’Europe en tant qu’organisation normative (standard-setting) qui semble être
reconnu par les acteurs du Partenariat oriental devrait être davantage
mis en lumière et systématiquement réaffirmé dans les documents
et dans des déclarations de l’Union européenne relatifs au Partenariat
oriental.
31. Dans ce contexte, il est regrettable que le Conseil de l’Europe
n’ait pas été associé au 2e Sommet du Partenariat
oriental qui s’est tenu à Varsovie en septembre 2011, malgré le
fait que l’Assemblée ait invité le Comité des Ministres à établir
un ensemble de propositions relatives à la contribution de notre
Organisation à la réalisation du Partenariat oriental en vue de
les présenter au Sommet
. De plus, le Conseil de
l’Europe n’est en aucun cas mentionné dans la déclaration de clôture
du sommet. A mon avis, la présidence ukrainienne du Conseil de l’Europe
a manqué une occasion de mettre en évidence le rôle primordial que
notre Organisation joue déjà dans le processus, et de le renforcer.
32. Il convient également de rappeler la communication conjointe
de la Commission européenne et de la Haute Représentante de l’Union
européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité
intitulée «Une stratégie nouvelle à l’égard d’un voisinage en mutation»
, publiée en mai 2011. Ce document
examine la politique de l’Union européenne à l’égard de son voisinage
(«Politique européenne de voisinage» (PEV)) en mettant l’accent
sur le processus du Partenariat oriental, et conclut que «le soutien
de l'Union européenne aux réformes politiques entreprises dans les
pays voisins n'avait porté ses fruits que de manière limitée». Il
affirme en outre que «la coordination entre l'Union européenne,
ses Etats membres et les grands partenaires internationaux est cruciale
et peut être améliorée».
33. Considérant que, dans le mémorandum d’accord de 2007 entre
le Conseil de l’Europe et l’Union européenne, le rôle de l’Organisation
est définie comme «la référence en matière de droits de l’homme,
de primauté du droit et de démocratie en Europe», on ne peut qu’arriver
à la conclusion légitime que le Conseil de l’Europe devrait être
le premier partenaire de l’Union européenne s’agissant de la mise
en œuvre des politiques de réforme dans les pays voisins de l’Union
qui sont membres de notre Organisation. Toutefois, la communication
conjointe, qui vise à définir la stratégie de l’Union européenne
pour les années à venir, ne fait référence au Conseil de l’Europe
qu’une seule fois: «Une coopération accrue avec le Conseil de l'Europe pourrait
également contribuer à promouvoir le respect de ces engagements.»
34. Je déplore donc que le rôle normatif, consultatif et de suivi
du Conseil de l’Europe ne soit pas reflété de manière appropriée
dans les documents politiques fondamentaux du Partenariat oriental
et les déclarations publiques en la matière. J’estime qu’il est
essentiel d’accroître la visibilité et de parvenir à la pleine reconnaissance
de la contribution du Conseil de l’Europe au Partenariat oriental.
3.3. Cas spécifique: le Bélarus
35. De toute évidence, le Bélarus présente un cas à part
par rapport aux cinq autres pays participant au Partenariat oriental.
36. Tout d’abord, le bilan du pays en matière de démocratie et
de droits de l’homme est extrêmement décevant et demeure une source
de préoccupation majeure. Les autorités de ce pays n’ont pas été
en mesure, jusqu’à présent, de mettre en pratique les dispositions
fondamentales du partenariat telles que l’engagement en faveur de
la démocratie, de l’Etat de droit et des droits de l’homme et des
libertés fondamentales. Les développements dans le pays, à la suite
de l'élection présidentielle en décembre 2010, et, en particulier,
la répression contre les opposants politiques du régime, n’ajoutent
pas d’optimisme sur l’évolution politique du pays.
37. Par ailleurs, le Bélarus, contrairement aux cinq autres Etats,
ne fait pas partie du Conseil de l’Europe et n’a pas d’engagements
et d’obligations pris dans le cadre de notre Organisation.
38. Enfin, contrairement aux cinq autres Etats partenaires, le
Bélarus ne participe pas au volet bilatéral du Partenariat oriental.
Il est donc d’autant plus difficile, pour l’Union européenne, d’exercer
une influence réelle sur les processus politiques dans ce pays à
travers les instruments du Partenariat oriental.
