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Résolution 1800 (2011)

Combattre la pauvreté

Auteur(s) : Assemblée parlementaire

Origine - Discussion par l’Assemblée le 12 avril 2011 (13e séance) (voir Doc. 12555, rapport de la commission des questions sociales, de la santé et de la famille, rapporteur: M. Volontè; et Doc. 12577, avis de la commission sur l’égalité des chances pour les femmes et les hommes, rapporteuse: Mme Ferić-Vac). Texte adopté par l’Assemblée le 12 avril 2011 (13e séance). Voir également la Recommandation 1963 (2011).

1. L’Assemblée parlementaire insiste sur la nécessité de protéger les droits humains et les libertés fondamentales de toutes les personnes, quelle que soit leur situation économique.
2. L’Assemblée regrette l’inquiétante montée de la pauvreté en Europe ces dernières années, qui s’explique notamment par la crise économique engendrée par la crise financière et par les nouvelles politiques de redistribution qui défavorisent les pauvres dans de nombreux pays, ainsi que par les réductions massives dans les services sociaux.
3. La pauvreté est un obstacle à la jouissance des droits humains, qu’ils soient politiques, civils, sociaux, économiques ou culturels. L’Assemblée appuie par conséquent pleinement le principe selon lequel chacun a le droit d’être protégé contre la pauvreté et l’exclusion sociale.
4. La pauvreté, qui engendre et aboutit à l’absence d’accès aux droits humains, ne peut être éliminée que si les stratégies de réduction de la pauvreté sont fondées sur ces droits. Fort de ses mécanismes de protection des droits humains, les plus efficaces en Europe, le Conseil de l’Europe est un acteur de premier plan de la lutte contre la pauvreté.
5. Réitérant sa Résolution 1558 (2007) sur la féminisation de la pauvreté, l’Assemblée rappelle que les femmes sont plus touchées que les hommes par la pauvreté et que leur pauvreté est plus grande que celle des hommes. S’attaquer aux causes profondes de la pauvreté des femmes, à savoir l’inégalité et la discrimination de fait entre les sexes, n’est pas seulement une obligation découlant des droits de l’homme, mais aussi un moyen d’utiliser pleinement le potentiel économique des femmes et leur contribution à la croissance économique.
6. L’Assemblée appelle les Etats membres:
6.1. à s’engager à mettre fin à la pauvreté: après s’être engagés à mettre fin à la pauvreté d’ici à 2015 dans le cadre des objectifs du Millénaire pour le développement, le moment est venu de s’engager à éliminer la pauvreté des enfants et la grande pauvreté d’ici à 2025;
6.2. à prendre des mesures pour lutter contre la pauvreté des femmes et à adopter une approche tenant compte de la dimension homme-femme comme élément central de toutes les politiques et de tous les programmes nationaux visant à éliminer la pauvreté et à combattre l’exclusion sociale;
6.3. à faire entendre la voix des personnes vivant dans la pauvreté: envisager de mettre en place de nouvelles formes de gouvernance et de participation pour associer les personnes et les communautés touchées par la pauvreté, renforcer leurs capacités et favoriser l’inclusion sociale de tous;
6.4. à veiller à ce que les stratégies de réduction de la pauvreté soient fondées sur les principes des droits humains, en assurant notamment l’accès des personnes et des communautés touchées par la pauvreté aux droits sociaux individuels et communautaires, et à leur pleine jouissance par les intéressés;
6.5. à adopter un plan d’action fixant notamment des objectifs ciblés et quantifiés;
6.6. à renforcer l’aide et la coopération internationales en matière de réduction de la pauvreté en s’appuyant notamment sur les mécanismes normatifs du Conseil de l’Europe dans le domaine de la sécurité sociale;
6.7. à accroître les investissements dans le capital humain, le capital économique, les infrastructures – en particulier celles des zones défavorisées –, le capital naturel, le capital institutionnel public et le capital des connaissances, compte tenu du fait qu’il n’y a pas de sécurité ni de développement sans investissements;
6.8. à accroître les investissements dans le développement de la petite enfance, l’enseignement et la scolarisation, en vue d’augmenter le niveau de qualification des jeunes sortant du système éducatif et de réduire l’abandon scolaire;
6.9. à prendre des mesures pour permettre, notamment, l’accès sans discrimination aux possibilités d’emploi, à une aide médicale et à un logement satisfaisants, sans discrimination;
