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Avis 209 (1999)

Demande d'adhésion de la Géorgie au Conseil de l'Europe

Auteur(s) : Assemblée parlementaire

Origine - Discussion par l’Assemblée le 27 janvier 1999 (4e séance) (voir Doc. 8275, rapport de la commission des questions politiques, rapporteur: M. Davis; et Doc. 8296, avis de la commission des questions juridiques et des droits de l’homme, rapporteur: M. Kelemen). Texte adopté par l’Assemblée le 27 janvier 1999 (4e séance).

1. La Géorgie a déposé le 14 juillet 1996 une demande d’adhésion au Conseil de l’Europe. Par sa Résolution (96) 33 du 11 septembre 1996, le Comité des Ministres a invité l’Assemblée parlementaire à formuler un avis sur cette demande, conformément à la Résolution statutaire 51 (30A).
2. Le Parlement de Géorgie a demandé le statut d’invité spécial auprès de l’Assemblée parlementaire le 4 mars 1993 et l’a obtenu le 28 mai 1996. L’examen de cette demande a été lié à l’adoption de la Recommandation 1247 (1994) relative à l’élargissement du Conseil de l’Europe, dans laquelle l’Assemblée a déclaré: «En raison de leurs liens culturels avec l’Europe, l’Arménie, l’Azerbaïdjan et la Géorgie auraient la possibilité de demander leur adhésion à condition qu’ils indiquent clairement leur volonté d’être considérés comme faisant partie de l’Europe.»
3. Une commission ad hoc de l’Assemblée a observé les élections législatives en Géorgie tenues le 5 novembre 1995 et a constaté que, malgré des irrégularités considérées comme mineures, «le scrutin s’est déroulé dans le calme et apparemment dans des conditions acceptables de normalité et de régularité».
4. Depuis 1996, la Géorgie participe à diverses activités du Conseil de l’Europe dans le cadre des programmes intergouvernementaux de coopération et d’assistance, ainsi qu’aux travaux de l’Assemblée parlementaire et de ses commissions par le biais de sa délégation d’invités spéciaux.
5. La Géorgie a ratifié la Convention culturelle européenne et la Convention sur le transfèrement des personnes condamnées, et a signé la Convention sur la reconnaissance des qualifications relatives à l’enseignement supérieur dans la région européenne.
6. L’Assemblée considère que la Géorgie est une société démocratique pluraliste respectueuse des droits de l’homme et de l’Etat de droit, et qu’elle est capable et a la volonté, dans le sens de l’article 4 du Statut, de poursuivre les réformes démocratiques engagées pour mettre l’ensemble de la législation et de la pratique en conformité avec les principes et les normes du Conseil de l’Europe.
7. La Géorgie a connu deux conflits armés, en Abkhazie (1992-1994) et en Ossétie du Sud (1990-1993). L’Assemblée estime que le pays a montré sa volonté de résoudre les situations conflictuelles par des voies pacifiques, l’amélioration substantielle des relations avec l’Ossétie du Sud en étant le meilleur exemple.
8. L’Assemblée considère que l’adoption d’une déclaration d’amitié vis-à-vis des peuples abkhaze et ossète et l’intensification des contacts à tous les niveaux contribueraient à l’instauration et au renforcement d’un climat de confiance dans les relations avec l’Abkhazie et l’Ossétie du Sud.
9. L’Assemblée appelle les responsables géorgiens et abkhazes à activer le dialogue sur le statut de l’Abkhazie à l’intérieur des frontières internationalement reconnues de la Géorgie et sur le retour des personnes déplacées en Abkhazie.
10. L’Assemblée parlementaire demande à la Géorgie de s’engager:
10.1. en matière de conventions
a. à signer la Convention européenne des Droits de l’Homme (CEDH), au moment de son adhésion, telle qu’amendée par ses Protocoles nos 2 et 11;
b. à ratifier la CEDH et ses Protocoles nos 1, 4, 6 et 7 dans l’année suivant son adhésion;
c. à signer et à ratifier, dans un délai d’un an suivant son adhésion, la Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants, et ses protocoles;
d. à signer et à ratifier, dans un délai d’un an suivant son adhésion, la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales et la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires;
e. à signer et à ratifier, dans un délai de trois ans suivant son adhésion, la Charte européenne de l’autonomie locale, la Convention-cadre européenne sur la coopération transfrontalière et ses protocoles additionnels ainsi que les conventions du Conseil de l’Europe relatives à l’extradition, à l’entraide judiciaire en matière pénale et celle relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime, et à appliquer entre-temps leurs principes fondamentaux;
f. à signer et à ratifier, dans un délai de trois ans suivant son adhésion, la Charte sociale du Conseil de l’Europe et, dès à présent, à s’efforcer de mettre en œuvre une politique conforme aux principes qu’elle contient;
g. à signer et à ratifier, dans un délai d’un an suivant l’adhésion, l’Accord général sur les privilèges et immunités du Conseil de l’Europe et ses protocoles additionnels;
h. à signer et à ratifier, dans un délai de deux ans suivant son adhésion, la Convention de Genève sur le statut des réfugiés et son protocole de 1967;
10.2. en matière de législation interne
a. à créer, dans les quatre ans suivant l’adhésion, le cadre juridique nécessaire à la mise en place d’une deuxième chambre du parlement, conformément aux exigences de la Constitution;
b. à adopter, dans un délai de deux ans suivant l’adhésion, un cadre juridique déterminant le statut des territoires autonomes et leur garantissant une large autonomie, dont les termes précis sont à négocier avec les représentants de ces derniers;