39. Cependant, la mise en œuvre du volet multilatéral du Partenariat
oriental pourrait contribuer à ce que le Bélarus s’engage dans la
voie de réformes politiques et législatives, et se rapproche des
normes du Conseil de l’Europe, ce qui, en définitive, faciliterait
son adhésion ultérieure au Conseil de l'Europe.
40. Dans ce contexte, il faut noter qu’en tant que pays participant
au volet multilatéral du Partenariat oriental, le Bélarus a été
invité à participer à toutes les activités multilatérales qui sont
sous la responsabilité du Conseil de l’Europe dans le cadre de la
plate-forme 1 (démocratie, bonne gouvernance et stabilité) – en
dépit du fait que le pays ne soit pas membre du Conseil de l’Europe.
Plus précisément, ces activités couvrent quatre grands domaines:
les normes électorales, le soutien de l’appareil judiciaire, les
mesures de lutte contre la cybercriminalité et la lutte contre la
corruption.
4. Dimension parlementaire: nécessité
d’éviter le double emploi
4.1. Etablissement de l'Assemblée
parlementaire du voisinage est-européen (Euronest), sa composition,
ses objectifs et activités
41. Il faut rappeler que le Parlement européen a proposé
de créer une Assemblée parlementaire du voisinage est-européen (Euronest)
pour assurer la dimension parlementaire au Partenariat oriental
– sur le même principe que l’Assemblée parlementaire euro-latino
américaine (EuroLAT) et l'Assemblée parlementaire euro-méditerranéenne
(APEM). Cette proposition a été favorablement accueillie par les
chefs d’Etat et de gouvernement participant au sommet de Prague
où le Partenariat oriental a été officiellement lancé en mai 2009.
42. Le Parlement européen a donc décidé de créer l’Assemblée Euronest,
composée de 120 membres: 60 membres du Parlement européen et 60
membres représentant les parlements des pays partenaires (10 par pays).
Sur ce dernier point, on se demande si une telle formule assure
une représentation équitable, sachant que la population de l’Ukraine
(48 millions d’habitants) est seize fois supérieure à celle de l’Arménie (3 millions)...
43. Le lancement de l’assemblée, qui était à l’origine prévu en
mars 2010, a dû être reporté plusieurs fois à cause d’un désaccord
entre le Parlement européen et les autorités du Bélarus sur la formule
de représentation de cette dernière: le Parlement européen ne reconnaît
pas la légitimité du Parlement bélarussien et a insisté sur une
représentation mixte incluant des personnalités de l’opposition
qui ne sont pas membres du parlement, ce que le Bélarus n’a pas
accepté.
44. Les présidents des Parlements d’Ukraine, de la République
de Moldova, de Géorgie, d’Azerbaïdjan et d’Arménie se sont accordés
sur la nécessité d’inclure les députés bélarussiens à Euronest.
Toutefois, les événements qui se sont produits au Bélarus après
l'élection présidentielle du 19 décembre 2010 les ont contraints
à revoir leur position. A la suite du harcèlement de l’opposition
par les autorités bélarussiennes, il a été décidé que la délégation
bélarussienne ne serait pas invitée à rejoindre Euronest jusqu’à
ce que l’OSCE reconnaisse les élections parlementaires dans ce pays
comme étant démocratiques.
45. Le 20 avril 2011, le Parlement européen a finalement accepté
de lancer Euronest sans la participation officielle du Parlement
bélarussien. Le 3 mai 2011, Euronest a finalement été inaugurée
à Bruxelles par 50 membres du Parlement européen et 50 représentants
de parlements des Etats partenaires (10 de chaque pays, hormis pour
le Bélarus). L’assemblée a adopté l’acte constitutif et le règlement.
46. Euronest a élu ses deux coprésidents, Kristian Vigenin (Bulgarie)
et Borys Tarasyuk (Ukraine), ainsi que huit vice-présidents, pour
former un bureau: Vahan Hovhannisyan (Arménie), Elkhan Suleymanov (Azerbaïdjan),
David Darchiashvili (Géorgie), Igor Corman (République de Moldova),
Traian Ungureanu (Roumanie), Ryszard Czarnecki (Pologne), Gerben-Jan Gerbrandy
(Pays-Bas) et Jacek Saryusz-Wolski (Pologne). Il faut mentionner
que M. Elkhan Suleymanov et M. David Darchiashvili sont respectivement membres
des délégations nationales de l’Azerbaïdjan et de la Géorgie auprès
de l'Assemblée parlementaire. Les délégations d’Arménie, d’Azerbaïdjan
et d’Ukraine comptent deux membres de l’Assemblée, tandis que la délégation
de Géorgie en compte quatre. Plusieurs délégations incluent aussi
d’anciens membres de notre Assemblée.
