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Rapport | Doc. 13665 | 09 janvier 2015

Le respect des obligations et engagements du Monténégro

Commission pour le respect des obligations et engagements des Etats membres du Conseil de l'Europe (Commission de suivi)

Corapporteur : M. Kimmo SASI, Finlande, PPE/DC

Corapporteur : M. Terry LEYDEN, Irlande, ADLE

Origine - Renvoi en commission: Résolution 1115 (1997). 2015 - Première partie de session

Résumé

Notant que le Monténégro, partenaire fiable et constructif du Conseil de l’Europe, joue un rôle positif dans la stabilisation de la région, la commission de suivi estime que le pays a progressé sur la voie du respect de ses engagements et obligations depuis son adhésion en 2007. Il a réalisé des avancées dans les cinq domaines clés identifiés en 2012 par l’Assemblée parlementaire, à savoir l’indépendance du pouvoir judiciaire, la situation des médias, la lutte contre la corruption et la criminalité organisée, les droits des minorités et la lutte contre la discrimination, ainsi que la situation des réfugiés et des personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays.

La commission invite toutefois le Monténégro à poursuivre des politiques centrées sur les normes démocratiques, la consolidation de l’Etat de droit, une transparence et une responsabilité accrues des institutions publiques ainsi qu’une représentation équitable des minorités.

Compte tenu de la détermination du Monténégro à poursuivre le processus de réforme dans le cadre des négociations d’adhésion à l’Union européenne, la commission propose de clore la procédure de suivi à l’égard du Monténégro et d’ouvrir un dialogue postsuivi.

Mais elle insiste également sur l’importance de la mise en œuvre des législations adoptées, et s’attend donc à ce que le pays mette en œuvre une série de réformes – concernant le processus électoral, l’indépendance de la justice, la lutte contre la corruption et le crime organisé, et la situation des médias – d’ici fin 2017, faute de quoi la commission proposera d’examiner l’opportunité de rouvrir la procédure de suivi générale pour le Monténégro.

A. Projet de résolution 
			(1) 
			Projet
de résolution adopté à l’unanimité par la commission le 11 décembre
2014.

(open)
1. En juin 2012, l’Assemblée parlementaire a adopté la Résolution 1890 (2012) sur le respect des obligations et engagements du Monténégro, décidant de poursuivre la procédure de suivi tout en encourageant le Monténégro à progresser dans cinq «domaines prioritaires», à savoir l’indépendance du pouvoir judiciaire, la situation des médias, la lutte contre la corruption et la criminalité organisée, les droits des minorités et la lutte contre la discrimination, ainsi que la situation des réfugiés et des personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays (PDI).
2. Depuis lors, le Monténégro a continué de jouer un rôle positif dans la stabilisation de la région et il reste un partenaire fiable et constructif, impliqué dans plusieurs initiatives régionales et multilatérales. Les autorités monténégrines ont établi une excellente coopération avec le Conseil de l’Europe, et en particulier avec la Commission européenne pour la démocratie par le droit (Commission de Venise), qui a adopté depuis 2012 de nombreux avis sur des textes législatifs essentiels. L’Assemblée félicite en particulier le Monténégro pour la ratification de la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (STCE n° 210, «Convention d’Istanbul»), le 22 avril 2013, qui a porté à 87 le nombre des conventions ratifiées par le pays.
3. L’Assemblée note qu’il existe au Monténégro un fort consensus au sujet de l’intégration dans l’Union européenne, qui a joué un rôle moteur dans l’accélération du processus de réforme. En particulier, l’ouverture des chapitres 23 et 24 des négociations d’adhésion en décembre 2014 devrait encore accélérer les réformes lancées dans les domaines de la justice, des droits de l’homme et des libertés fondamentales. L’Assemblée salue la coopération fructueuse établie entre le Conseil de l’Europe et l’Union européenne en vue d’améliorer les normes démocratiques au Monténégro. Elle est convaincue que les efforts du pays dans le sens de l’intégration européenne contribueront aussi à consolider le respect de ses obligations statutaires vis-à-vis du Conseil de l’Europe.
4. L’Assemblée estime que des politiques centrées sur les normes démocratiques, la consolidation de l’Etat de droit, une transparence et une responsabilité accrues des institutions publiques et une représentation équitable des minorités pourraient aider le Monténégro à surmonter la polarisation politique et ethnique qui divise toutes les sphères de la société et nuit au développement du pays.
5. Après les controverses liées aux élections législatives de 2012 et à l’élection présidentielle de 2013, l’Assemblée pense qu’il est devenu plus nécessaire encore, pour garantir la stabilité politique et la tenue d’élections libres, d’instaurer la confiance vis-à-vis des processus électoraux. L’Assemblée s’est félicitée de la création, en mai 2013, d’un «groupe de travail parlementaire pour l’instauration de la confiance dans les processus électoraux», qui a conduit à l’adoption, en février 2014, de la loi sur le registre des électeurs, la loi portant modification de la loi sur les cartes d’identité et la loi sur l’autonomie locale, ainsi qu’à l’adoption, en décembre 2014, de la loi portant modification de la loi sur le financement des partis politiques et des campagnes électorales.
6. A la lumière des développements récents, l’Assemblée a évalué les progrès réalisés dans les cinq domaines clés identifiés en 2012.
7. Concernant l’indépendance du pouvoir judiciaire, l’Assemblée:
7.1. se félicite de l’adoption des amendements constitutionnels de juillet 2013 relatifs au système judiciaire, qui exigent la majorité qualifiée pour l’élection des juges de la Cour constitutionnelle, du procureur suprême et des membres du Conseil de la magistrature, tout en prévoyant des mécanismes pour empêcher une paralysie;
7.2. attend des autorités monténégrines qu’elles adoptent les lois nécessaires sur les tribunaux, les droits et obligations des juges, le Conseil de la magistrature, la Cour constitutionnelle et le ministère public, en tenant compte de toutes les recommandations de la Commission de Venise;
7.3. se félicite de l’élection du procureur suprême en novembre 2014, conformément aux modifications apportées à la Constitution en juillet 2013.
8. Concernant la situation des médias, l’Assemblée:
8.1. se félicite de la création, en décembre 2013, de la commission de suivi des actions des autorités compétentes dans l’instruction des affaires de menaces et de violences envers des journalistes, d’assassinats de journalistes et de dégradation de biens appartenant aux médias, qui pourrait apporter une contribution utile, et extrêmement nécessaire, à l’élucidation des 12 affaires d’agressions et de menaces envers des journalistes. Elle se félicite aussi que deux affaires aient été résolues grâce à la coopération renforcée entre le ministère public, la police et l’Agence nationale de sécurité;
8.2. invite instamment les autorités monténégrines à garantir, notamment au moyen d’un financement approprié, que les organes d’autorégulation, en particulier le Conseil d’autorégulation des médias et le Conseil d’autorégulation de la presse locale et des périodiques, aient les moyens de remplir leurs responsabilités professionnelles;
8.3. se félicite de la dépénalisation de la diffamation en 2012;
8.4. s’inquiète, dans le même temps, des violations répétées de la loi par un organe de médias spécifique, qui porte atteinte à la dignité humaine; elle invite instamment les autorités monténégrines à ne pas fermer les yeux sur cet abus de la liberté des médias et à prendre toutes les mesures nécessaires pour veiller au plein respect de la loi et à l’exécution des décisions judiciaires.
9. Concernant la lutte contre la corruption et la criminalité organisée, l’Assemblée:
9.1. pense que, en dépit des nombreuses politiques mises en œuvre pour éradiquer la corruption, celle-ci reste largement répandue et devrait être davantage combattue;
9.2. prend note du projet de créer un organe de prévention de la corruption à compter de 2016 et appelle les autorités à fournir tous les moyens nécessaires pour permettre à cet organe de remplir convenablement sa mission essentielle, qui inclut le contrôle du financement des partis politiques et des campagnes électorales, le traitement des plaintes de donneurs d’alerte et leur protection ainsi que l’application de la loi sur les groupes de pression;
9.3. souligne à ce sujet le rôle du contrôle public pour détecter et dénoncer les actes de corruption, et la nécessité de garantir la protection des donneurs d’alerte et des journalistes d’investigation travaillant dans ce domaine;
9.4. s’attend à ce que le projet de loi sur le procureur public spécial pour la corruption et le crime organisé pourvoie le procureur spécial de tous les moyens nécessaires pour traiter les affaires de corruption et de crimes de guerre concernant des personnalités de haut niveau et pour conduire ses travaux en toute indépendance et en amont des affaires;
9.5. encourage le Monténégro à adopter et mettre en œuvre plusieurs autres lois qui pourraient améliorer la lutte contre la corruption, notamment une loi sur la confiscation des biens issus d’une activité criminelle;
9.6. souligne le rôle actif que le parlement et sa commission anticorruption peuvent jouer dans la lutte contre la corruption et invite le Parlement monténégrin à participer activement à la plate-forme anticorruption créée récemment par l’Assemblée parlementaire pour s’inspirer des bonnes pratiques mises en place dans d’autres Etats membres.
10. Concernant les droits des minorités et la lutte contre la discrimination, l’Assemblée:
10.1. se félicite de l’adoption des amendements à la loi antidiscrimination, en mars 2014, et à la loi sur le défenseur des droits de l’homme et des libertés (médiateur) du Monténégro, en juillet 2014. L’Assemblée note que le médiateur devient désormais le mécanisme de prévention de la torture prévu par le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, ainsi que le mécanisme de protection contre la discrimination en application de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination. Elle appelle les autorités monténégrines à veiller à ce que le médiateur dispose de toutes les ressources financières et humaines nécessaires pour accomplir sa mission de manière efficace et indépendante;
10.2. s’attend à ce que les amendements à la loi sur les droits et libertés des minorités et la loi sur les communautés religieuses soient adoptés rapidement;
10.3. invite les autorités monténégrines à davantage mettre en œuvre la Stratégie visant à améliorer la situation des Roms et des Egyptiens au Monténégro et à continuer d’accorder une grande importance à l’éducation des enfants roms;
10.4. félicite les autorités monténégrines d’avoir permis l’organisation pacifique de trois «marches des fiertés» en 2013 et 2014 sous la protection de la police, avec le soutien et la participation de responsables de haut niveau;
10.5. se félicite de la stratégie et du plan d’action ambitieux lancés par les autorités pour combattre la discrimination – y compris basée sur l’orientation sexuelle – et salue la volonté politique des autorités de progresser dans ce domaine;
10.6. note cependant que la discrimination contre les personnes lesbiennes, gays, bisexuelles et transgenres (LGBT) reste largement répandue au sein de la société monténégrine traditionnelle. Elle encourage les autorités monténégrines à poursuivre les activités de sensibilisation afin de faire évoluer les mentalités et à former les organes en charge du respect de la loi, en particulier le ministère public, la police et les magistrats, à prendre toutes les mesures nécessaires pour poursuivre et sanctionner tout acte ou comportement discriminatoire et tout discours de haine.
11. Concernant la situation des réfugiés et des personnes déplacées à l’intérieur du pays, l’Assemblée:
11.1. salue une nouvelle fois les efforts des autorités monténégrines pour accueillir des milliers de réfugiés et de PDI dans les années 1990. Elle félicite les autorités pour leurs efforts, notamment avec l’adoption de la loi de 2011 sur les étrangers, soit pour intégrer les réfugiés et les PDI en leur accordant le statut d’étranger résident permanent ou provisoire, soit pour faciliter leur retour volontaire dans leur lieu d’origine;
11.2. se félicite du fait que plus de 70 % des 16 000 réfugiés et PDI encore recensés au Monténégro aient demandé leur régularisation, et elle encourage les autorités monténégrines, avec le soutien du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) et des autorités des pays voisins, à faciliter encore le dépôt de demandes et l’obtention de la régularisation. L’Assemblée ne doute pas que les autorités monténégrines trouveront une solution juridique au problème des réfugiés et des PDI en situation irrégulière après l’expiration du délai du 31 décembre 2014;
11.3. note que les autorités monténégrines restent attachées à régler ce problème au moyen de plusieurs dispositifs sociaux. L’Assemblée n’ignore pas que l’enregistrement de certaines PDI continue de poser problème, mais elle est persuadées que les autorités monténégrines, avec celles de pays voisins, trouvera les moyens et les solutions juridiques pour résoudre les affaires encore en suspens;
11.4. salue tout particulièrement le travail du HCR et de la Croix-Rouge et l’assistance juridique et humanitaire inestimable fournie aux réfugiés et aux PDI, en particulier dans les camps de Konik. Elle salue la poursuite du Programme régional de logement et le soutien de la Banque de développement du Conseil de l’Europe pour promouvoir des solutions de logement durables. Elle appelle instamment les autorités monténégrines à continuer d’œuvrer à cette initiative régionale remarquable, qui est une contribution au processus de stabilisation et de réconciliation post-conflit yougoslave;
11.5. salue la ratification par le Monténégro, en octobre 2013, de la Convention des Nations Unies de 1961 sur la réduction des cas d’apatridie et encourage les autorités monténégrines à éviter toute situation pouvant exposer des personnes vivant au Monténégro à l’apatridie.
12. L’Assemblée insiste sur l’importance de la mise en œuvre de la législation adoptée pour respecter les obligations vis-à-vis du Conseil de l’Europe. Elle suivra donc attentivement la manière dont les autorités du Monténégro appliqueront la législation adoptée.
13. Au vu des progrès réalisés depuis l’adoption de la Résolution 1890 (2012) dans les cinq domaines clés identifiés alors par l’Assemblée, celle-ci décide de clore la procédure de suivi et d’engager un dialogue post-suivi. Ce dialogue pourrait s’achever fin 2017 si le Monténégro remplit les conditions suivantes, que l’Assemblée juge nécessaires pour le respect par ce pays de ses obligations et engagements envers le Conseil de l’Europe:
13.1. concernant l’indépendance du pouvoir judiciaire:
13.1.1. pleinement mettre en œuvre les amendements constitutionnels relatifs au système judiciaire adoptés en juillet 2013 et adopter les lois sur les tribunaux, les droits et obligations des juges, le Conseil de la magistrature, la Cour constitutionnelle et le ministère public, en prenant pleinement en considération les recommandations pertinentes de la Commission de Venise adoptées en décembre 2014;
13.1.2. assurer la formation professionnelle continue des personnels du ministère public, de la police et du système judiciaire, et améliorer leur coordination, de manière à garantir une justice efficace et professionnelle;
13.1.3. renforcer le statut et les moyens du procureur suprême nouvellement élu, qui doit être tenu responsable de la présentation au tribunal d’affaires motivées par des actes d’accusation solides et argumentés;
13.2. concernant la confiance dans le processus électoral:
13.2.1. mettre en œuvre la loi sur le financement des partis politiques et des campagnes électorales, y compris les réglementations sur l’utilisation de ressources administratives lors des campagnes électorales;
13.2.2. mener à bien la constitution de listes d’électeurs informatisées et veiller à leur bonne utilisation lors des scrutins à venir;
13.2.3. prendre des mesures pour associer pleinement les collectivités locales et les responsables politiques locaux à l’instauration de la confiance vis-à-vis du processus électoral au niveau local;
13.3. concernant la lutte contre la corruption:
13.3.1. mettre en œuvre la loi sur la prévention de la corruption et la loi sur la prévention des conflits d’intérêts; confier à la future Agence pour la prévention de la corruption la mise en œuvre de politiques de prévention efficaces et lui accorder tous les moyens nécessaires pour contrôler efficacement le financement des partis politiques et des campagnes électorales;
13.3.2. adopter la loi relative au procureur spécial pour la corruption et le crime organisé, donner à cette instance les ressources humaines et financières nécessaires et garantir la coordination avec les autres instances actives dans le domaine de la corruption, de manière à ce que les affaires de corruption soient dûment examinées dans les meilleurs délais;
13.3.3. établir un corpus d’affaires de haut niveau, veiller à la pleine application de la loi et permettre aux tribunaux de prononcer des décisions définitives;
13.3.4. poursuivre la mise en œuvre des recommandations du Groupe d’Etats contre la corruption (GRECO) liées aux troisième et quatrième cycles d’évaluation, qui portent sur la pénalisation, le financement des partis politiques, les parlementaires et la justice;
13.4. concernant la situation des médias:
13.4.1. ne tolérer aucun abus de la liberté des médias et de la liberté d’expression, adopter une législation pour sanctionner les atteintes à la dignité humaine dans les médias, et veiller à ce que les décisions judiciaires soient dûment exécutées;
13.4.2. veiller à ce que la commission de suivi des actions des autorités compétentes dans l’instruction des affaires de menaces et de violences envers des journalistes, d’assassinats de journalistes et de dégradation de biens appartenant à des médias dispose d’un libre accès aux informations et à ce que tous les organes publics répondent dans les meilleurs délais aux demandes d’informations formulées par la commission en vue de résoudre les dix affaires en cours d’attaques, de menaces ou d’assassinats de journalistes dont elle s’occupe;
13.4.3. promouvoir le fonctionnement efficace des organes d’autorégulation des médias et encourager activement un journalisme éthique et de meilleures normes professionnelles.
14. En cas de non-respect des engagements susmentionnés de la part des autorités monténégrines d’ici à la fin 2017, l’Assemblée attend de sa commission de suivi qu’elle examine l’opportunité de rouvrir la procédure de suivi générale pour le Monténégro.

