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Résolution 690 (1979)

Déclaration sur la police

Auteur(s) : Assemblée parlementaire

Origine - Discussion par l'Assemblée le 1er février 1979 (24e séance de la 30e Session) (voir Doc. 4212, rapport de la commission des questions juridiques). Texte adopté par l'Assemblée le 8 mai 1979 (2e séance de la 31e Session)

L'Assemblée,

1. Considérant que le plein exercice des droits de l'homme et des libertés fondamentales, garantis par la Convention européenne des Droits de l'Homme et d'autres instruments nationaux et internationaux, suppose nécessairement l'existence d'une société paisible, jouissant de l'ordre et de la sécurité publique ;
2. Considérant qu'à cet égard, la police joue un rôle essentiel dans tous les Etats membres, qu'elle est souvent appelée à intervenir dans des conditions périlleuses pour ses agents, et que ses tâches se trouvent encore compliquées lorsque des règles de conduite applicables à ses membres ne sont pas définies avec une précision suffisante ;
3. Estimant que des membres des forces de police qui ont commis des violations des droits de l'homme dans l'exercice de leurs fonctions et ceux qui ont appartenu à un corps de police dissous en raison de l'inhumanité de ses méthodes ne doivent pas être employés comme fonctionnaires de police ;
4. Estimant que le système européen de protection des droits de l'homme serait renforcé si la police se voyait proposer des règles de déontologie tenant compte des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
5. Estimant souhaitable que les fonctionnaires de police bénéficient du soutien actif, tant moral que matériel, de la communauté dans laquelle ils exercent leurs fonctions ;
6. Estimant que les fonctionnaires de police doivent jouir d'un statut et de droits comparables à ceux des fonctionnaires d'Etat ;
7. Considérant qu'il serait souhaitable d'énoncer des directives destinées à orienter le comportement des fonctionnaires de police en cas de guerre et d'autres situations d'exception, et dans l'éventualité d'une occupation par une puissance étrangère,
8. Adopte la Déclaration ci-après sur la police, qui fait partie intégrante de la présente résolution ;
9. Demande à sa commission chargée des relations avec les parlements nationaux et le public, à sa commission des questions juridiques et au Secrétaire Général du Conseil de l'Europe de donner à la déclaration le maximum de publicité.

Annexe Déclaration sur la police

(open)

A. Déontologie 
			(1) 
			Les parties A et B de la déclaration s'appliquent à toutes les personnes et organisations, y compris les services secrets, la police militaire, les forces armées ou milices assumant des fonctions de police, qui sont chargées de faire respecter la loi, d'effectuer des enquêtes, d'assurer l'ordre public et la sécurité de l'Etat.

1. Il incombe à tout fonctionnaire de police de s'acquitter des devoirs que lui confère la loi en protégeant ses concitoyens et la collectivité contre les violences, les déprédations et autres actes préjudiciables, définis par la loi.
2. Tout fonctionnaire de police doit agir avec intégrité, impartialité et dignité. En particulier, il doit s'abstenir de tout acte de corruption et s'y opposer résolument.
3. Les exécutions sommaires, la torture et les autres peines ou traitements inhumains ou dégradants demeurent interdits en toutes circonstances. Tout fonctionnaire de police a le devoir de ne pas exécuter ou d'ignorer tout ordre ou instruction impliquant ces actes.
4. Un fonctionnaire de police doit exécuter les ordres légaux réglementairement formulés par son supérieur hiérarchique ; il s'abstiendra toutefois d'exécuter tout ordre dont il sait ou doit savoir qu'il est illégal.
5. Il est du devoir de tout fonctionnaire de police de s'opposer aux violations de la loi. Si ces violations sont de nature à entraîner un préjudice grave et immédiat ou irréparable, il doit agir sans délai pour les prévenir au mieux de ses possibilités.
6. Si aucun préjudice grave et immédiat ou irréparable n'est à craindre, il doit s'efforcer de parer aux conséquences de ces violations, ou à leur répétition en avisant ses supérieurs. Si cette démarche reste sans résultat, il doit pouvoir en référer à une autorité supérieure.
7. Aucune mesure pénale ou disciplinaire ne sera prise à l'encontre d'un fonctionnaire de police qui aura refusé d'exécuter un ordre illégal.
8. Il est du devoir du fonctionnaire de police de refuser de participer à la recherche, à l'arrestation, à la garde ou au transport de personnes recherchées, détenues ou poursuivies sans être soupçonnées d'avoir commis un acte illégal, en raison de leur race ou de leurs convictions religieuses ou politiques.
9. Tout fonctionnaire de police est personnellement responsable de ses actes et des actes ou omissions qu'il a ordonnés et qui sont illégaux.
10. La voie hiérarchique doit être clairement établie. Il doit toujours être possible de remonter au supérieur responsable des actes ou omissions d'un fonctionnaire de police.
11. La législation doit prévoir un système de garantie et de recours légaux contre les préjudices qui peuvent résulter des activités de la police.
12. Dans l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire de police doit agir avec toute la détermination nécessaire sans jamais recourir à la force plus qu'il n'est raisonnable pour accomplir une tâche exigée ou autorisée par la loi.
13. Il faut donner aux fonctionnaires de police des instructions claires et précises sur la manière et les circonstances dans lesquelles ils doivent faire usage de leurs armes.
14. Un fonctionnaire de police ayant la garde d'une personne dont l'état nécessite des soins médicaux doit faire appel au personnel médical et, le cas échéant, prendre des mesures pour protéger la vie et la santé de cette personne. Il doit se conformer aux instructions des médecins et autres représentants qualifiés du corps médical s'ils estiment qu'un détenu doit être placé sous surveillance médicale.
15. Un fonctionnaire de police doit garder le secret sur toutes les questions de caractère confidentiel dont il a connaissance, à moins que l'exercice de ses fonctions ou les dispositions de la loi ne lui commandent d'agir autrement.
16. Tout fonctionnaire de police qui se conforme aux dispositions de la présente déclaration a droit au soutien actif, tant moral que matériel, de la collectivité dans laquelle il exerce ses fonctions.