6.10. à garantir le droit à une rémunération équitable en fixant un salaire minimal satisfaisant, reconnaissant le droit des travailleurs à une rémunération qui leur assure, ainsi qu’à leur famille, des conditions de vie décentes;
6.11. à offrir la garantie d’un revenu minimal permettant d’assurer l’inclusion sociale de ceux qui n’ont pas la possibilité de travailler ou qui en sont incapables;
6.12. à veiller à ce que les stratégies et mesures répondent aux besoins des personnes touchées par la pauvreté, qu’elles les empêchent de tomber dans la pauvreté en leur accordant une aide lorsqu’elles sont dans une situation critique, et qu’elles les aident à s’en sortir;
6.13. à adopter une approche multipartite pour s’attaquer aux problèmes liés à la pauvreté, en tenant dûment compte des responsabilités des parties prenantes: syndicats, entreprises, institutions financières, organes directeurs de l’administration, et notamment les autorités centrales, régionales et locales, société civile, etc.;
6.14. à favoriser les progrès de la science pour trouver de nouvelles solutions, diffuser de bonnes pratiques et répondre aux besoins non satisfaits des personnes vivant dans la pauvreté;
6.15. à favoriser le renforcement de la cohésion sociale au moyen du bénévolat, utilisé comme moyen supplémentaire de lutter contre la pauvreté;
6.16. à prévenir la transmission intergénérationnelle de la pauvreté en renforçant en particulier la solidarité entre les générations et la cohésion familiale. Une des principales causes de la pauvreté est la dissolution de la famille, et le renforcement des liens familiaux constitue donc une part importante des politiques intégrées de lutte contre la pauvreté. Il convient d’accorder une attention particulière aux grandes familles parce que les enfants de familles nombreuses sont très souvent pauvres;
6.17. à adopter une attitude positive ayant pour objectif de favoriser la prospérité et d’améliorer le bien-être de chacun.
7. La Charte sociale européenne (révisée) (STE no 163) est l’instrument de protection des droits humains le plus avancé, qui prévoit la protection contre la pauvreté parmi ses dispositions. L’article 30, sur le droit à la protection contre la pauvreté et l’exclusion sociale, devrait donc devenir l’une des dispositions clés de la Charte sociale européenne (révisée), au titre de son article A, paragraphe 1b, et tous les Etats membres du Conseil de l’Europe devraient accepter d’être liés par cette disposition. Les pays devraient se fixer pour objectif de ratifier et d’appliquer la Charte sociale européenne (révisée) dans son intégralité.
8. L’Assemblée appuie fermement les principes et directives du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH) pour une approche des stratégies de réduction de la pauvreté fondée sur les droits de l’homme, et invite les Etats membres à tenir dûment compte des directives dans l’élaboration de leurs politiques publiques et de leurs décisions budgétaires pertinentes.
9. L’Assemblée salue la mise en place par l’Union européenne de la «Plateforme européenne contre la pauvreté et l’exclusion sociale: un cadre européen pour la cohésion sociale et territoriale», et insiste sur l’importance d’un renforcement de la coopération avec l’Union européenne dans ce domaine.
10. L’Assemblée invite les parlements nationaux à continuer d’œuvrer en faveur de la signature, de la ratification et de l’application des instruments de protection sociale du Conseil de l’Europe, à savoir la Charte sociale européenne (révisée) et les protocoles y relatifs; la Convention européenne de sécurité sociale (STE no 78), l’Accord complémentaire pour son application (STE no 78A) et le Protocole y relatif (STE no 154), ainsi que le Code européen de sécurité sociale (révisé) (STE no 139).
11. L’Assemblée invite ses membres à sensibiliser la population aux avantages de l’inclusion sociale et à la nécessité de lutter contre la pauvreté, en favorisant une attitude plus positive à l’égard des personnes touchées par la pauvreté et pour éviter qu’elles soient stigmatisées.
12. L’Assemblée souligne la nécessité d’évaluer régulièrement l’efficacité des mesures prises au moyen, notamment, de débats thématiques à l’Assemblée parlementaire et de l’utilisation effective des mécanismes de suivi établis par les instruments conventionnels du Conseil de l’Europe, de façon à lutter contre la pauvreté et à favoriser la prospérité et la cohésion sociale.
13. Dans le cadre de son débat bisannuel sur les droits de l’homme et les droits sociaux, l’Assemblée décide de reprendre en 2013 la question de la lutte contre la pauvreté, en évaluant les progrès accomplis en la matière.