B. Exposé des motifs, par M. Sasi et M. Leyden, corapporteurs

(open)

1. Introduction

1. En juin 2012, l’Assemblée parlementaire a adopté la Résolution 1890 (2012) sur le respect des obligations et engagements du Monténégro, dans laquelle elle décidait de poursuivre la procédure de suivi tout en encourageant le Monténégro à progresser dans cinq «domaines prioritaires», à savoir l’indépendance du pouvoir judiciaire, la situation des médias, la lutte contre la corruption et la criminalité organisée, les droits des minorités et la lutte contre la discrimination, ainsi que la situation des réfugiés et des personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays (PDI).
2. M. Terry Leyden (Irlande, ADLE) a été nommé corapporteur par la commission de suivi le 27 février 2014, en remplacement de Mme Nursuna Memecan, qui a effectué la première visite d’information après l’adoption de la résolution de 2012. Nous souhaitons remercier notre collègue turque pour sa contribution à la procédure de suivi du Monténégro.
3. Le présent rapport a été élaboré à partir des conclusions de trois visites effectuées dans le pays: du 8 au 10 juillet 2013, nous avons décidé d’examiner la mise en œuvre de la Résolution 1890 (2012), de donner suite aux rapports d’observation de l’Assemblée concernant les élections législatives (14 octobre 2012) et présidentielle (7 avril 2013) et d’axer nos discussions sur les derniers développements politiques, la réforme du pouvoir judiciaire, l’application de la loi antidiscrimination et la situation des réfugiés et des PDI 
			(2) 
			Voir notre note d’information <a href='http://www.assembly.coe.int/CommitteeDocs/2013/fmondoc21_2013.pdf'>AS/Mon
(2013) 21 rev 2</a> du 8 novembre 2013.. Notre visite d’avril 2014, comprenant des réunions à Budva, s’est concentrée sur les questions des médias et de la lutte contre la corruption. La visite organisée les 17 et 18 novembre 2014, après la réception des commentaires de la délégation monténégrine auprès de l’Assemblée 
			(3) 
			Voir AS/Mon (2014)
22., nous a permis de débattre des récents changements intervenus dans le pays et de donner notre évaluation finale. Le présent rapport a trait aux récents changements intervenus au Monténégro et aux progrès réalisés dans le domaine de l’Etat de droit, de la démocratie et des droits de l’homme, en particulier concernant les secteurs clés identifiés par l’Assemblée dans sa Résolution 1890 (2012).
4. Nous tenons à remercier les deux présidents respectifs de la délégation monténégrine, MM. Zoran Vukčević et Predrag Sekulić, pour l’aide qu’ils ont apportée en 2013 et 2014 à la rédaction du présent rapport et pour l’excellente préparation de nos visites d’information. Nous aimerions également remercier les membres de la délégation monténégrine auprès de l’Assemblée et le Secrétariat de la délégation. Nous avons pu rencontrer le Président de la République, M. Vujanović, le Premier ministre, M. Đjukanović, le président du Parlement, M. Krivokapić, le Vice-Premier ministre et ministre de la Justice, le ministre de l’Intérieur, le ministre des Droits de l’homme et des minorités, le ministre du Travail et des Affaires sociales, la délégation parlementaire du Monténégro auprès de l’Assemblée, des représentants des partis politiques, les autorités judiciaires, le médiateur ainsi que des représentants des organes de l’Etat, de la communauté rom, des organisations internationales, de la communauté diplomatique, des organisations non gouvernementales (ONG) et des médias. Nous avons apprécié les renseignements fournis avant et après nos visites par la délégation du Monténégro auprès de l’Assemblée sur la mise en œuvre de la Résolution 1890 (2012), en se fondant sur les réponses fournies par les ministres et les services répressifs en juin et octobre 2013 et en avril et novembre 2014, initiative qui s’est révélée très utile.
5. Enfin, notre coopération avec les organisations internationales à Podgorica a été des plus profitables et nous avons eu des entretiens extrêmement fructueux, notamment avec M. l’Ambassadeur Mitja Drobnić, chef de la mission de l’Union européenne, M. l’Ambassadeur Lubomir Kopaj, chef de la mission de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) au Monténégro, Rastislav Vrbensky, coordonnateur résident des Nations Unies pour le Monténégro, et Mme Indu Mohanda, représentante du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) au Monténégro. Nous tenons à les remercier de nous avoir fait part de leurs expériences.

2. Développements récents

2.1. Evolutions régionales et internationales

6. Depuis juin 2012, le Monténégro collabore étroitement avec le Conseil de l’Europe. Nous avons appris avec satisfaction qu’il avait ratifié deux protocoles additionnels le 12 février 2013: le Protocole additionnel à la Convention sur les droits de l’homme et la biomédecine, relatif à la recherche biomédicale (STCE n° 195) et le Protocole additionnel à la Convention sur les droits de l’homme et la biomédecine relatif aux tests génétiques à des fins médicales (STCE n° 203). Il a également ratifié, le 22 avril 2013, la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (STCE n° 210, «Convention d’Istanbul») et, le 8 novembre 2013, le Protocole n° 15 portant modification à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, portant ainsi à 87 le nombre de conventions ratifiées. Le Monténégro envisage aussi de signer et de ratifier la Convention du Conseil de l’Europe sur la contrefaçon des produits médicaux et les infractions similaires menaçant la santé publique (STCE n° 211, «Convention MEDICRIME») 
			(4) 
			Information donnée
par la délégation du Monténégro, 19 juin 2013..
7. Notant que certaines réformes que les autorités monténégrines se sont engagées à accomplir selon un calendrier précis restent à mener à terme, le Comité des Ministres du Conseil de l’Europe a décidé, le 3 avril 2014, d’interrompre le bilan périodique, basé sur le dialogue, de la coopération et des progrès accomplis dans l’exécution des engagements statutaires et la mise en œuvre des processus démocratiques 
			(5) 
			<a href='https://wcd.coe.int/ViewDoc.jsp?Ref=SG/Inf(2014)5&Language=lanFrench&Ver=original&Site=CM&BackColorInternet=DBDCF2&BackColorIntranet=FDC864&BackColorLogged=FDC864'>SG/Inf(2014)5F</a> du 31 janvier 2014., «étant entendu que les autorités monténégrines achèveront les réformes en cours au regard des recommandations figurant dans le document SG/Inf(2014)5, ainsi qu’en ce qui concerne la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique, le renforcement de la participation des femmes à la vie politique, l’amélioration de la situation des personnes handicapées et le traitement de la discrimination à l’encontre des Roms» 
			(6) 
			CM/Del/Dec(2014)1196,
décision adoptée par le Comité des Ministres lors de sa 1196e réunion,
2-3 avril 2014..
8. Le Monténégro a entamé des pourparlers d’adhésion avec l’Union européenne en juin 2012. Jusqu’à présent, il a clos temporairement les chapitres 25 et 26 (Science et recherche et Education et culture). Le Conseil de stabilisation et d’association entre l’Union européenne et le Monténégro a encouragé, le 26 juin 2013, le Monténégro à maintenir le rythme des réformes dans le domaine de la justice et des droits fondamentaux et lui a rappelé qu’il devait consolider l’Etat de droit, en matière de criminalité organisée et de corruption, y compris à un niveau élevé. Il a également souligné la nécessité de faire davantage d’efforts pour garantir la transparence et l’indépendance de la justice. Il a rappelé qu’il faudrait adopter de nouvelles mesures pour renforcer les garanties relatives à la capacité, à la transparence et à l’intégrité de l’appareil judiciaire 
			(7) 
			Communiqué
de presse conjoint de la 4e réunion du
Conseil de stabilisation et d’association entre l’Union européenne
et le Monténégro, UE-ME 3605/13, 26 juin 2013.. En juillet 2013, le Monténégro a adopté des plans d’action concernant les chapitres 23 et 24 qui constitueront une base de référence et une série de mesures visant à atteindre les normes communautaires dans ces domaines. Le 18 décembre 2013, il a ouvert les négociations sur les chapitres 23 (appareil judiciaire et droits fondamentaux) et 24 (justice, liberté et sécurité) 
			(8) 
			Le
Monténégro a également ouvert les chapitres 5 (Marchés publics),
6 (Droit des sociétés), 20 (Politique industrielle et des entreprises),
puis 7 (Droit de la propriété intellectuelle) et 10 (Société de
l’information et des médias) le 31 mars 2014.. En tant que candidat à l’adhésion, il a aligné sa politique étrangère sur les positions de l’Union européenne concernant les sanctions appliquées à la Fédération de Russie après l’annexion de la Crimée.
9. Le Monténégro est resté un partenaire actif dans la stabilisation de la région. Le Président de la République, M. Vujanović, a beaucoup insisté sur ce point, mettant en avant les bonnes relations établies avec tous les pays voisins et la participation active du Monténégro à toutes les initiatives régionales et rappelant l’aspiration politique des autorités monténégrines à adhérer à l’Union européenne et à l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord (OTAN). Nous avons félicité M. Krivokapić, président du Parlement monténégrin, pour son élection à la présidence de l’Assemblée parlementaire de l’OSCE le 5 juillet 2013. Nous avons par ailleurs pris note d’une initiative lancée par M. Luksić, ministre des Affaires étrangères et européennes, afin de créer un réseau qui regrouperait six pays des Balkans occidentaux – Monténégro, Serbie, Kosovo* 
			(9) 
			*Toute référence au
Kosovo dans le présent document, qu’il s’agisse de son territoire,
de ses institutions ou de sa population, doit être entendue dans
le plein respect de la Résolution 1244 du Conseil de sécurité de
l’Organisation des Nations Unies, sans préjuger du statut du Kosovo. (dans le respect de la Résolution 1244 du Conseil de sécurité des Nations Unies, «l’ex-République yougoslave de Macédoine», Albanie et Bosnie-Herzégovine.
10. Bien que l’intégration à l’Union européenne fasse l’objet d’un consensus, l’adhésion à l’OTAN demeure un sujet controversé au Monténégro. Alors qu’en juin 2014, une loi sur le statut des forces de l’OTAN était débattue au parlement en séance plénière d’urgence, le Secrétaire Général de l’OTAN, M. Rasmussen, a annoncé le 24 juin 2014 que le Monténégro ne serait pas invité à se joindre à l’Organisation lors d’un sommet prévu en septembre 2014. L’OTAN préférait entamer des pourparlers approfondis et ciblés pour décider au plus tard à la fin de l’année 2015 s’il convenait d’inviter le Monténégro à adhérer à l’alliance 
			(10) 
			<a href='http://www.balkaninsight.com/en/article/nato-rejects-montenegro-membership-in-2014'>www.balkaninsight.com/en/article/nato-rejects-montenegro-membership-in-2014</a>..