47. Euronest a formé quatre commissions permanentes: la commission
des affaires politiques, des droits de l’homme et de la démocratie;
la commission d’intégration économique, de rapprochement des législations
et de convergence avec les politiques de l’Union européenne; la
commission de la sécurité énergétique; et la commission des affaires
sociales, de l’éducation, de la culture et de la société civile.
Chaque commission se compose de 30 membres: 15 du Parlement européen
et 15 des parlements des Etats partenaires.
48. Euronest a aussi créé deux groupes de travail, le premier
sur le Bélarus et le second sur les procédures opérationnelles.
49. Euronest se réunit en principe tous les ans, alternativement
dans un pays partenaire de l’Europe orientale et dans les locaux
du Parlement européen, sur l’un de ses lieux de travail (Bruxelles,
Luxembourg ou Strasbourg). La première réunion ordinaire d’Euronest
s’est tenue à Strasbourg en septembre 2011.
4.2. Synergie et complémentarité
possibles et besoin de coopération avec l’Assemblée parlementaire
50. La création de l’Assemblée Euronest suscite un certain
nombre de questions, y compris parmi les parlementaires des pays
partenaires qui y participent. Certains estiment qu’il aurait été
mieux d’associer des délégations de ces pays aux travaux du Parlement
européen, avec le statut d’observateurs, plutôt que de créer une
nouvelle institution lourde, coûteuse et aux perspectives incertaines.
51. Les travaux de l'Assemblée Euronest sont organisés en quatre
commissions (voir ci-dessus), pour assurer le suivi et le contrôle
parlementaires des quatre plates-formes thématiques de la coopération multilatérale.
Si Euronest était appelée à apprécier les progrès atteints dans
la mise en œuvre des objectifs du Partenariat oriental en matière
de réformes politiques destinées à consolider la démocratie, l’Etat
de droit et la protection des droits de l’homme, il y aurait un
double emploi avec les activités de notre Assemblée – et même le
risque de différences d’appréciation et de contradictions entre
l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe et Euronest.
52. Il faudrait donc faire preuve d’une très grande attention
pour prévenir les contradictions et les conflits potentiels, et
assurer qu’il y ait une coordination et une complémentarité dans
les travaux des deux assemblées.
53. L’une des solutions pratiques d’assurer cette complémentarité
pourrait être la désignation, en tant que membres de l’Assemblée
Euronest représentant les parlements des Etats partenaires, de membres
de délégations de ces Etats à l’Assemblée parlementaire. C’est déjà
le cas, au moins en partie, s’agissant de certaines délégations,
comme indiqué plus haut. Cela devrait néanmoins devenir, sinon une
règle, au moins une pratique courante.
54. De plus, afin d’éviter tout chevauchement, on devra réfléchir
aux arrangements et aux modalités qui permettent à l’Assemblée parlementaire
de participer aux travaux de l’Assemblée Euronest.
55. Ce sujet a été évoqué par M. Mevlüt Çavuşoğlu, Président de
notre Assemblée, lors de ses réunions avec le Président du Parlement
européen, M. Jerzy Buzek, et les chefs des principaux groupes politiques
du Parlement européen, au début du mois de mars 2010. Notre président
a mis l’accent sur la nécessité pour les deux institutions de coordonner
leurs politiques et leurs messages à l’égard des pays faisant l’objet
de procédures de suivi au sein de l’Assemblée, et a insisté sur
le fait que l’Assemblée devrait être un partenaire actif d'Euronest.
56. Le Président de l’Assemblée a également envoyé, le 15 mars
2010, une lettre au Président du Parlement européen, soulignant
encore une fois l’importance pour l’Assemblée d’être étroitement
associée aux activités de l’Assemblée Euronest dès le début.