c. à adopter, dans un délai d’un an suivant l’adhésion, une loi sur les médias électroniques;
d. à adopter, dans un délai d’un an suivant l’adhésion, une loi sur la profession d’avocat;
e. à adopter, dans les deux ans suivant l’adhésion, un cadre juridique permettant le rapatriement et l’intégration de la population meskhète déportée par le régime soviétique, en lui donnant notamment le droit à la citoyenneté géorgienne, à consulter le Conseil de l’Europe sur ce cadre juridique avant son adoption, à entamer le processus de rapatriement et d’intégration dans les trois ans suivant l’adhésion et à achever ce processus dans les douze ans suivant l’adhésion;
f. à amender, dans un délai de six mois suivant l’adhésion, la loi sur le médiateur (l’ombudsman) afin que ce dernier présente au parlement et rende public ensuite un rapport sur ses activités tous les six mois;
g. à prendre, dans un délai de deux ans suivant l’adhésion, des mesures législatives et, dans un délai de trois ans, les mesures administratives nécessaires afin de permettre la restitution de la propriété et des droits de bail ou une compensation pour la propriété perdue des personnes forcées d’abandonner leur foyer durant les conflits en 1990-1994;
h. à amender, dans un délai de trois ans après son adhésion, la loi relative à l’autonomie et à l’administration locale en vue de permettre l’élection de tous les maires au lieu de leur nomination;
i. à adopter, dans les deux ans suivant l’adhésion, une loi sur les minorités fondée sur les principes énoncés dans la Recommandation 1201 (1993) de l’Assemblée;
10.3. en matière de mise en œuvre des réformes
a. à maintenir et à poursuivre les réformes du système judiciaire, du ministère public (office du procureur) et de la police;
b. à continuer et à renforcer la lutte contre la corruption au sein du système judiciaire, du ministère public (office du procureur) et des forces de police;
c. à adopter, dans un délai de trois mois après son adhésion, la loi sur le transfert effectif du système pénitentiaire de l’autorité du ministère de l’Intérieur à celle du ministère de la Justice et à assurer la mise en œuvre effective de cette loi dans un délai de six mois après son adoption;
d. à revoir l’échelle des peines en vue de la réduction de la durée de la détention et à prévoir des peines de substitution à la peine de prison;
10.4. en matière de droits de l’homme
a. à assurer un strict respect des droits de l’homme des détenus, à abolir dans les six mois suivant son adhésion l’actuel système pénitentiaire consistant à mettre les détenus ayant des activités politiques antérieures dans la même cellule que les autres détenus, et à continuer à améliorer les conditions de détention dans les prisons ainsi que dans les centres de détention préventive;
b. à former aux droits de l’homme le personnel pénitentiaire et la police avec l’aide du Conseil de l’Europe;
c. à respecter le délai maximal de la détention préventive;
d. à appliquer dans les six mois suivant son adhésion le droit d’un détenu de choisir son (propre) avocat;
e. à réexaminer les cas des personnes condamnées ou détenues en raison de leur implication dans les bouleversements politiques en 1991-1992, dans un délai de deux ans après son adhésion;
f. à poursuivre résolument et impartialement les auteurs des crimes de guerre commis durant les conflits en Abkhazie et en Ossétie du Sud, y compris au sein de ses propres forces armées;
10.5. en matière de conflit en Abkhazie
a. à poursuivre les efforts visant à régler ce conflit par des moyens pacifiques et à faire tout ce qui est en son pouvoir pour mettre fin aux activités de tous les groupes armés irréguliers dans la zone de conflit et pour garantir la sécurité des forces collectives de maintien de la paix de la Communauté d’Etats indépendants (CEI), de la Mission d’observation des Nations Unies (Unomig) ainsi que des représentants de toutes les organisations internationales impliquées;
b. à faciliter la distribution de l’aide humanitaire aux groupes les plus vulnérables de la population touchés par les conséquences du conflit;
10.6. en matière de suivi des engagements à coopérer pleinement à la mise en œuvre de la Résolution 1115 (1997) de l’Assemblée sur la création d’une commission de l’Assemblée pour le respect des obligations et engagements des Etats membres du Conseil de l’Europe (commission de suivi), ainsi qu’au processus de contrôle établi en vertu de la Déclaration du Comité des Ministres du 10 novembre 1994 (95e session).
11. Sur la base de ces engagements, l’Assemblée estime que la Géorgie est capable et a la volonté, conformément à l’article 4 du Statut du Conseil de l’Europe, de se conformer aux dispositions de l’article 3 de ce Statut précisant les conditions requises pour pouvoir adhérer au Conseil de l’Europe: «Tout membre du Conseil de l’Europe reconnaît le principe de la prééminence du droit et le principe en vertu duquel toute personne placée sous sa juridiction doit jouir des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Il s’engage à collaborer sincèrement et activement à la poursuite du but (du Conseil de l’Europe)».
12. En vue d’assurer le respect de ces engagements, l’Assemblée décide de suivre de près, dès son adhésion, la situation en Géorgie dans le cadre de sa Résolution 1115 (1997).
13. L’Assemblée recommande au Comité des Ministres, sur la base des engagements exposés ci-dessus:
13.1. d’inviter la Géorgie à devenir membre du Conseil de l’Europe;
13.2. d’attribuer à la Géorgie cinq sièges à l’Assemblée parlementaire