2.2. Evolutions récentes au niveau national

11. Depuis l’adoption de la Résolution 1890 (2012), deux scrutins nationaux se sont déroulés au Monténégro: les élections législatives du 14 octobre 2012 et l’élection présidentielle du 7 avril 2013. Tous deux ont été observés par l’Assemblée parlementaire 
			(11) 
			Voir Doc. 13069 et Doc. 13217. et par une mission d’observation restreinte du Bureau des institutions démocratiques et des droits de l’homme de l’OSCE (BIDDH). Les conclusions et recommandations formulées par les commissions d’observation ad hoc dans leurs rapports des 14 octobre 2012 et 7 avril 2013 ont été débattues avec les autorités et prises en compte dans notre travail.
12. La Coalition pour un Monténégro européen, dirigée par Milo Đjukanović, chef du Parti démocratique des socialistes (DPS) – qui réunit le DPS, le Parti social-démocrate (SDP) (dirigé par le président du parlement, M. Krivokapić) et le Parti libéral (LP) – a remporté 39 sièges (46,33 %) et a pu former une majorité parlementaire avec le Parti des Bosniaques (3 sièges, 4,24 %) et l’Initiative civique croate (1 siège, 0,41 %).
13. L’opposition est composée du Front démocratique (DF) – coalition récente regroupant le Mouvement pour le changement et le parti Nouvelle démocratie serbe (20 sièges, 23,19 %), dirigée par M. Miodrag Lekić, du Parti socialiste populaire (SNP) (9 sièges, 11,24 %), de Monténégro positif (7 sièges, 8,37 %) et d’une coalition de partis albanais (Force pour l’unité – Forca per Bashkim (FZJ-FPB): Nouveau pouvoir démocratique, Forca per Bashkim, Perspective et Initiative civique; Ligue démocratique au Monténégro, Parti démocrate et Alternative albanaise) (2 sièges, 2,54 %).
14. Le parlement nouvellement élu a entamé ses travaux le 25 novembre 2012. Le nouveau règlement prévoit l’organisation plus régulière d’auditions de contrôle. Une commission anticorruption, chargée de superviser les activités des organes de l’Etat dans le domaine de la lutte contre la criminalité organisée et la corruption ainsi qu’une Commission pour l’intégration européenne ont été créées.
15. Le nouveau gouvernement a été élu le 4 décembre 2012. Il est composé de 19 membres et conduit par le Premier ministre, M. Đjukanović. La délégation a indiqué que trois des 18 membres du gouvernement appartiennent à des minorités (16,66 %): «Le Vice-Premier ministre est bosniaque, le ministre des Droits de l’homme et des minorités est musulman et un ministre sans portefeuille est croate 
			(12) 
			Information donnée
par la délégation nationale, 19 juin 2013, p. 70.
16. Le 7 avril 2013, deux candidats ont participé à l’élection présidentielle: M. Filip Vujanović, le président sortant (DPS), et M. Miodrag Lekić, un candidat indépendant. M. Vujanović a été réélu avec 51,21 % des voix (161 940 votes) selon la Commission électorale nationale. Le taux de participation a été de 63,90 %. M. Lekić a contesté les résultats, dont il a demandé l’annulation, et réclamé un nouveau scrutin. Estimant que l’élection présidentielle avait été truquée, le Front démocratique a décidé de boycotter le parlement. Lors de la campagne présidentielle, l’opposition a demandé une réforme électorale, une meilleure mise en œuvre de l’Etat de droit et un renforcement de la lutte contre la corruption.
17. En outre, une autre question politique a émergé après la fuite d’enregistrements audio provenant d’une réunion du DPS organisée pour préparer les élections législatives anticipées de 2012. Dans notre précédente note d’information, nous décrivions «l’affaire des enregistrements audio» 
			(13) 
			Voir <a href='http://www.assembly.coe.int/CommitteeDocs/2013/fmondoc21_2013.pdf'>AS/Mon
(2013) 21 rev 2</a>, paragraphes 20 à 23. . Des membres du DPS y feraient allusion à un éventuel abus de ressources publiques pour obtenir davantage de voix. Nous constatons que la question d’un éventuel abus de ce type a été soulevée à plusieurs reprises par les observateurs électoraux de l’Assemblée parlementaire. Elle a également été dénoncée par une ONG dans un rapport publié en novembre 2012 
			(14) 
			Voir le «Rapport sur
l’utilisation abusive des ressources publiques et des autorités
publiques pendant la campagne législative de 2012» publié par le
Réseau pour l’affirmation du secteur non gouvernemental (MANS),
novembre 2012.. Cette affaire a été largement couverte par les médias après que le quotidien Dan eut publié la retranscription des propos tenus par les cadres du DPS 
			(15) 
			<a href='http://www.osce.org/odihr/elections/100274'>www.osce.org/odihr/elections/100274</a>, Mission restreinte d’observation d’élections. Monténégro,
élection présidentielle du 7 avril 2013, rapport du 22 mars 2013..
18. Le Front démocratique a contesté les résultats de l’élection présidentielle, exprimé sa méfiance à l’égard du processus électoral et évoqué des fraudes éventuelles. Il a décidé de boycotter le parlement. Des négociations ont été entamées entre la majorité et l’opposition pour faire cesser ce boycott. Le parlement est convenu de créer deux groupes de travail chargés de régler ces questions liées aux élections et de modifier la réglementation.
18.1. Le 24 juin 2013, le parlement a mis en place une «commission d’enquête chargée de réunir des informations et des faits sur les événements liés aux activités des autorités publiques à la suite de la publication d’enregistrements audio et de transcriptions provenant des réunions des instances et organes du DPS», avec le soutien du DPS, parti au pouvoir, qui a répondu à toutes les invitations à des auditions, y compris pour le président du DPS et le Premier ministre M. Milo Đjukanović.
18.2. A la suite de nos réunions du mois de juillet 2013, nous avons eu le sentiment que cette commission ne disposait que de pouvoirs limités et d’aucun moyen d’appliquer des sanctions et qu’elle devait se borner à demander au ministère public d’ouvrir une enquête lorsqu’elle aurait réuni suffisamment d’éléments de preuve. Nous avons également eu le sentiment, compte tenu du caractère sensible de la question, que la commission était assez divisée et qu’elle aurait du mal à parvenir à des conclusions politiques. La commission a finalement remis un rapport technique au parlement le 31 juillet 2013, sans toutefois en tirer de conclusions politiques. Dans le même temps, le procureur général par intérim, M. Veselin Vucković, qui avait ouvert une enquête en 2013, nous a informés que 400 personnes avaient été auditionnées et 253 personnes morales vérifiées; 43 procédures avaient été engagées à l’encontre de 60 personnes et d’une personne morale; 12 personnes avaient été inculpées, dont 11 ont été condamnées; et 21 mises en accusation ont été annulées pour éléments de preuve insuffisants. Ces poursuites ont conduit le tribunal de première instance de Pljevlja à imposer deux peines avec sursis, tandis que dix autres personnes ont été acquittées 
			(16) 
			AS/Mon (2014) 22, p.
13..
18.3. Le 31 mai 2013, le parlement a adopté une «proposition de conclusion relative à l’instauration de la confiance dans le processus électoral», qui a débouché sur la création d’un «groupe de travail visant à donner confiance dans le processus électoral». Ce dernier est chargé de consulter le public et les organes souhaitant régler les questions électorales ainsi que de proposer des amendements à la loi sur les registres électoraux, à la loi sur la carte d’identité, à la loi sur le registre des permis de résidence temporaire, à la loi sur l’élection des conseillers locaux et des membres du parlement, à la loi sur le financement des partis politiques et à la loi sur la citoyenneté monténégrine, en s’appuyant sur ses propres observations et sur les recommandations de l’OSCE/BIDDH et du Conseil de l’Europe. A la suite de notre réunion avec le groupe de travail (composé de six députés de la majorité et de six députés de l’opposition désignés par le parlement) en juillet 2013, nous avons souligné l’esprit constructif qui animait ce groupe de travail. Celui-ci a préparé les amendements à la plupart des lois concernées, en coopération avec des représentants d’ONG et, sur une base ad hoc, avec des représentants de l’Union des communes du Monténégro.
19. Des élections locales ont eu lieu le 25 mai 2014 dans 13 municipalités. Pour la première fois au cours de ces élections, à la suite des modifications apportées en 2014 à la loi sur l’élection des conseillers locaux et des membres du parlement, des actions positives en faveur des minorités ont été lancées au niveau local. Le parti au pouvoir, le DPS, a remporté la majorité des voix dans 11 municipalités et la majorité absolue dans trois d’entre elles. Cinq cents observateurs nationaux d’une ONG appelée MANS (Réseau pour l’affirmation du secteur non gouvernemental) ont suivi les élections, signalé des centaines d’irrégularités 
			(17) 
			Dans
leur réponse officielle (voir AS/Mon (2014) 22, p. 13), les autorités
ont contesté l’impartialité de l’ONG MANS, celle-ci étant mandatée
par la délégation de l’Union européenne à Podgorica pour observer
les élections et ayant un engagement politique actif en faveur de
l’opposition. L’ONG a rédigé et soumis à la Commission électorale
de l’Etat les objections formulées pour le compte de l’opposition
par le Front démocratique. et annoncé qu’ils déposeraient plus de 130 plaintes au pénal pour infractions au droit de vote. Le MANS a accusé le DPS d’enfreindre la loi électorale et d’acheter leurs cartes d’identité aux partisans de l’opposition afin de les empêcher de voter 
			(18) 
			<a href='http://www.balkaninsight.com/en/article/montenegro-s-ruling-party-wins-local-elections'>www.balkaninsight.com/en/article/montenegro-s-ruling-party-wins-local-elections</a>.. Depuis lors, la directrice du MANS, Mme Calović a subi de nombreuses critiques et a récemment été la cible d’une campagne de dénigrement dans un média 
			(19) 
			Le journal Informer a publié des articles offensants
dénigrant l’intégrité personnelle et professionnelle de Mme Calović., qui a porté atteinte à sa dignité humaine, fait inacceptable qui ne devrait pas rester impuni. L’incident s’est produit dans un contexte qui a selon nous fait la vie dure aux ONG assurant la surveillance de l’action des pouvoirs publics et publiant des rapports critiques. Ces informations doivent être discutées au fond mais il n’y a pas lieu de critiquer les personnes qui les ont révélées.
20. Bien qu’une décision judiciaire interdise désormais la publication des documents offensants, le quotidien Informer a continué cette campagne de dénigrement, en violation flagrante de la loi et de la décision judiciaire, ce qui a incité certains parlementaires à proposer que la diffamation redevienne une infraction pénale. De notre point de vue, une telle mesure marquerait un retour en arrière. Nous attendons des autorités qu’elles prennent les mesures juridiques nécessaires pour prévenir d’autres campagnes similaires, qu’elles ne cautionnent en aucune manière de telles campagnes et qu’elles veillent à ce que les condamnations judiciaires soient pleinement exécutées.
21. Dans la capitale, Podgorica, les deux partis nationaux au pouvoir, le Parti démocratique des socialistes (DPS, 29 sièges sur 59) et le Parti social-démocrate (SDP), avec Monténégro positif (5 sièges) ont eu du mal à s’entendre sur le candidat au poste de maire. L’opposition (Parti socialiste populaire (SNP) et Front démocratique) a remporté 25 sièges. Une administration intérimaire a été désignée pour régler les questions urgentes 
			(20) 
			<a href='http://www.balkaninsight.com/en/article/early-elections-could-end-montenegro-s-capital-political-crises'>www.balkaninsight.com/en/article/early-elections-could-end-montenegro-s-capital-political-crises</a>.. Le 6 octobre 2014, le DPS et le SDP ont finalement trouvé un accord et élu M. Slavoljub Stijepović maire de la capitale.
22. Il nous faut enfin mentionner que le Président de la République et le Premier ministre, M. Đjukanović, ont précisé que le développement de l’économie nationale était une priorité pour les autorités. Le Premier ministre a en particulier souligné que l’économie du Monténégro restait sous-développée et qu’elle devrait être stimulée par des projets touristiques sur la côte, la construction d’autoroutes, d’une nouvelle centrale électrique et d’un câble électrique sous-marin avec l’Italie, ainsi que par la mise en œuvre d’un projet de recherche visant à explorer les ressources en gaz et en pétrole. Au cours de nos visites, nous avons constaté que la faillite et les 300 millions d’euros de dettes de l’usine d’aluminium de Podgorica (KAP), l’un des principaux exportateurs du pays, et l’activation de la garantie financière fournie par l’Etat en 2005, dans le cadre d’un accord amiable avec la KAP, a suscité des débats houleux dans le pays 
			(21) 
			Pour de plus amples
informations sur cette affaire, voir notre précédente note d’information <a href='http://www.assembly.coe.int/CommitteeDocs/2013/fmondoc21_2013.pdf'>AS/Mon
(2013) 21 rev 2</a>..