57. Ces mesures n’ont toutefois été suivies d’aucune réaction
de la part du Parlement européen. Notre Assemblée n’a reçu aucune
invitation à la séance inaugurale d’Euronest, ni à sa première réunion
ordinaire.
58. J’estime néanmoins que notre Assemblée devrait continuer d’aborder
ce sujet lors de nos contacts avec le Parlement européen à différents
niveaux, notamment lors des réunions conjointes des groupes politiques de
l’Assemblée parlementaire et du Parlement.
5. Conclusions
59. Le Partenariat oriental vise à établir un partenariat
avancé entre l’Union européenne et six Etats postsoviétiques (l’Arménie,
l’Azerbaïdjan, le Bélarus, la Géorgie, la République de Moldova
et l’Ukraine) basé sur les intérêts mutuels et les engagements communs
en faveur des valeurs fondamentales que sont la démocratie, l’Etat
de droit, les droits de l’homme et les libertés fondamentales, ainsi
que des principes de l’économie de marché, du développement durable
et de la bonne gouvernance.
60. Cinq des six pays partenaires, c’est-à-dire tous hormis le
Bélarus, sont membres à part entière du Conseil de l’Europe et sont
par conséquent liés par des obligations générales et des engagements
spécifiques relatifs aux principes fondamentaux de la démocratie,
du respect des droits de l’homme et de l’Etat de droit contractés
lors de leur adhésion à notre Organisation.
61. Compte tenu du fait que le degré de partenariat de l’Union
européenne avec les pays partenaires dépend de leur avancée sur
la voie des réformes démocratiques, le Partenariat oriental est
un cadre de coopération opportun dans la mesure où il peut encourager
et favoriser les réformes politiques, institutionnelles et juridiques
dans les pays partenaires, ce qui leur permettra de remplir leurs
obligations et engagements statutaires découlant de leur appartenance
au Conseil de l’Europe, au profit de leurs populations.
62. Le Conseil de l’Europe participe à la mise en œuvre du Partenariat
oriental tant au niveau bilatéral que multilatéral, en particulier
dans le cadre de la plate-forme 1 sur la démocratie, la bonne gouvernance
et la stabilité destinée à couvrir quatre domaines de coopération
prioritaires (les normes électorales, le soutien de l’appareil judiciaire,
la lutte contre la corruption et la lutte contre la cybercriminalité).
Il convient de saluer également l’accord entre le Conseil de l’Europe
et la Commission européenne prévoyant une «facilité» de financement
de 4 millions d’euros pour permettre à notre Organisation de mettre
en place des activités concrètes dans ces domaines prioritaires.
63. Il est toutefois regrettable que le rôle du Conseil de l’Europe
ne soit pas reflété de manière appropriée dans les documents politiques
fondamentaux du Partenariat oriental et dans les déclarations publiques
en la matière. Il faut accroître la visibilité et parvenir à la
pleine reconnaissance de la contribution du Conseil de l’Europe
au Partenariat oriental.
64. Afin d’atteindre cet objectif, il convient d’inviter tous
les acteurs du Partenariat oriental à rappeler de façon systématique
et explicite l’appartenance au Conseil de l’Europe de cinq des six
pays partenaires, ainsi que leurs obligations en découlant; à accroître
la visibilité du rôle normatif, consultatif et de suivi du Conseil
de l’Europe, ainsi que de ses capacités opérationnelles engagées
dans la mise en œuvre du partenariat; et à rappeler de façon explicite,
et prendre pleinement en considération, les conclusions des mécanismes
de suivi du Conseil de l’Europe, notamment la procédure de suivi
de l’Assemblée.
65. Tout en prenant acte de la création de l’Assemblée parlementaire
UE-Voisins de l’Est (Euronest) destinée à soutenir, promouvoir et
consolider le processus du Partenariat oriental au niveau parlementaire,
il convient de mettre en relief la nécessité de créer des synergies
et une complémentarité et d’éviter des chevauchements et messages
contradictoires
66. Les Parlements des Etats membres du Conseil de l’Europe participant
au Partenariat oriental devraient être encouragés, dans le cadre
de leur participation à Euronest, à garantir la synergie, la coordination
et la continuité du travail mené à l’Assemblée, notamment par la
désignation au sein de leurs délégations de membres du parlement
qui siègent à l’Assemblée, ou qui en ont été membres auparavant.