B. Statut

1. Les forces de police constituent un service public instauré par la loi et chargé du maintien de l'ordre et de l'application de la loi.
2. Tout citoyen peut s'engager dans la police s'il remplit les conditions exigées.
3. Le fonctionnaire de police doit recevoir une formation générale et professionnelle approfondie, avant et pendant son service, ainsi qu'un enseignement approprié en matière de problèmes sociaux, de libertés publiques, de droits de l'homme, notamment en ce qui concerne la Convention européenne des Droits de l'Homme.
4. Les conditions professionnelles, psychologiques et matérielles dans lesquelles le fonctionnaire de police exerce ses fonctions doivent préserver son intégrité, son impartialité et sa dignité.
5. Le fonctionnaire de police a droit à une juste rémunération, et des facteurs particuliers doivent entrer en ligne de compte tels que l'importance des risques et des responsabilités, ainsi que l'irrégularité des horaires de travail.
6. Les fonctionnaires de police doivent pouvoir constituer des organisations professionnelles, s'y affilier et y participer activement. Ils peuvent également jouer un rôle actif dans d'autres organisations.
7. A la condition d'être représentative, une organisation professionnelle de la police doit pouvoir :
participer aux négociations relatives au statut professionnel des fonctionnaires de police ;
être consultée sur la gestion des corps de police ;
engager toute action judiciaire au profit d'un fonctionnaire de police ou d'un groupe de fonctionnaires de police.
8. Le fait pour un fonctionnaire de police d'être affilié à une organisation professionnelle ou de participer à ses activités ne doit pas lui être préjudiciable.
9. Lors d'une action disciplinaire ou pénale intentée contre lui, un fonctionnaire de police a le droit d'être entendu et d'être défendu par un avocat. La décision doit être prise dans un délai raisonnable. Il doit pouvoir également recourir à l'assistance de l'organisation professionnelle à laquelle il appartient.
10. Un fonctionnaire de police qui fait l'objet d'une mesure disciplinaire ou d'une sanction pénale a le droit de recourir à un organisme indépendant et impartial ou à un tribunal.
11. Devant les tribunaux, un fonctionnaire de police jouit des mêmes droits que tous les autres citoyens.

C.Guerre et autres situations d'exception - Occupation par une puissance étrangère 
			(2) 
			Le présent chapitre ne s'applique pas à la police militaire.

1. En cas de guerre et d'occupation ennemie, le fonctionnaire de police doit continuer à assumer son rôle de protection des personnes et des biens, dans l'intérêt de la population civile. Il ne doit donc pas avoir le statut de « combattant », et les dispositions de la Troisième Convention de Genève du 12 août 1949, relatives au traitement des prisonniers de guerre, ne lui sont pas applicables.
2. Les dispositions de la Quatrième Convention de Genève du 12 août 1949, relatives à la protection des personnes civiles en temps de guerre, sont applicables à la police civile.
3. La puissance occupante ne doit pas ordonner aux fonctionnaires de police d'accomplir des tâches autres que celles mentionnées à l'article 1 du présent chapitre.
4. En cas d'occupation, un fonctionnaire de police ne doit pas :
prendre part à des actions contre les membres de mouvements de résistance ;
prêter son concours à l'application de mesures ayant pour but d'employer la population à des fins militaires et à la garde d'installations militaires.
5. Si un fonctionnaire de police démissionne au cours de l'occupation ennemie parce qu'il est contraint d'exécuter des ordres illégitimes de la puissance occupante, tels que ceux énumérés ci-dessus, qui sont contraires aux intérêts de la population civile, et parce qu'il n'a pas d'autre issue, il doit être réintégré dans les forces de police dès que l'occupation est terminée sans perdre aucun des droits ou avantages dont il aurait bénéficié s'il était resté dans la police.
6. Au cours ou à la fin de l'occupation, un fonctionnaire de police ne peut en aucun cas être l'objet d'une sanction pénale ou disciplinaire pour avoir exécuté de bonne foi l'ordre d'une autorité considérée comme compétente, dès lors que l'exécution de l'ordre incombait normalement à la police.
7. La puissance occupante ne peut prendre de sanctions disciplinaire ou judiciaire contre des fonctionnaires de police du fait de l'exécution, antérieurement à l'occupation, d'ordres donnés par les autorités compétentes.