3. Etat de droit

3.1. Indépendance du pouvoir judiciaire (domaine prioritaire)

23. L’adoption d’amendements constitutionnels visant à dépolitiser l’appareil judiciaire était l’une des conditions d’adhésion et l’un des «domaines prioritaires» identifiés par l’Assemblée dans sa Résolution 1890 (2012). Il s’agissait également d’une exigence de la Commission européenne pour ouvrir les négociations d’adhésion à l’Union européenne. Les autorités monténégrines ont décidé de soumettre le nouveau projet d’amendements constitutionnels concernant la Cour constitutionnelle, le procureur suprême et le Conseil de la magistrature à la Commission européenne pour la démocratie par le droit (Commission de Venise) en mai 2013. Lors de sa réunion du 14 juin 2013, la Commission de Venise a autorisé les rapporteurs à transmettre le projet d’avis 
			(22) 
			Document <a href='http://www.venice.coe.int/webforms/documents/?pdf=CDL(2013)033-e'>CDL(2013)033</a>. aux autorités monténégrines avant son adoption lors de sa prochaine session plénière d’octobre 2013.
24. Lors de notre visite d’information, en juillet 2013, nous avons discuté de ce projet d’amendements avec les plus hautes autorités judiciaires. Le président du Conseil de la magistrature était favorable aux amendements proposés, alors que la présidente et le vice-président de la Cour constitutionnelle étaient beaucoup plus réservés et exprimaient de sérieux doutes, en particulier au sujet de la proposition de sélection de cinq des juges de la Cour constitutionnelle au terme d’un concours ouvert. Ils considéraient que cette proposition «opportune» permettrait des manœuvres entre les partis politiques et transformerait la Cour constitutionnelle en instance partisane. Ils estimaient également que ces nouveaux amendements déstabiliseraient la Cour constitutionnelle, porteraient atteinte au mandat des juges en exercice et menaceraient la sécurité juridique.
25. Le 31 juillet 2013, les principaux partis politiques, à l’exception du parti d’opposition le Front démocratique, ont adopté les amendements constitutionnels, qui étaient conformes à la plupart des recommandations de la Commission de Venise. Nous avons salué cette adoption très attendue, qui devrait contribuer au processus de dépolitisation du pouvoir judiciaire. Les nouvelles dispositions constitutionnelles exigent la majorité qualifiée pour l’élection des juges de la Cour constitutionnelle, du procureur suprême et des membres du Conseil de la magistrature, tout en prévoyant des mécanismes pour empêcher une paralysie. Les amendements sont les suivants (extraits):
«Au premier tour de scrutin à la majorité des deux tiers, et au second tour à la majorité des trois cinquièmes de tous les membres du parlement, après au moins un mois, le parlement élit et révoque les juges de la Cour constitutionnelle, le procureur suprême et quatre membres du Conseil de la magistrature parmi d’éminents juristes».
«Au premier tour de scrutin, le parlement élit le procureur suprême sur proposition du Conseil des procureurs. Si le candidat proposé n’obtient pas la majorité requise, au second tour le parlement élit le procureur suprême parmi tous les candidats qui satisfont aux exigences légales».
«Le président de la Cour suprême est élu et révoqué par le Conseil de la magistrature à la majorité des deux tiers, sur proposition de l’assemblée générale de la Cour suprême».
«Le président du Conseil de la magistrature est élu par cette instance parmi ses membres qui ne sont pas des officiers judiciaires, à la majorité des deux tiers de ses membres».
«Le Conseil de la magistrature est composé du président et de neuf membres. Parmi ses membres peuvent figurer le président de la Cour suprême, quatre juges élus et relevés de leurs fonctions par la Conférence des juges, quatre juristes éminents élus et relevés de leurs fonctions par le Parlement et le ministre en charge des Affaires judiciaires».
26. Le 24 septembre 2013, le parlement a adopté, dans la période de 45 jours à compter de la date de promulgation des amendements, les premiers amendements requis à la loi sur le Conseil de la magistrature, la loi sur les tribunaux, la loi sur le ministère public et la loi sur la Cour constitutionnelle du Monténégro, afin d’harmoniser ces dernières avec les amendements constitutionnels nouvellement adoptés 
			(23) 
			Cette obligation est
énoncée dans la loi constitutionnelle du 31 juillet 2013 relative
à la mise en œuvre des modifications I à XVI de la Constitution
du Monténégro. Information donnée par la délégation du Monténégro
le 16 septembre 2013..
27. Nous escomptions que la nouvelle procédure de nomination du procureur suprême, découlant des modifications constitutionnelles de juillet 2013, conformément aux recommandations de la Commission de Venise, renforcerait le pouvoir et l’indépendance du ministère public. Une élection a été organisée au printemps 2014. Aucun des quatre candidats proposés n’a réussi à obtenir la majorité des deux tiers lors du premier tour ou la majorité requise des trois cinquièmes au deuxième tour. Au lieu de convoquer un nouveau scrutin (comme le prévoit la Constitution), le parlement a décidé, eu égard à son propre règlement, d’organiser un troisième tour (pendant que nous nous trouvions à Podgorica, en avril 2014), initiative qui s’est également soldée par un échec. Entre-temps, cette procédure a été contestée par l’ONG Human Rights Action (HRA). La Cour constitutionnelle a estimé, le 23 juillet 2014, que les dispositions du Règlement du Parlement du Monténégro relatives à l’élection du procureur suprême n’étaient pas conformes à la Constitution 
			(24) 
			Election du procureur
suprême – Déclaration de Human Rights Action, <a href='http://www.hraction.org/?p=6246#more-6246'>www.hraction.org/?p=6246#more-6246</a>, et <a href='http://www.hraction.org/?p=7004'>Communiqué de presse</a> de Human Rights Action du 25 juillet 2014..
28. Après l’échec du parlement à trouver un candidat consensuel qui réunirait les conditions requises pour devenir procureur suprême en avril 2014, Ivica Stanković a été élu à cette fonction le 7 octobre 2014 au deuxième tour (avec une majorité des trois cinquièmes).
29. HRA a également dénoncé la pratique persistante consistant à élire les responsables de l’appareil judiciaire d’une manière non conforme à la Constitution, en soulignant que l’élection à la présidence de la Cour suprême, en cours au mois d’août 2014, avait été menée conformément à des dispositions de la loi sur le Conseil de la magistrature contraires à la Constitution, ce qui l’avait incitée à former un autre recours constitutionnel afin de contrôler le caractère constitutionnel de dispositions de la loi sur le Conseil de la magistrature relatives à l’élection et à la révocation du président de la Cour suprême 
			(25) 
			<a href='http://www.hraction.org/?p=7004'>Communiqué
de presse</a> de Human Rights Action, 25 juillet 2014.. Pendant ce temps, le Conseil de la magistrature a procédé à l’élection et, le 26 juillet 2014, reconduit dans ses fonctions de présidente de la Cour suprême Mme Medenica, qui ne préside plus le Conseil de la magistrature 
			(26) 
			AS/Mon (2014) 22, p.
18..
30. Les autorités préparaient la loi sur le Conseil de la magistrature, la loi sur les tribunaux, la loi sur les droits et obligations des juges, la loi sur le ministère public et la loi sur la Cour constitutionnelle du Monténégro, qui devaient encore être modifiées afin de répondre aux exigences imposées dans le cadre des négociations d’adhésion à l’Union européenne relatives au chapitre 23. La Commission de Venise a adopté en octobre 2014 un avis sur le projet de loi relatif à la Cour constitutionnelle 
			(27) 
			<a href='http://www.venice.coe.int/webforms/documents/?pdf=CDL-AD(2014)033-f'>CDL-AD(2014)033</a>, Avis sur le projet de loi relative à la Cour constitutionnelle
du Monténégro, adopté par la Commission de Venise lors de sa 100e session
plénière (Rome, 10-11 octobre 2014), et a adopté son avis sur ces quatre autres projets de loi lors de sa réunion des 12-13 décembre 2014.
31. Nous saluons aussi l’intention des autorités de modifier et d’améliorer la loi sur l’assistance juridique gratuite, examinée actuellement par le parlement.
32. Bien que les modifications constitutionnelles relatives à la magistrature représentent un net progrès dans le respect de nos exigences, il est capital que la loi sur le Conseil de la magistrature, la loi sur les tribunaux, la loi sur le ministère public et la loi sur la Cour constitutionnelle du Monténégro soient pleinement conformes aux normes du Conseil de l’Europe. Nous nous félicitons de la coopération avec les autorités monténégrines en vue de veiller à ce que toutes les recommandations de la Commission de Venise soient suivies lors de l’adoption de ces lois. Leur mise en œuvre effective est par ailleurs essentielle pour garantir l’indépendance de la justice. Elles devraient encore être examinées dans le cadre du dialogue postsuivi envisagé avec le Monténégro.

3.2. Lutte contre la corruption et la criminalité organisée (domaine prioritaire)

33. Nous avons souligné que des lois et des pratiques efficaces de lutte contre la corruption sont indispensables pour garantir l’Etat de droit et qu’il faut obtenir des résultats concrets pour éradiquer une corruption qui demeure largement répandue et profondément ancrée. Plusieurs affaires ont été portées à notre attention 
			(28) 
			L’OCCRP (Projet de
rapport sur le crime organisé et la corruption) et le MANS ont publié
plusieurs rapports sur la question, voir <a href='https://reportingproject.net/unholy-alliances/'>https://reportingproject.net/unholy-alliances/</a>., également dans la ville de Budva (dans laquelle nous nous sommes rendus en avril 2014).
34. Nous avons été informés des modifications apportées au Code pénal et au Code de procédure pénale en août 2013, modifications qui devraient investir le procureur suprême, ainsi que le parquet spécial chargé de la lutte contre la corruption et la criminalité organisée, de pouvoirs d’enquête plus étendus. Un système informatique particulier sera mis au point pour permettre au parquet spécial d’accéder directement aux bases de données des différents organismes publics. Cela requerra cependant du temps et de l’argent.
35. Nous nous félicitons des mesures en cours prises par les autorités pour mieux satisfaire aux recommandations du Groupe d’Etats contre la corruption (GRECO). D’après le dernier rapport de Transparency International sur la perception de la corruption, publié le 3 décembre 2014 
			(29) 
			Voir <a href='http://www.transparency.org/cpi2014/results'>www.transparency.org/cpi2014/results</a>., le Monténégro figure en 76e position avec un indice de perception de la corruption de 42. Nous sommes cependant convaincus que la mise en œuvre de la législation est indispensable. Toutes les institutions d’Etat devraient être conçues et équipées de manière à prévenir, détecter et sanctionner la corruption.
36. Les antécédents du Monténégro en matière de lutte contre la corruption sont souvent pointés: les poursuites engagées dans des affaires de haut niveau ont rarement été menées à leur terme. Certaines peines prononcées par des tribunaux de première instance ont été annulées par des juridictions de degré supérieur pour des motifs de procédure. Le maire de Budva, Lazar Rađjenović, soupçonné d’abus d’autorité a été arrêté en mars 2014, tout comme Aleksandar Ticić, conseiller en privatisation du Premier ministre Milo Đjukanović, et Jelica Petričević, directrice adjointe de la banque Prva 
			(30) 
			Selon les médias, les
accusations résultaient d’un prêt bancaire de 2 millions d’euros
consenti en 2007 à la société privée Luna, assorti par Rađjenović d’une
garantie de l’Etat. La police a déclaré que le prêt avait été utilisé
pour acheter 26 000 mètres carrés de domaines de l’Etat à Kosljun,
et n’avait pas été remboursé. Les créances de la banque ont été recouvrées
auprès de la municipalité. <a href='http://www.anticorruption-Monténégro.org/home/news-from-Monténégro/100-arrests-highlight-Monténégro-s-efforts-against-corruption'>www.anticorruption-Monténégro.org/home/news-from-Monténégro/100-arrests-highlight-Monténégro-s-efforts-against-corruption</a>.. Certains interlocuteurs se sont toutefois demandé si ces arrestations auraient pu être dictées par des querelles internes entre deux factions du DPS.
37. Le Monténégro a semble-t-il engagé plusieurs réformes de ses politiques anti-corruption à la demande de la Commission européenne. Aux termes du projet de loi sur la prévention de la corruption, la Direction de l’Initiative anticorruption et la commission pour la prévention des conflits d’intérêt devraient être fusionnées pour former une Agence pour la prévention de la corruption, qui devrait être opérationnelle en 2016. Cette nouvelle agence devrait aussi recevoir les compétences de la Commission électorale nationale concernant le contrôle du financement des partis politiques et des campagnes électorales et elle sera chargée de traiter les signalements des donneurs d’alerte et d’assurer leur protection, ainsi que de faire appliquer la loi sur les groupes de pression.
38. Un projet de loi sur le procureur spécial est en cours de rédaction et il a été examiné par la Commission de Venise. Ce texte devrait améliorer les compétences, l’indépendance et la structure organisationnelle du procureur spécial pour le traitement des affaires de crime organisé et de corruption. Il reste à voir comment le procureur spécial travaillera avec le procureur suprême.
39. Le projet de loi sur le procureur spécial pour la corruption et le crime organisé a été adressé à la Commission de Venise, qui a adopté ses avis les 12 et 13 décembre 2014 
			(31) 
			Voir le document CDL(2014)055.. Pour l’heure, un grand nombre de nos interlocuteurs nous ont dit ne pas savoir clairement si le procureur suprême superviserait les travaux du procureur spécial pour la corruption et le crime organisé, ni s’il aurait accès à l’intégralité des dossiers traités par le procureur spécial.
40. Un projet de loi sur la confiscation des biens issus d’une activité criminelle est aussi en préparation. Ce texte devrait améliorer la conduite des investigations financières et l’échange d’expériences au niveau régional et international, sachant que les biens issus d’une activité criminelle sont souvent envoyés à l’étranger 
			(32) 
			AS/Mon (2014) 22, p.
5-6..
41. Un projet de loi portant modification de la loi sur la prévention des conflits d’intérêt devrait renforcer les restrictions de l’exercice de fonctions publiques, définir le contenu des déclarations de revenus et de patrimoine et prescrire d’autres mesures qui permettront de détecter et de sanctionner plus efficacement les cas de conflits d’intérêt 
			(33) 
			AS/Mon
(2014) 22, p. 44..
42. A cet égard, nous estimons que le Parlement a un rôle essentiel à jouer dans la promotion de la lutte contre la corruption. Une «commission de lutte contre la corruption», composée de huit membres de la majorité et de cinq membres de l’opposition, a été constituée par le parlement en 2012. Au cours de notre dernière visite, nous avons eu un échange de vues avec son président et ses membres. Cette commission a organisé des auditions consultatives sur «l’affaire Telekom» 
			(34) 
			Voir
le précédent rapport de suivi de l’Assemblée. le 6 février 2013 et enjoint le Bureau du procureur suprême d’adresser un appel urgent à l’administration américaine afin que celle-ci transmette tous les renseignements nécessaires que le procureur suprême nouvellement élu attendait encore en novembre 2014; une audition consultative sur l’affaire des enregistrements audio, organisée le 11 décembre 2013, a été ajournée parce que le procureur suprême par intérim avait quitté la réunion; une audition consultative en date du 30 décembre 2013 concernant l’achat du motel «Zlatica» et du terrain attenant, et visant à résoudre la question de l’hébergement de l’unité spéciale de la police, a été interrompue pour cause d’absence du procureur suprême par intérim 
			(35) 
			Information fournie
par la délégation, 4 avril 2014, p. 24-28.; plus récemment, dans le cadre d’une audition sur «les contrats de plusieurs millions pour des services de conseil juridique payés par la Société de production électrique du Monténégro», à la suite d’une plainte déposée par des représentants de la société civile, les matériels collectés ont été adressés au procureur suprême, qui devait dans un délai de 30 jours fournir à la commission anti-corruption des informations sur ces matériels 
			(36) 
			AS/Mon
(2014) 22, p. 46..
43. Des représentants de la société civile craignent néanmoins qu’en raison de sa structure et en l’absence de compétences clairement définies, la commission de lutte contre la corruption reste peu efficace en ne parvenant pas grâce à des mécanismes gouvernementaux et judiciaires à modifier concrètement les politiques et les pratiques qui posent problème 
			(37) 
			Contribution
du MANS au rapport de suivi 2014 de la Commission européenne sur
le Monténégro.. C’est pourquoi nous invitons le Parlement monténégrin à renforcer les moyens juridiques fournis à la commission afin qu’elle puisse affermir son rôle de surveillance et sa capacité à influer sur la lutte contre la corruption. Nous ne pouvons qu’encourager le Parlement monténégrin à tirer davantage parti de la Plateforme contre la corruption de l’Assemblée, récemment créée 
			(38) 
			Consulter
le site web dédié de ce projet: <a href='https://pace.coe.int/fr/web/apce/anti-corruption-platform'>https://pace.coe.int/fr/web/apce/anti-corruption-platform.</a>, qui pourrait offrir une tribune utile pour l’échange de bonnes pratiques.
44. L’une des questions particulières abordées par les ONG a été la décision, prise en août 2013, de supprimer des registres de l’administration fiscale et de l’administration foncière le numéro unique à 13 chiffres attribué à chacun à la naissance. Les ONG ont souligné que ce numéro d’identité constituait un outil efficace pour enquêter sur la situation réelle au regard de la propriété des actifs et des investissements au sein de sociétés à la source d’un conflit d’intérêts pour des responsables politiques et des fonctionnaires, et pour identifier les malversations présumées. Il permettait aux citoyens d’avoir accès à l’information sur le patrimoine des personnalités publiques et des personnes en lien avec elles 
			(39) 
			<a href='http://www.anticorruption-Monténégro.org/home/news-from-Monténégro/94-arrests-highlight-Monténégro-s-efforts-against-corruption'>www.anticorruption-Monténégro.org/home/news-from-Monténégro/94-arrests-highlight-Monténégro-s-efforts-against-corruption</a>..
45. Alors que les autorités invoquaient la protection des données à caractère personnel, la commission parlementaire de lutte contre la corruption a organisé le 27 décembre 2013 une audition consultative. Elle a conclu que dans le but de mettre en lumière des faits de criminalité organisée et de corruption, ce qui est le métier des journalistes d’investigation et de certaines ONG, l’accès désormais supprimé aux données est très important, ce qui signifie que le numéro d’identification personnel des propriétaires de sociétés ou de biens fonciers doit être accessible. La commission a souligné l’incompatibilité de plusieurs lois (loi relative à la protection des données à caractère personnel, loi sur la liberté d’accès à l’information, loi sur les entreprises, loi sur l’administration fiscale, loi sur l’administration du territoire et du cadastre) et du niveau de divulgation d’informations au public, y compris par la publication sur le web de numéros d’identification personnels, et a décidé de constituer un groupe de travail pour traiter ce problème 
			(40) 
			Information donnée
par la délégation, 4 avril 2014, p. 25..
46. Concernant la lutte contre le blanchiment de capitaux, notons l’adoption le 25 juillet 2014 de la loi sur la prévention du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme, qui vise notamment à suivre les recommandations du Comité d'experts sur l'évaluation des mesures de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme (MONEYVAL).

3.3. Autres développements

47. Pendant nos visites, nous avons discuté des derniers développements de la réforme de la justice, et notamment de la diminution du volume d’affaires en souffrance 
			(41) 
			Les autorités ont indiqué
que fin 2013, 4 251 affaires de plus de trois ans (remontant à 2010
ou avant) restaient en suspens dans l’ensemble des tribunaux du
pays, tous types d’affaires confondus. Au 31 août 2014, dans l’ensemble
des tribunaux du Monténégro, il y avait au total 3 815 affaires
en suspens, tous types d’affaires confondus, ouvertes depuis plus
de trois ans. AS/Mon (2014) 22, p. 18., de la création en 2010 d’une voie de recours nationale en cas de durée excessive de la procédure (67 plaintes enregistrées en 2013), de la formation des juges, de l’attention accordée à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme et du suivi de l’activité des tribunaux par 14 ONG, en tenant compte du fait que 150 000 nouvelles affaires concernant 300 000 personnes (soit la moitié de la population) étaient ouvertes chaque année 
			(42) 
			Information
fournie par Mme Medenica, alors Présidente
de la Cour suprême et du Conseil de la magistrature, <a href='http://www.assembly.coe.int/CommitteeDocs/2013/fmondoc21_2013.pdf'>AS/Mon
(2013) 21 rev 2</a>, p. 7..
48. La question des crimes de guerre demeure ouverte. Nous renvoyons au dernier rapport du Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe à la suite de sa visite du mois de mars 2014 
			(43) 
			<a href='https://wcd.coe.int/ViewDoc.jsp?id=2202711&Site=COE&BackColorInternet=DBDCF2&BackColorIntranet=FDC864&BackColorLogged=FDC864'>CommDH(2014)13</a>, 23 juin 2014, rapport du Commissaire aux droits de
l’homme, à la suite de sa visite au Monténégro, du 17 au 20 mars
2014., dans lequel il appelait les autorités à mettre fin à l’impunité des crimes les plus graves commis en temps de guerre et à octroyer un recours effectif aux victimes. Les autorités ont déclaré qu’une solution juridique avait été apportée à toutes les affaires de crimes de guerre (Morinj, Expulsions, Bukovica, Štrpci), à l’exception de l’affaire de «Kaluđerski laz», actuellement en appel. Elles ont précisé que 11 verdicts définitifs d’indemnisation de victimes de crimes de guerre avaient été rendus. Un arrangement judiciaire a été trouvé dans 42 affaires, toutes liées à l’affaire des expulsions. Dans 13 affaires portées devant des tribunaux monténégrins, la demande d’indemnisation de victimes de crimes de guerre a été rejetée définitivement. Certains défenseurs des droits de l’homme que nous avons rencontrés ont cependant déploré le faible niveau de gravité des actes d’accusation qui ont conduit à ces décisions judiciaires. Nous souhaitons nous faire l’écho de leur préoccupation, et de la position du Commissaire aux droits de l’homme, en rappelant qu’il est essentiel que justice soit rendue dans les affaires de crimes de guerre, dans l’intérêt de la réconciliation dans le pays et l’ensemble de la région.

4. Démocratie

4.1. Législation électorale

49. Nous avons abordé plusieurs questions d’ordre électoral avec nos interlocuteurs. Le gouvernement, l’opposition et le secteur non gouvernemental ont pris une mesure visant à charger le ministère de l’Intérieur de la gestion des listes électorales, étant donné le système informatique de pointe dont il dispose. M. Rasko Konjević, ministre de l’Intérieur, a rappelé que les citoyens devaient avoir une carte d’identité biométrique pour pouvoir voter. Bien que l’adoption de cette loi remonte à 2008, 25 000 citoyens ne possèdent toujours pas ce type de carte. De nouvelles campagnes d’information devraient être lancées. Des équipes mobiles ont été constituées par le ministère de l’Intérieur pour collecter des données biométriques sur le terrain.
50. Nous avons encouragé le parlement monténégrin à poursuivre ce travail et à régler toutes les questions soulevées à plusieurs reprises par les commissions ad hoc de l’Assemblée sur l’observation des élections. Ces améliorations devraient garantir que le processus électoral ne donnera pas lieu à une utilisation abusive des ressources publiques et administratives, qu’aucune pression ou intimidation ne sera exercée contre des enseignants et des fonctionnaires pour les pousser à voter pour le candidat soutenu par les partis au pouvoir, que le financement des partis politiques et des campagnes électorales sera plus transparent grâce à la mise en œuvre complète des recommandations du GRECO 
			(44) 
			Voir <a href='http://www.coe.int/t/dghl/monitoring/greco/evaluations/round3/GrecoRC3(2012)17_Montenegro_FR.pdf'>Greco
RC-III(2012)17F</a>, troisième cycle d’évaluation, rapport de conformité
sur le Monténégro «Incriminations (STE nos 173
et 191, GPC 2)», «Transparence du financement des partis politiques»,
adopté par le GRECO lors de sa 58e réunion
plénière, Strasbourg, 3-7 décembre 2012., que le rôle de la Commission électorale nationale (CEN) sera renforcé, que le registre des électeurs sera amélioré et que le droit au suffrage universel sera accordé à tous les citoyens du Monténégro, sans être assorti d’une condition de résidence de 24 mois 
			(45) 
			Voir Doc. 13217..
51. Outre les activités du «groupe de travail visant à donner confiance dans le processus électoral» (voir ci-dessus), plusieurs changements à la législation électorale ont été effectués: le 17 février 2014, le parlement a adopté la loi sur le registre des électeurs, la loi portant modification de la loi sur le financement des partis politiques, la loi portant modification de la loi relative à la carte d’identité et la loi sur l’autonomie locale.
52. La nouvelle loi sur le financement des partis politiques avait pour but de résoudre le problème de l’utilisation abusive de ressources administratives, à la suite de l’affaire «des enregistrements audio». Elle dispose que, sur l’ensemble du territoire, les organismes d’Etat ne verseront pas de prestations sociales et ne recruteront aucun personnel pendant la période électorale. De nombreux interlocuteurs, dont le Président de la République, ont reconnu que cette nouvelle loi entrave le bon fonctionnement de l’Etat et doit être peaufinée. Une autre disposition prévoit que le fournisseur d’électricité publie le nom des débiteurs avant et après les élections, et le nom de tous les bénéficiaires d’une aide sociale devrait également être publié, ce qui pourrait susciter des inquiétudes quant à la protection des données à caractère personnel. La capacité de la CEN à veiller à la mise en œuvre de cette loi a également été mise en doute.
53. La Cour constitutionnelle a cependant annulé certaines dispositions de la loi sur le financement des partis politiques et des campagnes électorales en mai 2014. Un groupe de travail présidé par la parlementaire Draginja Vuksanović a été chargé de réviser, avec la participation active et constructive d’ONG, la version de travail de la loi sur le financement des partis politiques et des campagnes électorales préparées par le gouvernement. Le groupe de travail a achevé cette tâche le 17 novembre 2014.
54. Nous espérons que la loi sur le financement des partis politiques et des campagnes électorales réglementera strictement l’utilisation de ressources administratives pendant les campagnes électorales, ce qui est essentiel pour garantir l’égalité des chances entre tous les partis politiques dans un pays qui n’a connu aucune alternance politique depuis 25 ans et où 40 % des employés travaillent pour l’Etat.
55. Le 21 mars 2014, le parlement a adopté la loi portant modification de la loi sur l’élection des conseillers locaux et des membres du parlement qui n’a pas, selon les informations que nous avons reçues, été soumise à la Commission de Venise, et qui introduit de nouvelles dispositions 
			(46) 
			Information
donnée par la délégation le 4 avril 2014.:
55.1. L’une de ces dispositions a trait à la nomination du Président de la CEN, qui sera élu par le parlement à la majorité de la totalité des voix des membres du parlement, sur proposition de la commission administrative après une annonce publique. La CEN se composera d’un président, de 10 membres permanents et d’un représentant autorisé pour chacun des organes présentant une liste électorale. La loi accorde désormais la possibilité de nommer un adjoint parmi les autres groupes minoritaires en remplacement d’un membre permanent de la CEN, désigné comme représentant d’un parti politique ou d’une liste électorale, afin de permettre une représentation des membres de groupes minoritaires ou de communautés nationales. Sur la base d’un avis de vacance et sur proposition de la commission administrative, un représentant de la société civile, du secteur des ONG et des universités, spécialisé dans la législation électorale, sera élu à la CEN.
55.2. Le 7 octobre 2014, le parlement a élu Budimir Šaranović à la présidence de la CEN, Vlado Dedović membre de la CEN désigné parmi les représentants de la société civile, des ONG et des universités, ainsi que les neuf autres membres de la CEN 
			(47) 
			AS/Mon (2014) 22, p.
11..
55.3. La loi modifie la composition des commissions électorales municipales, qui comptent un président, quatre membres permanents et un représentant autorisé pour chacun des organes présentant une liste électorale. Elle dispose également que le ministère de l’Intérieur a pour obligation de tenir des registres électoraux et de notifier les élections à l’ensemble des électeurs. L’utilisation d’un dispositif électronique d’identification des électeurs dans les bureaux de vote est proposée, et certaines dispositions relatives au vote à domicile ont été modifiées. Nous avons appris que € 200 000 avaient été alloués pour fournir les équipements et les logiciels nécessaires pour l’enregistrement électronique des électeurs.
55.4. Une version de travail du registre électronique des électeurs a été mise au point par le ministère de l’Intérieur fin octobre 2014. C’est l’opposition qui a demandé que l’identification électronique des électeurs soit effective avant les élections locales à Herceg Novi en décembre 2014 
			(48) 
			Ibid.,
p. 16..
55.5. D’autres dispositions portent sur les listes électorales: le nombre de signatures nécessaires à l’établissement de la liste électorale des conseillers locaux et des membres du parlement est ramené de 1 % à 0,8 % des électeurs dans la circonscription; le soutien d’au moins 150 électeurs est suffisant pour établir les listes électorales des partis politiques ou des groupes d’électeurs représentant des groupes ou des communautés minoritaires.
56. Nous félicitons le parlement des efforts consentis pour accroître la confiance dans les processus électoraux et résoudre certains des problèmes soulevés ces derniers mois. Nous sommes convaincus que cette confiance est essentielle pour le bon fonctionnement et la stabilité de la démocratie. Aussi encourageons-nous les autorités à suivre la mise en œuvre de ces lois, à accorder des ressources financières suffisantes pour permettre à la CEN de travailler convenablement et à combler d’éventuelles lacunes pouvant affecter la vie quotidienne de nombreux citoyens et le bon fonctionnement des services publics.

4.2. Situation des médias (domaine prioritaire)

57. Dans notre précédent rapport, nous nous sommes penchés sur la situation des médias. Lors de nos dernières visites, nous avons exprimé nos inquiétudes face à des agressions répétées de journalistes ou à des dégradations de biens appartenant aux médias dont les coupables n’ont pas été identifiés. Nous avons également souligné que, dans une société démocratique, il est inacceptable que des journalistes, en particulier d’investigation, fassent l’objet de menaces directes ou indirectes. La question de la liberté des médias a une nouvelle fois été débattue avec les autorités en 2014. Nous avons à cet égard pris en compte les conclusions du Commissaire aux droits de l’homme, à la suite de sa visite dans le pays, en mars 2014 
			(49) 
			Voir
le <a href='http://www.coe.int/fr/web/commissioner/-/montenegro-needs-to-do-more-to-address-past-human-rights-violations-and-ensure-media-freedoms?redirect=http%3A%2F%2Fwww.coe.int%2Fen%2Fweb%2Fcommissioner%2Fnews%3Fp_p_id%3D101_INSTANCE_easZQ4kHrFrE%26p_p_lifecycle%3D0%26p_p_state%3Dnormal%26p_p_mode%3Dview%26p_p_col_id%3Dcolumn-1%26p_p_col_count%3D1%26_101_INSTANCE_easZQ4kHrFrE_advancedSearch%3Dfalse%26_101_INSTANCE_easZQ4kHrFrE_keywords%3D%26_101_INSTANCE_easZQ4kHrFrE_delta%3D20%26p_r_p_564233524_resetCur%3Dfalse%26_101_INSTANCE_easZQ4kHrFrE_cur%3D2%26_101_INSTANCE_easZQ4kHrFrE_andOperator%3Dtrue'>communiqué
de presse</a> du 21 mars 2014 et le rapport de Nils Muižnieks, Commissaire
aux droits de l’homme, à la suite de sa visite au Monténégro (17-20
mars 2014), <a href='https://wcd.coe.int/ViewDoc.jsp?id=2202711&Site=COE&BackColorInternet=DBDCF2&BackColorIntranet=FDC864&BackColorLogged=FDC864'>CommDH(2014)13</a>, 23 juin 2014..
58. Les violences et les menaces à l’encontre de journalistes restent très préoccupantes. D’après les données officielles, entre 2004 et février 2014, 52 affaires d’agressions physiques ou de menaces graves contre des représentants des médias ou de dégradations de leurs biens ont été enregistrées 
			(50) 
			Dans les commentaires
sur le rapport du Commissaire aux droits de l’homme (<a href='https://wcd.coe.int/ViewDoc.jsp?Ref=CommDH/GovRep(2014)10&Language=lanEnglish&Ver=original&Site=COE&BackColorInternet=DBDCF2&BackColorIntranet=FDC864&BackColorLogged=FDC864'>CommDH/GovRep(2014</a>)10, 23 juin 2014), les autorités ont indiqué que 26
affaires sur 34 avaient été réglées: des poursuites avaient été
engagées dans 20 d’entre elles et, dans 6 autres, le parquet avait
décidé qu’il n’y avait aucun élément d’infraction pénale dans les
agressions signalées. Treize procédures pénales et 10 procédures
pour délits mineurs impliquant 36 personnes ont été engagées.. Trente-deux affaires ont été résolues. L’ONG Human Rights Action nous a fourni des rapports détaillés sur 30 affaires survenues de 2004 à janvier 2014, relatives à des menaces, des jets de pierres contre des locaux, la destruction de biens, des passages à tabac, la pose d’explosifs et les meurtres de Duško Jovanović, rédacteur en chef du quotidien Dan, en 2004, et de Srđan Vojičić, garde du corps de l’écrivain agressé Jevrem Brković, en 2006 
			(51) 
			Rapport
de HRA «Poursuites pour agressions contre des journalistes au Monténégro»,
31 janvier 2014.. De nombreuses affaires n’ont toujours pas été élucidées.
59. C’est pourquoi nous nous félicitons de la création, en décembre 2013, d’une «commission de suivi des actions des autorités compétentes dans l’instruction des affaires de menaces et de violences envers des journalistes, d’assassinats de journalistes et de dégradation de biens appartenant aux medias», composée de 11 membres 
			(52) 
			Cette commission est
ainsi composée: 2 représentants du parquet, 2 représentants de l’administration
de la police, 2 de l’Agence nationale de sécurité, 1 du Conseil
d’autorégulation des médias, 1 du syndicat des médias, 1 du secteur des
ONG et 1 journaliste (Mihailo Jovović) du quotidien indépendant Vijesti. et présidée par le rédacteur en chef adjoint du quotidien Dan, M. Nikola Marković. Cette démarche positive aidera à rendre justice et éventuellement à restaurer la confiance entre les journalistes d’investigation et les autorités. Cette commission devrait, nous l’espérons, faire la lumière sur certains meurtres et agressions non résolus – en particulier l’assassinat de Duško Jovanović – et en règle générale, rétablir la confiance des citoyens dans leurs institutions. Nous avons relevé que récemment, sous l’impulsion donnée par la commission, deux affaires ont été élucidées: deux personnes ont été arrêtées en rapport avec l’explosion qui a eu lieu devant le bâtiment du Vijesti, le 23 décembre 2013, et six autres à la suite de l’agression d’un journaliste à Nikšić. Nous avons rencontré des représentants de la commission une deuxième fois en novembre 2014. Nous sommes convaincus qu’elle pourra continuer de pousser à la résolution des affaires encore non élucidées, malgré les avis divergents des représentants des différentes parties quant aux résultats de cette commission. En écho à l’appel du Commissaire aux droits de l’homme, nous estimons que les autorités doivent appliquer une politique de tolérance zéro face aux violences et menaces à l’égard des journalistes. Nous avons noté avec satisfaction qu’aucune attaque n’a été commise depuis janvier 2014.
60. Nous avons noté que l’emploi de l’expression «mafia des médias» par un député de l’opposition lors d’un débat parlementaire en présence du Premier ministre a suscité un large débat parmi les journalistes. Par la suite, les autorités ont déclaré que cette expression ne s’appliquait pas aux journalistes d’investigation et ont souligné que ces mots avaient été sortis de leur contexte et mal interprétés 
			(53) 
			Voir les commentaires
fournis par les autorités sur le rapport du Commissaire aux droits
de l’homme, <a href='https://wcd.coe.int/ViewDoc.jsp?Ref=CommDH/GovRep(2014)10&Language=lanEnglish&Ver=original&Site=COE&BackColorInternet=DBDCF2&BackColorIntranet=FDC864&BackColorLogged=FDC864'>CommDH/GovRep(2014)10</a>, 23 juin 2014, p. 6-7. Voir aussi les explications détaillées
fournies par les autorités dans le document AS/Mon (2014) 22, p. 41.. Il était toutefois clair que les journalistes que nous avons rencontrés ressentaient cette expression comme une tentative visant à incriminer les journalistes d’investigation et comme une manière possible de légitimer de nouvelles menaces et agressions ciblant des journalistes qu’une description trompeuse pourrait amener certains à considérer comme des «mafieux».
61. Au cours de nos visites, nous avons rappelé qu’il est de la responsabilité des autorités de créer l’espace nécessaire pour permettre aux journalistes de travailler librement, et de renforcer les organes d’autorégulation. Autorités et journalistes ont également pour responsabilité commune d’améliorer encore l’éthique dans ce paysage médiatique fortement polarisé. Les autorités ont souligné qu’elles avaient pris la décision de dépénaliser la diffamation en 2012. Elles se sont toutefois plaintes que certains journalistes ne se conformaient pas aux normes déontologiques dans leur travail 
			(54) 
			Alors que le Conseil
d’autorégulation des médias considère que le discours de haine est
l’atteinte la plus fréquente aux principes du Codex, HRA estime
pour sa part que la principale violation du Codex est l’atteinte
à la présomption d’innocence, voir conclusions du <a href='http://www.hraction.org/wp-content/uploads/Report-on-media-monitoring.pdf'>Premier
rapport</a> – Conclusions et Recommandations – de HRA (septembre 2012
– mars 2013).. Nous avons incité les autorités à consolider les organes d’autorégulation qui devraient se charger de l’éthique dans le journalisme. A l’heure actuelle, il existe trois organes d’autorégulation distincts (et divisés): le Conseil d’autorégulation des médias (18 membres), le Conseil d’autorégulation de la presse locale et des périodiques (22 membres), regroupant les titres de presse écrite et les médias électroniques locaux, et le Conseil de la presse, constitué à la fin du mois de mai 2012 par les quotidiens Vijesti et Dan et l’hebdomadaire Monitor et inscrit au registre des ONG le 6 août 2012 
			(55) 
			<a href='http://www.hraction.org/wp-content/uploads/Report-on-media-monitoring.pdf'>www.hraction.org/wp-content/uploads/Report-on-media-monitoring.pdf</a>.. Dans son «Plan d’action pour le suivi de la mise en œuvre des recommandations de la Commission européenne», le gouvernement prévoit de subventionner le Conseil des médias et le Conseil d’autorégulation. Toutefois, lors de notre visite de novembre 2014, certains se sont inquiétés du risque que ce financement public ne soit pas garanti en 2015. Ce financement est pourtant indispensable pour garantir que les organes de régulation soient soutenus et accomplissent les tâches professionnelles attendues d’eux.
62. A ce sujet, nous saluons l’initiative prise par la Représentante de l’OSCE sur la liberté des médias, Dunja Mijatović, d’organiser à Vienne, le 13 octobre 2014, une table ronde réunissant des représentants de divers médias monténégrins (Pobjeda, Dan, Vijesti, Dnevne novine, Monitor et Portal analitika), avec le soutien des autorités monténégrines. Lors de cette réunion, les représentants des médias ont décidé de réexaminer le code de déontologie, en tant que première mesure pour améliorer l’autorégulation des médias dans le pays. Ils se sont aussi entendus sur les principes essentiels sur lesquels devrait reposer l’autorégulation des médias 
			(56) 
			Voir AS/Mon (2014)
22, p. 42 et le communiqué de presse du 14 octobre 2014 de l’OSCE,
«Les représentants des médias du Monténégro conviennent de mesures
pour coopérer au renforcement de l’autorégulation des médias».. Nous espérons que cette initiative s’avérera fructueuse. Le Conseil de l’Europe devrait être prêt à contribuer à cette initiative.
63. Nous avons également débattu de la publicité dans les médias. Les médias indépendants considéraient que la situation était déséquilibrée et que les médias publics et pro-gouvernementaux – ainsi que Pobjeda, média toujours propriété de l’Etat mais qui devrait finalement être privatisé – tiraient de plus grands avantages de la publicité, utilisée comme un instrument permettant d’exercer une pression économique sur des médias critiques. Le Vice‑Premier ministre et ministre de l’Information, M. Lazović, a reconnu qu’il n’existait pas de règles strictes en matière de répartition de la publicité dans les médias, mais que les annonces étaient essentiellement publiées dans les trois principaux médias imprimés 
			(57) 
			Nous
n’avons pu obtenir de chiffres fiables sur le nombre d’exemplaires
imprimés par chaque média. Dans leurs commentaires sur le rapport
du Commissaire aux droits de l’homme (<a href='https://wcd.coe.int/ViewDoc.jsp?Ref=CommDH/GovRep(2014)10&Language=lanEnglish&Ver=original&Site=COE&BackColorInternet=DBDCF2&BackColorIntranet=FDC864&BackColorLogged=FDC864'>CommDH/GovRep(2014)10</a>, p. 3), les autorités ont indiqué avoir dépensé plus
de € 880 000 en publicité, répartis comme suit: Dan – € 332 686,82; Pobjeda – € 267 598,94; Vijesti – € 255 756,31; Monitor – € 24 760,25.. Il a également insisté sur la nécessité d’assurer une diversification des médias dans un environnement fortement concurrentiel.

5. Droits de l’homme

5.1. Droits des minorités et lutte contre la discrimination (domaine prioritaire)

5.1.1. Cadre juridique

64. Au cours de nos visites au Monténégro, nous avons axé nos discussions sur la lutte contre la discrimination, en particulier envers les Roms et la communauté lesbienne, gay, bisexuelle et transgenre (LGBT) avec M. Suad Numanović, ministre des Droits de l’homme et des minorités, M. Jovan Kojićić, secrétaire du Conseil de lutte contre la discrimination et conseiller du Premier ministre pour les Droits de l’homme et la protection contre la discrimination, M. Šućko Baković, défenseur des droits de l’homme et des libertés (médiateur), et avec des ONG
65. Un groupe de travail composé de représentants du Bureau du médiateur, de la Commission des droits de l’homme et des libertés, des institutions compétentes de l’Etat, de la Commission européenne, de l’OSCE et du secteur non gouvernemental a été constitué pour élaborer des amendements à la loi de 2010 sur la lutte contre la discrimination et à la loi de 2011 relative au médiateur (voir ci-dessous) afin de tenir compte des recommandations de la Commission de Venise et de la Commission européenne contre le racisme et l'intolérance (ECRI) pour s’attaquer à la discrimination directe et indirecte 
			(58) 
			Information fournie
par la délégation, 19 juin 2013, p. 72..
66. La loi de 2010 sur la lutte contre la discrimination a été modifiée le 26 mars 2014. De nouvelles formes de discrimination telles que le harcèlement, le harcèlement sexuel, la discrimination raciale et le discours de haine, sont proscrites. Ce texte présente la promotion de l’égalité comme un outil destiné à prévenir la discrimination, et permet des «tests en situation», grâce auxquels une personne ayant l’intention de tester directement la mise en œuvre des règles antidiscriminatoires peut engager des poursuites. Il traite de la question de la ségrégation «forcée» [à l’encontre des Roms, des Ashkalis et des Egyptiens (RAE)] soulevée par l’ECRI 
			(59) 
			Voir rapport de l’ECRI
sur le Monténégro (<a href='http://www.coe.int/t/dghl/monitoring/ecri/Country-by-country/Montenegro/MNE-CbC-IV-2012-005-fre.pdf'>CRI(2012)5</a>), publié le 21 février 2012.. Il prescrit un délai d’un à trois ans à compter de la date de la reconnaissance de la discrimination pour engager des poursuites 
			(60) 
			Information fournie
par la délégation, 4 avril 2014, p. 37..

5.1.2. Situation de la communauté LGBT

67. Sur proposition du Conseil de lutte contre la discrimination, le Monténégro a adopté une «Stratégie visant à améliorer la qualité de vie des personnes LGBT (2013-2018)», accompagnée du plan d’action 2013. Cette stratégie globale devrait permettre un certain nombre de changements législatifs et mieux protéger les droits des personnes LGBT. Elle vise également à donner un signe fort de la volonté du gouvernement de maintenir son engagement dans ce domaine.
68. Par rapport aux conclusions formulées par l’Assemblée les années précédentes, nous avons observé que les autorités tentent de soutenir davantage la communauté LGBT. Le nouveau groupe de sensibilisation appelé «Queer Montenegro» a souligné l’excellente coopération établie avec la police. L’ONG Forum Progress a organisé sa première «Marche en bord de mer» le 24 juillet 2013 à Budva. Un certain nombre de responsables de l’Etat ont soutenu cet événement. La police a assuré la protection des manifestants.
69. L’organisateur de la deuxième marche de la fierté (homosexuelle) dans la capitale – prévue pour la fin du mois de juin 2014 – a décidé à l’issue de concertations avec la police de la reporter à l’automne pour des raisons de sécurité. La marche a eu lieu le 2 novembre 2014, organisée par l’ONG Queer Montenegro, en présence et avec le soutien du ministre des Droits de l’homme et des minorités, M. Numanović, du ministre de l’Intérieur, M. Raško Konjević, et du maire de Podgorica, M. Stijepović, ainsi que de représentants de la communauté internationale. Cette marche avait pour slogan «Traditionnellement fiers» et appelait au respect des droits des personnes LGBT. Elle a réuni 200 personnes, sous la protection de 1 800 policiers, et s’est déroulée sans incident majeur 
			(61) 
			AS/Mon
(2014) 22, p. 23-24.. Nous félicitons les autorités, qui ont permis l’organisation pacifique de trois marches de ce type ces dix-huit derniers mois.
70. La communauté LGBT reste toutefois encore confrontée à des difficultés: au cours de la «Marche en bord de mer» qui s’est déroulée en 2013 à Budva, de violents affrontements ont opposé la police à des manifestants anti-gays 
			(62) 
			Selon
HRA, deux personnes participant à la marche en bord de mer à Budva
ont été légèrement blessées et 20 fonctionnaires de police ont été
blessés à Podgorica, où les dégâts ont été estimés à € 20 000. La
police a arrêté plus de 80 personnes, dont 22 à Budva et 60 à Podgorica, <a href='http://www.hraction.org/?p=6890#more-6890'>www.hraction.org/?p=6890#more-6890</a>., qui scandaient des slogans homophobes comme «Tuez les homosexuels». Nous condamnons fermement ces violences, de même que la publication de fausses nécrologies annonçant le décès de Zdravko Cimbaljević, directeur de Forum Progress. Celui-ci est parti au Canada, où il bénéficie du droit d’asile. Ces actes montrent malheureusement que les programmes de sensibilisation et d’éducation doivent rester une priorité afin de garantir les droits de l’homme pour tous.
71. Enfin, les défenseurs des droits de l’homme ont regretté qu’une seule accusation au pénal ait été portée contre des personnes non identifiées pour coups et blessures graves, jet de pierres sur des policiers durant la marche organisée à Podgorica en 2013, alors que le Bureau du procureur suprême expliquait qu’il n’engageait pas de poursuites pénales parce qu’il considérait qu’il n’y avait pas d’infraction pénale pouvant être poursuivie d’office et qu’aucun des participants à la marche n’avait signalé de violences physiques dans les locaux de la police locale 
			(63) 
			Réponse écrite transmise
à HRA, voir <a href='http://www.hraction.org/?p=6890#more-6890'>www.hraction.org/?p=6890#more-6890</a>.. Après l’organisation de la marche de Podgorica en novembre 2014, des poursuites pénales ont été engagées contre deux mineurs, qui d’après les organisateurs de la marche avaient agi de manière isolée.
72. Les représentants de la communauté LGBT considèrent que le cadre juridique relatif aux droits des personnes LGBT peut être qualifié de satisfaisant, mais qu’il reste encore à être pleinement mis en œuvre. Le ministère public ne répond pas toujours de manière uniforme aux cas de menaces et d’agressions. Nous nous félicitons par conséquent de la signature en mars 2014, entre la Cour suprême du Monténégro et l’ONG de défense des personnes LGBT Forum Progress, d’un Protocole d’accord qui devrait renforcer et améliorer la capacité des juges à mieux comprendre les droits de l’homme des personnes LGBT et les normes internationales concernant l’orientation sexuelle et l’identité de genre 
			(64) 
			AS/Mon
(2014) 22, p. 24..
73. Les ONG de défense des personnes LGBT continuent de militer en faveur de l’égalité des droits pour cette communauté. Cela étant, de nombreux interlocuteurs ont souligné que le Monténégro était une société traditionnelle, et nous comprenons qu’il faudra du temps et de la patience pour promouvoir et améliorer les droits des personnes LGBT. Cela signifie qu’en dépit des progrès observés et de la volonté politique des autorités, il reste beaucoup à faire pour garantir la liberté de réunion. Nous attendons désormais une action déterminée de la police et de la justice, qui doivent poursuivre et punir les auteurs de violences et de discours de haine.

5.1.3. Egalité entre les hommes et les femmes

74. Dans le domaine de l’égalité entre les hommes et les femmes, nous avons été informés par Suad Numanović, ministre des Droits de l’homme et des minorités, qu’un plan d’action en faveur de l’égalité entre les hommes et les femmes avait été adopté en 2013. La lutte contre la violence à l’égard des femmes ainsi que l’autonomisation économique et la représentation des femmes dans la vie politique figurent parmi les priorités auxquelles les autorités s’attellent.
75. Nous nous sommes félicités de la modification apportée à la loi sur l’élection des conseillers locaux et des membres du parlement le 21 mars 2014, qui a introduit dans les listes électorales un «système d’alternance» grâce auquel au moins 30 % des candidats, et un candidat sur quatre, doivent représenter le sexe le moins représenté sur la liste, ce qui devrait, dans le contexte actuel, assurer une meilleure participation des femmes au parlement (elles constituent actuellement 17,8 % des députés). Cette mesure est positive 
			(65) 
			Dans notre précédente
note d’information (<a href='http://www.assembly.coe.int/CommitteeDocs/2013/fmondoc21_2013.pdf'>AS/Mon
(2013) 21 rev 2</a>), nous avons relevé qu’un pourcentage de 30 % était
requis, mais pas de système d’alternance, ce qui a eu pour effet
de limiter la présence des femmes au parlement à 17,8 % lors des
élections législatives de 2012. .
76. Concernant la violence à l’égard des femmes, nous félicitons le Monténégro d’avoir ratifié, le 22 avril 2013, la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (STCE n° 210, «Convention d’Istanbul»), entrée en vigueur le 1er août 2014. Nous notons avec satisfaction les activités menées par le Club politique féminin pour la lutte contre la violence domestique, qui a préparé une publication sur le thème «Violences familiales – mes droits» en coopération avec le secteur des ONG 
			(66) 
			Information fournie
par la délégation, 4 avril 2014, p. 8..

5.1.4. Situation des minorités

77. Le ministre des Droits de l’homme et des minorités a indiqué que des amendements à la loi de 2004 sur la protection des droits des minorités, la loi de 2010 sur les minorités et la loi sur les conseils des minorités nationales étaient en préparation. Ces amendements devraient mieux réglementer les conseils nationaux des minorités et permettre une répartition égale des fonds destinés aux minorités.
78. Une loi sur les communautés religieuses était en préparation et devait être examinée par la Commission de Venise. Jusqu’à présent, des accords bilatéraux ont été conclus entre l’Etat et le Vatican, et avec les communautés juive et musulmane. La nouvelle loi devrait remplacer celle qui date de 1977 et mieux réglementer les relations entre l’Etat et les communautés religieuses. La question du patrimoine de ces dernières devrait être réglementée dans une loi distincte.
79. La loi sur l’élection des conseillers locaux et des membres du parlement a été amendée en 2011 pour garantir la représentation réelle et proportionnelle des minorités. Elle a été appliquée pour la première fois lors des élections législatives de 2012. Pour mémoire, cette loi révisée a réduit à la fois le nombre de signatures requises pour valider les listes de candidats (c’est-à-dire 1 000 signatures d’électeurs inscrits au lieu de 1 % du nombre total d’électeurs; 300 signatures pour les minorités spécifiques représentant jusqu’à 2 % de la population totale) et le seuil à atteindre pour attribuer des sièges aux listes de candidats de minorités (c’est-à-dire 0,7 % des suffrages valablement exprimés en faveur des minorités et de la communauté nationale minoritaire et 0,35 % en faveur de la minorité croate, contre 3 % pour les listes ne représentant pas les minorités).
80. Lors de nos discussions du mois de juillet 2013, les représentants du SNP ont souligné qu’ils souhaitaient faire modifier l’article 45 de la Constitution, qui subordonne le droit de vote à une condition de résidence de 24 mois. Le représentant du Parti bosniaque souhaitait que les minorités soient mieux représentées dans les institutions de l’Etat et que ce principe soit inscrit dans la Constitution. L’Initiative citoyenne croate a regretté que les minorités ne soient pas associées aux négociations avec l’Union européenne et a demandé l’organisation d’une table ronde sur la nouvelle loi en préparation concernant les minorités. Le Parti démocrate (représentant les Albanais) a déploré que la nouvelle loi électorale prive les Albanais de leur circonscription spéciale, ce qui a ramené le nombre de leurs élus au parlement de 4 à 2. Il a aussi insisté sur l’enseignement en albanais et sur le fait que la représentation des Albanais dans les institutions publiques devrait refléter la proportion de ce groupe dans la population. De son côté, FORCA a souligné la nécessité d’adopter une loi organique définissant les minorités, d’offrir plus de place dans les médias publics et de renforcer les compétences des communes dirigées par des minorités.
81. En ce qui concerne les Roms, nous avons salué l’adoption en avril 2012 de la Stratégie 2012-2016 visant à améliorer la situation des Roms et des Egyptiens au Monténégro, ainsi que du plan d’action 2012. M. Isen Gaši, président du Conseil national des Roms du Monténégro, a indiqué qu’environ 6 000 Roms vivaient actuellement au Monténégro ainsi que 2 000 Roms et Egyptiens déplacés. Il a déclaré que 70 % des Roms ayant un domicile avaient des conditions de vie plutôt bonnes. 2 200 enfants roms sont scolarisés, mais 700 à 800 autres ne peuvent pas aller à l’école, faute d’être enregistrés.
82. Les Roms déplacés qui ont fui le Kosovo à la fin des années 1990 et se sont installés au Monténégro continuent de faire l’objet d’une attention importante (voir ci-dessous). Le ministre des Droits de l’homme et des minorités a reconnu que les Roms domiciliés au Monténégro avaient pâti de ce processus, même si le taux de scolarisation, le taux d’emploi et l’accès aux droits sociaux se sont améliorés. Nous notons avec satisfaction que la stratégie comprend pour la première fois des dispositions visant à lutter contre les mariages forcés et précoces de femmes roms et égyptiennes et contre la violence à l’égard des femmes. Le 1er juillet 2013, le Monténégro a succédé à la Croatie à la présidence annuelle de la Décennie pour l’intégration des Roms, dont il entend développer les activités pour promouvoir l’intégration des Roms.

5.1.5. Médiateur

83. Les amendements à la loi de 2010 contre la discrimination définissent les compétences et les pouvoirs du défenseur des droits de l’homme et des libertés (médiateur) du Monténégro en matière de discrimination.
84. La loi sur le défenseur des droits de l’homme et des libertés du Monténégro (médiateur) a été adoptée en 2011 et modifiée le 18 juillet 2014. La nouvelle loi dispose que le Président de la République sélectionne les candidats à la fonction de médiateur après consultation d’institutions scientifiques et techniques et de représentants d’organisations de la société civile. Elle prévoit aussi que le médiateur soit reçu dans les meilleurs délais, à sa demande, par les plus hautes autorités et les chefs de tous les organes. L’institution du médiateur est devenue le mécanisme de prévention de la torture établi dans le cadre du Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, ainsi que le mécanisme de protection contre la discrimination en application de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination. Le médiateur pourra effectuer des visites auprès des organes, institutions ou organisations qui accueillent des personnes privées de liberté ou des personnes dont les déplacements sont limités, formuler des recommandations à l’intention des organes, institutions ou organisations compétents en vue d’améliorer le traitement accordé à ces personnes, soumettre des avis sur les propositions de lois et autres réglementations concernant la protection et la promotion des droits de l’homme et des libertés des personnes détenues ou dont les déplacements sont limités.
85. Le médiateur, son adjoint, ses conseillers et les membres du personnel de l’institution auront un accès complet et illimité à tous les locaux et à tous les documents nécessaires pour leurs activités de prévention de la torture, sans aucune limite et indépendamment du degré de confidentialité. Une nouvelle disposition prévoit la protection permanente des personnes employées par l’institution du médiateur (immunité) contre toute sanction ou conséquence néfaste dont ils pourraient pâtir en conséquence de leurs positions ou de leurs recommandations 
			(67) 
			AS/Mon
(2014) 22, p. 23..
86. Il semble que le médiateur devrait bénéficier d’une meilleure situation financière après l’adoption de la loi de 2014 et avoir une compétence plus vaste pour la gestion de son personnel. Cependant, plusieurs de nos interlocuteurs ont soulevé la question des ressources humaines et financières du médiateur et de sa capacité à mener à bien ces tâches. C’est pourquoi il est essentiel que les autorités monténégrines fassent appel au savoir‑faire du Conseil de l’Europe pour s’assurer que les compétences et les ressources du médiateur, telles que définies dans la loi modifiée, permettent à cette institution d’œuvrer de manière indépendante et efficace.

5.1.6. Situation des réfugiés et des PDI (domaine prioritaire)

87. En septembre 2014, on comptait 6587 PDI et réfugiés (5 742 PDI du Kosovo 
			(68) 
			Chiffres
fournis par le ministère du Travail et des Affaires sociales le
31 octobre 2014. et 845 réfugiés de Bosnie-Herzégovine et de Croatie résidaient au Monténégro 
			(69) 
			Fiche d’information
du HCR sur le Monténégro, septembre 2014. Ce chiffre est à comparer
avec les 10 422 PDI et réfugiés recensés en mars 2013, d’après les
chiffres fournis par le Bureau de soutien aux réfugiés et le ministère
de l’Intérieur le 20 mars 2013 et par la délégation le 19 juin 2013.
Le nombre des PDI et des réfugiés était de 15 800 en 2009.). Le nombre de familles qui souhaitent rentrer de leur plein gré dans leur pays d’origine reste faible 
			(70) 
			En 2013, 103 familles
ont exprimé ce souhait. Le retour de 46 d’entre elles (238 personnes)
a été approuvé et considéré comme sûr par les organisations internationales
associées à ce processus, sous réserve que leurs communes respectives
mettent à disposition des terrains pour construire des maisons avec
les fonds alloués par les donateurs aux personnes rapatriées. D’après
les informations données le 17 octobre 2013 par le Bureau d’aide
et de soutien aux réfugiés et le ministère du Travail et des Affaires
sociales, 788 personnes déplacées ont déclaré qu’elles étaient prêtes
à retourner volontairement au Kosovo à condition que leurs droits
y soient pleinement respectés. En 2014, 14 familles ont choisi de
retourner à Klina et Pecs au Kosovo, et cent autres ont exprimé
le souhait de retourner au Kosovo (AS/Mon (2014) 22, p. 27). , bien qu’il semble que leur nombre soit en légère augmentation 
			(71) 
			En novembre 2014, le
ministère du Travail a indiqué qu’une centaine de personnes étaient
retournées au Kosovo, tandis qu’un millier de personnes avaient
exprimé ce souhait.. Les autorités monténégrines mettent en avant le manque de terrains disponibles et de solutions d’hébergement, ainsi que les conditions générales limitées en matière de réinsertion, qui continuent de compromettre les chances d’un retour volontaire durable au Kosovo.
88. Dans sa Résolution 1890 (2012), comme suite à la révision de la loi sur les étrangers, l’Assemblée invite les autorités monténégrines à faciliter la régularisation et l’octroi d’un titre de séjour temporaire ou permanent aux réfugiés et aux PDI vivant encore au Monténégro et à trouver une solution adaptée pour ceux qui risquent de se retrouver apatrides si les papiers d’identité nécessaires à leur enregistrement ne sont plus disponibles ou ne peuvent être obtenus. Aux termes de la loi de 2011 sur les étrangers, les personnes déplacées et les PDI avaient jusqu’au 31 décembre 2012 pour déposer une demande en vue d’obtenir le statut d’étranger résident permanent. Le 28 mai 2013, le Parlement du Monténégro a adopté une loi portant modification de la loi sur les étrangers, qui a prolongé le délai au 31 décembre 2013. Il a une nouvelle fois prolongé ce délai au 31 décembre 2014, après avoir adopté des amendements à la loi portant modification de la loi sur les étrangers, le 23 décembre 2013. En avril 2014, 3 400 PDI et réfugiés n’avaient pas encore demandé la régularisation de leur statut juridique (ils étaient 4 800 en septembre 2013 
			(72) 
			Information donnée
par la délégation le 21 octobre 2013.). Le parlement a repoussé, pour la quatrième fois, la date limite pour soumettre des demandes de permis de résidence provisoire ou permanente de la part des personnes déplacées et des PDI (jusqu’au 31 décembre 2014). Depuis 2011, les autorités s’efforcent soit d’intégrer les réfugiés en leur accordant le statut d’étranger doté d’un droit de résidence permanent, soit de faciliter leur retour volontaire dans leur lieu d’origine.
89. Nous sommes conscients des efforts consentis par les autorités et le HCR pour aider les PDI et les réfugiés à obtenir des documents d’identité dans leur pays d’origine 
			(73) 
			Les autorités monténégrines,
avec le HCR et l’OSCE, ont effectué 16 visites au Kosovo avec des
personnes sans papiers, essentiellement des Roms. Six cents personnes
ont jusqu’à présent eu recours à ce dispositif et 2 000 documents
ont été rassemblés. Information donnée par la délégation le 21 octobre
2013., même si cela reste problématique. Nous avons appris qu’en 2013, les autorités du Monténégro et du Kosovo avaient adopté des mesures pour permettre à une équipe mobile du Kosovo, dotée du matériel technique approprié, de fournir des documents d’identité biométriques aux PDI. Début octobre 2014, quatre équipes mobiles du Kosovo ont visité les camps de Konik et les villes monténégrines où des réfugiés étaient accueillis et ont interrogé 332 personnes ayant demandé des documents 
			(74) 
			260
personnes ont obtenu des copies des registres; 191 personnes ont
demandé une carte d’identité de la République du Kosovo; 69 passeports
et cartes d’identités ont été remis à des PDI.. Nous encourageons les autorités monténégrines, avec le HCR, à poursuivre cette action, qui simplifiera la situation d’un certain nombre de PDI et réduira le nombre de personnes en situation irrégulière.
90. Nous avons également été informés que les PDI et les réfugiés qui résident au Monténégro jusqu’à l’obtention du statut d’étranger doté d’un droit de résidence permanent prévu par la loi sur les étrangers ont, jusqu’au 30 juin 2015, les mêmes droits que les citoyens monténégrins, y compris le droit de travailler et le droit à l’assurance chômage conformément aux réglementations applicables au travail et à l’emploi (à quelques exceptions près liées à la nationalité monténégrine). Cependant, ces personnes restent confrontées à des difficultés pour accéder au marché du travail, car elles ne peuvent pas être recrutées par les administrations publiques ou les entreprises.
91. Nous avons noté avec satisfaction que près de 90 % des enfants résidant dans les camps de Konik vont à l’école 
			(75) 
			Information donnée
par la délégation le 21 octobre 2013.. Il convient de se féliciter de l’entrée en vigueur des modifications apportées à la loi générale sur l’éducation en août 2013, qui permettent aux personnes ayant le statut d’étranger doté d’un droit de résidence permanent d’enseigner dans des établissements éducatifs au Monténégro.
92. Malgré les efforts des autorités pour faciliter l’accès aux documents dans les pays d’origine et malgré la diminution des frais administratifs, le processus d’identification reste coûteux pour les PDI (les frais s’élèvent en moyenne à € 100 à € 170 par personne) et complexe, même pour les nouveau-nés dont les parents sont réfugiés ou déplacés. Nous avons été avisés que le Gouvernement monténégrin, avec la délégation de l’Union européenne et le HCR, continuerait de coopérer avec les pays d’origine par le biais du Groupe de travail sur les documents d’état civil en vertu de l’initiative de Belgrade, de manière à réduire les coûts liés aux documents d’identité 
			(76) 
			Ibid..
93. A cet égard, le HCR préconise l’adoption d’une loi sur l’enregistrement ultérieur des naissances, qui garantirait un enregistrement universel 
			(77) 
			Pour en savoir plus
sur cette question, voir le rapport du HCR intitulé <a href='http://www.refworld.org/pdfid/514d715f2.pdf'>Report
on Statelessness in South Eastern Europe</a> (septembre 2011). Dans sa contribution du 21 octobre
2013, la délégation a souligné que «à la suite de plusieurs réunions,
le groupe de travail technique régional constitué et coordonné par
le ministère de l’Intérieur du Monténégro avait conclu que les personnes
nées dans les anciennes républiques RFSY et RFY ne devaient pas
devenir apatrides et que la citoyenneté devait pouvoir être obtenue
sur la base du pays d’origine (par le biais de l’enregistrement,
de l’enregistrement postérieur ou de la détermination), tandis qu’un
enfant, indépendamment de sa république ou de son pays de naissance, pouvait
obtenir la citoyenneté sur la base de celle de ses parents».. En 2013, 98 demandes d’enregistrement ultérieur de personnes n’étant pas nées dans des structures de santé ont été présentées par le Centre juridique des ONG, et 45 de ces demandes ont abouti. Davantage de demandes d’enregistrement ultérieur devaient être traitées par le HCR et le Centre juridique en 2014 
			(78) 
			Information donnée
par la délégation le 4 avril 2014.. De leur côté, les autorités ont souligné qu’elles mettaient tout en œuvre pour faciliter le transport et l’enregistrement. Elles craignaient que certaines PDI s’abstiennent de rechercher leurs documents d’identité et de s’enregistrer, afin de pouvoir bénéficier des droits sociaux à la fois dans leur pays d’origine et dans leur pays de résidence.
94. Le ministre du Travail nous a informés que, en vertu d’un accord avec le HCR, les réfugiés de Croatie et de Bosnie-Herzégovine ne seraient plus considérés comme des réfugiés en 2015.
95. Lors de la visite de juillet 2013, et de nouveau en novembre 2014, grâce à l’aide apportée par le Représentant et les membres du personnel du HCR au Monténégro, les corapporteurs ont visité les camps de Konik I (38 baraquements, 214 familles, 1 156 personnes) et de Konik II (56 baraquements, 67 familles, 316 personnes) 
			(79) 
			Information donnée
par le ministère du Travail et des Affaires sociales – chiffres
au 17 octobre 2013. situés dans la banlieue de Podgorica, dans lesquels s’étaient déjà rendus les précédents rapporteurs de l’Assemblée en 2012 
			(80) 
			Voir <a href='http://www.assembly.coe.int/CommitteeDocs/2013/amondoc21_2013.pdf'>AS/Mon
(2013) 21 rev 2</a>.. Une série de projets lancés par les autorités pour remettre en état les logements se poursuit, comme le Processus régional de Sarajevo et le «projet pilote du camp de Konik» (construction de 120 unités résidentielles) lancé en mars 2013 et géré par la Banque de développement du Conseil de l’Europe, le projet 2011 d’instrument d’aide de préadhésion (IAP) de l’Union européenne concernant l’«identification de solutions durables pour les personnes déplacées et les résidents du camp de Konik», le «Programme national visant à loger les réfugiés et les personnes déplacées les plus vulnérables» pour résoudre les problèmes de logement et fournir 1 177 unités résidentielles à près de 6 000 personnes dans 13 municipalités, ainsi que les contributions financières ou en nature de donateurs nationaux (en particulier l’ONG allemande Help, l’Agence suisse pour le développement et la coopération et les Etats-Unis 
			(81) 
			Les Etats-Unis ont
annoncé un don de 100 mobile homes, utilisés dans le camp de Bondsteel
au Kosovo, afin d’améliorer les conditions de logement dans le camp
de Konik II.). En octobre 2014, les autorités monténégrines et la Banque de développement du Conseil de l’Europe ont signé un accord de subventions d’un montant de € 9,9 millions pour la construction de logements pour 120 familles à Podgorica et d’une maison de retraite pouvant accueillir 68 personnes âgées à Pljevlja. Des programmes de logement régionaux permettront d’accueillir des personnes déplacées dans 907 logements, et de fournir des matériaux de construction pour 120 logements et la construction de 60 logements préfabriqués. Le gouvernement prévoit d’achever ce processus en 2016 et d’avoir pu fermer tous les centres d’hébergement collectif à cette date 
			(82) 
			AS/Mon
(2014) 22, p. 25..
96. Nous pensons que les autorités monténégrines n’ont cessé de chercher des solutions durables pour les PDI et les réfugiés. En septembre 2014, 11 569 personnes déplacées et PDI avaient demandé le statut d’étranger doté d’un droit de résidence permanent. Sur ce nombre, 10 284 dossiers ont été traités, et 1 285 restaient encore dans l’attente d’une réponse; 556 PDI avaient demandé le statut d’étranger doté d’un droit de résidence permanent. 402 dossiers ont été traités et 154 restaient encore dans l’attente d’une réponse 
			(83) 
			AS/Mon (2014) 22, p.
29.. Cela signifie que plus de 70 % des 16 000 PDI et réfugiés encore recensés au Monténégro ont fait une demande de régularisation, et nous encourageons les autorités monténégrines, avec le soutien du HCR et des autorités des pays voisins, à faciliter le dépôt de demandes et l’obtention de la régularisation avant le 31 décembre 2014.
97. La question du risque de cas d’apatridie reste ouverte. Le ministère de l’Intérieur a publié du 22 septembre au 22 novembre 2014 une annonce appelant toutes les personnes qui pensent n’avoir la nationalité d’aucun Etat, ou qui n’ont pas accès à la citoyenneté, à demander la nationalité monténégrine 
			(84) 
			Ibid.. A ce sujet, nous nous félicitons de la ratification par le Monténégro, en octobre 2013, de la Convention de 1961 des Nations Unies pour la réduction des cas d’apatridie.
98. Lors de nos contacts avec le HCR, nous avons également discuté de la situation des demandeurs d’asile. Voisin d’un pays membre de l’Union européenne (Croatie), le Monténégro devient un pays attractif qui est sur la voie de l’intégration européenne. Par conséquent, le nombre de demandeurs d’asile y est en augmentation (1 066 demandes en 2013 contre 10 en 2010). Entre 2007 et 2014, plus de 6 300 demandes d’asile ont été soumises. Onze personnes ont obtenu la protection des autorités. Un centre d’accueil d’une capacité de 65 places a été ouvert en février 2014, avec une possibilité d’étendre sa capacité à 100 places. Ce centre devrait accueillir en priorité les demandeurs d’asile les plus vulnérables (femmes, femmes enceintes et enfants) 
			(85) 
			Information donnée
par la délégation le 21 octobre 2013.. Les autorités doivent par ailleurs développer le système d’asile. A ce sujet, les autorités nous ont indiqué qu’un groupe de travail interministériel avait été constitué afin de rédiger une nouvelle loi sur l’asile, ainsi que la législation secondaire, et que la mise en place de registres électroniques des demandeurs d’asile, comportant des informations de base, était prévue pour décembre 2014 
			(86) 
			AS/Mon (2014) 22, p.
29-30..

6. Conclusions

99. Au cours de nos visites des mois de juillet 2013, avril 2014 et novembre 2014, nous avons pu constater l’engagement pro-européen et la détermination du Monténégro à se conformer aux normes du Conseil de l’Europe et aux exigences de l’Union européenne dans les domaines de l’Etat de droit, de la démocratie et des droits de l’homme. Le Monténégro a fortement progressé sur la voie du respect de ses engagements et obligations.
100. Nous félicitons les autorités monténégrines pour leurs efforts continus en faveur de la lutte contre la discrimination. Nous notons que plusieurs mesures positives ont été prises pour garantir le droit à la liberté de réunion de la communauté LGBT et encourageons les autorités à poursuivre leur action de sensibilisation pour accroître le degré de tolérance des citoyens. Les récents amendements à la loi sur le médiateur devraient accroître les compétences, les capacités et l’indépendance financière de cette institution, appelée à améliorer la protection des droits de l’homme. Nous attendons aussi avec intérêt de connaître les améliorations en préparation dans le domaine de la protection des minorités, qui devraient encore consolider la coexistence pacifique de l’ensemble des minorités vivant au Monténégro. Il convient d’accorder une attention soutenue à la communauté rom.
101. Nous tenons à remercier les autorités monténégrines, aux côtés du HCR et de la communauté internationale, pour leur action continue concernant l’accueil et/ou l’intégration des réfugiés et des PDI. La loi révisée sur les étrangers a facilité l’accès au permis de résidence permanente ou temporaire, même si des difficultés administratives et financières subsistent. C’est pourquoi nous appelons instamment les autorités monténégrines à poursuivre leurs efforts pour aider les 3 400 PDI et réfugiés toujours dépourvus de documents d’identité et dont le séjour sur le territoire du Monténégro sera considéré comme illégal fin décembre 2014.
102. Tout en félicitant les autorités monténégrines pour les progrès réalisés, nous aimerions souligner quelques points essentiels sur lesquels un effort supplémentaire est nécessaire:
102.1. L’adoption en juillet 2013 de modifications constitutionnelles très attendues concernant le pouvoir judiciaire constitue une avancée considérable. Un certain nombre de lois relatives aux tribunaux, aux droits et devoirs des juges ainsi qu’au Conseil de la magistrature, à la Cour constitutionnelle et au ministère public restent néanmoins à modifier pour être pleinement conformes aux recommandations de la Commission de Venise et aux normes du Conseil de l’Europe, et il nous faudra suivre ces évolutions. Il s’agit là d’une condition préalable indispensable pour restaurer la confiance des citoyens dans leur système judiciaire et garantir indépendance du pouvoir judiciaire. Nous encourageons vivement les autorités monténégrines à continuer de collaborer étroitement avec la Commission de Venise et à tenir compte de ses recommandations.
102.2. Le «groupe de travail visant à donner confiance dans le processus électoral», constitué en 2013, a permis aux partis politiques d’établir un dialogue constructif et de proposer des amendements concernant un certain nombre de lois importantes relatives aux processus électoraux. Nous regrettons cependant que la Commission de Venise n’ait pas été consultée sur cette législation importante. La confiance dans les processus électoraux doit être instaurée à tous les niveaux, y compris local, et une attention plus grande devrait être accordée à la mise en œuvre des lois par les collectivités locales et les responsables politiques locaux.
102.3. Une nouvelle loi sur la prévention de la corruption devrait réformer les structures chargées de combattre la corruption et la criminalité organisée. Nous observons qu’à partir de 2016 la future Agence pour la prévention de la corruption aura un rôle fondamental à jouer dans le contrôle de la mise en œuvre de la loi sur le financement des partis politiques et de nombreux autres domaines. Ses capacités devraient être renforcées. Il nous faudra également veiller à ce que le procureur spécial, dont les compétences et la relation avec le procureur suprême (désormais élu démocratiquement) sont régies par une loi distincte, dispose de toutes les garanties nécessaires pour travailler en toute indépendance et sans aucune ingérence politique.
102.4. Dans le domaine des médias, la création de la «commission de suivi des actions des autorités compétentes dans l’instruction des affaires de menaces et de violences envers des journalistes, d’assassinats de journalistes et de dégradation de biens appartenant aux medias» est un signe encourageant et devrait contribuer à élucider certaines affaires d’agressions et de menaces envers des journalistes. Toutefois, cela pourrait ne pas suffire à créer un environnement de travail favorable aux médias. Il est grand temps de s’attaquer à la question de l’autorégulation pour s’assurer que la profession pratique un journalisme éthique et sanctionne les violations du code de déontologie de ses membres.
103. En conclusion, au vu des progrès réalisés par le Monténégro depuis 2012, et de son engagement renouvelé à poursuivre le processus de réforme dans le cadre des négociations en vue de l’adhésion à l’Union européenne, nous sommes en mesure de proposer la clôture de la procédure de suivi et l’ouverture d’un dialogue postsuivi tel qu’il est prévu par la Résolution 2018 (2014), adoptée par l’Assemblée en octobre 2014. Nous demanderons ainsi que les autorités monténégrines mènent à bien, d’ici à la fin 2017, une série de réformes visant à instaurer la confiance dans le processus électoral, renforcer l’indépendance du pouvoir judiciaire, intensifier la lutte contre la corruption et le crime organisé et améliorer la situation des médias. En cas de non-respect des engagements susmentionnés de la part des autorités monténégrines d’ici à la fin 2017, la commission de suivi devrait examiner l’opportunité de rouvrir la procédure de suivi général pour le Monténégro.